J’ai lu :
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A Bon
entendeur, salut ! de Françoise Davoine et Jean-Max Gaudillière, chez
Stock. C’est une réflexion, un essai, excentrique jusque dans sa forme à sauts et à
gambades, sur les vertus de la lecture de Don
Quichotte pour résister à la terreur, à l’abus de pouvoir, aux traumas, à
toutes les formes de perversion et de tartufferie. Je ne suis pas certaine d’en
avoir savouré tout le suc – je suis même sûre du contraire, ma lecture de Don Quichotte étant trop lointaine, et
mes connaissances en psychanalyse trop incertaines. Mais c’est une lecture
passionnante, et stimulante, sur les vertus, entre autres, de la fidélité, et
du rire.
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Légère
comme un papillon de Michela Marzano, chez Grasset (c’est drôle, pour un
ouvrage qui évoque l’anorexie…). Autre legs, que Pierre a laissé inachevé. Le
précédent, il n’a pas eu le temps de le lire.
L’autrice,
philosophe, Italienne enseignant et écrivant en français et en France – mais ce
livre-ci a été écrit en italien, puisqu’il en est traduit par Camille Paul -
utilise dans cet essai (« ouvrage de réflexion marqué par la subjectivité »
enseigne-t-on à nos élèves) sa propre expérience d’anorexique pour interroger
cette maladie qu’elle préfère considérer comme un symptôme, le discours
étouffant qui est tenu sur celle-ci, le rapport au corps et la façon dont il
doit être pensé en philosophie, et enfin le rapport à la langue, et la façon
dont, dans son cas, le français lui a permis d’échapper à un passé étouffant et
douloureux pour aller de l’avant, déchirure fondatrice. Comment aussi, dans l’écriture
de ce livre-ci, la « langue paternelle redevenue maternelle » s’est
imposée. Il est, en italien, sous-titré « Comment l'anorexie m'a enseigné à vivre ». Pourquoi le sous-titre, si explicite et si provocant, a-t-il disparu en français ?
Tant qu’on essaiera d’expliquer
l’anorexie en ayant recours aux catégories analytiques traditionnelles, sa
raison profonde nous échappera. Peut-être parce qu’il n’y aura rien à
expliquer. Parce que trouver une cohérence dans le fait qu’en semblant choisir
la mort on célèbre la vie relève de la folie…
Mais peut-être
aussi parce que, à travers certains symptômes, on cherche seulement un moyen de
ne pas mourir psychiquement. De ne pas renoncer à son propre « moi ».
de ne pas être ce que les autres voudraient nous faire être.
Mieux vaut, en
tout cas, les catégories analytiques traditionnelles que certaines des
nouvelles théories « révolutionnaires » qui se sont répandues ces
dernières années… le sujet sans inconscient, la clinique du vide, les nouvelles
formes du symptôme… et ainsi de suite…
Jusqu’à faire
passer « les anorexiques » pour des manipulatrices perverses, prêtes
à tout pour plonger les autres dans le désespoir.
Qu’on en
finisse avec les lieux communs, les banalités, les généralisations, les
recettes faciles pour vendre des livres et berner celui qui souffre.
Qu’on en
finisse avec le « corps fétiche », le « refus de la
féminité », le « rapport symbiotique à la mère »…
[…] Toute
époque a ses prophètes. Et la nôtre n’échappe pas à la règle. Et voilà que d’un
simple coup de chiffon, on efface tout : l’affect, les émotions, les
désirs, la singularité…
On remballe
tout ce qui dérange. On cherche une explication unique. Totalisante.
Totalitaire. Et une fois la « société » accusée, on se sent plus
léger….
C’est un livre
touchant, intéressant, stimulant, qui tisse fragments de récits
autobiographiques, (avec ce risque de l’impudeur-pour-autrui qui toujours me
chiffonne, pour les « autres » dont il est question dans ce livre, le
père inflexiblement exigeant, adoré et rejeté, la mère, les amours - mais c’est
fait sans complaisance ni exhibitionnisme), avec une réflexion qui, partie de cette
anorexie fondatrice, s’interroge, à la toute fin, sur ce que c’est que la
relation amoureuse, dans son malentendu originel et son acceptation sans
réserve de l’autre.
Livre
stimulant et riche donc. A qui je reprocherais, malgré sa sincérité opiniâtre,
et son titre, un certain manque de légèreté. Un goût trop prononcé pour l’aphorisme,
au détriment des vertus persuasives du sourire et de l’humour. A venir, sans
doute, puisque, précisément, il se conclut sur le sourire de son autrice.
Une interview, ici, chez Mollat. Ce visage, et ces mains, qui progressivement
s’animent…
J’ai lu encore :
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Une Vie de racontars, fragments
autobiographiques de Jørn Riel
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L’heure des Fous, de Nicolas Lebel, un polar
chez Marabooks.
Je les chroniquerai une autre
fois.
Pierre B. Cévennes- Études de cheminées. Encres de Chine