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mardi, avril 2 2013

Joe Dassin - Cadeau pour Dorothy

Goguenards, mes enfants m’ont tendu un paquet enveloppé de papier rouge. Suffisamment peu épais pour que je distingue à travers le nom de Joe Dassin. « Il est temps que tu assumes tes goûts » a été le commentaire sarcastique. Je les assume, mes goûts ! j’adore les chansons de Joe Dassin, j’en connais un paquet par cœur, et je me suis rendu compte il y a déjà quelques années, dans les bouchons de l’été méridional, au cours d’une émission à icelui vouée par France Inter, que mon goût pour ces chansonnettes allègres ou mélancoliques n’était pas seulement une sorte de complaisance d’intellectuelle, mais un plaisir réel. Elles sont fichtrement bien ficelées, paroles et musiques, et elles ont tant accompagné ma jeunesse et mes colonies de vacances que je les porte en moi. Bref.

Il s’agissait en l’occurrence d’un recueil de nouvelles, Cadeau pour Dorothy, titre posthume attribué par les éditeurs – la sœur de Joe Dassin et un sien ami, le physicien Alain Giraud – sur le modèle de Breakfast at Tiffany’s. Ce titre, qui n’est pas celui de l’une des nouvelles, est lié à la réapparition de l’une d’entre elles, offerte par le tout jeune Joe, étudiant à Ann Arbor, à sa petite amie d’alors, prénommée Dorothy. Laquelle ayant retrouvé le texte, l’a adressé via facebook à l’un des fils du chanteur. Il y a une histoire de famille d’émigrants, transposée des juifs ukrainiens aux Italiens du sud, une scène de racisme ordinaire dans une petite ville où se côtoient noirs et blancs, une variation sur Des Souris et des hommes, et une histoire méditerranéenne, le choc entre les membres d’une équipe de tournage et les autochtones, sur une île grecque, années 50. On sent dans ces textes les lectures qui les sous-tendent, un goût pour la notation réaliste, et le souci émouvant d’un travail littéraire. Mais dans l’ensemble, c’est trop long, assez verbeux, et maladroit. Bref, si ce recueil est une louable manifestation de piété sororale, la lecture en est, hélas, superflue. Revenons sans réserves aux chansonnettes dont chacune est, à sa façon, une brève histoire, bien mieux rythmée.

dimanche, août 12 2012

Histoires, chansons, souvenirs...

je m'souviens ma mère m'aimait
Et je suis aux galères
Je m’souviens ma mère disait
Mais je n’ai pas cru ma mère
Ne traîn’ pas dans les ruisseaux
T’bats pas comme un sauvage
T’amuse pas comme les oiseaux
Elle me disait d’être sage

J’ai pas tué, j’ai pas volé
J’voulais courir la chance
J’ai pas tué, j’ai pas volé
J’voulais qu’chaque jour soit dimanche

Je m’souviens ma mère pleurait
Dès qu’je passais la porte
Je m’souviens comme elle pleurait
Elle voulait pas que je sorte
Toujours toujours elle disait
T’en vas pas chez les filles
Fais donc pas toujours c’qui t’plaît
Dans les prisons y a des grilles

J’ai pas tué j’ai pas volé
Mais j’ai cru Madeleine
J’ai pas tué j’ai pas volé
J’voulais pas lui faire de peine

Je m’souviens ma mère disait
Suis pas les bohémiennes
Je m’souviens comme elle disait
On ramass’ les gens qui traînent
Un jour les soldats du roi
T’emmèneront aux galères
Tu t’en iras trois par trois
Comme ils ont emmené ton père

Tu auras la tête rasée
On te mettra des chaînes
T’en auras les reins brisés
Et moi j’en mourrai de peine
Toujours, toujours tu rameras
Quand tu s’ras aux galères
Toujours, toujours tu rameras
Tu penseras p’t'être à ta mère

J’ai pas tué, j’ai pas volé
Mais j’ai pas cru ma mère
Et j’me souviens qu’elle m’aimait
Pendant que je rame aux galères *

 


J’adorais cette chanson que j’ai apprise en colonies de vacances. Elle fait partie des chansons qui m’habitent, avec L’Auvergnat de Brassens, un jour interprétée – j’avais six ans - par le groupe des ‘grandes’ vêtues de toges blanches (des draps, sans doute), à la fête de fin de séjour du « home d’enfants » François et Suzon, à La Bourboule, où je séjournais pour cause de rhino-pharyngites.


Je viens de lire - autre fascinant raconteur d’histoires – un volume de souvenirs de Joseph Kessel Ami entends-tu (encore un chant qui donne la chair de poule, et je me souviens d’Anna Marly, il doit y avoir une dizaine d’années, à l’émission matinale de Pierre Assouline sur France Culture, contant de sa voix passionnée les circonstances de sa composition : le livre de souvenirs qu’elle a écrit s’appelle : Anna Marly, troubadour de la Résistance), livre où Kessel raconte à son ami Jean-Marie Baron des épisodes de sa vie intense de journaliste et  d’aventurier. Il y a dans sa parole si vivante une absence totale de moralisme – mais non de sens moral – qui a par les temps qui courent a quelque chose, certes, de dangereux, mais d’infiniment salubre et
qui éloigne tout penchant au préjugé. C’est là que j’ai découvert aux petites heures du matin que ce Galérien était un chant d’origine russe traduit par Kessel et Druon. Mon carnet de chant en donne une version où manquent les bohémiennes, la version recopiée ci-dessus est peut-être un peu bancale. J’en ai écouté ce matin une version des Compagnons de la chanson (très belles voix) terriblement mélodramatique. Yves Montand, c’est mieux, mais je ne sais pas encore mettre de son sur ce blog, alors allez l’écouter par vous-mêmes !

* Paroles : Maurice Druon. Musique: Chant traditionnel russe, Arrangement: Léo Poll - 1942 Ed. Nuances 1950

Une interview de Kessel sur les archives de la télévision suisse romande. Et une photo de lui - ce merveilleux visage d'homme - trouvée sur le site de l'Internaute.

samedi, août 11 2012

Pierre Barouh - Encore la radio

J’adore les gens qui savent conter des histoires. Comme Jean Renoir, avec sa faconde et son accent parigot. Il y en a des heures enregistrées à l’INA et ça se trouve en CD. Ce matin, c’était Pierre Barouh, chez Philippe Meyer, La Prochaine fois je vous le chanterai. Pierre Barouh est quand même l’auteur, excusez du peu, d’A bicyclette, la célébrissime chanson d’Yves Montand, où l’on apprend qu’en studio Montand s’est trompé sur le texte :

« Quand le soleil à l’horizon / Profilait sur tous les buissons / nos silhouettes/ on revenait fourbus contents / le cœur un peu vague pourtant / de n’être pas seul(s ?) un instant /avec Paulette… » et Montand s’est trompé : « de n’être pas un seul instant » ce qui change beaucoup de choses : « Une erreur infime et l’image se rétrécit totalement », dit Pierre Barouh. Yves Montand a corrigé en public. Il y a une autre histoire de chanson avec Montand, avec Le Kabaret de la dernière chance. « J’la raconte ? Bon, eh bien voilà : » Ça s’écoute ici.

Un type généreux, passionné, humaniste jusqu’au bout des ongles. La suite sera samedi prochain, il y a de très belles chansons. De la belle ouvrage radiophonique. Et il y a un livre de souvenirs ! Les Rivières souterraines, 2011, chez A vos pages.

lundi, mars 12 2012

Mademoiselle ?

Continuons en mode réac-et-ringard. La disparition officielle des mots, ça me met toujours très mal à l’aise. Je ne peux pas m’empêcher de penser qu’ils ressortiront, ailleurs, sous forme d’actes, de non-dits, de frustrations, en pire. Et j’ai beaucoup de mal à croire à la philanthropie de l’administration. Aussi ai-je adoré la charmante chronique de François Morel, vendredi, au volant sur les routes du « Garlaban couronné de chèvres » et piqué d’amandiers en fleurs. On peut l’écouter, ici. Apparemment, elle a suscité moult réactions foudroyantes.

Voici ce que dit de « mademoiselle » la première entrée du CNRTL : 

« I.

A. − Vx. [Titre employé pour désigner toute femme mariée qui n'était pas noble ou qui était noble mais non titrée ou pour s'adresser à elle] Dans cette pièce se tenaient le respectable bourgeois et sa femme, mademoiselle Lecamus (Balzac, Martyr calviniste, 1841, p. 58).On l'appelle mademoiselle, quoiqu'elle ait été mariée. Le nom de dame était encore réservé aux femmes nobles (Michelet, Insecte, 1857, p. 395).Le 19 janvier 1664, MlleMolière, la femme du poète, mit au monde un garçon (A. France, Génie lat., 1909, p. 126):

1. À Beaune, les premiers fidèles se recrutèrent parmi la noblesse...; à Dijon, parmi la noblesse et les gens de robe..., «M. Bossuet, conseiller au parlement et mllesa femme.»..., et ailleurs...» ... C'était le temps où les Espagnols menaçaient la frontière de Bourgogne (1636-1637). Bremond, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 545.

Fam. Mon Dieu! que vous êtes grosse! Moi qui vous ai vue comme un jonc, maintenant vous me paraissez une des tours de Notre-Dame. Ah, mamselle Sophie! qu'avez-vous fait là? Que monsieur votre mari ne s'attende pas à mes compliments pour vous avoir mise dans ce bel état (Courier, Lettres Fr. et Ital., 1825, p. 735).

La dernière citation est gratinée ^^…

Rem. S'emploie dans le milieu du théâtre (et parfois du cinéma) pour désigner une actrice, même mariée, notamment une sociétaire de la Comédie-Française ou pour s'adresser à elle. »

Quelles femmes plus libres que les actrices ?

Et pour finir, un air de Nougaro :

J'avais rêvé d'un couple dont je sois l'Il, toi l'Elle
Imaginé une île amoureuse d'une aile
Et l'aile s'est posée sur ma lèvre de sel
Et nous voici cloués à l'Être universel

Oui, celle qu'on attend tous, nos rêves unis vers elle,
La voici à mon bras, l'infinie demoiselle
Et je nous vois, jeunes, en croix, pâmés, cieux
Et je nous vois jeunes, en croix, pâmés, cieux..

Mais, même en te voyant dans mon nid, hirondelle
Mais même en te voyant j'ai peur et je t'appelle
Par ton vrai nom traduit de la langue de Dieu
Mademoiselle-Je-n’en-crois-pas-mes-yeux…

A écouter par soi-même, car je n’en trouve pas de trace sur la toile, et je n’en ai qu’une très antique version en disque vinyle : « Femmes et famines » - que j'écoutais en boucle dans mes jeunes années de demoiselle.

dimanche, septembre 25 2011

Gourmandise

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Alors que le liseron blanc éclaire de ses corolles les friches et les haies envahies par ses vrilles exubérantes, mon convolvulus se dessèche, faute, tout simplement, de lectures, hélas ! Alors, pour accueillir l’automne en ce bel été indien, non pas Jo Dassin – que j’adore, eh oui ! – mais un petit air de Trénet, avec la voix de Jacques Douai.

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est fermée
On y voit la nuit en rond
Et les plaines et les monts
Les rivières et les vallons
On y voit
Toute une armée
De soldats bardés de fer
Qui joyeux partent pour la guerre
Et fuyant l'orage des bois
On voit les chevaux du roi
Près de la rivière

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est fermée
On y voit mille soleils
Tous à tes yeux bleus pareils
On y voit briller la mer
Et dans l'espace d'un éclair
Un voilier noir
Qui chavire
On y voit les écoliers
Qui dévorent leurs tabliers
Des abbés à bicyclette
Le Quatorze Juillet en fête
Et ta robe au vent du soir
On y voit des reposoirs
Qui s'apprêtent

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix?
Qu'est-ce qu'on y voit?
Quand elle est ouverte
On n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
On n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
Les découvertes.

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