POURQUOI J'ÉCRIS ?

Parce que...
1924
(Feuilles de route)

Il m’est difficile de dire combien j’aime la poésie de Cendrars. Le simple fait d’ouvrir un volume des poèmes, (à présent Du Monde Entier Au Cœur du Monde est rassemblé en un seul volume magnifiquement commenté et annoté par Claude Leroy, mais j’ai encore l’ancienne édition en deux volumes en loques) et d’en lire un, ou plusieurs, à la volée, me donne un sentiment de joie, de plénitude. Les petits poèmes de voyage !...

Lesquels deux volumes j’ai feuilletés de fond en comble, ce qui est difficile, et pas moyen de remettre la main ni les yeux sur l’épitaphe que Cendrars s’était rédigée. Tant pis. C’est aujourd’hui le 21 janvier, date anniversaire de la mort de Louis XVI - de Lénine aussi il paraît -, jour de la Sainte Agnès, mais aussi date anniversaire des cinquante ans de la mort de Cendrars.

Ce sera le début de La Prose, cette merveille de lyrisme, alors. Qui résonne en moi, depuis si longtemps.

Blaise Cendrars

Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France

dédiée aux musiciens

En ce temps-là, j'étais en mon adolescence
J'avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de mon enfance
J'étais à 16.000 lieues du lieu de ma naissance
J'étais à Moscou dans la ville des mille et trois clochers et des sept gares
Et je n'avais pas assez des sept gares et des mille et trois tours
Car mon adolescence était si ardente et si folle
Que mon coeur tour à tour brûlait comme le temple d'Ephèse ou comme la Place Rouge de Moscou quand le soleil se couche.
Et mes yeux éclairaient des voies anciennes.
Et j'étais déjà si mauvais poète
Que je ne savais pas aller jusqu'au bout.    

Le Kremlin était comme un immense gâteau tartare croustillé d'or,
Avec les grandes amandes des cathédrales toutes blanches
Et l'or mielleux des cloches...
Un vieux moine me lisait la légende de Novgorode
J'avais soif
Et je déchiffrais des caractères cunéiformes
Puis, tout à coup, les pigeons du Saint-Esprit s'envolaient sur la place
Et mes mains s'envolaient aussi avec des bruissements d'albatros
Et ceci, c'était les dernières réminiscences
Du dernier jour
Du tout dernier voyage
Et de la mer.

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