Herbert Lottman - Colette

Petite chronique rapide :

En quête de références bibliographiques précises au sujet du compagnonnage de Musidora avec Colette, Marguerite Moreno, Annie de Pêne pendant la guerre de 14, je me suis trouvée en train de lire in extenso Colette, d’Herbert Lottman (1990), dont je crois qu’en fait je ne l’avais jamais lu. Biographie à l’américaine, très documentée, en quarante-quatre chapitres dont certains reprennent les titres d’œuvres, tant il y a une dimension autobiographique dans l’œuvre de Colette, et tant son écriture parfois douloureuse a ponctué sa vie : Claudine s’en va, La Vagabonde, L’Entrave, La Naissance du Jour… Musidora n’y est mentionnée que de façon allusive, tant pis. Mais ce qui était intéressant, c’était la façon dont il fait très clairement apparaître combien Colette était dès l’origine une déclassée, qu’elle est restée presque jusqu’à la fin, combien elle a été, dans sa sensualité affichée, dans son incarnation si charnelle, scandaleuse, et enfin combien sa vie a été, avant même le mariage avec Willy (Villy, parce que Gauthier-Villars), au temps où elle vivait chez ses parents, mais surtout après, placée sous le signe du manque d’argent, de la course contre la dèche, jusqu’à ce qu’enfin, les royalties venues de l’adaptation à succès de certaines de ses œuvres - Gigi surtout, en France (de Colette Aubry avec Danièle Delorme, 1949) et aux USA (de Vincente Minelli, 1958, avec Leslie Caron, Maurice Chevalier et Louis Jourdan, je l’ai vu, celui-là, c’est une comédie musicale assez charmante, sinon que je regrette qu’à la fin Gigi reste en robe du soir, au lieu de remettre sa robe d’écolière, comme elle fait dans l’explicit dans cette nouvelle absolument réussie, l’une des œuvres de Colette que j’adore. Légère, fine, allègre.) – jusqu’à ce qu’enfin les royalties donc la mettent tout à fait à l’aise. Ce qui est intéressant, aussi, et c’est un sujet que Lottman connaissait bien, c’est le récit de la vie pendant la guerre, la seconde en particulier. Où l’on voit que la nécessité de vivre, simplement, de manger, obligeait à bien des contorsions, loin de l’image manichéenne si habituelle d’une petite France romantiquement résistante contre une grande France veule et collabo. On y apprend aussi des tas de choses sur les frères Jouvenel, spécialement Renaud, et sur Colette de Jouvenel. Sur Maurice Goudeket (« good quéquette », le mot est de Valéry, mouarf !) comme promoteur de l’œuvre de sa femme : les éditions du Fleuron, c’est lui, je l’ignorais. C’est un ouvrage très documenté, avec notes et références à des articles parfois peu connus, une biblio, et un index. Assez bien traduit, malgré ici ou là des anglicismes ou des bizarreries que j’ai la flemme de rechercher. Du coup, j’ai remis le nez dans la Correspondance, que je butine, lorsque je suis fatiguée ou distraite. Lettres à Marguerite Moréno (l’amie de toujours), à Hélène Picard, la poétesse solitaire et azimutée, au « Petit Corsaire », rassemblées ensemble chez Flammarion. C’est une correspondance extrêmement vivante, alerte, inventive, dont des fragments entiers, au mot près, étaient restés dans ma mémoire. Au-delà des facilités, des afféteries parfois, de la préciosité par moments excessive de certaines des œuvres, Colette était une sacrée épistolière.

Le site de la Société des Amis de Colette est ici.

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