Michèle Desbordes - La Demande

Après Les Petites Terres, de Michèle Desbordes, il y a eu La Demande, commandée, avant même de partir, au Pouzadou, la librairie du Vigan – ô le plaisir des villes où l’on peut enchaîner marché et libraire ! – et qui m’attendait à l’arrivée, petit bonheur de vacances.

Narration poétique et incantatoire, longues phrases sinueuses et sans cesse renaissantes, imparfaits obsédants, une sorte de fil des jours hors du temps, baigné de lumière et de silences – il n’y a pas un seul dialogue au style direct, comme si l’écriture était la transcription urgente et pourtant infiniment travaillée d’un courant de conscience qui unirait dans un réseau serré la créatrice et ses créatures : un vieux peintre exilé d’Italie sur les bords de la Loire, regard attentif sans cesse capturant la splendeur et la diversité du monde, et sa servante, active, discrète, taiseuse. Autre regard, qui finit par rencontrer le premier jusqu’à ce que se noue entre eux un pacte qui est aussi une méditation sur la mort.
Le texte s’annonce comme une « histoire ». Pas un roman, certes (que s’y passe-t-il, sinon les rites au fil des jours d’un quotidien qui tisse l’intimité muette du peintre et de la servante ?). Sorte de résurgence intense d’un lointain passé réinventé (sans qu’il soit jamais nommé, le peintre évoque Vinci), recomposé, qui éclaire une grande Histoire d’une « vie minuscule », animant comme sur une scène mentale nimbée de clarté silencieuse la rencontre ardente de deux êtres entre vie, art, et mort.

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet