Le corps de Liane, Cypora Petitjean-Cerf

Il y a Liane, l’amie à la vie à la mort de Roselyne depuis l’école primaire, et sa mère Christine, qui fait une longue déprime, et sa grand-mère Huguette, qui aime les bébés et va apprendre la liberté et l’indépendance avec le permis de conduire. Il y a Jean-Luc, le taciturne ami de Roselyne, Lamia, la belle-fille de l’épicier arabe Hassan, et Achraf, le fils d’icelui. Il y a Eva, la bonne mousseuse et souillon et sa fille Armelle, une peste de 8 ans qui adore les beaux, les grands mots, surtout en guise d’insultes. Il y a des plats bretons en pagaïe et à satiété, des scènes à l’école et d’autres à la maison, chez Christine, chez Huguette ou chez Hassan, parce que Roselyne, sa mère ne l’aime pas, et on ne va pas chez elle. Il a Sophie et Charlotte, les peintresses qui savent transfigurer le réel et les visages. Il y a des bébés pas nés ou mal enterrés, et bien des hommes absents, très peu d’hommes, c’est le problème d’ailleurs.
Il y a un univers, indéniablement, - très gynécée -, des personnages attachants, et la générosité d’une conteuse qui ravaude les accrocs intimes de l’Histoire. Bref, un roman qui se lit bien, qui émeut, même. Mais pourquoi diable faut-il qu’il n’y ait pas de syntaxe ??? Pourquoi les phrases se succèdent-elles sans lien dans cette histoire de liens solidement renoués ? Outre le sentiment d’inconfort que donne cette juxtaposition sempiternelle – j’ai toujours peur que quelque chose lâche ou s’effondre – il y a la litanie des prénoms, qui remplacent les pronoms. C’est une syntaxe post-Duras, et ça me fatigue. Je rêve de Proust, Barbey, Bossuet ? Cette littérature de langue maigre, de vendredi, saint ou pas, envahissante chez les jeunes romanciers, il faut que cela cesse ! on meurt de faim, on trébuche à chaque pas, ça brouille la vue et ça soulève l’estomac. Que le corps de Liane, accort et sinueux, communique à la phrase de son auteur sa plénitude ! Son univers y gagnera.

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