Eté balzacien ?

Je renoue aujourd’hui avec Convolvulus, qui a connu ces derniers jours une assez longue éclipse, due à une panne. Que mes lecteurs veuillent bien m’en excuser.

Est-ce l’été ? plutôt une sorte d’antichambre de l’automne, avec prunes en train de mûrir, et poires, mais guère de pommes et pas l’ombre d’un coing. Il y en avait plein les arbres dans le Tarn, riche en cognassiers de bornage, où la chaleur était intense, et les fleurs des champs nombreuses, que, las !,  je ne pus photographier, mon appareil est en réparation.

Le mois d’août est devant vous. Vous le passez dans la moitié nord de la France, où la Manche est à 14 degrés, où les étés sont « tièdes voire frais ». Le ciel est gris, le temps venteux. Le soleil se lève à 7h du soir et se couche deux heures plus tard. Ne vous laissez pas décourager, et lisez Balzac ! et si les grands romans et les prétendues descriptions interminables vous effraient, plongez dans les brefs romans et les nouvelles. Les Etudes Philosophiques ne sont pas mes préférées, il y a souvent en elles quelque chose d’explicitement démonstratif, encore que j’aie déjà fait ici l’éloge sans réserve d’El Verdugo. Mais j’ai lu cet après-midi Melmoth réconcilié, conte ‘fantastique’ dont l’incipit ironique, consacré à l’ « espèce hybride » du caissier, « que l’on ne peut reproduire ni par semis ni par bouture », « arrosé par les idées religieuses, maintenu par la guillotine, ébranché par le vice, et qui pousse à un troisième étage entre une femme estimable et des enfants ennuyeux »  laisse d’emblée supposer la dimension parodique. Car si Balzac a emprunté à l’Irlandais Maturin le personnage de John Melmoth, l’Anglais inquiétant qui surgit devant la caisse de Castanier occupé à préparer sa première et ultime escroquerie, le sort de son pouvoir surnaturel, transmis au caissier indélicat car amoureux, puis progressivement dévalué par diverses transactions en bourse, prête à sourire, voire à pouffer.

Il y a donc conjonction entre le don de voir l’avenir et un amant caché dans une garde-robe, et, tambour battant, un passage de relais – et de pouvoirs - de caissier à usurier, puis à notaire, puis à diverses professions du bâtiment, pour finir, rue Saint-Honoré (de Balzac) par l’agonie d’un clerc de notaire empoisonné au « vif-argent » au cours d’un traitement anti-syphilitique. On termine par une conférence bouffonne entre un chœur de clercs de notaire à l’humeur potache et un démonologue allemand féru de Jacob Bœhm. De l’or et de l’argent, la toute-puissance, l’amour et la syphilis, tout ce qui fait la matière même du Père Goriot, dès la longue (mais quasi unique !) description liminaire. Je dirais bien, tiens, que Melmoth Réconcilié est une potacherie fantasque, sinon fantastique. Ne pas commencer par là, en tout cas, pour le balzacien débutant qui trouvera ci-dessous toutes sortes de liens vers brèves et moins brèves histoires. Et puisse-t-il au terme de ce butinage au fil de l’œuvre se trouver membre de la vaste confrérie des balzacophiles !…

A propos de l’œuvre : quelques éclaircissements ici et . Et la merveilleuse généalogie de La Comédie Humaine

Albert Savarus
Le Bal de Sceaux
La Bourse
Le Cabinet des Antiques
Les Comédiens sans le savoir
Une Double famille
L’Envers de l’Histoire contemporaine
Un Épisode sous la Terreur
Étude de femme
Eugénie Grandet
La Fausse maîtresse
La Femme abandonnée
Une Fille d’Eve
La Grenadière
Un Homme d’affaires
Madame Firmiani
L’Illustre Gaudissart
Le Message
La Messe de l’athée
Modeste Mignon
La Muse du département
La Paix du ménage
Un Prince de la Bohême
Le Réquisitionnaire
La Vendetta
La Vieille Fille 
Wann Chlore

Il y a chez Folio un volume qui offre, outre Les Secrets de la Princesse de Cadignan quelques autres « études de femme » mais le site de Gallimard est si mal fait que pas moyen de savoir lesquelles et je ne trouve pas le volume….  C'est une bonne manière, en tout cas, d'entrer dans le labyrinthe, dont j'espère avoir pour certains, sinon enseigné, du moins éclairé quelques détours...

* J'ai oublié de qui était la photo, très ancienne, de ce hiératique Balzac-menhir dans la brume...
PPS : C'est une photo d'Edward Steichen, début XXe. Balzac vers la lumière.

Il en a d'autres sur le site du Metropolitan Museum of Arts, ici et . C'est magnifique. Il s'agit de la version en plâtre du Balzac, transporté par Rodin à Meudon. On trouve un autre Balzac et une fiche très intéressante sur le site du Musée Rodin. Et encore ici.

 

 

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