mardi, avril 15 2014

Les réquisitions

Les réquisitions sont organisées dès le début de l'occupation par les Allemands. Les Saint-Quentinois ne sont pas surpris car ils ont connu l'occupation durant la guerre de 1870-1871 et ses nombreuses réquisitions.

Les réquisitions de marchandises

D'après Elie Fleury, nous pouvons voir que, vers la mi-septembre, les Saint-Quentinois ont été dépouillés de « peaux de la Halle aux cuirs (330 000 francs), 300 bicyclettes, 5 000 chemises, 5 000 caleçons, 5 000 paires de chaussettes, 5 000 tricots, du drap en pièce, des vêtements confectionnés, etc., etc. Il y en avait pour un million et plus. ». Cela montre que ces réquisitions sont massives et touchent des biens divers et variés.
Elie Fleury montre que les autorités municipales essaient sans cesse de négocier et d'atténuer l'ampleur des réquisitions. Il retranscrit ainsi un dialogue entre le maire M. Gibert et le directeur général des étapes qui a la responsabilité des réquisitions.
-Excellence, la ville de Saint-Quentin s'appauvrit de jour en jour : une semaine encore de ce régime et nous ne pourrons plus rien.
-Oh ! Nous trouverons bien les moyens d'obtenir ce qu'il nous faut.
-Pensez, Excellence, que la ville de Saint-Quentin compte 45 000 ouvriers et 5 000 riches peut-être, et encore sont-ils partis pour la plupart.
-Confisquez leurs biens et faites vous des ressources avec.
-La loi s'y oppose.
-Il n'y a plus de loi française.
L'intervention de la municipalité permet d'atténuer certaines réquisitions mais pas de les supprimer.
Les Allemands, dès novembre 1914, s'en prennent aux productions de l'industrie saint-quentinoise : C'est par la filature de M. Touron, sénateur, que la fête commence : 600 000 francs de coton ; puis 300 000 francs chez MM. Hugues ; 100 000 mètres chez Léon frères ; 500 pièces finies chez MM. Boudoux, etc... Chaque réquisition est précisée sur un document déposé en mairie : "Au 20 octobre, on en sera au numéro 8 000".
Les "réquisitions" portent parfois sur de petites quantités et ne semblent pas être motivées par la guerre : "Il y a de tout depuis le ballon de football jusqu'à un étui de préservatifs". "Les infirmières... se montrent d'une âpreté nerveuse...Les fourrures sont dévalisées d'abord puis tant d'aigrettes...tant de mètres de rubans et surtout tant de corsets."

Les réquisitions d'hommes

Les réquisitions peuvent aussi toucher les hommes et les otages. Nous pouvons prendre comme exemple la réquisition du 23 septembre 1914, où "on sonne et l’on affiche que tous les hommes de 18 à 48 ans devront se rendre à la Bourse du commerce à 7 heures du soir et que la ville sera frappée d’une pénalité de 500 francs par absence constatée".
Mais cette première réquisition n'aura pas lieu car on ne peut pas l'exécuter comme l'écrit Elie Fleury : "C'est inepte : le local ne recevrait pas les mobilisés d'un village moyen et commencer à 7 heures du soir une identification de cinq à six mille hommes !"
Elie Fleury écrit aussi que : "Les Allemands en reviennent à une très vieille coutume barbare, les otages". Trois notables, renouvelables tous les vingt-quatre heures, doivent être à disposition des autorités allemandes. Ils sont installés confortablement au-dessus de la pharmacie Brancourt, sur la place de l'Hôtel-de-Ville. Ils passent la journée à jouer aux cartes. Selon Fleury, "quelques Saint-Quentinois, qui ne sont pas désignés et qui s'en croyaient dignes par leur situation, sont un peu vexés". Mais ce système des otages ne dure pas longtemps (du 25 septembre au 14 octobre 1914).