Mot-clé - Apollinaire

Fil des billets - Fil des commentaires

mercredi, novembre 20 2013

Magie d'Apollinaire - Signe

Signe

Je suis soumis au Chef du Signe de l’Automne
Partant j’aime les fruits je déteste les fleurs
Je regrette chacun des baisers que je donne
Tel un noyer gaulé dit au vent ses douleurs

Mon Automne éternelle ô ma saison mentale
Les mains des amantes d’antan jonchent ton sol
Une épouse me suit c’est mon ombre fatale
Les colombes ce soir prennent leur dernier vol

Alcools


dimanche, février 24 2013

Ah ! tombe neige...

La blanche neige

Les anges les anges dans le ciel
L'un est vêtu en officier
L'un est vêtu en cuisinier
Et les autres chantent

Bel officier couleur du ciel
Le doux printemps longtemps après Noël
Te médaillera d'un beau soleil
D'un beau soleil

Le cuisinier plume les oies
Ah ! tombe neige
Tombe et que n'ai-je
Ma bien-aimée entre mes bras

 

Guillaume Apollinaire - Alcools

C'est le 500ème billet, aujourd'hui. Il se bornera à saluer la neige. Et mes lecteurs et lectrices dont la fidélité me réconforte, au détour parfois d'un commentaire. Il a neigé trop menu aujourd'hui pour que j'aie pu photographier la chute du duvet d'oie. Mais j'avais cet Apollinaire dans la tête, que voici.

dimanche, novembre 27 2011

Brumes


Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d'automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux

Et s'en allant là-bas le paysan chantonne
Une chanson d'amour et d'infidélité
Qui parle d'une bague et d'un cœur que l'on brise

Oh ! l'automne l'automne a fait mourir l'été
Dans le brouillard s'en vont deux silhouettes grises

Guillaume Apollinaire - Alcools


mardi, septembre 27 2011

Les fruits tombant....

Automne malade et adoré
Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers

Pauvre automne
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n'ont jamais aimé

Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé

Et que j'aime ô saison que j'aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu'on les cueille
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu'on foule
Un train
Qui roule
La vie
S'écoule

Guillaume Apollinaire - Alcools



samedi, octobre 16 2010

Ah Dieu ! que la guerre est jolie

Pour moi, la violence faisait partie de l’existence, et il fallait s’y exercer. C’est pourquoi, d’ailleurs, je suis revenu de Suisse pour être soldat et désirais être soldat par le bas, pour voir la violence – pas l’exercer, la voir – mais au fond, j’y participais et j’ai bien dû m’y mettre aussi. J’ai donné des coups et j’en ai reçus. [...]  Si la guerre avait été l’horreur continue que montre Barbusse dans Le Feu ou Remarque dans A l’Ouest rien de nouveau, c’était insoutenable. Il y avait des compensations ; d’énormes compensations. Elles ont été décrites souvent – après -  par des psychologues. Il y avait des moments de bonheur véritable, même sur la ligne de feu.... il y avait des choses rudement belles à voir, quelquefois, quand ce ne serait que les feux d’artifice le soir... les fusées, l’odeur du champ de bataille qui était enivrante. Oui, tout cela. « L’air est plein du terrible alcool. » oui, tout cela Apollinaire l’a vu. Il n’y avait qu’un poète pour dire cela.
Ah, mon Dieu il a fait l’apologie de la guerre.
Non, il a tout simplement fait l’apologie de la vie dans la mort. Il a fait l’apologie de la paix dans la guerre. Car la paix dans la guerre, c’est quelque chose... le relâchement, tout d’un coup.

Ces propos éclairants, stimulants, du peintre André Masson au cours d’entretiens avec Georges Charbonnier, en 1957, (publiés chez Ryôan-Ji en 1985), sont cités au chapitre IV : Prier, crier, recréer le front, du bouquin passionnant que je suis en train de lire : Apollinaire, une biographie de guerre, d'Annette Becker, chez Tallandier. Travail rigoureux, minutieux de documentation écrit par une historienne, ce livre éclaire au plus près, avec des intuitions excitantes, la création littéraire féconde (Calligrammes, correspondance surabondante, articles, drame – Les Mamelles de Tirésias, j’ai hâte d’y arriver) du  poète devenu combattant.
Petit partage d’un samedi matin.