Alessandro Piperno - Inséparables.... peut-être, mais indigeste !

Restons en Italie, pour le meilleur.... et pour le pire. Inséparables, tel est le titre du roman d’Alessandro Piperno, prix Strega 2012 qui m’attendait, avec son bandeau alléchant. Et que j’ai traîné, perplexe, bien plus d’une semaine, pour le finir dans le train. By the way, une question me taraude : POURQUOI FAUT-IL QUE LES VOYAGEURS SE GÈLENT EN TGV ? – C’est la clim, est-il invariablement répondu aux voyageurs emmitouflés dans manteaux et écharpes à l’INTÉRIEUR du train. – Et alors ? En quoi est-il légitime qu’en plein hiver les clients de la prestigieuse ( ?) compagnie française de transports ferroviaires, voyageant à bord de son train de prestige, attrapent la crève pire que dans une troisième classe des trains d’autrefois, pour un prix très exagérément supérieur ? si clients nous sommes, puisqu’usagers est un terme et une notion semble-t-il caducs, ne serait-il pas légitime que nous soyons confortablement traités ?

J’ai donc fini Inséparables emballée jusqu’au nez dans ma grosse veste fourrée. Froid dehors, ennui dedans, le crayon à la main pour souligner, page après page, effets de remplissage, traduction bancale, aphorismes neu-neu, chroniques de gestes à perte de vue, conversations creuses. L’auteur serait un spécialiste de Proust. Question construction narrative, il n’en a pas gardé grand-chose. Quant au style... j’ai eu l’impression de replonger dans du Houellebecq (à moins que ce ne soit Marc Lévy ?), ce qui explique peut-être le succès et les éloges reçus dans la presse et sur la toile par cette interminable et languissante chronique fraternelle.

Au hasard : « Semi avait été enthousiasmé par sa manière de s’habiller : un pantalon marron en coton épais et une veste en velours à grosses côtes couleur caramel, sur un col roulé en mérinos d’un bleu ciel diaphane. Les chaussures étaient les plus surprenantes, tellement semblables à celles que lui-même, à peine arrivé de son bureau, arborait ce jour-là : un modèle Church, mais contrairement aux siennes, en chamois tête-de-nègre.’’ [Vous avez dit La Redoute ?]

[...] « A présent, elle était là, dans une tenue extraordinaire [NB : Pull, veste, pantalon, chaussures...], et elle n’arrêtait pas de se tortiller sur sa chaise, en proie à une gêne qui frôlait la paranoïa. Puis elle avait tiré de son sac le numéro soigneusement recouvert de cellophane et l’avait posé sur la table. Samuel lui avait demandé :
-      
‘‘ Je peux ?
-          Mais certainement, faites donc !
-          Si tu continues à me vouvoyer, je vais devoir le faire moi aussi.
-          Oui, je sais. Vous avez raison’’, avait-elle répondu en baissant la tête en signe de reddition, comme si le ton moqueur de Semi l’avait profondément mortifiée. »

S’ensuit une page de conversation du même tonneau, puis ce passage d’une insondable profondeur :

« Ludovica ajouta : ‘‘ J’adore le café. Je pourrais vivre de café, mais malheureusement je souffre d’une inflammation chronique de l’œsophage et il m’est formellement déconseillé... c’est bien ça l’ennui : j’aime à la folie les choses qui me font du mal.’’

Cette considération était allée se loger dans la région la plus vigilante de la conscience de Samuel. Il l’avait emportée chez lui, cette phrase, il y avait pensé et repensé ; il avait même dormi avec elle pendant quelques nuits d’affilée. ‘‘J’aime à la folie les choses qui me font du mal.’’ Une grande et belle phrase vraiment. Une phrase révélatrice. »

Doit-on prendre un tel passage au premier, au second, au trentième degré ? Faut-il y voir une satire des mœurs de la grande bourgeoisie juive italienne ? Sans doute. Comme il faut admirer la réflexion que propose le roman sur la fraternité dans ses rapports avec le père (déchu, il paraît que le précédent roman lui est consacré) et avec la mère (juive) ? Certes. Mais tout est tellement peu inventif ! La traduction de Fanchita Gonzales Battle est laborieuse, inconfortable, donnant sans cesse le sentiment de lire « entre deux langues ». Bref, laissons tomber. La lecture de « ce formidable roman d’Alessandro Piperno »  (sic) m’a tellement assommée qu’en faire un sujet de chronique me barbe tout autant. J’arrête, et si vous m’en croyez, en cette période d'agapes et de réveillon, abstenez-vous.

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