lundi, janvier 24 2011

Marc Dugain - Heureux comme Dieu en France (2002)

Pas joyeux, joyeux, Heureux comme Dieu en France, de Marc Dugain. Un roman abrupt, dans sa construction comme dans son style, sur fond cette fois de guerre de 40, après La Chambre des officiers, qui confinait dans leur chambre de souffrance des gueules cassées de la Grande Guerre. Le narrateur de ce roman-ci, alias Galmier à cause de ses épaules tombantes (c’est la source de Perrier), n’est pas seulement le cauchemar des tailleurs. C’est un type indolent, incolore, que son insignifiance apparente va paradoxalement porter insensiblement de plus en plus haut dans la Résistance, où l’a engagé sans quasiment lui demander son avis son père communiste. Jusqu’à l’arrestation, puis à l’après-guerre, où il se coule dans un personnage d’épicurien rondouillard et détaché, en quête, obscurément, de la seule femme qui ait charpenté sa vie, Mila, sa chef dans la Résistance, disparue peu avant sa propre arrestation.

Malgré le détachement, le peu d’empathie (d’enthousiasme ?) que suscite le personnage, malgré un goût peut-être un peu exagéré pour la formule « à la française » et une syntaxe portée sur la juxtaposition, ce livre un peu sec, et somme toute classique au sens le plus rigoureux du terme, est porteur d’une élégance et d’une forme d’espoir sans illusion.

1/2/11 : J'ai trouvé, après rédaction de ce billet, un article ici (Le Matin, journal marocain en ligne), qui éclaire l'écriture du roman.

mardi, août 11 2009

Marc Dugain -La Chambre des officiers

''Pourquoi, c’est marrant ce bouquin'' ? a demandé Vincent, 15 ans, en relevant le nez du ''Cercle des éplucheurs de patates'', comme je pouffais à deux reprises dans ma lecture. Surpris. Il avait vu le film de François Dupeyron et savait bien qu’il s’agissait d’un sujet grave. Le lent retour au monde d’un jeune ingénieur du génie dont une « marmite » a fait exploser le bas du visage le premier jour de la guerre de 14, au cours d’une reconnaissance. Cinq ans au Val de Grâce : toute la guerre plus un peu de rabe, dans la chambre réservée aux officiers devenus des « gueules cassées », d’où le titre. Seize opérations, pour récupérer la parole et la faculté de s’alimenter, mais pas figure humaine, malgré les efforts et l’ingéniosité des chirurgiens. Chronique à la première personne d’un apprentissage de la douleur, de l’impuissance, de l’horreur de soi. Puis de l’amitié et de la fraternité, de l’inventivité, de la gouaille, avec ses deux copains d’élection, l’aviateur juif Weil et l’aristocrate breton Penanster. Les trois anciens de la Chambre des officiers ont constitué une sorte de club auquel ils ont intégré Marguerite, infirmière devenue elle aussi gueule cassée.

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