Que dire sur ce magnifique roman « d’amour » ? À part peut-être que c’est un chef-d’œuvre de la littérature classique. A la fois froid et touchant, mêlant l’amour et la guerre, Aragon a su y imprimer un réalisme qui fait tout le charme de cet ouvrage. Dans une écriture fluide, douce et harmonieuse Aragon nous livre le secret du « jeu amoureux ».
« La première fois qu’Aurélien vit
Bérénice, il la trouva franchement laide. » Voila comment Aragon débute
cette histoire qui pourtant sera une belle histoire d’amour entre Aurélien et
Bérénice. Même si parfois certains passages « traînent en longueur », nous
sommes néanmoins emportés par cette bouleversante tragédie. Tragédie dans
laquelle on retrouve à de nombreuses reprises la présence de Racine et de sa
Bérénice, qui inspire le personnage de Bérénice Morel (tel est le nom de
l’héroïne) mais certainement aussi Aragon dans l’écriture de son œuvre.
Œuvre que je qualifierais de difficile de par sa
taille (c’est un « pavé ») mais aussi par la beauté de sa langue
classique. Aragon nous fait vivre au travers de ses personnages une autre
époque, où nous pouvons découvrir des styles de vies différents des nôtres,
mais aussi des personnages historiques tels que le peintre Picasso, car le
roman mêle étroitement personnages inventés et personnages réels. Il nous fait
aussi découvrir la ville de Paris au travers des multiples errances d’Aurélien.
Mais il nous montre aussi la tristesse des âmes des hommes partis et revenus de
la guerre de 14, qui, si elle ne les a pas tués, les a détruits de l’intérieur,
et leur reconstruction est lente et douloureuse ou ne se fait jamais.
C’est donc l’une des plus belles histoires d’amour qu’il m’ait été donné de lire, Aragon a joué du réalisme comme il a su jouer des sentiments de ses personnages principaux, la mélancolie, le mal de vivre, le « goût de l’absolu ». On n’oublie pas Aurélien et Bérénice. C’est un roman envoûtant et que je relirai à coup sûr.
Photo de couverture : Man Ray, le masque de la noyée de la Seine, dont Bérénice est le reflet.