Il y a le viaduc de Garabit (pourquoi diable l'ont-ils peint en rose ?), quelques kilomètres après Saint
Flour et sa rude et sombre église basaltique, perchée sur son rocher. On suit la D 909, à moins que l’on ne
prenne l’autoroute A75 qui la borde presque exactement. On passe parmi les prés
à peine fauchés et si odorants, et l’on arrive à Loubaresse (sortie 31 par
l’autoroute). Et là, sur la place, de l’autre côté de la route face à l’église,
il y a l’Auberge paysanne.
Nous y avions déjeuné, il y a 28 ans, lors d’un bref
et épicurien séjour en Margeride, d’un généreux plat de girolles, de myrtilles
à peine cueillies, de fromage blanc à peine égoutté… il y avait une salle
basse, obscure, aux boiseries noircies par la fumée d’un âtre quasi médiéval
avec sa broche - et le chien d’alors, qui, gavé de restes succulents, snobait
les simples morceaux de pain.
J’y ai toujours fait étape depuis, lors de mes
passages sur l’A75, quand l’heure s’y prêtait, seule, ou accompagnée – ma
fille, Juliette et Manon gardent un souvenir ému d’un aligot et d’une truffade
partagés un soir avant de rallier les Cévennes – pour un thé, un goûter, ou un
repas. Fin juillet, il était à peine l’heure de dîner, mais la truffade était
chaude et l’omelette aux cèpes fondante. Quant à l’assiette gourmande, si
savoureusement rustique, elle éclipse ô combien ses sœurs urbaines, avec sa
part de tarte aux myrtilles, sa coupelle
de compote de pommes, son fromage blanc avec framboises toutes fraîches, et son
pounti aux pruneaux… il faisait beau, c’était au jour déclinant sous le
tilleul, et dans la salle basse, immuable, les tables étaient mises.