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dimanche, octobre 21 2012

La Lune dans le rectangle du patio - Régine Detambel

C’est Martine Rassineux qui a cité Régine Detambel parmi les auteurs qui l’inspiraient dans son travail sur l’enfance. Avec qui, même, elle a travaillé autour d’une réflexion sur la rythmique des jeux d’enfants. Avec l’expo, il y a tout un éventaire de livres sur le sujet à la BM, dont nombre de la collection « Haute Enfance », chez Gallimard – très joli titre de collection. Alors comme les bouquins que je veux emprunter sont toujours dehors, j’ai pioché dans la sélection. La Lune dans le rectangle du patio. En brefs chapitres qui sont autant de fragments se construit en quelque sorte le thriller d’une psyché enfantine. Au cœur d’une vie de petite fille, ce rectangle d’eau croupie du médiocre patio familial où se reflète la pleine lune, seul reflet dégradé du ciel dans sa chambre sous une avancée de toit. Éclats d’une vie familiale populaire, années 60, avec gifles faciles, secrets des parents épiés par les trous de serrure ou un conduit d’aération, téléphone gris marqué par les traces minuscules et écœurantes des corps, pellicules, rouge-à-lèvres, projections alimentaires dans la grille…. Et puis il y a la disparition inexplicable de Trop-se-mêle, sorte de double audacieuse, binoclarde, disgracieuse de l’enfant narratrice. Avec tous les bouleversements qu’entraîne cette disparition : enquête policière, installation de la mère et du frère de Virginie-Trop-se-mêle sur le canapé du salon pour cause de proximité du téléphone… tout le tissu incohérent de la vie prend alors sens autour de cette quête qui, pour être vaine, n’en colore pas moins les plus menus épisodes du quotidien. C’est l’écume d’une enfance qui s’exprime ici, grasse, hybride, hétéroclite, « louche », étoilée de quelques bribes de merveilles, achevée sur un suspens.

Régine Detambel a été papoue, il y a bien longtemps, à la fin du siècle dernier, sans doute.

Elle a un site, beau à regarder (j’y ai fait à peine un tour), organisé, plein de propositions, de textes d’elle et des autres. Une puissante réflexion aussi, semble-t-il, sur le(s) corps.