La visite de la Bibliothèque Jacques Doucet était pour moi comme un voyage dans le temps. Mon cœur battait la chamade à l’idée d’entrer dans un lieu qui n’a pas coutume d’accepter des lycéens.
Les livres, soigneusement installés devant nous, représentaient comme des trésors à mes yeux, autant que ceux qui étaient entreposés tout autour de notre petit groupe. Certains ouvrages avaient été effleurés par les plus grands écrivains, et certaines œuvres comportaient même des notes ou des petits dessins écrits de la main de leurs auteurs (Verlaine, Rimbaud, Apollinaire, sur un papier à en-tête du café Tortoni) ! Cette perspective me transportait de joie, j’étais au comble de l‘excitation.
Les reliures assez anciennes et pour la plupart colorées en étaient d’autant plus fascinantes, surtout celle des Fleurs du Mal de Baudelaire ou l’œuvre d’Edgar Allan Poe, Le Corbeau, traduit par Mallarmé, dont nous avons pu admirer quelques illustrations d’Edouard Manet.
Si je devais citer mon moment favori, ce serait lorsque fut apportée spécialement pour nous une représentation picturale (réalisée par Sonia Delaunay), de la Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, écrite par Blaise Cendrars, que nous avions étudiée durant l’année. Cela représentait énormément pour nous car chaque représentation de cette œuvre est unique.