Mot-clé - Bettencourt

Fil des billets - Fil des commentaires

mardi, janvier 11 2011

Bettencourt – Visage rentré

Les petites histoires de Bettencourt, je ne m'en lasse pas. Celle-ci, qui est une Histoire Comme il faut, on peut difficilement faire plus concis, a un petit air du Plume de Michaux. 

Quand j’en ai assez, je rentre mon visage en moi-même. Il n’y a plus qu’une peau lisse sur laquelle personne ne peut lire. Cela m’arrive souvent, hier encore dans un salon.

Mais bientôt quelqu’un s’écrie : « oh ! Regardez ! » Alors brusquement je sors mon nez, je déploie mes oreilles, j’ouvre la bouche et les yeux. Je vois que tout le monde me regarde.

Il n’y a plus rien à voir

jeudi, décembre 23 2010

Dubuffet- Bettencourt "Poirer le papillon"

(…) La nouvelle de votre venue probable en janvier nous enchante. Excusez mon erreur d’interprétation sur votre conversion, je comprends peu à ces choses. Vous voici donc déconverti. Moi, je songe à me convertir au paganisme, je vais me faire baptiser. Peut-être par un nègre. Dans une grotte.

Amitiés

Jean

Petit fragment de ma lecture toute fraîche de « Poirer le papillon », lettres de Jean Dubuffet à Pierre Bettencourt, éditions Lettres Vives, 1987, jolis petits bouquins aux pages un peu épaisses et non-coupées !!!! plaisir retrouvé de les fendre d’un coup de lame - quatre en haut, puis quatre en haut et sur la tranche - au fil d’une lecture plus intensément rendue à la découverte. Le titre, pour moi à la limite du sens, me tarabustait : « Poirer » était-il un nom de papillon ? ou quelle action étrange désignait-il ?. Il apparaît que le verbe « poirer », d’origine argotique, signifie « arrêter, emprisonner », et qu’il désigne pour les chasseurs de papillons – au moins pour Dubuffet et Bettencourt qui le furent de conserve – l’action de saisir « au vol, vif encore », un papillon.

Lire la suite...

mercredi, septembre 22 2010

Fable fraîche de bon matin

Un autre petit Bettencourt pour la route. Amusant, avec un petit air de Max Aub....

              La victime

Tu t’es conduite avec moi indignement. Mais enfin, c’est une candeur inénarrable de ne pas t’en apercevoir.

Qu’ai-je fait ? dit-elle.

-  Comment ? c’est à moi que tu as le toupet de demander des explications ! moi le refait, moi le volé, moi la victime ?

Que faire ? dit-elle.

-  Tu avoues enfin. Ah ! je m’en doutais que c’était toi. Misérable ! me le rendras-tu ?

Que faites-vous ? dit-elle.

Je serrai, je serrai plus fort, j’étais furieux. Elle tomba, elle était morte, non, elle dit encore :

Qu’avez-vous fait ?

 (Fables Fraîches pour lire à jeun)

lundi, août 30 2010

Bettencourt, l’autre

Les ballons

Au printemps, leurs femmes gonflent comme des ballons et s’envolent. Les maris doivent les tenir en laisse avec un cordon. A la terrasse d’un café, on les rencontre ainsi par trois ou quatre attablés, leur laisse à la main. Vingt ou trente mètres au-dessus d’eux, s’ils ont bien voulu donner de la longueur, leurs femmes sont en train de faire salon. « Amène-la, me disait mon voisin, qu’on voie un peu la tête qu’elle a. » Mais nous eûmes beau nous y suspendre à trois, rien n’y fit.

Les maris pendant cette période ont une démarche légère, leurs pieds posent à peine sur le sol. Mais, qu’arrive un mauvais plaisant qui coupe la corde, adieu la mère de nos enfants. Portée par les alizés, elle ira se perdre au-dessus des océans, dans ce domaine de rêve et de légende qui leur sert de halo. (avec la voix de Pierre Mondy)

Pierre Bettencourt -
Fumeur de pipe observé par un enfant peau-rouge
, 1969

Ecoutant, sourire aux lèvres, d’antiques émissions de France Culture  Mi-Fugue, mi-raisin (1976 !), par mon cher Bertrand Jérôme - je tombe sur une « fable » ( ? les « Fables Fraîches pour lire à jeun » ont été publiées en 1986, je ne sais donc pas quelle était la source de Bertrand Jérôme en 76, la revue Bizarre ?), puis deux, puis trois, de Bettencourt. Le nom ayant investi depuis quelques mois les ondes radiophoniques et les médias pour de fort nauséabondes raisons, un œil sur gougueule me fait découvrir l’existence d’un Pierre Bettencourt, beau-frère désormais défunt (2006) de madame-qui-défraie-la-chronique. Et la découverte en vaut la peine. Imprimeur et éditeur confidentiel pendant la guerre d’Artaud, Michaud, Ponge, il était aussi écrivain et peintre ? plasticien ?, ami de Dubuffet, auteur d’une œuvre marquée de sauvagerie et de sadisme en quelque sorte policés, apprivoisés ? Les textes sont brefs, cocasses, enlevés, étranges. Il y a une intéressante interview du Matricule des Anges en 97, où vous en découvrirez assez, je l’espère, pour avoir envie, comme moi, de pousser plus loin l’investigation http://www.lmda.net/mat/MAT01983.html .

Découverte de la Chine par une jeune souris montée sur un cheval jaune, 1969

Lire la suite...