jeudi, juillet 12 2012

Réminiscence estivale (?)

J’ai lu il y a bien longtemps, fascinée, un roman de Maurice Pons intitulé Les Saisons. Lequel a disparu depuis bien longtemps de mes étagères - j’ai regardé, souvent, parce que j’y ai souvent repensé, parce que j’ai souvent pensé à le relire. Il faudra donc que je l’emprunte à la bibli, s’il y est, ou que je le rachète. Cela se passait dans une contrée indéterminée, indistincte, glauque, détrempée par une pluie absolument incessante, insinuante, omniprésente. Le « héros » y débarquait parmi des villageois hostiles et grimaçants dont je me souviens qu’ils le lapidaient. Il s’y pratiquait une sexualité tremblante où la contraception était assurée par des grenouilles introduites dans le vagin des femmes. Tout y était gauche - je ne sais pourquoi le mot anglais « awkward » me paraît plus approprié, à cause de ses sonorités sans doute -, inconfortable, définitivement précaire – et cruel. Ce sont des fragments de souvenirs. C’était un livre terrible et singulier. J’y pense, en regardant par la fenêtre encore encombrée de piles diverses la pluie tomber, sans relâche.

samedi, avril 28 2012

Beaux livres

Une balade au L.A.M de Villeneuve d’Ascq nous a permis entre autres de découvrir à la bibliothèque de ces beaux livres – d’artistes, ou de dialogue, selon le terme d’Yves Peyré -. Moment de merveilles, devant ces livres qui sont comme les manuscrits enluminés des XIXe et XXe siècles.

« Le livre est si bien fait pour être orné ; il porte avec tant de bonheur toutes les élégances ! Eh ! quelle merveille, après tout, un bel exemplaire d'une bonne édition qui représente un chef-d’œuvre de l'esprit humain ! Quelle joie et quelle fête à le tenir dans ses mains, tremblantes d'une émotion ineffable ! On le regarde, on le contemple, on le retourne, on l'ouvre enfin, et voilà que soudain le véritable amateur, grâce au livre, entre en des ravissements infinis. »


Comme Verlaine, illustré par Bonnard. Des lithographies sépia, qui donnent le sentiment d'avoir été tracées par le peintre sur les pages mêmes du livre.


Ou encore l'inventivité graphique et typographique étourdissante de La Fin du monde filmée par l'ange de Notre-Dame de Cendrars (auteur et éditeur, à La Sirène) et Léger.


vendredi, avril 27 2012

Cinq ans...

Alexandre Zinoviev - Portrait de monsieur Fontainas, détail.
Roubaix, Musée de la Piscine.

Et voici des affiches, du rouge du vert multicolores comme mon passé bref du jaune
Jaune la fière couleur des romans de France à l'étranger...

dimanche, mars 25 2012

Agus, Thuy

Soizic, à qui je l'avais confié, est allée me faire dédicacer Mal di Pietre au Salon du Livre dimanche dernier. Merci Soizic! Elle a trouvé une autrice solitaire, et qui ne parlait ni français ni anglais. Soizic ne parle pas italien... La conversation a été vite tarie. Dommage ! Moi, j'étais passée au stand Liana Levi le vendredi soir à la fermeture, mais Milena Agus, c'était le lendemain... Le vendredi, c'était Kim Thuy, que je n'ai pas plus vue, d'ailleurs. Adossé aux grilles de l'escalier, en déséquilibre sur deux marches, indifférent au flot montant et descendant des voyageurs, un monsieur asiatique d'âge mûr était plongé dans la version poche de Ru, son petit livre, vendredi soir à Cambronne. Avant-hier, quoi.

samedi, mars 24 2012

24 mars

Je n’ai guère eu le temps de passer par ici, ces derniers jours, malgré le jaillissement du printemps en fleurs à travers villes et campagnes, malgré la douceur de l’air. C’est à peine si j’ai lu (Le Misanthrope, encore, et des articles autour). Mais voici  que depuis jeudi les livres me rattrapent.

Il y a des jours bienheureux, où, comme ce midi, votre boîte-aux-lettres vous réserve des surprises rectangulaires, enveloppées de bulles protectrices, emballées de joli papier rose et vert – ou pas. Où ce sont vos amies qui décident de ce que vous allez lire (quand ???), en allant dénicher de petits trésors du côté de vos lieux de prédilection, les Cévennes, délaissées depuis deux ans, les dicos, toujours fertiles en découvertes. Merci Anne, Zaza, Odile.

Il y a eu aussi, jeudi, la rencontre avec des auteurs, qui, à la fin de la journée, ont si bellement évoqué ensemble le travail de l’écriture, sa gestation pendant, par exemple, un nécessaire ennui, son surgissement, ou au contraire, le constant retravail qu’elle exige. Le « gueuloir », intérieur ou non, toujours - merci Gustave, pour la formule et pour la pratique. Il y avait Cathy Ytak et ses phrases lyriques, intenses, vocales (Rien que ta peau), Denis Lachaud qui parle si bellement, sans jamais de clichés verbaux, et qui a lu des fragments d’une sorte de drame intime, intérieur, L’Une, et Sylvain Levey, caustique, rageur, sincère, et dont j’ai lu Costa le rouge, hommage à un grand-père. Auteurs jeunesse, que je ne lis guère d’ordinaire, et dont le propos, le travail, la langue sont ceux de tout écrivain visant à la justesse – tous l’ont dit. Il y avait Michel Azama, aussi, dont j’ai avalé en une semaine une dizaine de ses pièces si intenses, à la langue ardente et aux personnages paroxystiques, entre mythes et Histoire d’autrefois, et soubresauts du monde d’aujourd’hui. Un homme aigu et chaleureux. Beaucoup de livres, finalement, quand on y pense. Et puis je suis enfin retournée à la bibliothèque. Où j’ai emprunté pour raisons de proximité géographique sur les rayons Laurence Tardieu – ici recommandée un jour par une lectrice de passage -, elle est marseillaise, Linn Ulmann, pour voir, et l’ultime Trollope disponible à l’emprunt, Le Château du Prince de Polignac, minuscule opus récemment extrait par l’Herne d’un volume de Tales of all countries. Amusante bluette malicieuse entre une veuve anglaise de trente-six ans et un aimable Français sub quinquagénaire, en la bonne ville du Puy-en-Velay très pittoresquement décrite. Mais pourquoi avoir donné au soupirant français en gants beurre frais le nom d’un prêcheur dominicain ? et puis, 48 pages format 'carnet' (c’est le nom de la collection), certes en joli papier et en Garamond bleu, pour 9€50!!! C’est exorbitant.


Puis-je prouver que je ne suis pas un escargot ? certain jeudi matin où je partis en retard au lycée, oui. Où j’y arrivai encore plus en retard, après entrevue passablement fâcheuse avec des messieurs en képi. Qui s’étaient embusqués, équipés d’un appareil puissant, sur la petite route qui descend vers Sailly Laurette. Bilan, ponction non moins fâcheuse sur certain document rose dont il est bien difficile de se passer quand on vit à la campagne. Ce qu’à Dieu ne plaise, et que Saint Christophe me protège…

lundi, mars 12 2012

Mademoiselle ?

Continuons en mode réac-et-ringard. La disparition officielle des mots, ça me met toujours très mal à l’aise. Je ne peux pas m’empêcher de penser qu’ils ressortiront, ailleurs, sous forme d’actes, de non-dits, de frustrations, en pire. Et j’ai beaucoup de mal à croire à la philanthropie de l’administration. Aussi ai-je adoré la charmante chronique de François Morel, vendredi, au volant sur les routes du « Garlaban couronné de chèvres » et piqué d’amandiers en fleurs. On peut l’écouter, ici. Apparemment, elle a suscité moult réactions foudroyantes.

Voici ce que dit de « mademoiselle » la première entrée du CNRTL : 

« I.

A. − Vx. [Titre employé pour désigner toute femme mariée qui n'était pas noble ou qui était noble mais non titrée ou pour s'adresser à elle] Dans cette pièce se tenaient le respectable bourgeois et sa femme, mademoiselle Lecamus (Balzac, Martyr calviniste, 1841, p. 58).On l'appelle mademoiselle, quoiqu'elle ait été mariée. Le nom de dame était encore réservé aux femmes nobles (Michelet, Insecte, 1857, p. 395).Le 19 janvier 1664, MlleMolière, la femme du poète, mit au monde un garçon (A. France, Génie lat., 1909, p. 126):

1. À Beaune, les premiers fidèles se recrutèrent parmi la noblesse...; à Dijon, parmi la noblesse et les gens de robe..., «M. Bossuet, conseiller au parlement et mllesa femme.»..., et ailleurs...» ... C'était le temps où les Espagnols menaçaient la frontière de Bourgogne (1636-1637). Bremond, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 545.

Fam. Mon Dieu! que vous êtes grosse! Moi qui vous ai vue comme un jonc, maintenant vous me paraissez une des tours de Notre-Dame. Ah, mamselle Sophie! qu'avez-vous fait là? Que monsieur votre mari ne s'attende pas à mes compliments pour vous avoir mise dans ce bel état (Courier, Lettres Fr. et Ital., 1825, p. 735).

La dernière citation est gratinée ^^…

Rem. S'emploie dans le milieu du théâtre (et parfois du cinéma) pour désigner une actrice, même mariée, notamment une sociétaire de la Comédie-Française ou pour s'adresser à elle. »

Quelles femmes plus libres que les actrices ?

Et pour finir, un air de Nougaro :

J'avais rêvé d'un couple dont je sois l'Il, toi l'Elle
Imaginé une île amoureuse d'une aile
Et l'aile s'est posée sur ma lèvre de sel
Et nous voici cloués à l'Être universel

Oui, celle qu'on attend tous, nos rêves unis vers elle,
La voici à mon bras, l'infinie demoiselle
Et je nous vois, jeunes, en croix, pâmés, cieux
Et je nous vois jeunes, en croix, pâmés, cieux..

Mais, même en te voyant dans mon nid, hirondelle
Mais même en te voyant j'ai peur et je t'appelle
Par ton vrai nom traduit de la langue de Dieu
Mademoiselle-Je-n’en-crois-pas-mes-yeux…

A écouter par soi-même, car je n’en trouve pas de trace sur la toile, et je n’en ai qu’une très antique version en disque vinyle : « Femmes et famines » - que j'écoutais en boucle dans mes jeunes années de demoiselle.

dimanche, mars 11 2012

Agus, Ôé, ou le Salon du livre, en mode grognon

Aaaarghhh ! l’année dernière, je suis allée au salon du livre à cause de / grâce à Jørn Riel, interviewé par Josyane Savigneau. Ce fut un naufrage. Et voilà que cette année, il y aura Milena Agus ! pour l’adaptation par Nicole Garcia de Mal de Pierres. Mais c’est à midi et demi. L’heure où les Papous seront sur la grande scène (avec 200 sièges ! ça changera du studio bruyant ouvert à tous les échos où l’on squattait debout).

Je n’irai pas, je crois. Tant pis. J’écouterai les Papous de la maison, et pour Milena, si on la trouve sur la toile, tant mieux. Sinon, tant pis. L’année dernière, je n’ai jamais trouvé l’interview de Riel (elle n’a pas l’air d’être dans les podcasts), vous me direz, ce n’était pas une perte. Quant au programme du Salon, je le trouve confus à souhait, comme le fond sonore où l’on y baigne. Si vous cherchez Agus par le moteur de recherche, bon courage, et par le programme, vous avez intérêt à connaître le nom de l’intervieweuse, paske rien à Agus ni à Milena…

Il y aura aussi Mathieu Belezi, dont j’ai haï C’était notre terre, Beigbeder, qui n’arrive pas à éveiller le moindre intérêt chez moi, Laure Adler, grande prêtresse de la féminitude libérée (et éradicatrice des Décraqués, et de l’exquis Bertrand Jérôme, l’été 2004, honnie soit-elle à tout jamais ! Sa voix de papier de verre bobo sur toutes les ondes !!!). Il y aura aussi plein d’auteurs russes, dont j’ignore tout, autant les découvrir paisiblement chez le libraire, ou à la bibli. Et de japonais(es) itou. Parmi lesquels Kenzaburô Oé, prix Nobel, interviewé, oh mon dieu, par Josy soi-même. Aura-t-elle relu cette fois plus de quatre de ses romans ? peut-être, un prix Nobel, c’est mieux qu’un chasseur.

Adoncques, « Le Salon du livre, je n’y vais pas », c’est décidé. Quant à vous, si vous ne l’avez fait, lisez Agus !

 

jeudi, février 2 2012

Ustensile et recette du jour

Voici conseil et recette du bon Alexandre en son Grand Dictionnaire de cuisine:

Poêle à frire


Ustensile de cuisine ordinairement en fer battu dans lequel on fait fondre de la graisse ou du lard, ou dans lequel on met de l'huile, et qui sert à faire des fritures, des omelettes, des crêpes ; anciennement les poêles avaient une très grande queue, sur laquelle il suffisait de frapper un petit coup pour retourner les omelettes et les crêpes, mais qu'il fallait se garder d'abandonner, si on ne voulait pas voir ce que contenait la poêle renversé dans le feu. De là le proverbe employé encore au figuré, bien que les poêles à petite queue se tiennent toutes seules sur le feu : « Est bien embarrassé celui qui tient la queue de la poêle. »

Pannequets

Recette de M. de Courchamps.

Mettez dans une terrine deux cuillerées à bouche de farine, trois jaunes d'œufs et deux œufs entiers, un peu de sel et quelques gouttes de fleur d'oranger ; délayer bien le tout et achevez de le délayer avec du lait, afin que l'appareil soit bien clair ; prenez une petite poêle ronde et creuse, chauffez-la, essuyez-la, mettez un peu de beurre dans plusieurs épaisseurs de papier en forme de petit sachet, frottez-en votre poêle partout, mettez dans cette poêle une cuillerée à dégraisser pleine de votre pâte, tournez-la sur tous les sens, afin de bien étendre le pannequet, lequel doit être bien mince et bien égal partout. Lorsqu'il sera cuit, renversez-le sur le plat où vous devez le servir ; étendez votre pannequet, saupoudrez-le de sucre et continuez ainsi pour les autres, jusqu'à ce que vous ayez employé la totalité de votre appareil.

On recouvre quelquefois ces pannequets avec un enduit de confiture, mais ceci masque leur goût, et c'est une recherche que nous ne saurions approuver.
Ainsi parle M. de Courchamps, mais du moment que vous n'ajoutez pas une confiture quelconque en chausson dans votre appareil, ce ne sont plus des pannequets, c'est tout bonnement des crêpes fines.
La groseille ou l'abricot sont nécessaires pour constituer les pannequets. 

Le pannequet, c'est le pan cake!
Et aujourd'hui, c'est la Chandeleur.

lundi, janvier 2 2012

Autre Voeu

In omnibus requiem quaesivi et nusquam inveni, nisi in angulo cum libro *…

Attribuée à Thomas a Kempis dans Le Nom de la Rose, cette citation figurerait comme légende d’un portrait de ce Thomas, moine allemand né à Kempen près de Cologne, d’où son nom. Sous-prieur du monastère augustinien du Mont Sainte Agnès - ben tiens… - Windesheim, Hollande, excellent copiste, il aurait exécuté quatre copies de la Bible, et aurait publié d’abord de façon anonyme (1418)  puis sous son propre nom (1441) ce manuel de vie spirituelle qui l’a rendu célèbre, et dans la traduction duquel se sont illustrés entre autres Corneille et Lamennais.

Que l’année qui s’ouvre soit pour lectrices et lecteurs fertile en recoins et en « beaux livres de haute graisse, légers au pourchas et hardis à la rencontre », fussent-ils plus profanes que les lectures du bon Thomas…

* "J'ai cherché partout le repos et je ne l'ai trouvé nulle part ailleurs que dans un coin avec un livre".

Chênes

De la Grésigne au Nord du Limousin, le bord de la route est ponctué de chênes. C'est un bonheur pour l'œil, un réconfort.

Un peu de Queneau, donc, pour entamer l'année comme je l'ai quittée. C'est Chêne et Chien (1952), étrange « roman en vers » qui est le récit poétique de la psychanalyse de Queneau - à la fois « chêne » (quesne, ou quêne en normand), et chien (quen). Abject, et sublime. J'adore le poème qui clôt la seconde section de cet ouvrage, et dont voici quelques passages :

Chêne et chien voilà mes deux noms,
étymologie délicate :
comment garder l'anonymat
devant les dieux et les démons ?[…]

Le chêne lui est noble et grand
il est fort et il est puissant
il est vert il est vivant
il est haut il est triomphant.

Le chien se repaîtrait de glands
s'il ne fréquentait les poubelles
Du chêne la branche se tend
vers le ciel. […]

...
Le chien redescend aux Enfers.
Le chêne se lève — enfin !

Il se met à marcher vers le sommet de la montagne.

Et que l’élan des chênes soit en vous pour l’année qui s’ouvre…

samedi, décembre 31 2011

Chêne nocturne dans la Grésigne


Mais le chêne fixé sur un socle de marbre
Semble un berger figé parmi son troupeau d'arbres….

Desnos, en vitesse, pour saluer ce chêne nocturne, à titre de célébration du « bout d’an ».

Et à l’année prochaine !

                          

 

dimanche, novembre 27 2011

Brumes


Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d'automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux

Et s'en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d'amour et d'infidélité
Qui parle d'une bague et d'un cœur que l'on brise

Oh ! l'automne l'automne a fait mourir l'été
Dans le brouillard s'en vont deux silhouettes grises

Guillaume Apollinaire - Alcools


lundi, octobre 31 2011

Déclaration d'amour ferroviaire



Le paysage dans le cadre des portières

Court furieusement, et des plaines entières

Avec de l'eau, des blés, des arbres et du ciel

Vont s'engouffrant parmi le tourbillon cruel

 

Où tombent les poteaux minces du télégraphe

Dont les fils ont l'allure étrange d'un paraphe.

Une odeur de charbon qui brûle et d'eau qui bout,

Tout le bruit que feraient mille chaînes au bout

 

Desquelles hurleraient mille géants qu'on fouette ;

Et tout à coup des cris prolongés de chouette.

- Que me fait tout cela, puisque j'ai dans les yeux

La blanche vision qui fait mon cœur joyeux,

 

Puisque la douce voix pour moi murmure encore,

Puisque le Nom si beau, si noble et si sonore

Se mêle, pur pivot de tout ce tournoiement,

Au rythme du wagon brutal, suavement.

Verlaine - La Bonne chanson, 1870

mardi, octobre 25 2011

Chant d'Automne

                                 I

Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l'hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.

J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? - C'était hier l'été ; voici l'automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

                              II

J'aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,
Douce beauté, mais tout aujourd'hui m'est amer,
Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l'âtre,
Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.

Et pourtant aimez-moi, tendre coeur ! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant ;
Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère
D'un glorieux automne ou d'un soleil couchant.

Courte tâche ! La tombe attend ; elle est avide !
Ah ! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,
Goûter, en regrettant l'été blanc et torride,
De l'arrière-saison le rayon jaune et doux !

Charles Baudelaire - Les Fleurs du Mal, "Spleen et idéal"

mercredi, septembre 28 2011

Kydônia mala ou cotoneum malum

Le coing, quoi.


C’est une année à coings. Des cognassiers (l’arbre à cognac, m’a dit un jour une gamine !), j’en ai croisé des dizaines cet été sur les routes du Tarn, dans les haies ou au coin(g) des clôtures, il semble bien avoir cette fonction de borne qu’il doit à la profondeur de ses racines, j’ai lu ça quelque part, un jour. Le cognassier au coin(g) de la maison croule sous les fruits. Je les entendais tomber, lourdement, l’autre jour, de mon hamac. D’où ces quelques images, et les recettes du bon Dumas. Une brouette pleine est stockée en ce moment sous le porche. Quand on rentre, on est saisi par cette odeur si délicate, proche un peu de celle du seringa, exquise.

                                                              

mardi, septembre 27 2011

Les fruits tombant....

Automne malade et adoré
Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers

Pauvre automne
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n'ont jamais aimé

Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé

Et que j'aime ô saison que j'aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu'on les cueille
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu'on foule
Un train
Qui roule
La vie
S'écoule

Guillaume Apollinaire - Alcools



dimanche, septembre 25 2011

Gourmandise

Une_noix__qu_y_a-t-il.JPG

Alors que le liseron blanc éclaire de ses corolles les friches et les haies envahies par ses vrilles exubérantes, mon convolvulus se dessèche, faute, tout simplement, de lectures, hélas ! Alors, pour accueillir l’automne en ce bel été indien, non pas Jo Dassin – que j’adore, eh oui ! – mais un petit air de Trénet, avec la voix de Jacques Douai.

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est fermée
On y voit la nuit en rond
Et les plaines et les monts
Les rivières et les vallons
On y voit
Toute une armée
De soldats bardés de fer
Qui joyeux partent pour la guerre
Et fuyant l'orage des bois
On voit les chevaux du roi
Près de la rivière

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est fermée
On y voit mille soleils
Tous à tes yeux bleus pareils
On y voit briller la mer
Et dans l'espace d'un éclair
Un voilier noir
Qui chavire
On y voit les écoliers
Qui dévorent leurs tabliers
Des abbés à bicyclette
Le Quatorze Juillet en fête
Et ta robe au vent du soir
On y voit des reposoirs
Qui s'apprêtent

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est ouverte
On n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
On n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
Les découvertes.

submit or c

samedi, juillet 30 2011

Considérations lexicales

Les lecteurs de ce blog auront peut-être remarqué que je n’emploie jamais, à propos d’une femme écrivain, ce hideux néologisme désormais autorisé semble-t-il par l’Académie* (Ben non, voir commentaire infra) et inventé il y a déjà quelques lustres par les féministes québécoises plus directement sensibles que nous ne le sommes (ou plus tôt) aux questions de « genre » dans tous leurs aspects, y compris grammaticaux : une « auteurE », comme une professeurE, toutes formes tellement contraires aux « règles » certes très diverses des féminins de noms en - eur, que leur simple vue sur une page me hérisse le poil (orosco referens…^^). J’utilise donc, parce que c’est commode, grammatical et que cela sonne bien, le mot « autrice » (comme actrice, autre profession artistique qui ne pose aucun problème à quiconque).

Or voilà que l’une de mes… lectrices (une autre forme d’art, qui d’ailleurs sera au cœur de ma prochaine note sur Si Beau, si fragile,  le volume d’articles critiques de Daniel Mendelsohn que je suis en train de lire, dans le désordre, avec excitation et bonheur), adoncques une des mes lectrices, Anne d’Evry, me signale en commentaire à l’un des billets sur Shirley Hazzard que CETTE FORME EXISTE, ou du moins a existé dans « l’ancienne langue ». Elle a même été considérée avec faveur, contre « auteuresse » et « authoresse », tous deux illogiques - ‘‘autoresse’’ à la rigueur !, comme doctoresse ou professoresse, à la mode italienne (et telle est ma profession), quant à « auteuresse », c’est aussi exotique que ce féminin québécois récusé plus haut et que je répugne à réécrire. Cette forme, ''autrice'', donc, a été considérée avec faveur par Rémy de Gourmont, excusez du peu ! j’adopte, donc, définitivement, autrice, et pour ceux que cela intéresse, voyez les extraits du TLF ci-dessous.

AUTEUR, subst.masc.

[…] Rem. 1. ‘‘ Comme il n'existe pas de forme féminine du mot auteur, on l'emploie indifféremment pour qualifier un homme ou une femme : il ou elle est l'auteur de ce livre. On parlera aussi de femme-auteur. L'exemple suivant est une résurgence isolée de l'ancienne langue qui employait le féminin autrice (cf. aussi auteuresse, authoresse)

« Auteur se dit de toute personne qui a mis au jour un ouvrage; écrivain ne se dit que par rapport au style. On peut être en même temps bon écrivain et mauvais auteur, c'est-à-dire écrire avec correction, avec élégance, et ne pas traiter le sujet solidement et à fond, ou n'avoir pas puisé dans les bonnes sources. On peut aussi être bon auteur sans être bon écrivain... » (Besch. 1845).’’

AUTEURESSE, AUTHORESSE, subst. fém.

Néologique et Littéraire : Femme écrivant des ouvrages de littérature :

1. « Un journal discourait naguère sur authoresse, et, le proscrivant avec raison, le voulait exprimer par auteur. Pourquoi cette réserve, cette peur d'user des forces linguistiques? Nous avons fait actrice, cantatrice, bienfaitrice, et nous reculons devant autrice, et nous allons chercher le même mot latin grossièrement anglicisé et orné, comme d'un anneau dans le nez, d'un grotesque th. »

Gourmont, Esthétique de la langue française, 1899.

Thanks, Anne, et thanks, Rémy, si je puis me permettre…

P.S. : 5 août.  Et voici, ici, un article spirituel et stimulant sur la même question, occasion en outre de découvrir le blog d'une traducTRICE de littérature indienne. Allez-y voir!

Some more ici.

mercredi, juillet 20 2011

Petite synthèse pour grappiller facile

Genou blessé aidant, j’ai concocté à destination des lecteurs submergés ou nonchalants une petite synthèse, dont les entrées, parfaitement arbitraires et parfois interchangeables, relèvent de mon unique fantaisie. Histoire de donner aux plus frénétiques lecteurs de quoi étancher leur passion au-delà même d’un été pluvieux. Sans doute en ai-je oublié, ou ai-je négligé les auteurs (de thrillers par exemple) les plus connus, mais j’arrête, car la chose est très fastidieuse à mettre en page, à cause des liens, et la machine rame… Bonne promenade !
Que les titres soient ou non flanqués d'une gracieuse boucle, ils sont tous cliquables et renvoient aux billets correspondants.

Les trois plus beaux romans de l’année :
Aaron Appelfeld : Le Garçon qui voulait dormir (pas encore chroniqué - Si, ça y est, c'est fait)
Shirley Hazzard – La Baie de midi
Jón Kalman Stefánsson : Entre Ciel et terre

Injustement ignorés ou oubliés
Georges Bonnet : Les yeux des chiens ont toujours soif, Un jour nous partirons
Jeannette Haien : La Pêche au saumon
Francesco Masala : Ceux d'Arasolé
Thomas Savage : Le Pouvoir du chien
                           La Reine de l'Idaho

Lire la suite...

vendredi, mai 27 2011

Si l’on récapitule….

... depuis la « pile insurmontable » du 28 mars, c’est-à-dire il y a « pile » deux mois :

J’ai lu :

  • Grøndahl  
  • De Bernières
  • Indridason 
  • Mia Couto
  • et utilisé à l’occasion L’Agenda de l’apprenti écrivain
  • Pas mal avancé dans la lecture d’Antoine et Isabelle, aussi, de Vincent Borel avec qui je m’entretins au Salon du Livre et comment ne pas acheter à un auteur un de ses livres alors même que l’on a bavardé un quart d’heure avec lui ? Mais j’ai calé. Non que l’intrigue ne soit intéressante ni le bouquin attachant, mais une fois encore, je trouve que le travail de l’éditeur est insuffisant. Il y avait à mon avis de quoi trancher dans le vif, dans les dialogues, par exemple, et de quoi resserrer la narration. Dommage. C’est de la part de V.B. une belle entreprise de résurrection romanesque de ses ancêtres espagnols et de la saga familiale sur fond d’Espagne avant et pendant Franco, avec enquête rigoureuse sur une famille de puissants capitalistes lyonnais et internationaux.
  •  Une des nouvelles de Jacques Dalodé, aussi, (Très Bonnes nouvelles du Bénin ) que m’offrit mon amie Elisabeth, j’y reviendrai dès que j’aurai ré-exhumé le livre !!!! 
  •    Et puis j’en ai lu d’autres, comme Un Bûcher sous la neige de Susan Fletcher, qu’il faut que je chronique, ou Solaire, et Nada, que j'ai chroniqués.    

            Avec tout ça, il en reste quand même neuf, de la pile, et pas que des tout fins genre Hongrie d’Anne-Marie Garat, avec qui je m’entretins aussi. Ben, je suis pas sortie de l’auberge…


Autre rose, plus évidemment « lèvres » que la précédente. Mais moins délicatement sensuelle. Photographiées  avant que battue(s) de pluye ou d’excessive ardeur, /Languissante(s)elle(s) meur[ent], fueille à fueille déclose(s).

De pluye, guère, hélas, mais pour le vent et l’excessive ardeur, ils font leurs dégâts.

samedi, avril 30 2011

Nom d'un petit bonhomme, voilà-t-y pas que j'ai oublié l'anniversaire de mon liseron !

Il y a eu quatre ans mercredi pourtant qu'il a commencé à lancer ses vrilles, quelle distraction !

FLEUR DU MATIN

O le blanc liseron des bois
A fragilité sans égale ;
Sa fleur n'apparaît qu'une fois
Un matin en l'air toute pâle.
Lorsqu'a fui la bise hivernale,
Au printemps elle nous séduit,
Mais sa vie à midi s'exhale ;
Elle ne voit jamais la nuit.

Elle a placé, l'aimable fille,
Des liserons dans ses cheveux ;
La jeunesse dans ses yeux brille;
à  la voir, le cœur amoureux
Lui murmure de doux aveux.
O fleur, qu'elle prend pour parure,
On voudrait ton destin heureux,
Pour mourir dans sa chevelure.

C'est de Jules Lefebvre, in Une Cigale au Salon de 1887, recueil collectif.

Rien d'impérissable, certes, mais c'est le seul liseron poétique que j'aie sous la main à partager ce soir.

mercredi, avril 20 2011

Mon fils, dit la souris / Ce Doucet est un chat !

Le rayonnement mat de livres précieux...

C'était le 8 avril, à la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet, où nous avons été royalement reçus, avec mes élèves. Que ses deux conservatrices, Mmes Nobécourt-Mucarelli et Lesiewicz, en soient chaleureusement ici remerciées. Le coffret à l'éclat fauve, au fond, c'est Tête d'or, de Claudel, dans une reliure en cuir et galuchat. 

" Le chagrin est fort ancien! Aujourd'hui, les gainiers préfèrent se servir de galuchat. Le galuchat est, comme vous le savez sans doute, la dépouille du raja sephen, un poisson de la Mer Rouge (...) : entre le galuchat et le chagrin, il y a, monsieur, toute la différence de l'océan à la terre..."
Balzac, La Peau de chagrin, 1831, in CNRTL.

Le Blason de Doucet par Legrain...




Moment enchanté, devant des merveilles bibliophiliques à nous offertes, parmi lesquelles Le Corbeau, de Poe-Mallarmé-Manet, ou Stèles dans son écrin de bois.


Et la Prose, avec sa reliure colorée peinte des mains mêmes de Sonia Delaunay, touchée par celles de Cendrars.


J'en suis encore bouleversée.

(Les photos sont d'Adeline V, Amandine M. et Perrine F.)

lundi, avril 11 2011

Nous ne sommes pas des ''translateurs'' (sic) !

J'emprunte le paragraphe suivant à une interview de Jón Kalman Stefánsson citée sur le blog de son très remarquable traducteur Eric Boury. Pour moi qui enseigne les lettres classiques, espèce menacée et accusée de ringardise quasi génétique, comme formant d'inutiles "translateurs" (quel est cet abominable barbarisme ???), cette phrase de l'écrivain est un baume :

« Comme vous le disiez, vous êtes également traducteur. Cet exercice vous a-t-il permis de vous rapprocher encore un peu plus des mots ?

J. K. S. : La traduction est un excellent entraînement pour les écrivains. Cela permet de redécouvrir sa propre langue, de connaître à fond les mots, qui sont ta matière première. Le langage devient alors mon outil : plus je le maîtrise, mieux je réussirai à faire passer le texte aux lecteurs islandais. »

Il va de soi que le propos est transposable du lecteur islandais au lecteur comme au  rédacteur français....

Voici le lien avec le blog d'Éric Boury.

PS : En fait, l’interview citée provient d’une interview avec Mikaël Demets, sur le blog L’Accoudoir (« parce que même le canapé lit » ^^), interview vraiment passionnante. On y trouve encore ceci, que je ne résiste pas à citer : « en Islande, la traduction de Milton par Jón Porláksson est d’une beauté extraordinaire, assez éloignée du poème originel, mais magnifique au point que la parution de cette version islandaise a été extrêmement importante pour notre littérature.

Mais derrière ces raisons concrètes, il reste quelque chose d’indéfinissable : quand un écrivain emprunte des mots à un autre écrivain, il ne sait pas toujours l’expliquer. En tant qu’auteur, tu as les mots dans le sang, et lorsque tu écris, tu ressors tout ce que tu as à l’intérieur. C’est ainsi que Milton a surgi. »

Voilà. La Tristesse des anges, c’est la suite, et c’est pour septembre….

 

lundi, mars 28 2011

Pile insurmontable....

Où et quand vais- je trouver le temps !

Et il y en a encore trois en haut, dont Little Big Bang. Celui que je voudrais bien entamer, il est sur les rangs depuis plus d’un mois, c’est Un Immense Asile de fous (Notwithstanding : Stories from an English Village), de Louis de Bernières, auteur anglais, comme son nom ne l’indique pas vraiment. Je n’ai jamais pris le temps de parler ici de sa trilogie Sud américaine : La Guerre des fesses de Don Emmanuel, Señor Vivo et le baron de la coca, La Calamiteuse progéniture du Cardinal Guzman, aventure littéraire de haute saveur et de longue haleine, dont il y a quelque temps il était devenu difficile de se procurer le premier tome, alas ! Un jour, j'espère....

En attendant, je me bornerai aux nouvelles et autres novellas.

O douleur ! le temps mange la vie…

vendredi, mars 25 2011

Chez Zulma

Chez Zulma, le plus joli éventaire du Salon, « trempé de couleurs », merci à Carole qui m’a donné cette photo

On reconnaît vers la gauche My First Sony. C’est le seul que j’aie lu, c’est déprimant. Il doit y avoir pas loin Little Big Bang (2  horizontal, 3 vertical en partant de droite et d’en-bas). Pour les autres, après exploration, il y a à gauche, le rouge et blanc, L’Alfa Roméo d’Annie Cohen, au-dessus, avec les fleurs orangées, c’est Mes Seuls dieux d’Anjana Appachana (Inde), et le coffret, c’est Hubert Haddad, Nouvelles du Jour et de la Nuit. On ne voit pas Auður Ava Ólafsdóttir, elle est à gauche, en train de signer des Rosa Candida. Souriante, attentive, jolie, et rousse. La voici.

 

  Et voilà le poème-épigraphe :

À la mémoire de Zulma

Vierge-folle hors barrière
et
d’un Louis

 Bougival, 8 mai.

Elle était riche de vingt ans,
Moi j’étais jeune de vingt francs,
Et nous fîmes bourse commune,
Placée, à fonds perdu, dans une
Infidèle nuit de printemps...

La lune a fait [un] trou dedans,
Rond comme un écu de cinq francs,
Par où passa notre fortune :
Vingt ans ! vingt francs !... et puis la lune !

— En monnaie — hélas — les vingt francs !
En monnaie aussi les vingt ans !
Toujours de trous en trous de lune,
Et de bourse en bourse commune...
— C’est à peu près même fortune !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

— Je la trouvai — bien des printemps,
Bien des vingt ans, bien des vingt francs,
Bien des trous et bien de la lune
Après — Toujours vierge et vingt ans,
Et... colonelle à la Commune !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

— Puis après : la chasse aux passants,
Aux vingt sols, et plus aux vingt francs...
Puis après : la fosse commune,
Nuit gratuite sans trou de lune.

               Saint-Cloud. — Novembre.

- page 2 de 4 -