Camilleri - L'odore della notte

L’Odeur de la nuit, autre beau titre suggestif. C’était celui-là que je voulais lire, d’autant plus qu’il s’annonçait comme la suite du Voleur de goûter, où je crois avoir abandonné pour quelques années les aventures de Montalbano. À moins que ce ne soit à La Voix du violon. Lecture plaisante quoi qu’il en soit, même si, pour le coup, cette fois-ci, je suis un peu restée sur ma faim, malgré l’abondance des mets que s’offre Montalbano, entre les nunnatu (boulettes frites d’alevins pêchés clandestinement, et « constellées de points noirs : les yeux des minuscules poissons à peine nés »), ou les pirciati surépicés qui répandaient des odeurs de paradis terrestre, et autres merveilles offertes par la mer, la terre, et les talents des cuisinier(e)s sicilien(ne)s.

Peut-être y a-t-il dans ce volume quelque chose d’un peu systématique. La langue y est très sicilianisée jusqu’au cœur de la narration – au moins au début de l’histoire -. Et quoi qu’en dise le traducteur, toujours Serge Quadruppani, toujours en préambule, cette étrangeté familière m’est pour le coup apparue comme trop mécanique. (Au passage, il y a dans ce préambule un petit développement sur la nécessité « moderne » de ne pas céder à la tentation d’une traduction fluide par laquelle je me sentie, en quelque sorte, « visée ». Je conçois qu’une traduction rende les aspérités originelles de la langue d’un écrivain, fût-ce aux dépens de la grammaire classique. Je continue à protester contre le fait que le traducteur ignore les règles élémentaires de la grammaire dans sa propre langue, comme c’est évidemment le cas pour les exemples tirés de Doppler dont j’ai déjà oublié le traducteur). Cela dit, mes critiques d’aujourd’hui visent plus Camilleri soi-même en l’occurrence que Quadruppani, dont le travail est pour le moins intéressant et inventif. Mais trêve de ronchonnements.

C’est l’automne à Vigàta, Livia n’est pas là, Montalbano se sent vieillir, et un fait-divers sans importance le relance sur une enquête en sommeil, la disparition d’un homme d’affaires véreux parti avec les économies de victimes trop crédules. Avec lui a disparu un de ses employés, un beau garçon, mais l’officine bancaire est restée ouverte sous la garde d’une vierge vieillissante et irrémédiablement énamourée, qui ne peut croire ni à l’escroquerie éventuelle commise par son patron, ni à sa mort possible. Montalbano, en proie à toutes sortes de considérations « introspectives », mène son enquête avec détermination et irritation, car sa Sicile ancestrale s’effrite sous les efforts des promoteurs immobiliers : l’une des victimes du roman, et non la moindre, est un olivier centenaire abattu pour laisser place à une maison moderne sans intérêt. La fin du texte tourne au fantastique littéraire. C’est bizarre, et si ce n’est pas parfait, ce n’est pas mal fait, et l’on s’y laisse prendre.

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet