Ma Sœur, mon amour - Chitra Banerjee Divakarumi

Seule une histoire peut empêcher nos descendants de trébucher comme des mendiants aveugles et de se déchirer aux épines des cactus. (Chinua Achebe)
C’est l’épigraphe – à laquelle je souscris, ô combien, même si cactus il n’y a pas partout ! - de Ma Sœur, mon amour (Sister of my heart) de Chitra Bannerjee Divakaruni.
Voilà que mon chemin de lectrice a croisé l’Inde, trois fois en quelques semaines,

...cependant qu’hier matin, après une fin de nuit passée à avaler ce roman, France Culture, pour une fois digne de son nom, consacrait l’émission Concordance des Temps à Christophe Jaffrelot, passionnant spécialiste de ce pays et de son histoire.

J’avais découvert Chitra Bannerjee Divakaruni, il y a deux ans. Une amie m’avait offert La Maîtresse des épices (alors chez Picquier), dont je n’ai jamais pris le temps de parler, mais que j’ai offert depuis, plusieurs fois. Ma Sœur, mon amour m’a donc tiré l’œil, à cause de l’auteur, et d’une couverture où une paume de femme s’ouvre sur un fouillis de voiles orangés et un collier d’œillets du même ton.
C’est une histoire qui regorge d’histoires. Deux sœurs d’élection – sont-elles au moins cousines ? – à Calcutta, dans une somptueuse demeure de famille (brahmane ? il n’est guère fait mention des castes dans cette Inde-là) en plein effritement – marbre, clôture dense de figuiers centenaires, et la terrasse de briques où les fillettes, puis les jeunes filles dorment, rêvent, et se racontent en épiant les étoiles filantes -. Elles ont trois mères, et pas un père, les deux sont morts au loin le jour de leur naissance, les frappant d’opprobre et de malchance. Ainsi grandissent-elles, strictement élevées dans le sens du devoir, à la maison et à l’école religieuse, loin du monde extérieur, gorgées d’histoires par leur troisième mère Pishi.
Sudha est belle, timide, intuitive et romanesque. Anju déborde d’intelligence et d’esprit de rébellion. Chacune est à l’autre sa sœur d’âme, jusqu’à ce que la vie les entraîne vers leurs destins imprévus, toutes deux précocement mariées, l’une en Inde, l’autre en Amérique.

C’est construit sobrement, selon les voix alternées de l’une ou l’autre des deux filles. La Princesse dans le Palais des serpents devient La Reine des épées (le conte, encore ! comme cœur battant de l’univers romanesque). Rites, étoffes, bijoux, saveurs, odeurs, épices… au-delà des mots, on cherche à découvrir la saveur des mets.

C’est chez 10/18, source inépuisable de découvertes étrangères – Divakaruni écrit en anglais, et vit en Californie -, même si l’on peut en regretter la minceur des marges et l’absence totale de notes explicatives à l’abondant lexique indien.

C’est une histoire d’amours et d’exils, subtile, profonde, émouvante et captivante. Je ne l’ai pas lâchée avant de l’avoir finie... pour découvrir, en passant chez le libraire, que l’autre volume du même auteur qu’il proposait, La Liane du désir (Vine of desire), en constituait la suite. Catastrophe. Encore une nuit passablement ébréchée. J’en parlerai demain.

Le dernier roman de l’autrice The Palace of illusions, vient de paraître aux USA.

http://www.chitradivakaruni.com/

http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/concordance/fiche.php?diffusion_id=60345

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet