La NRF

1. Le compte rendu d’une œuvre choisie dans la bibliographie donnée en début d’année doit m’être envoyé sous la forme d’un fichier Word comprenant 500 mots en moyenne (au plus tard à la fin des vacances). Ce travail, annoncé depuis un certain temps, est obligatoire. On peut s’inspirer du « plan » suivi par Malraux :

- Définition de la tonalité ou du registre de l’œuvre.

- Evocation de l’intrigue (ici volontairement négligée, à cause de la singularité de l'œuvre mais aussi parce que le but d'un tel exercice n'est pas de raconter l'histoire).

- Réflexion sur la façon qu’a l’auteur de « traiter » ses personnages.

- Elargissement à l’univers de l’auteur sur le thème préalablement cité de la « rêverie ».

2. Vous devez avoir répondu personnellement, et au brouillon, au questionnaire distribué en classe. Il attirait votre attention sur le style de Malraux, c’est-à-dire ici, et dans un sens volontairement restreint, sur sa manière discursive singulière. J’énumère ci-dessous quelques aspects de ces formes linguistiques mentionnées dans le questionnaire (1). Je vous propose également, même très sommairement, des éléments de réponse, que nous pourrons éventuellement compléter en classe:

- Les marques de l’énonciation : 1re personne du singulier, évidemment, mais aussi 1re du pluriel au mode impératif, qui fait participer le lecteur à la démarche critique. Le temps employé est un présent omnitemporel, du même ordre que le présent gnomique ou de vérité générale.

- Le vocabulaire : riche de précisions pour approcher avec nuance le genre et le registre de l’œuvre : « merveilleux », « fantastique », « mythes », « féérie », « comédie », « lyrique », etc. Comprendre le maniement de ces catégories en suppose la maîtrise. Faites les recherches qui s'imposent pour mettre au clair tous ces points .

- La syntaxe et les modalités des phrases : importance des oppositions, antithèses qui nuancent, distinguent les notions, les idées : « non du rêve, mais de la rêverie française. » par exemple ; recours modéré à l’énumération, aux subordonnées relatives explicatives de volume croissant pour approfondir l’analyse : « Le collège paraît absurde au collégien, qui voit ce qu’il a d’arbitraire, qui devine combien il est différent des maisons où agissent les hommes.» ; goût des interrogations que l’on peut juger « rhétoriques », en ce qu’elles anticipent sur la curiosité du lecteur en formulant par avance les questions qu’il peut se poser sur le roman. Habile procédé qui tient en éveil son intérêt en ne lui apportant que des bribes de réponse.

- Corollaire du précédent : la ponctuation, aspect trop souvent négligé de l'expression, qui va de pair avec une syntaxe rigoureuse. Etudiez notamment l'art du point-virgule, et ses relations avec la virgule, dans le texte de Malraux (une observation minutieuse suffit). Pour préciser et approfondir la réflexion, je vous renvoie bien entendu à votre Grammaire descriptive de la langue française , p. 23 et suivantes, mais aussi au billet de Danièle Sallenave sur le site de l'Académie française («Bloc-notes» du 04 avril 2013) : «Défense du point-virgule» (http://www.academie-francaise.fr/dire-ne-pas-dire). Enfin, vous pourrez aussi consulter le Traité de la ponctuation française, de Jacques Drillon, Gallimard, coll. «Tel», p. 366 et suivantes. Lectures instructives et utiles.

- Les références culturelles : « Ubu », « Nuit de Walpurgis », mentions d’auteurs (Alain-Fournier, Hoffmann, Mac Orlan), qui réfèrent à un paysage littéraire capable d’entrer en résonance avec le roman évoqué. Vous l'avez compris, Malraux n'exhibe pas vainement ses connaissances. Il met en relation des œuvres, fait des allusions littéraires pertinentes pour mieux servir sa cause : rendre compte avec justesse - et justice - du roman de Vialatte.

3. Procéder à une telle analyse ne suffit pas, même s'il n'est pas négligeable de prendre conscience, par ce biais, des potentialités de la langue. Vous ne devez pas oublier la situation d’énonciation dans laquelle Malraux est placé. Ses choix stylistiques dépendent d’une éthique, qui n’est autre que son propre rapport, existentiel, à la lecture et à l’écriture. C’est pourquoi il vous est demandé de lire beaucoup. Car imiter n’est pas singer (Du Bellay joue de cette distinction avec virtuosité dans la Défense et illustration de la langue française), mais s’approprier, « digérer » cette matière première qu’est la langue littéraire. C’est pourquoi le pastiche n’est pas une fin en soi, il n’est qu’une étape de ce patient travail. Vous n’y parviendrez que progressivement, à votre rythme. Sans doute, l’art est long et difficile mais passionnant !

4. Multipliez donc les lectures des chroniques de L’œil de la NRF pour répéter l’exercice, et lorsque vous aborderez la rédaction de votre propre compte rendu, ne vous souvenez plus que d’une seule chose : ce qu’il faut retenir de l’œuvre choisie et pour quelles raisons ! Ecrivez avec simplicité, mais en recherchant toujours le mot juste.

(1) Je rappelle que dans ce questionnaire assez détaillé de petits exercices « pastichiels » étaient proposés. Leur faible degré de difficulté vous permettait –vous permet encore car il n’est pas trop tard pour les faire ! – de les corriger vous-mêmes.

La suite, en cours...