La mémoire de la Première guerre mondiale à Saint-Quentin

mercredi, mai 25 2016

Commémorer le 11 novembre et le souvenir de la Grande guerre

La cérémonie de 11 novembre

La date du 11 novembre correspond à l'armistice de 1918. Un an après, la commémoration du 11 novembre est relativement discrète car la victoire a été célébrée le 14 juillet 1919 par un défilé militaire autour de l’Arc de triomphe et sur les Champs-Élysées. Le 2 novembre 1919, premier "jour des morts" depuis la fin de la guerre, est célébré par les familles dans un esprit solennel de recueillement et de deuil. En 1920, l'anniversaire des cinquante ans de la République donne lieu à une nouvelle forme de commémoration du 11 novembre. On célèbre le soldat inconnu, symbole et représentant de tous les soldats morts au combat et on choisit pour lieu d’inhumation l’Arc de triomphe suite à une campagne de presse. Le lieu réunit les soldats de la Révolution, de l’Empire, ainsi que des guerres du XIXe siècle. Les commandants des différents secteurs militaires durent ainsi exhumer le corps d’un soldat français non-identifié. Afin de choisir l’inconnu qui représentera tous les soldats, le 10 novembre, huit cercueils sont emmenés à la citadelle de Verdun, symbole de la résistance de l’armée française en 1916. Il revient à un jeune soldat de vingt-et-un ans de choisir le cercueil. Il choisit le sixième en y déposant un bouquet de fleurs. Le cortège se rendit ensuite vers l’Arc de triomphe en traversant Paris, accompagné par une foule immense. Le soldat inconnu ne fut inhumé que le 28 janvier 1921. Une "flamme éternelle" est ajoutée sur la tombe en 1923 : elle est ravivée tous les soirs à 18h30. Le 11 novembre fut férié pour la première fois en 1922. Cette décision fut tardive car le Parlement trouvait qu’il y avait déjà trop de jours fériés. Une partie de la société pensait que la priorité devait être la reconstruction du pays. C'est pourquoi il fallut attendre 4 ans pour que la mémoire des morts de la Grande guerre soit honorée avec cette journée nationale.

La cérémonie du 11 novembre 2014 à Saint-Quentin

La cérémonie du 11 novembre 2014 est constituée de différentes étapes. Tout d’abord, les drapeaux sont brandis par des militaires devant le monument aux morts puis des gerbes de fleurs sont déposées par les représentants officiels de la Ville devant celui-ci.

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Ensuite, une fanfare joue, accompagnée par une chorale composée principalement d’enfants, les hymnes nationaux (français, belge et anglais).

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Puis, des discours sont prononcés (en allemand, en anglais et en français) qui nous expliquent la signification de la cérémonie et nous rappellent l’horreur de la Première Guerre Mondiale. La cérémonie prend fin après plusieurs airs joués par la fanfare. Discours.jpg

Le monument aux morts de Saint-Quentin

Après la première guerre mondiale, la municipalité choisit de construire un monument aux morts à l’emplacement du moulin d’Isle qui été détruit. La construction du monument est confiée à l’architecte Paul Bigot, grand prix de Rome. Le monument aux morts a été inauguré en 1927 en présence du général Debeney, chef d’état-major général de l’armée et libérateur de la ville.

Monument vue générale

Le monument est constitué d’un mur de granit long de 31 mètres et haut de 8 mètres. Sa partie inférieure se découpe en pilotis de ciment. Sa partie supérieure comporte un large bas-relief dédié aux soldats morts dans les tranchées en 1914-1918. Deux autres, latéraux, évoquent les guerres de 1557 et de 1870. Les deux sculpteurs chargés de la partie supérieure sont Henri Bouchard et Paul Landowski.

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1870

D’autres monuments ont été édifiés à côté par la suite. Ils rendent hommage aux soldats morts en Indochine et en Afrique du Nord ainsi qu'aux martyrs du ghetto de Varsovie.

La nécropole nationale de Saint-Quentin

Une préoccupation de chaque armée : enterrer les corps

En 1914, les morts sont d'abord inhumés dans des fosses communes mais les tombes individuelles s’imposent rapidement ensuite. Après la guerre, dans les années 1920, la France s’engage dans les travaux d’aménagement de vastes nécropoles nationales.
Les décrets de septembre 1920 précisent que l'Etat prendra en charge l'inhumation des corps des soldats "Morts pour la France", appellation juridique nouvellement créée qui doit figurer sur l'acte de décès du défunt et être enregistrée par l'Etat-civil. Ils autorisent aussi les familles à demander le retour du corps des soldats. Chaque municipalité en France est alors confrontée à un afflux prévisible d'inhumations : la première solution envisagée est de créer des sections à l'intérieur ou à côté des cimetières existants mais cette approche se révèle rapidement peu satisfaisante, notamment dans les villes proches du front.
Les décrets fixent aussi la manière dont doivent être organisés ces cimetières. L’appartenance religieuse de chaque personne doit être respectée (croix latine pour les chrétiens, catholiques et protestants ; stèle rectangulaire avec l’étoile de David pour les juifs ; arc couronné d’un croissant de Lune et d’une étoile à cinq branches pour les musulmans ; stèle en plein cintre pour les athées et les agnostiques). Sur chaque stèle figure le nom et le prénom du défunt, son unité, son grade, sa date de décès (lorsque celle-ci est connue) ainsi que la mention « Mort pour la France ».
Un ou plusieurs ossuaires regroupant l’ensemble des soldats non identifiés sont aussi construits. Les tombes individuelles sont confectionnées avec un matériau propre à la nation (grès des Vosges ou granite gris pour les Allemands ; pierre calcaire pour les Britanniques ; marbre pour les Américains). Il y a 2 330 cimetières de la Première guerre mondiale en France.

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Le cimetière allemand de Saint-Quentin



L'aménagement d'une nécropole nationale à Saint-Quentin

A la fin de la guerre les lieux d'inhumation se sont multipliés d'autant plus que les cimetières municipaux ont subi de nombreuses destructions comme celui du quartier Saint-Jean.

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Source : Archives Municipales

Ces tombes militaires sont installées en périphérie car il est particulièrement difficile de circuler dans la ville à cause notamment de la destruction des ponts sur le canal.
A la fin de l'année 1923, l'armée prend la décision de regrouper tous les morts français en créant un nouveau cimetière militaire qui sera une "nécropole nationale". Le conseil municipal de la Ville du 29 janvier 1924 nous fournit des précisions sur ce projet : "Ce cimetière se trouve sur la route de Saint-Quentin à Vermand, à l'angle du chemin du Bois des Roses, à 1 km environ de la sortie de la ville, à 3 km environ de la gare. Nous avons pu savoir qu'après son organisation définitive le cimetière national français de Saint-Quentin comprendra environ 3 700 corps identifiés en tombes individuelles et 1 500 corps inconnus en ossuaire

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Source : Archives Municipales

L'opération de transfert des corps à l'intérieur de la nécropole nationale est achevée en juin 1924. Une dizaine de sépultures supplémentaires est transférée en octobre 1924, une soixantaine en 1935, une vingtaine après 1952. Il y a aujourd'hui dans la nécropole 4 947 soldats français dont 1 319 inhumés en ossuaire, auxquels s'ajoutent 125 soldats russes et 2 roumains.

Source : V. Georges et F. Pillet 14-18. Saint-Quentin. Les champs du repos, 2015.

mercredi, mai 18 2016

La mémoire de la Première guerre mondiale à travers les collections du musée Antoine Lécuyer

Le musée Antoine Lécuyer de Saint-Quentin abrite une grande partie des oeuvres du peintre saint-quentinois, Maurice-Quentin de La Tour. Une partie des collections est cependant consacrée à la Première guerre mondiale.

La pensée aux absents d'André Devambez

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André Victor Edouard Devambez (1867-1944) est un peintre, graveur et illustrateur français. En 1890, il obtient le Grand prix de Rome en peinture. Durant la première guerre mondiale, il fait partie de la section des peintres de camouflage du 1er régiment du génie en qualité de caporal. Il fut ensuite gravement blessé ce qui le contraint à retourner chez lui, où il réalisa des affiches de propagande française jusqu’à la fin du conflit.
En 1924, il commence une œuvre destinée à dénoncer les souffrances morales et physiques des soldats sur le front ainsi que des civils qui vivaient dans la peur au quotidien. Cette oeuvre est un triptyque c'est-à-dire qu'elle est constituée de trois panneaux jointifs latéralement (les panneaux latéraux constituent, lorsqu'ils sont montés sur charnières, des volets qui peuvent se refermer sur la partie centrale.)

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Sur le panneau de gauche, le décor est sombre, on distingue vaguement quelques objets et des hommes allongés sur le sol. Un soldat français lit une lettre, éclairé par une lumière qui projette son ombre sur le mur. Ce soldat incarne la solitude des soldats au front.

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Sur le panneau de droite, le décor est sombre aussi, il représente trois soldats se trouvant dans un trou d’obus. Ces soldats incarnent les conditions difficiles au front.

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Le panneau central intitulé « Le souvenir » représente trois femmes assises sur un banc, vêtues tout en noir. Ces trois femmes représentent la fille, la mère, et l'épouse, qui incarnent la douleur des civils.

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D'autres artistes

Ernest Amas

Ernest Amas est un peintre Français né en 1869 dans le nord de la France. Il fait ses études aux côtés de Matisse avant de s’installer à Paris. Il meurt en 1959.
Durant la première guerre mondiale, il fait partie de la réserve territoriale et est emprisonné en Allemagne dans des camps, où il réalise le portrait de ses compagnons en uniforme. Ces œuvres visent à faire transparaître la personnalité ainsi que la nationalité de chaque prisonnier.

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Le tableau qu’il a peint en 1915 (vue du camp III de Munster) donne un aperçu de ce qu’était la vie des prisonniers de ces camps.

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Emmanuel Croizé

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Le tableau représente Louise Hugues qui est l’épouse de François Frédéric Hugues, maire de Saint-Quentin de 1886 à 1896 et député de 1893 à 1906. Cette femme a été présidente de l’Union des Femmes de France, une société de la Croix Rouge. Elle est arrêtée en octobre 1914, accusée d’espionnage. Elle est rapidement relâchée. Elle est nommée chevalier de la Légion d’Honneur après la guerre. Emmanuel Croizé a réalisé un portrait d’elle pour l’Union des Femmes de France. Le tableau la représente en tenue d’infirmière avec sur son manteau, la décoration de la Légion d’Honneur, l’insigne de l’UFF et la Croix Rouge. Autour d’elle sont peints des gens tristes et blessés qui semblent compter sur elle. Elle y apparaît comme une héroïne.