Saint-Quentin en août 1914 › L'entrée des Allemands à Saint-Quentin

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mercredi, mars 5 2014

L'entrée des Allemands à Saint-Quentin (28 août 1914)

Elie Fleury fait un double récit de cette journée en mêlant constamment la manière dont les autorités et lui-même vivent les mêmes événements.

L’événement vu par les autorités

Le préfet de l’Aisne est présent à Saint-Quentin dès 6 heures du matin : il a été envoyé par la présidence de la République pour évacuer la riche collection de pastels de Maurice-Quentin de La Tour.
Les nouvelles ne sont pas bonnes : la receveuse des Postes de Fontaine-Notre-Dame (12 kilomètres de Saint-Quentin) téléphone à la mairie pour préciser : « Voilà les Prussiens. Ils avancent, voilà les casques à pointe ». La même information est aussi communiquée depuis Homblières (7 km).
Ces informations ne sont pas prises au sérieux par les autorités : « Elle n’y connaît rien. La receveuse est folle : ce sont des Anglais ».
Le préfet de l’Aisne passe une heure en haut du beffroi « à regarder la fumée des proches incendies et les nuages blancs des shrapnels ».
Mais, comme toutes les autorités locales, il a confiance dans les dépêches officielles qui nient l’avancée allemande. Ainsi, il transmet la nouvelle à Paris mais en précisant : « Mais ce n’est pas sérieux ». Il dit aussi au sous-préfet qui a pour ordre de quitter la ville si Saint-Quentin est menacée : « Je crois que maintenant vous pouvez rester. Il n’y aura rien ».

L'événement vu par Elie Fleury

La population est de plus en plus angoissée et croit de moins en moins les dépêches officielles qui disent qu’aucun danger ne menace Saint-Quentin.
Elie Fleury décide de partir en voiture « en reconnaissance » le matin du vendredi 28 août à 6 heures du matin pour se faire sa propre opinion. Arrivé à Marteville, à la sortie de Vermand, il croise plusieurs personnes (un agriculteur, des cyclistes) qui lui confirment l’arrivée des Allemands.
De retour à Saint-Quentin, le maire lui demande de taire cette information. Il monte à 9 heures au petit clocher de la Basilique et voit, tout autour de la ville, des villages incendiés (« les petits nuages blancs des shrapnels luisent sous le soleil dans le ciel bleu du ciel »). Il apprend aussi que des soldats allemands sont signalés à Itancourt et au cimetière de l’Est.
Face à l'absence de réaction, les Allemands peuvent entrer sans problème dans la ville. Fleury se trouve à l’Hôtel-de-Ville dans l’après-midi où « tout le monde attend ». « Il est 5 heures 25. Tout d’un coup, Delhorbe se précipite dans le cabinet du maire en criant : « Les v’là ! ». On se jette aux fenêtres et par celle de gauche on aperçoit, s’alignant tout à l’entrée de la rue Croix-Belle-Porte, de l’angle du Café de Paris au coin de la rue Saint-André, un rang d’hommes gris coiffés de casques. En arrière, un fourmillement de troupes. »
Elie Fleury écrit aussi : "On illumina le 29 août 1914 en Allemagne et ... on donna un jour de congé aux élèves des écoles quand le communiqué annonça que la ville de Saint-Quentin était prise une troisième fois : 21 octobre 1870, 19 janvier 1871, 28 août 1914"