Ferme les yeux de François Gantheret chez Gallimard

Poursuivi par la sonnerie du téléphone portable de sa femme, peintre de talent récemment suicidée – lorsqu’il décroche, un silence béant – Jean Latran, romancier et directeur de collection discret, finit par rencontrer au bout de la ligne et au fond d’une impasse paisible une femme aveugle et inquiétante. Entre douleur et curiosité, il se sent peu à peu entraîné au-delà de son propre contrôle. Mais, présence discrète à ses côtés, sa secrétaire Eva veille.
Le ton est sobre et juste. L’histoire est bien menée, sans effets excessifs. C’est un peu court de souffle et d’invention, peut-être, mais c’est une bonne lecture - de week end électoral, par exemple.

"C’est de ce moment que les mots sont devenus blancs. Tous les mots possibles sont exsangues, et les objets aussi, ceux qu’elle a touchés, ceux qui auraient dû porter encore la chaleur de ses mains, ses pinceaux par exemple, qu’il a cent fois pris et reposés : du bois, rien que du bois dans ses doigts. Et les deux palettes, l’une d’elles portait encore une larme de mauve qu’elle devait tenter d’assombrir, un peu de noir s’y mêlait sans s’y mélanger, la pâte n’était pas sèche, elle ne s’est ternie, puis durcie que plusieurs heures après. Même cet ovale de bois verni qui semblait recéler un reste de vie, qu’il a saisi, mettant ses doigts là où elle mettait les siens, et comme elle les mettait, qu’il a porté à son visage pour en respirer l’odeur, même cela n’était plus qu’un objet inerte, sans poids, sans couleurs. Bariolé, simplement."

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