Une bouffée de Milosz triste

Un lecteur qui signe Zébulon me fait découvrir ce beau et sombre poème de Milosz, dédié à Laurent Terzieff, disparu l'an dernier. Le voici offert à tous:

L'étrangère

(En hommage à Laurent Terzieff)

Tu ne sais rien de ton passé. Tu l'as rêvé,
- Oui, sûrement tu l'as rêvé.
Je vois ton visage dans la lumière grise de la pluie.
Novembre ensevelit le paysage et ma vie.
Je ne sais rien, je ne veux rien savoir de ton passé.
Tes yeux me parlent de brumeuses villes lointaines
Que je ne verrai jamais
Et dont jamais je n'entendrai le son dans ta voix.
Novembre est sur toute mon âme,
Novembre est sur toute la plaine.
Je te vois inconnue à travers Autrefois.
Ce sont des choses depuis longtemps mortes,
- Mortes irrémédiablement -
Des musiques étouffées, des luxures flétries.
Je suis sûr que novembre est derrière la porte.
Je vois vivre en ton cœur ce que ton cœur oublie.
Ton âme est loin, bien loin d'ici. Ton âme étrangère
Est une nuit de brume,
De brume et de bruine sale sur les faubourgs
Où la vie a la couleur froide de la terre,
Où des hommes mourront, sans avoir connu l'amour.

Oscar Vladislas  de Lubicz Milosz (1877-1939) - Les Sept Solitudes (1906).

Commentaires

1. Le mercredi, février 29 2012, 20:42 par Ventlent

Si vous aimez Milosz, il a écrit de vraiment très beaux poèmes. Je signale qu’il existe maintenant une nouvelle et belle édition numérique d'une grande partie de ses poèmes sur le site http://www.ante-matiere.net ; le titre est « Le soir où j'ai connu le son de votre voix ». Le téléchargement et le prix sont libres.

2. Le mercredi, février 29 2012, 21:20 par Agnès

Merci de ce partage. J'irai y voir. Ce que je voudrais aussi  retrouver, ce sont les Contes Lituaniens, que j'ai perdus!

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