Déon Meyer - Lemmer l'invisible,
Par Agnès Orosco le dimanche, avril 18 2010, 00:09 - Noirs, thrillers, polars - Lien permanent
très mauvais titre (pour traduire
un mot africaans « Onsigbaar
»), qui ne me donnait aucune envie de le lire, d'autant moins que j’avais
décidé que j’en avais assez de l’atmosphère entre enfer et apocalypse qui règne
dans les thrillers. Et puis je me suis laissée prendre : parce que mon fils est
fan, parce que Déon Meyer connaît son métier, et que c’est fichtrement bien
construit, bien écrit, avec juste ce qu’il faut d’exotisme pour que le lecteur
(la lectrice) à la vie paisible, confortablement installé(e) sur son canapé ou
dans son siège de TGV (privilège rare par les temps qui courent) ait
l’impression de pénétrer quelques-uns des arcanes de la vie de garde du corps,
dans le monde ultra-dangereux sur le plan politique comme naturel de l’Afrique
du Sud.
Bref Martin Fitzroy Lemmer
est donc garde du corps, sans arme, parce qu’il est en liberté conditionnelle
après quatre ans de prison.
Et sa nouvelle mission est de veiller sur une
jeune femme, la trentaine, garçonnière, jolie et apparemment généreuse,
orpheline de toute famille – parents morts et frère disparu, autour duquel
tourne sa quête, tandis qu’autour d’elle rôdent toujours plus menaçants
d’inquiétants assassins cagoulés. Elle s’appelle Emma Le Roux et elle a cru
voir ressurgir après vingt ans ce frère disparu, Jacobus, dans un reportage
télévisé sur des faits de banditisme écologique. L’enquête devient une sorte de
« road novel ».
Menaces immobilières, espionnage et coups tordus, activistes écologistes
exaltés … tels sont les éléments qui vont conduire Emma aux portes de la mort,
et rendre Lemmer à lui-même après une douloureuse et violente traversée du
désert.
On peut regretter quelques ficelles et/ou chevilles. On peut déplorer qu’Emma
s’évapore vraiment trop dans la seconde partie du texte, ou le recours à des
« dei » ex machina. Il n’empêche que le roman mêle avec talent personnages
vigoureusement campés, destins individuels et Histoire d’aujourd’hui et
d’autrefois ; on a le sentiment d’en sortir un peu plus perspicace et
documenté(e) – sur l’adrénaline, les vautours, les guerres tribales, les
rapports entre peuples et entre langues, et les alliances entre l’Afrique du
Sud et Israël. Entre autres. Tendu(e) aussi, et pourtant, c’est une excellente
lecture de détente.
Quelques éléments de décor sur le site de l’auteur (en africaans, pour ceux qui maîtrisent…)