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lundi, janvier 7 2013

Puisqu'on parle de con-trepets...

Farfouillant dans mon rayon Queneau, d’ailleurs scandaleusement dégarni, j’ai retrouvé dans le numéro 150-11 de la revue Temps Mêlés, février 1981, cet hommage de François Caradec à Queneau :

               Hommage à Raymond Queneau

 Si j’ouvre ma fenêtre et monte à mon balcon
                     je vois passer les cons
      c’est aujourd’hui dimanche et c’est le jour pour qu’on
                     ne rencontre que cons
              qui toute la semaine ont tissé leur cocon
                     tel est le lot des cons
              c’est le péché d’Adam qui les rend si féconds
                     travailleurs pauvres cons
              dominicalement ils sortent rubiconds
                     de leurs tablées de cons
              la parole facile et leur esprit facond
                     ils prennent un air con
              pour parler de l’hiver si fertile en flocons
                     qui neigent sur les cons
              évoquant la biture où vidant les flacons
                     une bande de cons
              ricanait en citant les poètes abscons
                     ce sont bien les plus cons
              dont les muses jamais n’ont connu l’Hélicon
                     mais ont un si beau cul.

En distiques que nous hésiterons, malgré Ovide, à qualifier d’élégiaques. « Sarcastiques » serait sans aucun doute plus... congru.

Occasion, pour moi, de rendre hommage à Caradec, amateur sourcilleux de contrepets réguliers, comme à Queneau.

J’y ajoute, issus du même numéro, un souvenir, du même Caradec, autour de « R.Q. »,
et une hypothèse « anthroponymique » qui, je l’espère, ne manquera pas de réjouir les lecteurs des aventures de Sally Mara, grande sœur, passablement extravagante, de Zazie.

mercredi, août 1 2012

"Bonnes feuilles", feuilles mortes, feuilles de chou...

Deux extraits de « bonnes feuilles » entendus par inadvertance sur France Culture. La première fois, c’était Amélie Nothomb. Une voix acide, qui m’a rappelé celle de Karin Viard, mais avec une diction tellement trébuchante que je me suis inquiétée pour la comédienne. Raté, c’était l’autrice, qui lisait elle-même l’incipit de son roman-de-la-rentrée. Une resucée de Barbe Bleue version colocation, avec sombre et mystérieux séducteur au nom espagnol, lequel proposait pour un loyer dérisoire (500 euros, quand même) un appart grand luxe dans quelque chose comme le XVIe arrondissement. L’héroïne se nomme Saturnine, elle est belge, elle n’en peut plus de partager le deux-pièces et l’hospitalité de sa copine Corinne à Marne-la-Vallée, et la brochette de bourgeoises chics qui attend avec elle dans l’antichambre a flairé en elle la future élue du fascinant Don Juan qui les fait toutes rêver.
Sur fond de banalités diverses, catalogue d’agences immobilières, études sociologiques sur les appartements parisiens ou le regard hypothétiquement porté par les Français sur les Belges ou sur les aristocrates, l’autrice, qui en est à son vingtième roman mais à son soixante-treizième enfantement (ce qui fait un total de 53 fausses-couches si je sais compter, quelle santé ! – ou quel gâchis), l’autrice donc accumule les formules gnomiques, sentences et autres aphorismes, dans un style qui associe quelques afféteries (un « brushing impavide », hypallage ?) avec un lot de platitudes, et emploie l’insupportable tournure « l’insupporter » qui m’insupporte. Elle parle de son œuvre avec ardeur et conviction, et une sorte de naïveté aveugle et satisfaite. Sachez quand même qu’il s’agit d’une réhabilitation du personnage de Barbe Bleue ignominieusement traité par Perrault, et de son droit au secret.

Cette fille doit largement friser la cinquantaine, et l’énergie qu’elle met à se mettre en scène au lieu de travailler son talent a quelque chose de profondément pathétique.

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lundi, janvier 2 2012

Chênes

De la Grésigne au Nord du Limousin, le bord de la route est ponctué de chênes. C'est un bonheur pour l'œil, un réconfort.

Un peu de Queneau, donc, pour entamer l'année comme je l'ai quittée. C'est Chêne et Chien (1952), étrange « roman en vers » qui est le récit poétique de la psychanalyse de Queneau - à la fois « chêne » (quesne, ou quêne en normand), et chien (quen). Abject, et sublime. J'adore le poème qui clôt la seconde section de cet ouvrage, et dont voici quelques passages :

Chêne et chien voilà mes deux noms,
étymologie délicate :
comment garder l'anonymat
devant les dieux et les démons ?[…]

Le chêne lui est noble et grand
il est fort et il est puissant
il est vert il est vivant
il est haut il est triomphant.

Le chien se repaîtrait de glands
s'il ne fréquentait les poubelles
Du chêne la branche se tend
vers le ciel. […]

...
Le chien redescend aux Enfers.
Le chêne se lève — enfin !

Il se met à marcher vers le sommet de la montagne.

Et que l’élan des chênes soit en vous pour l’année qui s’ouvre…

mardi, décembre 21 2010

Queneau, Queval, Jouet, Homais

Il neige tant – il a tant neigé – qu’à quoi bon sortir. Même pas entretenir ce blogue pour cause de panne Orange – qui n’en a cure, un délai de trois jours complets pour réparation ne leur paraît en rien illégitime -. D’où le côté différé de cette note.

Aussi, outre quelques activités culinaires et ménagères, ai-je lu, assez frénétiquement. Zazie d’abord, que j’envisageai de faire passer de lecture délectée de mes quinze ans puis quelques autres années ultérieures à « objet-d’étude-le-roman » selon les termes éducationnationaux. Donc achat de l’édition ‘‘Folio plus’’ avec commentaires (et notes) et emprunt à la BM d’un Cahier de l’Herne, pas encore ouvert, du « Poètes d’aujourd’hui » (ô regrettée petite collection carrée de chez Seghers source d’inépuisables découvertes de mes mêmes quinze ans et au-delà !) par Jean Queval collègue oulipien de Queneau et enfin un Raymond Queneau de Jacques Jouet à la Manufacture, lesquels trois ouvrages me conduisent à cette note sur des ouvrages critiques, pas si fréquentes ici.

C’est que la première, de lecture, le Zazie à destination des scolaires, m’a tellement agacée que j’en ai zébré des passages entiers.

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