Les Lettres en Hypokhâgne – Lycée Pierre d’Ailly- Compiègne
Ce blogue se veut un lieu de réflexion et d’échanges avec les Hypokhâgneux. Reynald André CHALARD est professeur de Lettres supérieures au lycée Pierre d’Ailly de Compiègne. Organisateur de deux cycles de conférences, LES RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY ainsi que LES LUNDIS DE PIERRE D'AILLY, il enseigne également la littérature aux spécialistes de Lettres modernes en Khâgne (Première supérieure). Contact : Reynald-Andre.Chalard@ac-amiens.fr
2024-03-13T15:02:00+01:00
Reynald André CHALARD
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Pour introduire à l'étude de la poésie de Clément Marot, « L'Adolescence clémentine», visitez l'exposition de la BnF : « L'Invention de la Renaissance. L'Humaniste, le Prince et l'Artiste.»
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2024-02-27T16:50:00+01:00
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Reynald André Chalard
Cours
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Renaissance_expo.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Catalogue de l'exposition</strong>, sous la direction de Jean-Marc Chatelain et Gennaro Toscano, Bibliothèque nationale de France, 2024.</p>
<p>Dates de l'exposition : 20 février - 16 juin 2024 (Bibliothèque Richelieu).</p>
<p><strong>Quelques informations sur le contenu de cette magnifique exposition et présentation du plan de travail sur l'oeuvre de Marot</strong>.</p>
<p>Quatrième de couverture du catalogue de l'exposition :</p>
<p><em>Du XIVe au XVIe siècle, l'Europe est le théâtre d'une effervescence intellectuelle et artistique que la postérité a consacrée sous le nom de Renaissance. Venu d'Italie, l'humanisme en est le moteur. Sa paradoxale modernité tient au fait qu'il crée du neuf en prétendant faire retour au passé reculé du monde antique grec et latin : les lettrés entreprennent de reconstituer le legs de ses textes littéraires, philosophiques et scientifiques, les artistes s'efforcent de faire revivre ses formes, les princes puisent à son prestige les termes d'une nouvelle affirmation de leur puissance.</em></p>
<p><em>De ce grand changement culturel, le livre est l'instrument central, tant comme véhicule du savoir que comme objet de luxe et de collection. À travers l'histoire de la chasse aux manuscrits anciens, du travail de leur copie et de leur édition, de l'entreprise de leur réunion dans des bibliothèques prestigieuses, ainsi que par la mise en lumière des liens étroits que l'art du livre entretient avec l'ensemble des manifestations artistiques du temps (peinture, sculpture, art de la médaille et de la reliure, gravure et dessin), il s'agit ici de pénétrer dans l'univers de pensée des humanistes de la Renaissance pour mieux comprendre les ressorts d'un mouvement qui a infléchi de manière décisive le destin culturel de l'Occident.</em></p>
<p>Sur l'exposition, consultez <a href="https://www.bnf.fr/fr/agenda/linvention-de-la-renaissance#bnf-l-exposition-en-bref">le site de la BnF</a>.</p>
<hr />
<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XVIe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur la poésie</em>.</p>
<p><strong>Clément MAROT, <em>L’Adolescence clémentine</em>, éd. Gallimard, coll. « Poésie / Gallimard » (édition de Frank Lestringant). ISBN : 978-2070345304</strong>.</p>
<hr />
<p><strong>HISTOIRE LITTÉRAIRE</strong></p>
<p><strong>La Littérature de la Renaissance</strong></p>
<p><em>L’Adolescence clémentine</em> (1532), de Clément MAROT :</p>
<p><strong>LE RIRE DE LA POÉSIE</strong></p>
<p>De Boileau à Nerval (1), du XVIIe au XIXe siècles, critiques et poètes s'accordent à voir en Clément Marot un des pères de la poésie française. Son <em>élégant badinage</em> (Boileau), sa <em>grâce</em> (La Fontaine, Nerval), son <em>style naturel</em> (La Bruyère), <em>sa virtuosité et sa gaieté</em> (Théodore de Banville) ont contribué à sa popularité et ont fécondé bien des oeuvres postérieures, dans l'inspiration et dans le ton. Rimailleur, irrévérencieux et très <em>raillard</em>, son art de la <em>gaudisserie</em> s'illustre en des formes et des registres poétiques multiples et, par le biais de la parodie et de la satire, manie l'ironie avec une efficace et audacieuse subtilité. Valet de chambre du Roi et poète officiel, trop inféodé au pouvoir, selon Victor Hugo, il prit cependant des risques et en paya parfois durement le prix. Notre étude tentera de cerner la richesse de sa production poétique, qui va de la transformation de l'héritage des Grands Rhétoriqueurs au maniement inventif et personnel de la chanson, en passant par la traduction (par exemple de la première églogue des <em>Bucoliques</em> de Virgile), au poème étonnant du <em>Temple de Cupido</em>, influencé par le <em>Roman de la Rose</em>...</p>
<p>(1) Dans son œuvre intitulée <em>La Bohême galante</em> (1852), Nerval se livre à une réflexion générale sur <em>Les Poètes du XVIe siècl</em>e, où sont notamment commentés quelques grands principes de la <em>Défense et illustration de la langue française</em>. Le XIXe siècle poétique a en effet recherché une source d’inspiration dans la poésie de la Renaissance en générale, et dans la poésie de Ronsard en particulier, sans que Marot soit oublié. Vous lirez ce texte fort intéressant dans les deux éditions suivantes : Gérard de NERVAL, <em>Œuvres</em>, éd. Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1986, pages 937-957, et à partir de la page 942, pour l’analyse de la <em>Défense</em>. Et Gérard de NERVAL, <em>Œuvres complètes</em>, éd. Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», tome III, 1993, pages 244-264, et à partir de la page 249, pour l’analyse de la <em>Défense</em>.</p>
<hr />
<p><strong>TRAVAUX</strong> : les références renvoient à l’édition de Frank Lestringant, Gallimard, «Poésie», 2007. Attention : le corpus est délimité par les pages 41-241.</p>
<p><em>Ce programme de travail ne contient que des propositions. Il ne constitue pas en lui-même le plan du cours</em>. <em>Des précisions supplémentaires sur les travaux à mener seront données en classe</em>.</p>
<p>1. <strong>Exercices préalables</strong> (cf. bibliographie) : De ce recueil d’œuvres de jeunesse – l’adolescence, l’un des cinq âges de la vie depuis les Romains, étant comprise entre quinze et trente ans – Marot dit lui-même dans sa préface (p. 45) qu’il n’est « autre chose qu’un petit jardin, que je vous ai cultivé de ce que j’ai pu recouvrer d’arbres, d’herbes et de fleurs de mon printemps. ».</p>
<pre></pre>
<p>a) <strong>Il est d’abord indispensable de se renseigner sur notre poète et de le situer</strong>, à l’aide d’un manuel scolaire ou du <em>Dictionnaire des Lettres françaises du XVIe siècle</em>, par exemple, dans l’histoire de la poésie. Il est tout aussi nécessaire de connaître le contexte politique et religieux du règne de François Ier, si l’on veut bien comprendre ce qui se dit, par exemple, dans les épîtres IX et X (Marot accusé d’avoir mangé du lard en carême et jeté en prison au Châtelet).</p>
<p>b) <strong>Vous pourrez ensuite lire, crayon en main, la « préface » de Franck Lestringant</strong>, responsable de l’édition de <em>L’Adolescence clémentine</em> chez Gallimard. Vous vous familiariserez par la même occasion avec votre livre, en remarquant qu’il contient d’autres œuvres de Marot, dont la lecture est recommandée : <em>L’Enfer, Déploration de Florimond Robertet et Quatorze Psaumes</em>.</p>
<p>c) <strong>Exposé</strong> : <strong>Pour avoir quelques lumières sur l’intertexte de <em>L’Adolescence clémentine</em></strong> (travail en petits groupes possible) : l’héritage médiéval avec, notamment <em>Le Roman de la Rose</em> ; la poésie de François Villon, en lisant les poèmes célèbres du <em>Testament</em> ; la tradition pétrarquiste, et l’art poétique des Grands Rhétoriqueurs, que pratiqua assidûment Jean Marot, le père de notre poète, lui-même Grand Rhétoriqueur.</p>
<p>d) <strong>Vous ne manquerez pas de consulter les éléments importants du paratexte éditorial</strong> : la <strong>chronologie</strong> (p. 321-334), <strong>la note de poétique</strong> de F. Lestringant (p. 335-342) sur les formes poétiques, la métrique et les rimes propres à notre recueil, les <strong>notes</strong> qui éclaircissent ou commentent tel mot ou tel passage des poèmes (p. 343-390) ainsi que le <strong>glossaire</strong> (p. 391-400).</p>
<p>Tout au long du cours :</p>
<p>e) <strong>Afin de mieux comprendre la « rhétorique » de Marot</strong>, vous penserez à feuilleter <em>Les Figures du discours</em> (éd. Champs-Flammarion), de Pierre Fontanier, le <em>Gradus</em> (éd. 10/18), de Bernard Dupriez, ainsi que <em>Traités de poétique et de rhétorique de la Renaissance</em> édités au Livre de poche par Francis Goyet. On consultera également avec profit les deux ouvrages suivants : AQUIEN, Michèle, <em>Dictionnaire de poétique</em>, Le Livre de Poche, 1993, 344 p. (« Les Usuels de Poche » n° 8073) et MOLINIÉ, Georges, <em>Dictionnaire de rhétorique</em>, Le Livre de Poche, 1992, 350 p. (« Les Usuels de Poche » n° 8074). Vous chercherez dans ces dictionnaires la définition des genres et formes poétiques suivants : <em>épître, complainte, ballade, rondeau, chanson, élégie</em>, par exemple.</p>
<pre></pre>
<p>2. <strong>Synthèse</strong> : Quelles remarques pouvez-vous faire sur la composition du recueil ? Comment le recueil s’est-il constitué ? Quels en sont les « genres poétiques » ? Quels registres ou tonalités y sont à l’œuvre ?</p>
<p>3. <strong>Synthèse</strong> : En quoi consiste l’art de la raillerie (« gaudisserie ») dans <em>L’Adolescence clémentine</em> ? De qui et de quoi le poète se moque-t-il ? De quelle(s) manière(s) ?</p>
<p>4. <strong>Synthèse</strong> : Qu’est-ce qu’un « rondeau » ?</p>
<p>5. <strong>Explications de texte</strong> : « Rondeau I », p. 175. Et « Rondeau parfait », p. 216.</p>
<p>6. <strong>Synthèse</strong> : Une partie de <em>L’Adolescence clémentine</em> s’intitule « Chansons » (pp. 219-241). Qu’est-ce qu’une chanson poétique et quelles en sont les différents aspects dans cette section ? Vous trouverez matière à réflexion dans GOYET, Francis, <em>Traités de poétique et de rhétorique de la Renaissance</em> édités au Livre de poche (cf. « L’art poétique » de Thomas Sébillet) et dans BUFFARD-MORET, Brigitte, <em>La Chanson poétique du XIXe siècle – origine, statut et formes</em>, éditions des Presses Universitaires de Rennes, 2006, notamment aux pages 69-76, qui sont consacrées à Marot.</p>
<p>7. <strong>Explication de texte</strong> : « Ballade V », pp. 156-157.</p>
<p>8. <strong>Explication de texte</strong> : « Épître IX » « Marot à Monseigneur Bouchart », pp. 126-127.</p>
<p>9. <strong>Explication de texte</strong> : « Épitaphe XIII », « De Jehan Serre », pp. 146-147.</p>
<p>10. <strong>Synthèse</strong> : Quelle place l’amour occupe-t-il dans <em>L’Adolescence clémentine</em> ?</p>
<p>(...)</p>
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<p><strong>Indications bibliographiques</strong></p>
<p><strong>Édition de référence</strong> :</p>
<p>Clément Marot, <em>L’Adolescence clémentine</em>, éd. Frank Lestringant, Gallimard, «Poésie », 2007, p. 41-241, ISBN : 978-2-07-034530-4.</p>
<p><strong>Sur MAROT</strong> :</p>
<p>SAINTE-BEUVE, <em>Panorama de la littérature française</em> (portraits et causeries), éd. Le Livre de Poche, coll. « La Pochothèque ».</p>
<p>DEJEAN, Jean-Luc, <em>Clément Marot</em>, Fayard (biographie).</p>
<p>Consulter les articles consacrés à notre poète dans différents dictionnaires dont le <em>Dictionnaire des Lettres françaises du XVIe siècle</em>.</p>
<p><strong>Sur <em>L'Adolescence clémentine</em></strong> :</p>
<p>LESTRINGANT, Frank, <em>Clément Marot de L'Adolescence à L'Enfer</em>, Paradigme, 2006.</p>
<p><strong>Sur MAROT et la poésie de la Renaissance</strong> :</p>
<p>WEBER, Henri, <em>La Création poétique au XVIe siècle en France</em>, Nizet, 1955.</p>
<p>RIGOLOT, François, <em>Poésie et Renaissance</em>, éditions du Seuil, coll. « Points », 2002.</p>
<p><strong>Œuvres de poètes antérieurs et contemporains</strong> :</p>
<p>Cf. les conseils de lecture dans <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/07/26/Lire-en-Hypokh%C3%A2gne-%3A-proposition-d-une-LISTE-qui-ne-devrait-pas-donner-le-vertige...">le billet du 28 décembre 2020 intitulé Lire en Hypokhâgne</a> : Pétrarque, Villon, les Grands Rhétoriqueurs, Du Bellay, Ronsard, entre autres …</p>
<p><strong>Sur le XVIe siècle littéraire</strong> :</p>
<p>AULOTTE, Robert (sous la direction de) : <em>Précis de littérature française du XVIe siècle</em>, Presses Universitaires de France.</p>
<p><strong>La langue du XVIe siècle</strong> :</p>
<p>FRAGONARD, Marie-Madeleine, et KOTLER, Éliane, <em>Introduction à la langue du XVIe siècle</em>, Nathan / Université, coll. « 128 », 1994.</p>
<p>GOUGENHEIM, Georges, <em>Grammaire de la langue française du XVIe siècle</em>, éd. Picard.</p>
<p>HUGUET, Edmond, <em>Dictionnaire de la langue française du XVIe siècle</em>, éd. Champion, en 7 volumes (1925-1966).</p>
<p>GREIMAS, A., <em>Dictionnaire du Moyen français</em>, éd. Larousse.</p>
<p><strong>Versification</strong> :</p>
<p><strong><em>Pour une initiation</em></strong> :</p>
<p>AQUIEN, Michèle, <em>La Versification appliquée aux textes</em>, Nathan / Université, coll. « 128 », 1993 (réédition chez Armand Colin).</p>
<p>BUFFARD-MORET, Brigitte, <em>Précis de versification</em>, Armand Colin, coll. « Cursus », 2011 (2e édition).</p>
<p><strong><em>Deux références majeures</em></strong> (outre celle - très importante - de Benoît de Cornulier, plus difficile à manier en HK, mais dont nous présenterons quelques notions cardinales) :</p>
<p>MAZALEYRAT, Jean, <em>Éléments de métrique française</em>, Armand Colin.</p>
<p>ELWERT, W. T., <em>Traité de versification française</em>, Klincksieck.</p>
<p><strong>Rhétorique, figures de style</strong> :</p>
<p>FONTANIER, Pierre, <em>Les Figures du discours</em>, éd. Champs-Flammarion.</p>
<p>DUPRIEZ, Bernard, <em>Gradus</em>, éd. 10/18.</p>
<p>GOYET, Francis, <em>Traités de poétique et de rhétorique de la Renaissance</em> édités au Livre de poche.</p>
<p>AQUIEN, Michèle, <em>Dictionnaire de poétique</em>, Le Livre de Poche.</p>
<p>MOLINIÉ, Georges, <em>Dictionnaire de rhétorique</em>, Le Livre de Poche.</p>
<hr />
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La 11e édition des «Rencontres de Pierre d'Ailly» a eu lieu jeudi 30 novembre 2023 : «LITTÉRATURE, DROIT ET MORALE : LIBERTÉ ET RESPONSABILITÉ DE L’ÉCRIVAIN. ». Conférence d'Emmanuel Pierrat, avocat au barreau de Paris et écrivain.
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2023-12-21T18:48:00+01:00
2024-01-11T23:51:41+01:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/PierratEmmanuel1.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Emmanuel Pierrat</strong>, dans la salle <em>Imago Mundi</em> du lycée Pierre d'Ailly, jeudi 30 novembre 2023.</p>
<p><strong>La 11e édition des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2023/05/23/11e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB%2C-jeudi-30-novembre-2023-%3A-%C2%ABLITT%C3%89RATURE%2C-DROIT-ET-MORALE-%3A-LIBERT%C3%89-ET-RESPONSABILIT%C3%89-DE-L%E2%80%99%C3%89CRIVAIN.-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-d-Emmanuel-Pierrat%2C-avocat-au-Barreau-de-Paris-et-%C3%A9crivain."><em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></a> a été à nouveau un grand succès. </strong> <strong>Maître Emmanuel Pierrat</strong> nous a brillamment instruits sur les rapports que la littérature entretient avec la morale et le droit, en regard de l’œuvre de Louis-Ferdinand Céline - dont le <em>Voyage au bout de la nuit</em> mis au programme - et plus particulièrement des manuscrits retrouvés. Qu'il en soit vivement remercié !</p>
<p>Je remercie <strong>Madame Bourrelier</strong>, Proviseur du lycée Pierre d'Ailly, qui a permis ces «Rencontres» et en a présenté la 11e édition. Merci également à tous les participants, qui nous ont fait l'honneur et le plaisir de leur présence : Mme Martine Miquel, Conseillère régionale des Hauts-de-France ; Mme Valérie Faranton, I.A.-IPR de Lettres (Académie d’Amiens) ; Mme Angélique Bodin-Berlingué, Proviseure adjointe du lycée Pierre d’Ailly ; merci à mes collègues et aux élèves et étudiants présents.</p>
<p>Merci enfin à <strong>Axelle D.</strong>, KH ; à <strong>Solenn L.</strong> et à <strong>Alex B</strong>., tous deux HK, pour leurs belles photos !</p>
<hr />
<p><strong>AVANT LA CONFÉRENCE, EN SALLE IMAGO MUNDI</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>De gauche à droite : <strong>Mme Valérie Faranton</strong>, I.A.-IPR de Lettres (Académie d’Amiens) ; <strong>Mme Angélique Bodin-Berlingué</strong>, Proviseure adjointe du lycée Pierre d’Ailly ;
<strong>Reynald André Chalard</strong>, Professeur de Lettres en CPGE, organisateur et animateur des RENCONTRES DE PIERRE D’AILLY ; <strong>Mme Évelyne Bourrelier</strong>, Proviseur du lycée Pierre d’Ailly ; <strong>Mme Martine Miquel</strong>, Conseillère régionale des Hauts-de-France ; <strong>Maître Emmanuel Pierrat</strong>, Avocat au barreau de Paris et Écrivain.</p>
<hr />
<p><strong>EXORDE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel3_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel9_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel10_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Évelyne Bourrelier,</strong> proviseur, présentant la 11e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, devant un auditoire très attentif, en salle <em>Imago Mundi</em>.</p>
<hr />
<p><strong>CONFÉRENCE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel4_m.jpg" alt="" /><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel21_m.jpg" alt="" /></p>
<p><strong>Maître Emmanuel Pierrat</strong> et Reynald André Chalard</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel8_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Des <strong>Hypokhâgneux</strong> et des <strong>Khâgneux</strong> très studieux.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel5_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Valérie Faranton</strong>, Inspectrice Pédagogique Régionale -Inspectrice d'Académie, prenant la parole pour conclure la conférence.</p>
<hr />
<p><strong>Pour introduire la conférence</strong> <em>(discours de présentation de Reynald André Chalard)</em> :</p>
<p>Madame la Conseillère Régionale des Hauts-de-France, Madame l'Inspectrice Pédagogique Régionale de l'Académie d'Amiens, Madame le Proviseur, Madame le Proviseur adjoint, chers collègues et amis, très chers Étudiants des Classes Préparatoires littéraires et élèves du lycée Pierre d’Ailly,</p>
<p>Nous voilà réunis aujourd’hui pour la <strong>11e édition des « Rencontres de Pierre d’Ailly »</strong>. Merci à tous de votre présence.</p>
<p><em>Les enjeux de ces « conférences »</em> - je le rappelle - <em>tournent autour de la littérature, de l’expérience esthétique <ins>et</ins> éthique qu’elle nous propose, de ce qu’elle nous donne à penser de notre rapport au monde, des problématiques qu’elle permet de croiser, au carrefour de la philosophie, de l’histoire et plus largement des sciences humaines</em>. (Page à consulter sur ce blogue: <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/Les-Rencontres-de-Pierre-d-Ailly">LES RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</a>).</p>
<p>C’est <strong><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/11/25/Revue-des-Deux-Monde-%3A-Michel-Cr%C3%A9pu%2C-Du-truc.-Aux-%C3%A9l%C3%A8ves-du-lyc%C3%A9e-Pierre-d%E2%80%99Ailly-de-Compi%C3%A8gne%2C-en-souvenir-d%E2%80%99une-belle-rencontre.">Michel Crépu</a></strong>, ancien directeur de <em>La Nouvelle Revue Française</em>, qui a inauguré en 2013 ces <em>Rencontres de Pierre d’Ailly</em> par une réflexion stimulante sur la culture face à la technique ; et notre dernier invité était, en 2022, <strong><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/12/15/Les-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-ont-eu-lieu-jeudi-24-novembre-2022-%3A-%3A-%C2%AB-Le-Roman-in%C3%A9puisable-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Philippe-Le-Guillou%2C-romancier-et-essayiste%2C-prix-M%C3%A9dicis-1997-pour-%C2%ABLes-Sept-noms-du-peintre%C2%BB.-Rattrapage-de-la-8e-%C3%A9dition.">Philippe le Guillou</a></strong>, romancier et essayiste, auteur d’une œuvre importante et notamment du roman <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, dont il était venu nous entretenir. Cette même année 2022, nous avons également eu la joie d’accueillir notre ancien Khâgneux, <strong><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/05/28/La-10e-%C3%A9dition">Mohamed Mbougar Sarr</a></strong>, devenu écrivain et lauréat du prix Goncourt 2021, pour son roman <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>.</p>
<p>Le thème de réflexion choisi cette année porte, en partie, sur une des œuvres au programme de l’Hypokhâgne, <em>Voyage au bout de la nuit</em>, de Louis-Ferdinand Céline. En effet, le titre de cette conférence ne peut réduire le questionnement à un seul auteur et nécessite une mise en perspective historique qui ouvre le corpus à d’autres œuvres : <strong>« Littérature, Droit et Morale : liberté d’expression et responsabilité de l’écrivain »</strong>. Et comme les problèmes que nouent les trois premières notions ne sont pas que littéraires et philosophiques mais aussi – et peut-être surtout – <em>judiciaires</em>, c’est tout naturellement à un avocat spécialiste de la propriété intellectuelle que j’ai pensé pour nous aider à comprendre, sur le plan du Droit, la nature du conflit qui existe entre la liberté de création de l’écrivain et sa responsabilité devant la loi. Nous avons donc l’immense plaisir d’accueillir <strong>M. Emmanuel Pierrat</strong> qui, à tous les sens du terme, est un maître dans ce domaine. Avocat au barreau de Paris, ancien Membre du Conseil National des Barreaux et ancien Membre du Conseil de l’Ordre, il est titulaire depuis 1997 du certificat de spécialisation en droit de la propriété intellectuelle. Au nombre de vos nombreuses et diverses activités, je précise aussi que vous êtes ancien Conservateur du Musée du Barreau de Paris, Secrétaire Général du Musée Yves Saint-Laurent Paris et membre du Comité scientifique des Musées des Arts Décoratifs. Vous exercez également les fonctions d’agent d’artistes littéraires et artistiques et de Délégué aux données personnelles et vous co-présidez les Jurys du Conseil National des Barreaux délivrant la mention de spécialisation « Droit de la propriété intellectuelle.» Vous êtes l’auteur de chroniques judiciaro-littéraires dans différents journaux et médias et vous intervenez très régulièrement sur LCI comme consultant. Président et juré de nombreux prix littéraires (notamment des prix Antoine Bernheim de la Fondation pour le Judaïsme français, du Prix Sade), vous êtes enfin un écrivain : outre les nombreux ouvrages juridiques de référence sur le droit de l’édition, la liberté d’expression, le droit du commerce du livre, le droit à l’image, vous avez signé plusieurs essais sur la culture, la justice ou encore la censure, et vous êtes l’auteur de plus d’une douzaine de romans et récits, ainsi que de traductions de l'anglais et du bengali. C’est dire la chance que nous avons de <strong>voir se combiner, dans votre rapport à la littérature, l’expertise judiciaire, par nature professionnelle, et l’expérience littéraire, par principe personnelle</strong>. Nous ne manquerons d’ailleurs pas de vous questionner sur cet entrelacs énigmatique qui fait que l’avocat-écrivain que vous êtes défend des écrivains. C’est évidemment une autre manière d'approcher la littérature, car il s’agit d'abord pour vous de la <em>défendre</em> – à partir de ceux qui la font-, compte tenu des limites que la loi lui impose, et de <em>l'illustrer</em> ensuite, en vous risquant à produire des oeuvres littéraires. Et vous nous direz alors, si la connaissance que vous avez de ces « limites » - longuement inventoriées et développées dans votre ouvrage <em>L’Auteur, ses droits et ses devoirs</em> (folio / essais 2020) – influence a priori votre propre écriture, et de quelle manière.</p>
<p>Et sur ce point – c’est-à-dire sur le point des <strong>limites</strong>, <strong>juridiques</strong> d’abord, <strong>morales</strong> ensuite -, il faut dire que la mentalité contemporaine est ambiguë voire contradictoire. Nous sommes en effet les héritiers d’une tradition littéraire qui, au moins depuis <strong>le siècle des Lumières</strong>, revendique la liberté de penser – donc de s’exprimer – contre la morale et le régime politique établis, surtout quand ils sont tyranniques et qu’ils imposent dogmatiquement une <em>doxa</em>, qui peut s’incarner dans la loi, contraindre les comportements et asservir les esprits. La laïcisation de notre société depuis la Révolution a cependant favorisé, avec l’appui d’un Montesquieu, d’un Voltaire, d’un Diderot et d’un Rousseau <strong>l’émancipation intellectuelle</strong> en affranchissant la pensée de sa tutelle religieuse et théologico-politique. Et c’est par le truchement de la littérature, et l’affirmation d’un <em>modus scribendi</em> qui remonte à l’Antiquité, <strong>la satire</strong>, que nos auteurs s’y sont souvent essayés, <strong>en risquant de passer sous les fourches caudines de la censure littéraire, comme leurs illustres prédécesseurs, écrivains en tous genres, d’Ovide à Racine, en passant par Rabelais et Molière, entre autres</strong> : les <em>Lettres persanes, La Religieuse, Candide, Le Dictionnaire philosophique</em> ont porté des voix courageuses contre l’intolérance et le fanatisme politique et religieux, en voulant montrer qu’<strong>il n’y a pas d’idées absolues mais seulement des idées discutables</strong>. Voilà de quoi passer au crible de la critique les valeurs morales les mieux assises : le risque était grand, et c’est l’histoire de la littérature qui nous en montre les victoires aussi bien que les défaites. L’autonomisation progressive du champ littéraire (cf. Bourdieu), avec le romantisme, au XIXe siècle, a fait germer des œuvres d’autant plus singulières que s’imposait une conception du sujet singulier et unique : c’est le roman qui en représente les grandeurs et les misères, dans une société qui cependant remet ce sujet en question en tant qu’individu : être soi, ne pas être réduit à ses origines en aspirant à devenir quelqu’un d’autre, ne pas se perdre dans la foule anonyme a eu parfois un prix cher payé : les Julien Sorel et les Emma Bovary qui hantent le roman « réaliste » le savent bien. Les lecteurs que nous sommes comprennent et admettent que ces héros ou anti-héros de romans transgressent des interdits pour accomplir leurs désirs. Ils savent, ces lecteurs, que le mal, sous toutes ses formes, doit être affronté par ses personnages, parce que c’est le ressort même de la fiction narrative, même quand elle tourne ce mal en dérision, que d’en déployer les nombreuses et subtiles modalités. C’est pourquoi <em>lire</em> a toujours été perçu par les autorités comme un acte dangereux : <strong>de Platon au procureur Pinard, qui instruisit les procès de Baudelaire et de Flaubert pour outrage à la morale publique, un soupçon pèse sur la littérature, dont on veut condamner les effets corrupteurs sur les âmes qui oseraient s’y aventurer</strong>. Le roman a ainsi mauvaise presse à l’âge classique, et s’il acquiert ses lettres de noblesse au XIXe siècle, il n’en est pas moins surveillé par le pouvoir. Car - nous le savons bien - la littérature dispense une connaissance pratique, elle influence notre perception du monde par les représentations qu’elle nous en propose. Au début de sa <em>Poétique</em>, Aristote affirme que l’homme, dès l’enfance, est naturellement enclin à <strong>« imiter »</strong> et qu’il prend plaisir aux « imitations » : c’est aussi par <em>l’imitation</em>, ajoute-t-il, qu’il acquiert ses premières connaissances. Et <strong>l’anthropologue René Girard nous a montré l’importance du désir mimétique dans l’économie des passions et dans les relations interhumaines</strong>, importance qui n’est pas réductible au mimétisme caricatural d’un Don Quichotte. Que les écrivains appartiennent au camp de <strong>l’art pour l’art</strong>, - expression schématique mais qui signifie bien que la littérature est ici exclue du collectif et de l’événementiel – ou qu’ils se rangent dans celui de <strong>l’intellectuel engagé</strong>, à chaque fois qu’ils transgressent dans leurs œuvres les limites imposées par la religion, les mœurs (essentiellement ce qui touche à la sexualité) et au pouvoir politique en place, ils sont jugés susceptibles de troubler l’ordre social.</p>
<p>Aussi, comme l’a bien expliqué Gisèle Sapiro, « la responsabilité pénale de l’écrivain est étroitement liée à la croyance collective dans son influence et dans son rôle. » (<em>La Responsabilité de l’écrivain</em>, Seuil, 2011, p. 10). Ce pouvoir accordé à l’écrit, depuis la Révolution française, a produit une législation qui demande à l’écrivain de « répondre » de ses œuvres, considérées par la loi comme des « actes ». Nous en connaissons tous les conséquences judiciaires, notamment à travers les procès célèbres du XIXe siècle, (notamment ceux de Baudelaire, Flaubert et Eugène Sue) auxquels vous avez consacré un livre intitulé <em>La Littérature en procès</em> (éditions Hermann, 2021), et dont vous nous parlerez sans doute. On impute au romancier Flaubert, par exemple, les vices supposés de ses personnages, auxquels on l’identifie, surtout si ces derniers ne sont pas condamnés moralement par le narrateur, et on juge immédiatement coupable le poète (Baudelaire), qui exprime à la première personne son accointance avec le mal et les péchés qui en découlent. Que redoute-t-on à chaque fois ? La contagion morale, la corruption des esprits, la perdition des âmes, l’outrage aux bonnes mœurs. <strong>Vous nous direz, cher Maître, sur quel socle s’est fondée cette notion de « responsabilité » de l’écrivain</strong>. Il paraît évident que chaque époque a ses limites et ses interdits, qui ne sont pas forcément ceux de la suivante : « Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà », affirmait Blaise Pascal dans ses <em>Pensées</em>. Sans pour autant s’enfermer dans un relativisme qui n’explique pas tout, nous aurions tendance à penser que si Baudelaire et Flaubert publiaient de nos jours respectivement <em>Les Fleurs du Mal</em> et <em>Madame Bovary</em>, ils ne seraient pas condamnés : la loi française ne punit plus la débauche ou la « peinture lascive » de la sensualité des « Femmes damnées » (titre de Baudelaire), ni l’adultère ni le blasphème ; de même que Rimbaud et Verlaine ne seraient plus inquiétés par la police pour délit d’homosexualité. Les tensions morales que révèlent ces procès, et ce qu’elles nous apprennent de la société, révèlent aussi une conception de la littérature elle-même habitée par l’<em>ethos</em> de l’écrivain, <strong><em>ethos</em> qui peut entrer en conflit avec la morale collective</strong>. Et nous verrons que si nous ne considérons pas la littérature comme un simple divertissement mais comme une tentative d’élucidation des grands problèmes humains, ce conflit est inévitable. La question de la liberté de création et d’expression se pose donc constamment.</p>
<p>Et elle se pose aujourd’hui, plus que jamais, et de manière inouïe. Car nous ne vivons plus à l’époque où la <em>NRF</em> de Gide octroyait tous les droits à la littérature, affirmant que rien ne lui était opposable. Plus récemment, Milan Kundera écrivait aussi, dans <em>L’Art du roman</em>, que la littérature devait suspendre le jugement moral et nous faire oublier les considérations de vérité, en ne renvoyant qu’à elle-même. Le lecteur de Cervantès n'aurait ainsi de compte à rendre à personne, sauf à Cervantès. De même le romancier, qui se réclamerait de la littérature européenne et se sentirait le frère de Rabelais, de Diderot, de Flaubert, de Dostoïevski, de Kafka, de Proust … Longtemps, nous avons suivi André Gide, à nouveau, lorsqu’il affirme dans son étude sur Dostoïevski, que « c’est avec les beaux sentiments que l’on fait de la mauvaise littérature » (<em>Essais critiques</em>, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 637). Les beaux sentiments nous rattrapent, et comme l’enfer, ils sont pavés de bonnes intentions. En effet, au nom du respect des personnes, de leurs croyances ou tout simplement de ce qu’elles revendiquent d’être, des associations, des individus demandent que, dans l’art et la littérature, les représentations ou les idées qui – selon eux – les contestent, les critiquent ou les insultent, une censure soit exercée. Cette censure, qui prétend défendre des causes pourtant légitimes (comme la cause des femmes victimes de violences sexuelles cf. MeToo en 2017), chasse et condamne devant le tribunal médiatique tout ce qui est jugé moralement répréhensible ou offensant pour une minorité ou une communauté. <strong>C’est le terme de <em>Cancel culture</em> (auquel vous avez consacré en 2022 un ouvrage dont le titre conserve l’expression anglo-américaine, malgré – dites-vous – votre amour de la francophonie) qui, depuis la fin des années 2010 est couramment employé pour désigner ce phénomène qui nous vient des universités d’Amérique du Nord et se manifeste d’abord par l’indignation, la dénonciation, l’ostracisation, le boycott puis la censure</strong> (cf. Hubert Heckmann, <em>Cancel !</em>, éditions Intervalles, 2022, p. 9). <strong>Cette culture de la censure</strong> – ou « culture de l’effacement », traduction de <em>cancel culture</em> préconisée par l’Académie française - (« culture » au sens de « comportements au sein d’une communauté fédérée par des valeurs », Heckmann, p. 11) <strong>ne risque-t-elle pas d’aboutir à un effacement de la culture</strong> (p. 20) ? Donnons <strong>quelques exemples</strong>. <strong>Réécrire</strong> la fin de <em>Carmen</em>, l’opéra de Bizet, comme le fit en 2018 le metteur en scène Leo Muscato, en permettant à l’héroïne éponyme de tuer son amant jaloux au lieu qu’elle soit tuée par lui, dans l’intention de dénoncer les violences faites aux femmes ; <strong>brûler</strong> les albums de Tintin, jugés racistes et sexistes ; <strong>éliminer</strong> d’un titre célèbre d’Agatha Christie le mot « nègre » ; réécrire – comme l’a demandé son éditeur – certains textes de Roald Dahl, afin d’en supprimer les termes « liés au poids, à la santé mentale, à la violence, au genre et à l’ethnie » ; <strong>empêcher</strong> en 2019 une représentation des <em>Suppliantes</em> d’Eschyle à la Sorbonne, au motif que l’on verrait dans le maquillage des comédiens un blackFace révélateur -pense-t-on - d’une mise en scène racialiste pour ne pas dire raciste, <strong>toutes ces formes de censure qui ne finissent pas de juger les œuvres du passé</strong> – en dénonçant un Voltaire antisémite, un Rousseau misogyne, les romans du XIXe siècle, à cause, notamment, de « l’antisémitisme chez Balzac, de (...) l’invisibilisation des femmes ou (de) l’instrumentalisation des femmes dans toute la littérature du XIXe » (propos tenus sur France Culture le 10 mars 2023 par Tiphaine Samoyault) <strong> - exigent à présent l’innocence aussi bien de l’auteur que de ses productions</strong>. Dès lors, qu’en est-il, à nouveau, de la responsabilité de l’écrivain ? Doit-elle être prévenue par des « sensitivity readers » (« lecteurs « sensibles » ?), dont le modèle a été importé des États-Unis, et dont la tâche consiste à « s’assurer que l’auteur n’a pas écrit par inadvertance quelque chose de mal informé ou de mal avisé » (cf. texte 7 du livret : Emmanuel Pierrat, <em>Les Nouveaux justiciers. – Réflexion sur la cancel culture</em>, éditions Bouquins /essais, 2022, p. 165-166.) ? Ces « lecteurs » d’un nouveau genre, désormais en exercice dans la patrie littéraires de Rabelais, Molière et Voltaire – tous les trois censurés et poursuivis à leur époque par le pouvoir théologico-politique -, sont devenus les bras armés du Droit de nombreux éditeurs qui redoutent les procès que l’on pourrait leur intenter pour œuvre non conforme à la nouvelle morale. <strong>Faut-il en appeler à l’auto-censure de l’écrivain lui-même, qui par ce biais se signalerait par son « engagement » dans une cause et ferait ainsi amende honorable ? Engagement et responsabilité, est-ce, d’ailleurs, la même chose ?</strong> Dans son essai sur <em>La Responsabilité des intellectuels</em> (Calmann-Lévy, 2001), l’historien Tony Judt préfère la notion de « responsabilité » à celle d’engagement, qui implique, selon lui, l’alignement à un parti ou à une idéologie. Sartre lui-même, lors de la première session de la Conférence générale de l’Unesco, en 1946, a tenté de définir cette « responsabilité de l’écrivain », tributaire de la situation politique de la France au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, en la situant dans deux régimes d’expression différents, qui sont « deux manières de prendre les mots » mais aussi « deux attitudes » (<em>La Responsabilité de l’écrivain</em>, Verdier, 1998, p. 10. Cette thèse sera reprise et développée en 1948 dans son essai <em>Qu’est-ce que la littérature ?</em>) : la prose et la poésie, c’est-à-dire « l’utilisation des mots pour nommer » (pour la prose) et l’utilisation des « mots comme des objets dont l’assemblage produit certains effets, comme des couleurs sur une toile en produisent. » (pour la poésie) (p.11). Selon lui, « on ne peut donc pas reprocher à un poète de nier, en tant que poète, ses responsabilités d’homme », même si en tant que poète l’engagement reste pour lui possible. <strong>Mais même dans ce cas, la poésie peut-elle échapper aux nécessités redoutables du partie pris et à ses conséquences sur la littérature ?</strong> Le poète breton Guillevic, longtemps compagnon de route communiste d’un autre grand poète, Aragon, a pu parler de « poésie encagée », à propos d’une partie de sa production poétique pendant et après la guerre. Dans <em>Recherche de la base et du sommet</em> (1971), le poète résistant René Char fait cet aveu déchirant, en 1943 : « ... Je veux n'oublier jamais que l'on m'a contraint à devenir – pour combien de temps ? – un monstre de justice et d'intolérance, un simplificateur claquemuré, un personnage arctique qui se désintéresse du sort de quiconque ne se ligue pas avec lui pour abattre les chiens de l'enfer. Les rafles d'Israélites, les séances de scalp dans les commissariats, les raids terroristes des polices hitlériennes sur les villages ahuris, me soulèvent de terre, plaquent sur les gerçures de mon visage une gifle de fonte rouge. Quel hiver ! Je patiente, quand je dors, dans un tombeau que des démons viennent fleurir de poignards et de bubons. » (<em>Œuvres complètes</em>, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 633.). <strong>L’engagement ainsi conçu peut ainsi coïncider avec une attitude morale remarquable voire louable, mais il ne garantit en rien la qualité et la valeur de l’œuvre littéraire</strong>.</p>
<p>Nous voyons bien que <strong>les épineux problèmes ainsi soulevés par les interactions du Droit et de la Morale</strong>, quand il s’agit de littérature – et plus généralement d’art – <strong>réclament de notre part nuances et « esprit de complexité »</strong> (qui est selon, Milan Kundera, le propre du roman. <em>L’Art du roman</em>, folio, p. 30). <em>Nuances et esprit de complexité</em>, pour ne pas confondre la défense politique ou sociale d’une cause avec l’objet littéraire qui en traite, laissant encore la liberté à la littérature de s’affronter au Mal en le disant et en le questionnant par les représentations qu’elle peut en déployer dans la poésie, dans le roman et au théâtre (le genre de l’essai posant d’autres questions et réserves que l’on pourra discuter à l’occasion de cette conférence) : <em>Nuances et esprit de complexité</em>, donc, pour ne pas faire un second procès à Baudelaire, comme l’imagine avec beaucoup de drôlerie en 2002 l’écrivain Raymond Jean, qui raconte, dans son roman intitulé <em>Clotilde ou le second procès de Baudelaire</em> (éditions Actes Sud), les remous que suscite l’étude de certains textes de l’auteur des <em>Fleurs du Mal</em>, proposés par un professeur de Lettres un tantinet provocateur : on y apprend que Baudelaire aurait écrit des insanités sur les femmes, la drogue, les Belges et les pauvres... Question posée par les parents d’élèves : ne faudrait-il pas prévenir la jeunesse contre ces propos inadmissibles que l’on trouve successivement dans ses journaux intimes, <em>Les Paradis artificiels</em> ou dans ses <em>Petits poèmes en prose</em> ? <em>Nuances et esprit de complexité</em>, pour bien comprendre <strong>ce qui se joue dans la lecture, qui révèle l’importance éthique de la littérature, aspect ignoré ou minimisé voire inexplicablement séparé de la dimension esthétique de l’œuvre</strong> : face au livre, le lecteur n’est jamais passif, il est travaillé par les débats moraux que provoquent, par exemple, des personnages de roman, et son mimétisme n’est pas simple singerie mais relève d’une alchimie subtile ! <em>Nuances et esprit de complexité</em>, pour <strong>élaborer une éthique de la compréhension et de l’intelligence</strong> qui ne passe pas pour une compromission avec quelque forme d’oppression que ce soit ; <em>nuances et esprit de complexité</em> enfin (provisoirement) pour ne pas considérer qu’il n’y a de littérature possible que celle qui fait la promotion du <em>Bien</em> : mais qu’en serait-il d’une telle littérature ? Et que nous vaudrait cette allégeance à un <em>Bien</em> ainsi dogmatiquement défini ?</p>
<p>Que peut donc, que fait donc, le Droit,<strong> cher Maître Pierrat</strong>, dans ce nouveau dispositif d’accusation morale des œuvres littéraires, dans la mesure où les parties contestataires peuvent en user pour condamner les écrivains et les artistes ? C’est à votre expertise professionnelle reconnue dans le monde judiciaire que nous nous en remettons aujourd’hui pour que vous nous proposiez quelques pistes de réflexion sur cette difficile question. Fort de votre expérience d’avocat – mais aussi d’écrivain -, <strong>vous nous parlerez de cette nouvelle censure</strong> (dont le principe n’est pourtant pas nouveau, comme l’atteste l’Histoire !), <strong>censure qui procède de nouvelles attitudes morales – et comment la loi y répond</strong> -, <strong>puis vous aborderez le cas de Louis-Ferdinand Céline</strong> (au programme de l’HK avec <em>Voyage au bout de la nuit</em>), <strong>à travers ses manuscrits récemment retrouvés</strong>, et que vous connaissez bien, notamment pour avoir défendu contre les ayants droit de Céline Jean-Pierre Thibaudat, qui en a révélé l’existence et les a mis à la disposition des éditions Gallimard. Vous y avez d’ailleurs consacré un livre intitulé <em>L’Affaire Céline</em>, qui sera publié en 2024. Vous nous direz peut-être, à cette occasion, ce que ces manuscrits nous apprennent de Céline, et comment ils nous permettent de mieux comprendre son œuvre, sans pour autant que cela excuse ou nous fasse oublier ses pamphlets abjects. Pour tout cela, <strong>cher Monsieur Pierrat</strong>, nous vous remercions sincèrement !</p>
<p>R.A. C.</p>
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<p><strong>LECTURES</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel11_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Étienne G., KH</strong>, lisant un extrait de <em>Nouvelles morales, nouvelles censures</em>, Gallimard, 2018, p. 20-21 :</p>
<p>« Rappelons pourtant la nécessité de distinguer les œuvres — et leurs interprétations par les musiciens et les acteurs — de leurs auteurs ; sauf à vider nos bibliothèques des romans du collabo Céline, de toutes les fictions (pour enfants et adultes) du pédophile Lewis Carroll, des poèmes de l’assassin François Villon, des récits du voleur Malraux, de la prose du voleur Jean Genet, etc.
Réfléchir, savoir, comprendre, rappeler, ne pas oublier ; tout cela est utile. Mais un créateur n’est ni un candidat aux élections ni une personne que le lecteur ou le spectateur doit épouser.
Nous entrons dans une nouvelle ère, où la censure ne restreint plus la diffusion d’une œuvre en raison de son message, mais décide qu’une œuvre est inacceptable au seul motif que son auteur ne peut être jugé ou rejugé. Dans cette nouvelle ère, celui qui écoute ou goûte les compositions, les tableaux ou les romans des fautifs devient à son tour suspect, voire coupable de ses crimes ou comportements immoraux.»</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel13_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Juila F., HK</strong>, lisant un extrait de <em>Les Nouveaux justiciers. – Réflexion sur la cancel culture</em>, éditions Bouquins /essais, 2022, p. 9-10 :</p>
<p>«Ces esprits aussi bien-pensants qu’extrémistes, de plus en plus nombreux, ont commencé par censurer des créations au motif que leurs auteurs, parfois même leurs interprètes, auraient eu un comportement répréhensible, voire moralement blâmable ou odieux. De plus en plus de penseurs hexagonaux, et beaucoup de clients du café du Commerce, se sont mis à imiter les pires campus américains qui dénoncent la supposée « appropriation culturelle », expurgent les classiques et déboulonnent toutes les statues. Cette nouvelle morale ne considère plus comme nécessaire de distinguer les œuvres – et les interprétations des œuvres livrées par les musiciens et les acteurs – de leurs auteurs.»</p>
<p>Question posée à <strong>Maître Pierrat</strong> :</p>
<p>Les extraits que nous venons de lire pose la question de savoir si l’on peut distinguer l’œuvre de l’auteur. Gisèle Sapiro dit oui et non (<em>Peut-on dissocier l’œuvre de l’auteur ?</em> Seuil, 2020, p. 227-233). Oui : l’œuvre échappe à son auteur, l’identification de l’un et de l’autre n’est jamais complète. Par ailleurs, elle affirme la nécessité de toujours contextualiser les œuvres, de ne pas les déshistoriciser… Non : l’œuvre porte toujours des traces de la vision du monde de son auteur. Et sans censurer les œuvres de l’esprit, elle émet des réserves pour celles qui inciteraient à la haine raciale et au sexisme, qui font l’apologie du viol et de la pédocriminalité, « à condition de distinguer apologie et représentation », écrit-elle. Et je crois que vous n’êtes pas d’accord avec elle sur ce point. Pouvez-vous préciser sur quoi porte votre désaccord (esquissé dans <em>Les Nouveaux justiciers</em>, Bouquins, 2022, p. 44-46) ?</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel12_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Victor A., HK</strong>, lisant un extrait de <em>L’Auteur, ses droits et ses devoirs</em>, Gallimard, coll. « Folio / Essais », p. 305-310 (L’AFFAIRE ARAGON ET LE DÉLIT
DE PROVOCATION AU MEURTRE DANS UN BUT DE PROPAGANDE ANARCHISTE) :</p>
<p>André Breton, en mars 1932, sort une plaquette relatant « l’affaire » : « Misère de la poésie ». Aragon, à qui Breton a présenté le texte, s’est montré « objectivement d’accord », mais peu enclin à laisser passer une telle publication où son poème est qualifié « de circonstance », correspondant peu à l’étiquette surréaliste. (…). Breton se sent gêné par la forme très réaliste que prend Front rouge. Mais il revient sur la tentative d’inculpation à l’aide de la loi de 1894 : « En leur qualité de poètes il appartient aux surréalistes de montrer la nouvelle iniquité que cette entreprise constitue, le sensible progrès qu’elle marque en 1932 dans la volonté d’application des lois scélérates. » La publication de Front rouge a entraîné de nombreux débats parmi les intellectuels. André Gide est convaincu que « la pensée est aussi dangereuse que les mots », et n’a pas signé la pétition en faveur d’Aragon : « Et puis, pourquoi demander l’impunité de la littérature. Quand j’ai publié Corydon, j’étais prêt à aller en prison. La pensée est aussi dangereuse que des actes. Nous sommes des gens dangereux. C’est un honneur que d’être condamné sous un tel régime. » Quant à Jean Paulhan, il déclare : « Je signerais volontiers une pétition qui réclamerait pour l’écrivain toutes les responsabilités et tous les droits jusqu’à celui d’aller en prison. »</p>
<p>Question posée à <strong>Maître Pierrat</strong> : la responsabilité de l’écrivain. Assumer son œuvre jusqu’à accepter d’aller en prison pour elle. Avez-vous été confronté à de tels cas en tant qu’avocat ?</p>
<hr />
<p><strong>ÉCHANGES AVEC LA SALLE</strong></p>
<p><strong>Nos élèves des classes préparatoires littéraires</strong> posent des questions à <strong>Maître Emmanuel Pierrat</strong>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel14_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Victor A</strong>., HK.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PierratEmmanuel15_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Baptiste F</strong>., KH.</p>
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<p><strong>REMERCIEMENTS ET REMISE DES CADEAUX</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/PierratEmmanuel17.JPG" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Zoé D.-D.</strong>, HK, et <strong>Emma M.</strong>, HK, offrant à <strong>Emmanuel Pierrat</strong> <em>Ainsi parlait Zarathoustra</em>, de Nietzsche, dans la «Bibliothèque de la Pléiade», ainsi que <em>Histoires extraordinaires de l'art - De Vermeer à Louise Bourgeois</em>, de Judith Benhamou, pour le remercier de sa venue à Compiègne.</p>
<hr />
<p><strong>REGARDER ÉCOUTER LIRE</strong> :</p>
<p>J'ai demandé à <strong>Emmanuel Pierrat</strong> quel tableau et quelle musique pourraient donner une image de ce qu'il cherche (ou aime) en littérature et en art. Voici les références qu'il a bien voulu m'indiquer (Man Ray, Aragon, chanté par Léo Ferré) :</p>
<p><strong>ARTS PLASTIQUES</strong> :</p>
<p><strong><em>Portrait imaginaire de D. A. F. de Sade</em></strong> (1938), par Man Ray.</p>
<p><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Portrait-imaginaire-de-D.-A.-F.-de-Sade-Man-Ray-1938.jpg"><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Portrait-imaginaire-de-D.-A.-F.-de-Sade-Man-Ray-1938_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p><strong>Un tableau</strong> : le portrait de Sade par Man Ray. En lien direct avec mon intérêt pour les oeuvres de Sade et le surréalisme.</p>
<p><em>Commentaire d'Emmanuel Pierrat</em>.</p>
<p><strong>MUSIQUE</strong> :</p>
<p><strong><em>«L'Affiche rouge»</em></strong>, d'Aragon, poème chanté par Léo Ferré (extrait du <em>Roman inachevé</em> - 1956 -, d'abord intitulé «Strophes pour se souvenir») :</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
<p><strong>Une musique</strong> : «L'Affiche rouge», chanson écrite par Louis Aragon. Je suis un des rédacteurs de l'appel à l'entrée du couple Manouchian au Panthéon que quelques amis et moi-même avons adressé au Président de La République il y a deux ans ; la cérémonie aura lieu le 21 février prochain. C'est là encore, un texte magnifique, mis en musique et interprété avec un immense talent par Léo Ferré. Une affiche de propagande visant un groupe de résistants étrangers, un poème et une musique, bref, une part de l'histoire de France.</p>
<p><em>Commentaire d'Emmanuel Pierrat</em>.</p>
<hr />
http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2023/12/22/La-11e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-jeudi-30-novembre-2023-%3A-%C2%ABLITT%C3%89RATURE%2C-DROIT-ET-MORALE-%3A-LIBERT%C3%89-ET-RESPONSABILIT%C3%89-DE-L%E2%80%99%C3%89CRIVAIN.-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-d-Emmanuel-Pierrat%2C-avocat-au-barreau-de-Paris-et-%C3%A9crivain.#comment-form
http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?feed/atom/comments/296
11e édition des «Rencontres de Pierre d'Ailly», jeudi 30 novembre 2023 : «LITTÉRATURE, DROIT ET MORALE : LIBERTÉ ET RESPONSABILITÉ DE L’ÉCRIVAIN. ». Conférence d'Emmanuel Pierrat, avocat au barreau de Paris et écrivain.
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2023-10-05T17:41:00+02:00
2024-02-28T19:17:23+01:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Pierrat1.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>EMMANUEL PIERRAT - © PHOTO JOËL SAGET / AFP</p>
<hr />
<p><strong>11 e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY (2013-2023)</strong></p>
<p><strong>Conférence de Me Emmanuel Pierrat sur la liberté d'expression de l'écrivain, prévue jeudi 30 novembre 2023, à 14h00, au lycée Pierre d'Ailly, à Compiègne, en salle <em>Imago Mundi</em></strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>«LITTÉRATURE, DROIT ET MORALE : LIBERTÉ ET RESPONSABILITÉ DE L’ÉCRIVAIN»</strong></p>
<p><strong>Emmanuel Pierrat est avocat au barreau de Paris, spécialiste en droit de la propriété intellectuelle</strong>. Il dirige un cabinet spécialisé dans le droit de la culture et les affaires de censure. Ancien Conservateur du Musée du barreau de Paris, il est Secrétaire Général du Musée Yves Saint-Laurent Paris et membre du Comité scientifique des Musées des Arts Décoratifs. Il est en outre l’auteur de plus d’une dizaine de romans et récits, de nombreux essais, et rédige un blog judiciaro-littéraire, alimenté chaque semaine, sur le site de livreshebdo.fr</p>
<p><strong>L’objectif de cette nouvelle conférence sera de s’interroger, avec Emmanuel Pierrat, sur la liberté d’expression et sur la responsabilité de l’écrivain face au droit, qui les définit, en les codifiant</strong>. Appartenant à un autre ordre, <strong>la morale</strong> peut renforcer ou contester le droit pour imposer son jugement à la littérature. Voilà qui exige, pour la réflexion, une rapide mise en perspective historique.</p>
<p><strong><em>Morale de l'oeuvre, morale de la lecture</em></strong></p>
<p>Et sans doute faut-il commencer par distinguer <strong>morale collective</strong> et <strong>morale individuelle</strong>, faire une différence entre l’ensemble des valeurs et des règles d’action qui s’imposent aux groupes humains par le bais d’appareils prescriptifs comme la famille, l’École, l’Église, et les variations individuelles des pratiques de cette morale car, comme l’écrit Michel Foucault dans le tome II de son <em>Histoire de la sexualité</em> (<em>L'Usage des plaisirs</em>, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », tome II, p. 759.) : « Un code d’actions étant donné (…), il y a différentes manières de « se conduire » moralement, différentes manières pour l'individu agissant d'opérer <strong>non pas simplement comme agent, mais comme sujet moral de cette action</strong>. » (<em>Je souligne</em>). Un aspect de ce que Foucault nomme la « substance éthique » de l’individu se forge ainsi par la lecture, dont le modèle occidental est commandé, depuis Platon (<em>République</em> livres III et X) et saint Augustin (<em>Confessions</em>, livres I et III) par <em>le principe ascétique</em> (amélioration éthique de l’individu) et <em>le principe esthétique</em> (expérience littéraire, plaisir de la lecture). Comme l’a montré Brian Stock dans son livre intitulé <em>Lire, une ascèse</em> (éd. Jérôme Million, 2008), ces deux principes ont été subordonnés l’un à l’autre dans des proportions qui ont pu varier au cours de l’histoire, du Moyen Âge d’Abélard, au romantisme d’un Coleridge et d’un Schopenhauer, à travers <strong>la notion d’imagination créatrice</strong>. Le plaisir que nous éprouvons à lire des fictions ne provient pas que de la forme esthétique de l’œuvre, mais elle vient aussi de la connaissance de l’homme que celle-ci nous procure et des « manières d’être » ou d’agir qu’elle nous propose. Ainsi, Marielle Macé peut affirmer ceci, dans <em>Façons de lire, manières d’être</em>, Gallimard, 2011 : « Un livre peut en effet acquérir la force d’une autorité, montrer qui ou quoi désirer, et doubler en cela notre formation intérieure d’une antériorité active ; il devient une sorte de conseil, et même d’oracle, un passé choisi qui a tout à la fois la magie de la prophétie, l’inquiétante étrangeté du pressentiment, et la justesse d’une préfiguration. Cela ne peut pas avoir lieu sans excès, sans emportement complet du sujet, car le désir témoigne, comme c’était le cas pour Marcel (Proust), d’un véritable entêtement : ‘Lire, c’est désirer l’œuvre, c’est vouloir être l’œuvre, c'est refuser de doubler l'œuvre en dehors de toute autre parole que la parole même de l’œuvre.’(2) Possibilisation de soi et acquiescement à l’injonction d’un dehors, ici, sont volontairement mêlés. » p. 191. René Girard a par ailleurs montré que le désir mimétique peut avoir pour origine un certain contact avec la littérature, ce qui est alors susceptible de rendre l'oeuvre et la lecture dangereuses, pour la société et pour l'État, selon que l'influence incite ou non le sujet à l'action : de Paolo et Francesca - imitant Lancelot et Guenièvre, dans la <em>Divine comédie</em> de Dante - à Emma Bovary, en passant par Don Quichotte et les lecteurs de <em>Werther</em>, ce mimétisme anthropologique est redoutable, quels que soient ses formes et ses effets, fastes ou néfastes, car il peut remettre en question l'ordre politico-social (cf. notamment <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>, de R. Girard et <em>De l'horrible danger de la lecture</em>, de Voltaire, dans un contexte autrement particulier).</p>
<p><strong><em>L'Écrivain face à la Loi</em></strong></p>
<p>Dans ce cadre si particulier et si intime de la lecture, on peut penser, comme Pascal, que « la vraie morale se moque de la morale » (fr. 671, éd. Sellier). Le lecteur est alors reconnaissant envers les auteurs qui lui permettent de se constituer en « sujet moral » par la lecture, fût-ce au prix de bouleversements intérieurs, adhésions ou rejets. L’histoire littéraire montre que le prix à payer pour une telle liberté, aussi bien pour les auteurs que pour ceux qui les lisent, peut être parfois très cher. Car <strong>la morale publique</strong>, celle qui régit les « bonnes mœurs » codifiées par <strong>le droit positif</strong>, et <strong>la morale religieuse</strong> – ou les deux combinées, selon les époques – ont le pouvoir de fixer les limites de ce qui peut s’écrire et donc se lire : un écrivain ne peut donc pas tout dire impunément, <strong>sa responsabilité est engagée</strong>, comme l’a étudié Gisèle Sapiro, dans son livre intitulé précisément <em>La Responsabilité de l’écrivain</em> (Seuil, 2011), dans lequel elle établit, notamment, <strong>une généalogie de la morale littéraire</strong>. Et force est de constater que dans ce domaine, les avis divergent voire s’opposent ou se combattent : parfois, nous pourrons trouver que la censure est légitime, parfois nous serons consternés par ce que nous estimerons être une injustice, à moins que nous ne remettions en question la possibilité de censurer l’art, mais alors selon quelles modalités, ou à quel prix ? Car si nous n’avons <strong>aucun doute aujourd'hui sur les cas de Rabelais, Molière, Racine, Voltaire, Flaubert, Baudelaire</strong>, par exemple, nous sommes moins assurés de notre jugement pour des œuvres plus récentes, comme celle de <strong>Louis-Ferdinand Céline</strong>, dont les pamphlets abjects compliquent – voire interdisent pour certains – la lecture de <strong>l’œuvre fictionnelle</strong>, même <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Obnubilés par des cas extrêmes, qui peuvent légitimement susciter notre indignation, nous avons oublié, à tort ou à raison, qu’au début du siècle une revue prestigieuse, la <em>Nouvelle Revue Française</em>, animée Par André Gide, Jean Schlumberger, puis plus tard par Jacques Rivière, Jean Paulhan et Marcel Arland, avait marqué la littérature (fiction) du sceau de l’autonomie : « <strong>Ici, la littérature a tous les droits</strong>. <strong>Rien ne lui est opposable. Ni la religion ni la politique, ni les mœurs ni la morale, ni la tradition ni la mode</strong>. (…) Seuls comptent l’intensité d’écriture et son pouvoir de révélation, cette singularité dans l’ordre de la connaissance et du discours qu’on lui accorde. (…) La littérature autorise comme aucun autre langage. Elle peut tout dire. Elle est dégagée de la toile des responsabilités que tisse la vie sociale, familiale et citoyenne. Elle est libérée de l’obligation de faire sens sans délai et de se rendre utile à la communauté. Ici se manifeste l’aventure de l’esprit qui se sonde, s’interroge, cherche à se connaître et à se maîtriser, mais prend aussi le risque de se perdre. (…) Alban Cerisier, <em>Une histoire de La NRF</em>, Gallimard, 2009, pages 9. L'écrivain du XXIe siècle devrait-il maintenant renoncer à cette liberté, au nom de sa nécessaire <strong>responsabilité</strong>, <strong>qui ne relèverait pas seulement du respect de la loi mais d'une éthique que l'écriture aurait intériorisée ? Et selon quelles modalités ?</strong></p>
<p><strong><em>Vers une « moralisation » de la littérature ?</em></strong></p>
<p>Notre époque, au contraire, cherche à « moraliser » les œuvres littéraires, en leur appliquant de nouveaux critères de recevabilité, comme le respect des personnes dans toutes leurs singularités : l'écriture devrait alors s'interdire toute représentation négative de ces traits spécifiques à chacun. La bonne moralité de l'auteur, au civil comme au pénal, devient aujourd'hui un critère sélectif prégnant, même quand l'auteur concerné a été jugé et puni par la justice. Reste à savoir si ces critères moraux, nécessaires dans les relations interhumaines, sont pertinents pour évaluer une œuvre d’art : ne serions-nous pas menacés par la « moraline », (Nietzsche, <em>L’Antéchrist</em> notamment §2) : à savoir le prêt-à-penser moral (expression de Jean-Charles Darmon) - la bien-pensance, dirait-on aujourd'hui -, qui est à l’éthique ce que la langue est à la parole : une réalité externe qui précède l’auteur, et avec laquelle ce dernier devrait composer ? La question est complexe, et les réponses possibles différentes selon les auteurs, les œuvres, les époques. <strong>C’est pourquoi l’expertise de Maître Emmanuel Pierrat nous sera précieuse</strong> : ayant défendu des écrivains -en étant un lui-même – et ayant étudié l’histoire de la censure jusqu’à nos jours, il nous dira ce qu’il pense de <strong>la notion de responsabilité, s’il faut distinguer les œuvres de leurs auteurs, s’il ne faut juger les œuvres que sur le fondement de critères propres à l’art, en quoi consiste <em>la cancel culture</em> et si l’avenir de la littérature pourrait en pâtir</strong>. L'exposé se déroulera en trois temps : tout d'abord, Maître Emmanuel Pierrat nous présentera quelques <strong>jalons historiques de la censure littéraire</strong> ; puis il se concentrera sur <strong>les droits et les devoirs de l'écrivain aujourd'hui</strong> ; enfin, dans ce cadre, il nous instruira sur les <strong>manuscrits retrouvés de Louis-Ferdinand Céline</strong>, auxquels il vient de consacrer un livre intitulé <em>L'Affaire Céline</em>. Qu'il soit d'ores et déjà remercié de sa généreuse et prometteuse conférence !</p>
<p><strong><em>L'oeuvre littéraire et la problématique du Mal</em></strong></p>
<p>Nous pourrons ainsi mieux <strong>problématiser</strong> notre lecture du <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Il s’agira d’essayer de lire un roman situé, historiquement, et dont l’auteur appartient à « Une grande génération » (titre homonyme d'un ouvrage d'Henri Godard), dans laquelle figurent aussi Malraux, Guilloux, Giono, Montherlant, Malaquais, Sartre, Queneau et Claude Simon. <strong>On posera – à propos des œuvres de ces écrivains - la double question de l’engagement et du « moralisme »</strong> : <strong>1)</strong> d’un côté, la dénonciation – par Julien Benda, auquel s’associe Sartre et Caillois- d’une littérature pure, incarnée par Paul Valéry et Jean Giraudoux, dont le supposé repli aurait en partie mené à la guerre (cf. <em>La France byzantine ou le triomphe de la littérature pure</em>, 1945) ; <strong>2)</strong> de l’autre, la querelle qui oppose, en 1932, deux types d’écrivain, autour de la notion de <strong><em>moralisme</em></strong> (versus <em>immoralisme</em>), sa présence dans les œuvres, <strong>Jacques Rivière en critiquant les méfaits, Ramon Fernandez (le père de Dominique) le défendant</strong>, le premier étant plus influencé par <em>le freudisme</em>, le second par <em>l’humanisme classique</em> (cf. Jacques RIVIÈRE et Ramon FERNANDEZ, <em>Moralisme et Littérature</em>, éditions R.-A Corrêa, 1932.). <strong>Céline</strong> sera donc étudié selon cette perspective, et son roman approché dans <strong>ses aspects aussi bien littéraires que linguistiques</strong>. Ni l’histoire ni la sociologie ne suffiront cependant pour comprendre <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Sans tomber dans la doxa célinienne, nous tenterons de voir si ces propos de Georges Bataille, dans <em>La Littérature et le Mal</em> (1957) éclairent – et dans quelle mesure – notre lecture : « La littérature n'est pas innocente, et, coupable, elle devait à la fin s'avouer telle. L'action seule a les droits. La littérature, je l'ai, lentement, voulu montrer, c'est l'enfance enfin retrouvée. Mais l'enfance qui gouvernerait aurait-elle une vérité ? Devant la nécessité de l'action, s'impose l'honnêteté de Kafka, qui ne s'accordait aucun droit. Quel que soit l'enseignement qui découle des livres de Genet, le plaidoyer de Sartre pour lui n’est pas recevable. A la fin la littérature se devait de plaider coupable ! » Que signifie alors <em>écrire</em>, que veut dire enfin <em>lire</em> ? Nous ne pourrons pas éviter ces questions, et c'est en cela que la réflexion engagée par cette nouvelle conférence sera passionnante.</p>
<p><strong><em>Maître Emmanuel Pierrat : de l'expertise professionnelle à l'expérience littéraire</em></strong></p>
<p><strong>Comme c'est le cas à chaque « Rencontre »</strong>, nous interrogerons notre invité sur son parcours intellectuel, ses passions et, en l'occurrence, son travail d’avocat et d’écrivain, sur les rapports qu’ils entretiennent dans l’élaboration d’une parole qui, dans les deux cas, recherche une vérité. Mais <strong>Emmanuel Pierrat</strong> est aussi un grand lecteur. Il a consacré l’un de ses ouvrages à la lecture : <em>Aimer Lire – une passion à partager</em>, éditions Du Mesnil (2012) : «… écrire force à mieux lire. Et à aimer les livres. » p. 132.</p>
<p><strong><em>La démarche du cours</em></strong> :</p>
<p>Cette conférence est articulée au cours d’<strong>Histoire littéraire</strong> sur le <em>Voyage au bout de la nuit</em> de <strong>Céline</strong>, que les Hypokhâgneux auront lu dans l’édition recommandée (Ce cours du lundi fera écho au cours <strong>Genres / Notions</strong> du vendredi sur le roman / récit / nouvelle). L’examen préalable des procès de Flaubert et de Baudelaire n’aura d’autre but que d’enclencher une réflexion sur <strong>l’histoire de la censure littéraire</strong> - qui concerne aussi Céline -, telle que nous en avons cerné les contours ci-dessus. Avec <em>une double exigence</em>, qui respecte à la fois le caractère social et individuel du fait littéraire : <strong>historiciser la réflexion</strong>, certes, mais aussi <strong>penser les problèmes que pose l’œuvre</strong> à l’aune de <strong>sa métaphysique implicite</strong>. Voilà qui semble le meilleur rempart contre le séparatisme techniciste et l’émiettement des savoirs : le <em>technicisme</em> est la maladie scolaire du <em>formalisme</em>, la réduction du texte à ses procédés, ce qu'il faudrait pouvoir combattre, ne serait-ce que pour redonner goût à la littérature. L'étude des formes littéraires est tout à fait légitime - et même nécessaire -, mais elle n'a bien évidemment rien à voir avec la <em>procédémania</em>...</p>
<hr />
<pre></pre>
<p>(1) Roland Barthes, <em>La Préparation du roman</em> I et II, éditions du Seuil /IMEC, 2003, p. 149.
(2) Roland Barthes, <em>Œuvres complètes</em>, éditions du Seuil, 3 tomes, 1993-1995, t. II, p. 51. La citation est extraite de Critique et vérité (1966), dans la partie intitulée « La Lecture ».</p>
<hr />
<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE D'EMMANUEL PIERRAT</p>
<ul>
<li><em>Nouvelles morales, nouvelles censures</em>, Gallimard, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Le Grand Livre de la censure</em>, Paris, Plon, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Code de la liberté d'expression. Textes et jurisprudences</em>, en collab. avec Vincent Ohannessian, Paris, Anne Rideau Éditions, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>L'Auteur, ses droits et ses devoirs</em>, Gallimard, coll. « Folio essais», 2020.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>1857 - La Littérature en procès</em>, Hermann, coll. « Des morales et des oeuvres», 2021.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Dictionnaire du monde judiciaire</em> (direction d'ouvrage), coll. « Bouquins », 2021.</li>
</ul>
<p><em>et</em></p>
<ul>
<li><em>Troublé de l'éveil</em> (récit), éd. Fayard, 2008.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Aimer lire, une passion à partager</em>, Du Mesnil, 2012.</li>
</ul>
<p>BIBLIOGRAPHIE COMPLÉMENTAIRE POUR LE COURS</p>
<p>Revue <em>La Licorne</em> n° 106 : <em>Transgression, Littérature et Droit</em>, Presses Universitaires de Rennes, 2013.</p>
<p>Jean-Charles DARMON et Philippe DESAN (sous la direction de ), <em>Pensée morale et genres littéraires</em>, Presses Universitaires de France, 2009.</p>
<p>Hubert HECKMANN, <em>Cancel ! De la culture de la censure à l'effacement de la culture</em>, éditions Intervalles, 2022.</p>
<p>Sandra LAUGIER, Éléonore ROY-REVERZY, Gisèle SÉGINGER (sous la direction de), <em>Éthique et Littérature</em>, Presses Universitaires de Strasbourg, 2000.</p>
<p>Sandra LAUGIER (sous la direction de), <em>Éthique, littérature, vie humaine</em>, Presses Universitaires de France, 2006.</p>
<p>Jacques RIVIÈRE et Ramon FERNANDEZ, <em>Moralisme et Littérature</em>, éditions R.-A Corrêa, 1932.</p>
<p>Gisèle SAPIRO, <em>La Responsabilité de l'écrivain. Littérature, droit et morale en France (XIXe-XXIe siècle)</em>, éditions du Seuil, 2011.</p>
<p>Gisèle SAPIRO, <em>Peut-on dissocier l'oeuvre de l'auteur ?</em>, éditions du Seuil, 2020.</p>
<p>Et, pour rire ou pour frémir... :</p>
<p>Raymond JEAN, <em>Clotilde ou le second procès de Baudelaire</em> (roman), éditions Actes Sud, 2002.</p>
<hr />
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</div>
<hr />
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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« Les Rencontres de Pierre d'Ailly » : présentation, programme des conférences passées et à venir sur la littérature...
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2023-09-05T12:21:00+02:00
2023-11-07T13:55:35+01:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><strong><em>« On devient stupide, dès qu’on cesse d’être passionné. »</em> Helvétius, <em>De l’Esprit</em> (Discours III, ch. VIII)</strong></p> <p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/IMGP0380.JPG" alt="IMGP0380.JPG" title="IMGP0380.JPG, nov. 2014" /></p>
<p><strong><em>Mardi 19 novembre 2013, en salle </em>Imago Mundi<em> du lycée Pierre d'Ailly, première </em>Rencontre<em> : Michel Crépu, alors directeur de la </em>Revue des Deux Mondes<em> (puis directeur de la </em>NRF<em>, de 2015 à 2022), répond aux questions des élèves des classes préparatoires sur le numérique, la culture, l'humanisme et «l'otium»...</em></strong></p>
<p>(Photo de Louisa Desbleds, HK 2013-2014)</p>
<hr />
<p><strong>LES RENCONTRES DE PIERRE D’AILLY</strong> <em>ont pour vocation d’engager un débat fécond entre les étudiants de nos classes préparatoires littéraires et un écrivain ou un critique, un poète, un philosophe, un éditeur, un homme ou une femme de culture. Les enjeux de ces « conférences » tournent autour de la littérature, de l’expérience esthétique </em>et<em> éthique qu’elle nous propose, de ce qu’elle nous donne à penser de notre rapport au monde - de nos «différents modes d'existence» (E. Souriau) - , des problématiques qu’elle permet de croiser, au carrefour de la philosophie, de l’histoire et plus largement des sciences humaines</em>. <em>Chaque conférence est précisément articulée au cours de Lettres en Hypokhâgne, qu'elle prolonge par un dialogue vivant.</em></p>
<hr />
<p><strong><mark>11e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/11/25/Revue-des-Deux-Monde-%3A-Michel-Cr%C3%A9pu%2C-Du-truc.-Aux-%C3%A9l%C3%A8ves-du-lyc%C3%A9e-Pierre-d%E2%80%99Ailly-de-Compi%C3%A8gne%2C-en-souvenir-d%E2%80%99une-belle-rencontre.">(2013-2023)</a></mark></strong></p>
<p><strong>Conférence de Me Emmanuel Pierrat sur la liberté d'expression de l'écrivain, prévue <mark>jeudi 30 novembre 2023</mark>, à 14h00, au lycée Pierre d'Ailly, à Compiègne, en salle <em>Imago Mundi</em></strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>«LITTÉRATURE, DROIT ET MORALE : LIBERTÉ ET RESPONSABILITÉ DE L’ÉCRIVAIN»</strong></p>
<p><strong>Emmanuel Pierrat est avocat au barreau de Paris, spécialiste en droit de la propriété intellectuelle</strong>. Il dirige un cabinet spécialisé dans le droit de la culture et les affaires de censure. Ancien Conservateur du Musée du barreau de Paris, il est Secrétaire Général du Musée Yves Saint-Laurent Paris et membre du Comité scientifique des Musées des Arts Décoratifs. Il est en outre l’auteur de plus d’une dizaine de romans et récits, de nombreux essais, et rédige un blog judiciaro-littéraire, alimenté chaque semaine, sur le site de livreshebdo.fr</p>
<p><strong>L’objectif de cette nouvelle conférence sera de s’interroger, avec Emmanuel Pierrat, sur la liberté d’expression et sur la responsabilité de l’écrivain face au droit, qui les définit, en les codifiant</strong>. Appartenant à un autre ordre, <strong>la morale</strong> peut renforcer ou contester le droit pour imposer son jugement à la littérature. Voilà qui exige, pour la réflexion, une rapide mise en perspective historique.</p>
<p><strong><em>Morale de l'oeuvre, morale de la lecture</em></strong></p>
<p>Et sans doute faut-il commencer par distinguer <strong>morale collective</strong> et <strong>morale individuelle</strong>, faire une différence entre l’ensemble des valeurs et des règles d’action qui s’imposent aux groupes humains par le bais d’appareils prescriptifs comme la famille, l’École, l’Église, et les variations individuelles des pratiques de cette morale car, comme l’écrit Michel Foucault dans le tome II de son <em>Histoire de la sexualité</em> (<em>L'Usage des plaisirs</em>, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », tome II, p. 759.) : « Un code d’actions étant donné (…), il y a différentes manières de « se conduire » moralement, différentes manières pour l'individu agissant d'opérer <strong>non pas simplement comme agent, mais comme sujet moral de cette action</strong>. » (<em>Je souligne</em>). Un aspect de ce que Foucault nomme la « substance éthique » de l’individu se forge ainsi par la lecture, dont le modèle occidental est commandé, depuis Platon (<em>République</em> livres III et X) et saint Augustin (<em>Confessions</em>, livres I et III) par <em>le principe ascétique</em> (amélioration éthique de l’individu) et <em>le principe esthétique</em> (expérience littéraire, plaisir de la lecture). Comme l’a montré Brian Stock dans son livre intitulé <em>Lire, une ascèse</em> (éd. Jérôme Million, 2008), ces deux principes ont été subordonnés l’un à l’autre dans des proportions qui ont pu varier au cours de l’histoire, du Moyen Âge d’Abélard, au romantisme d’un Coleridge et d’un Schopenhauer, à travers <strong>la notion d’imagination créatrice</strong>. Le plaisir que nous éprouvons à lire des fictions ne provient pas que de la forme esthétique de l’œuvre, mais elle vient aussi de la connaissance de l’homme que celle-ci nous procure et des « manières d’être » ou d’agir qu’elle nous propose. Ainsi, Marielle Macé peut affirmer ceci, dans <em>Façons de lire, manières d’être</em>, Gallimard, 2011 : « Un livre peut en effet acquérir la force d’une autorité, montrer qui ou quoi désirer, et doubler en cela notre formation intérieure d’une antériorité active ; il devient une sorte de conseil, et même d’oracle, un passé choisi qui a tout à la fois la magie de la prophétie, l’inquiétante étrangeté du pressentiment, et la justesse d’une préfiguration. Cela ne peut pas avoir lieu sans excès, sans emportement complet du sujet, car le désir témoigne, comme c’était le cas pour Marcel (Proust), d’un véritable entêtement : ‘Lire, c’est désirer l’œuvre, c’est vouloir être l’œuvre, c'est refuser de doubler l'œuvre en dehors de toute autre parole que la parole même de l’œuvre.’(2) Possibilisation de soi et acquiescement à l’injonction d’un dehors, ici, sont volontairement mêlés. » p. 191. René Girard a par ailleurs montré que le désir mimétique peut avoir pour origine un certain contact avec la littérature, ce qui est alors susceptible de rendre l'oeuvre et la lecture dangereuses, pour la société et pour l'État, selon que l'influence incite ou non le sujet à l'action : de Paolo et Francesca - imitant Lancelot et Guenièvre, dans la <em>Divine comédie</em> de Dante - à Emma Bovary, en passant par Don Quichotte et les lecteurs de <em>Werther</em>, ce mimétisme anthropologique est redoutable, quels que soient ses formes et ses effets, fastes ou néfastes, car il peut remettre en question l'ordre politico-social (cf. notamment <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>, de R. Girard et <em>De l'horrible danger de la lecture</em>, de Voltaire, dans un contexte autrement particulier).</p>
<p><strong><em>L'Écrivain face à la Loi</em></strong></p>
<p>Dans ce cadre si particulier et si intime de la lecture, on peut penser, comme Pascal, que « la vraie morale se moque de la morale » (fr. 671, éd. Sellier). Le lecteur est alors reconnaissant envers les auteurs qui lui permettent de se constituer en « sujet moral » par la lecture, fût-ce au prix de bouleversements intérieurs, adhésions ou rejets. L’histoire littéraire montre que le prix à payer pour une telle liberté, aussi bien pour les auteurs que pour ceux qui les lisent, peut être parfois très cher. Car <strong>la morale publique</strong>, celle qui régit les « bonnes mœurs » codifiées par <strong>le droit positif</strong>, et <strong>la morale religieuse</strong> – ou les deux combinées, selon les époques – ont le pouvoir de fixer les limites de ce qui peut s’écrire et donc se lire : un écrivain ne peut donc pas tout dire impunément, <strong>sa responsabilité est engagée</strong>, comme l’a étudié Gisèle Sapiro, dans son livre intitulé précisément <em>La Responsabilité de l’écrivain</em> (Seuil, 2011), dans lequel elle établit, notamment, <strong>une généalogie de la morale littéraire</strong>. Et force est de constater que dans ce domaine, les avis divergent voire s’opposent ou se combattent : parfois, nous pourrons trouver que la censure est légitime, parfois nous serons consternés par ce que nous estimerons être une injustice, à moins que nous ne remettions en question la possibilité de censurer l’art, mais alors selon quelles modalités, ou à quel prix ? Car si nous n’avons <strong>aucun doute aujourd'hui sur les cas de Rabelais, Molière, Racine, Voltaire, Flaubert, Baudelaire</strong>, par exemple, nous sommes moins assurés de notre jugement pour des œuvres plus récentes, comme celle de <strong>Louis-Ferdinand Céline</strong>, dont les pamphlets abjects compliquent – voire interdisent pour certains – la lecture de <strong>l’œuvre fictionnelle</strong>, même <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Obnubilés par des cas extrêmes, qui peuvent légitimement susciter notre indignation, nous avons oublié, à tort ou à raison, qu’au début du siècle une revue prestigieuse, la <em>Nouvelle Revue Française</em>, animée Par André Gide, Jean Schlumberger, puis plus tard par Jacques Rivière, Jean Paulhan et Marcel Arland, avait marqué la littérature (fiction) du sceau de l’autonomie : « <strong>Ici, la littérature a tous les droits</strong>. <strong>Rien ne lui est opposable. Ni la religion ni la politique, ni les mœurs ni la morale, ni la tradition ni la mode</strong>. (…) Seuls comptent l’intensité d’écriture et son pouvoir de révélation, cette singularité dans l’ordre de la connaissance et du discours qu’on lui accorde. (…) La littérature autorise comme aucun autre langage. Elle peut tout dire. Elle est dégagée de la toile des responsabilités que tisse la vie sociale, familiale et citoyenne. Elle est libérée de l’obligation de faire sens sans délai et de se rendre utile à la communauté. Ici se manifeste l’aventure de l’esprit qui se sonde, s’interroge, cherche à se connaître et à se maîtriser, mais prend aussi le risque de se perdre. (…) Alban Cerisier, <em>Une histoire de La NRF</em>, Gallimard, 2009, pages 9. L'écrivain du XXIe siècle devrait-il maintenant renoncer à cette liberté, au nom de sa nécessaire <strong>responsabilité</strong>, <strong>qui ne relèverait pas seulement du respect de la loi mais d'une éthique que l'écriture aurait intériorisée ? Et selon quelles modalités ?</strong></p>
<p><strong><em>Vers une « moralisation » de la littérature ?</em></strong></p>
<p>Notre époque, au contraire, cherche à « moraliser » les œuvres littéraires, en leur appliquant de nouveaux critères de recevabilité, comme le respect des personnes dans toutes leurs singularités : l'écriture devrait alors s'interdire toute représentation négative de ces traits spécifiques à chacun. La bonne moralité de l'auteur, au civil comme au pénal, devient aujourd'hui un critère sélectif prégnant, même quand l'auteur concerné a été jugé et puni par la justice. Reste à savoir si ces critères moraux, nécessaires dans les relations interhumaines, sont pertinents pour évaluer une œuvre d’art : ne serions-nous pas menacés par la « moraline », (Nietzsche, <em>L’Antéchrist</em> notamment §2) : à savoir le prêt-à-penser moral (expression de Jean-Charles Darmon) - la bien-pensance, dirait-on aujourd'hui -, qui est à l’éthique ce que la langue est à la parole : une réalité externe qui précède l’auteur, et avec laquelle ce dernier devrait composer ? La question est complexe, et les réponses possibles différentes selon les auteurs, les œuvres, les époques. <strong>C’est pourquoi l’expertise de Maître Emmanuel Pierrat nous sera précieuse</strong> : ayant défendu des écrivains -en étant un lui-même – et ayant étudié l’histoire de la censure jusqu’à nos jours, il nous dira ce qu’il pense de <strong>la notion de responsabilité, s’il faut distinguer les œuvres de leurs auteurs, s’il ne faut juger les œuvres que sur le fondement de critères propres à l’art, en quoi consiste <em>la cancel culture</em> et si l’avenir de la littérature pourrait en pâtir</strong>. L'exposé se déroulera en trois temps : tout d'abord, Maître Emmanuel Pierrat nous présentera quelques <strong>jalons historiques de la censure littéraire</strong> ; puis il se concentrera sur <strong>les droits et les devoirs de l'écrivain aujourd'hui</strong> ; enfin, dans ce cadre, il nous instruira sur les <strong>manuscrits retrouvés de Louis-Ferdinand Céline</strong>, auxquels il vient de consacrer un livre intitulé <em>L'Affaire Céline</em>. Qu'il soit d'ores et déjà remercié de sa généreuse et prometteuse conférence !</p>
<p><strong><em>L'oeuvre littéraire et la problématique du Mal</em></strong></p>
<p>Nous pourrons ainsi mieux <strong>problématiser</strong> notre lecture du <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Il s’agira d’essayer de lire un roman situé, historiquement, et dont l’auteur appartient à « Une grande génération » (titre homonyme d'un ouvrage d'Henri Godard), dans laquelle figurent aussi Malraux, Guilloux, Giono, Montherlant, Malaquais, Sartre, Queneau et Claude Simon. <strong>On posera – à propos des œuvres de ces écrivains - la double question de l’engagement et du « moralisme »</strong> : <strong>1)</strong> d’un côté, la dénonciation – par Julien Benda, auquel s’associe Sartre et Caillois- d’une littérature pure, incarnée par Paul Valéry et Jean Giraudoux, dont le supposé repli aurait en partie mené à la guerre (cf. <em>La France byzantine ou le triomphe de la littérature pure</em>, 1945) ; de l’autre, la querelle qui oppose, en 1932, deux types d’écrivain, autour de la notion de <strong><em>moralisme</em></strong> (versus <em>immoralisme</em>), sa présence dans les œuvres, <strong>Jacques Rivière en critiquant les méfaits, Ramon Fernandez (le père de Dominique) le défendant</strong>, le premier étant plus influencé par <em>le freudisme</em>, le second par <em>l’humanisme classique</em> (cf. Jacques RIVIÈRE et Ramon FERNANDEZ, <em>Moralisme et Littérature</em>, éditions R.-A Corrêa, 1932.). <strong>Céline</strong> sera donc étudié selon cette perspective, et son roman approché dans <strong>ses aspects aussi bien littéraires que linguistiques</strong>. Ni l’histoire ni la sociologie ne suffiront cependant pour comprendre <em>Voyage au bout de la nuit</em>. Sans tomber dans la doxa célinienne, nous tenterons de voir si ces propos de Georges Bataille, dans <em>La Littérature et le Mal</em> (1957) éclairent – et dans quelle mesure – notre lecture : « La littérature n'est pas innocente, et, coupable, elle devait à la fin s'avouer telle. L'action seule a les droits. La littérature, je l'ai, lentement, voulu montrer, c'est l'enfance enfin retrouvée. Mais l'enfance qui gouvernerait aurait-elle une vérité ? Devant la nécessité de l'action, s'impose l'honnêteté de Kafka, qui ne s'accordait aucun droit. Quel que soit l'enseignement qui découle des livres de Genet, le plaidoyer de Sartre pour lui n’est pas recevable. A la fin la littérature se devait de plaider coupable ! » Que signifie alors <em>écrire</em>, que veut dire enfin <em>lire</em> ? Nous ne pourrons pas éviter ces questions, et c'est en cela que la réflexion engagée par cette nouvelle conférence sera passionnante.</p>
<p><strong><em>Maître Emmanuel Pierrat : de l'expertise professionnelle à l'expérience littéraire</em></strong></p>
<p><strong>Comme c'est le cas à chaque « Rencontre »</strong>, nous interrogerons notre invité sur son parcours intellectuel, ses passions et, en l'occurrence, son travail d’avocat et d’écrivain, sur les rapports qu’ils entretiennent dans l’élaboration d’une parole qui, dans les deux cas, recherche une vérité. Mais <strong>Emmanuel Pierrat</strong> est aussi un grand lecteur. Il a consacré l’un de ses ouvrages à la lecture : <em>Aimer Lire – une passion à partager</em>, éditions Du Mesnil (2012) : «… écrire force à mieux lire. Et à aimer les livres. » p. 132.</p>
<p><strong><em>La démarche du cours</em></strong> :</p>
<p>Cette conférence est articulée au cours d’<strong>Histoire littéraire</strong> sur le <em>Voyage au bout de la nuit</em> de <strong>Céline</strong>, que les Hypokhâgneux auront lu dans l’édition recommandée (Ce cours du lundi fera écho au cours <strong>Genres / Notions</strong> du vendredi sur le roman / récit / nouvelle). L’examen préalable des procès de Flaubert et de Baudelaire n’aura d’autre but que d’enclencher une réflexion sur <strong>l’histoire de la censure littéraire</strong> - qui concerne aussi Céline -, telle que nous en avons cerné les contours ci-dessus. Avec <em>une double exigence</em>, qui respecte à la fois le caractère social et individuel du fait littéraire : <strong>historiciser la réflexion</strong>, certes, mais aussi <strong>penser les problèmes que pose l’œuvre</strong> à l’aune de <strong>sa métaphysique implicite</strong>. Voilà qui semble le meilleur rempart contre le séparatisme techniciste et l’émiettement des savoirs : le <em>technicisme</em> est la maladie scolaire du <em>formalisme</em>, la réduction du texte à ses procédés, ce qu'il faudrait pouvoir combattre, ne serait-ce que pour redonner goût à la littérature. L'étude des formes littéraires est tout à fait légitime - et même nécessaire -, mais elle n'a bien évidemment rien à voir avec la <em>procédémania</em>...</p>
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<pre></pre>
<p>(1) Roland Barthes, <em>La Préparation du roman</em> I et II, éditions du Seuil /IMEC, 2003, p. 149.
(2) Roland Barthes, <em>Œuvres complètes</em>, éditions du Seuil, 3 tomes, 1993-1995, t. II, p. 51. La citation est extraite de Critique et vérité (1966), dans la partie intitulée « La Lecture ».</p>
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<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE D'EMMANUEL PIERRAT</p>
<ul>
<li><em>Nouvelles morales, nouvelles censures</em>, Gallimard, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Le Grand Livre de la censure</em>, Paris, Plon, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Code de la liberté d'expression. Textes et jurisprudences</em>, en collab. avec Vincent Ohannessian, Paris, Anne Rideau Éditions, 2018.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>L'Auteur, ses droits et ses devoirs</em>, Gallimard, coll. « Folio essais», 2020.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>1857 - La Littérature en procès</em>, Hermann, coll. « Des morales et des oeuvres», 2021.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Dictionnaire du monde judiciaire</em> (direction d'ouvrage), coll. « Bouquins », 2021.</li>
</ul>
<p><em>et</em></p>
<ul>
<li><em>Troublé de l'éveil</em> (récit), éd. Fayard, 2008.</li>
</ul>
<ul>
<li><em>Aimer lire, une passion à partager</em>, Du Mesnil, 2012.</li>
</ul>
<p>BIBLIOGRAPHIE COMPLÉMENTAIRE POUR LE COURS</p>
<p>Revue <em>La Licorne</em> n° 106 : <em>Transgression, Littérature et Droit</em>, Presses Universitaires de Rennes, 2013.</p>
<p>Jean-Charles DARMON et Philippe DESAN (sous la direction de ), <em>Pensée morale et genres littéraires</em>, Presses Universitaires de France, 2009.</p>
<p>Hubert HECKMANN, <em>Cancel ! De la culture de la censure à l'effacement de la culture</em>, éditions Intervalles, 2022.</p>
<p>Sandra LAUGIER, Éléonore ROY-REVERZY, Gisèle SÉGINGER (sous la direction de), <em>Éthique et Littérature</em>, Presses Universitaires de Strasbourg, 2000.</p>
<p>Sandra LAUGIER (sous la direction de), <em>Éthique, littérature, vie humaine</em>, Presses Universitaires de France, 2006.</p>
<p>Jacques RIVIÈRE et Ramon FERNANDEZ, <em>Moralisme et Littérature</em>, éditions R.-A Corrêa, 1932.</p>
<p>Gisèle SAPIRO, <em>La Responsabilité de l'écrivain. Littérature, droit et morale en France (XIXe-XXIe siècle)</em>, éditions du Seuil, 2011.</p>
<p>Gisèle SAPIRO, <em>Peut-on dissocier l'oeuvre de l'auteur ?</em>, éditions du Seuil, 2020.</p>
<p>Et, pour rire ou pour frémir... :</p>
<p>Raymond JEAN, <em>Clotilde ou le second procès de Baudelaire</em> (roman), éditions Actes Sud, 2002.</p>
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<p><strong>10e édition <em>exceptionnelle</em> des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/05/28/La-10e-%C3%A9dition">Lire le billet du 30 mai 2022</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Mohamed Mbougar SARR sur <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, éditions Philippe Rey / Jimsaan (Prix Goncourt 2021), prévue JEUDI 12 MAI 2022, à 14 heures, au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em>, à Compiègne</strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>« DANS LE LABYRINTHE DU ROMAN»</strong></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> est né en 1990 au Sénégal. Il a été formé au Prytanée militaire de Saint-Louis (Sénégal) et au lycée Pierre d'Ailly de Compiègne, où il a été élève en classes préparatoires aux grandes écoles littéraires (Hypokhâgne et Khâgne Lettres modernes) de 2009 à 2012. Il prépare actuellement une thèse de doctorat à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, à Paris. Il a reçu le <em>prix Stéphane Hessel de la jeune écriture francophone</em> en 2014 pour sa nouvelle intitulée « La Cale».</p>
<p>Il est l'auteur de quatre romans : <em>Terre ceinte</em>, éditions Présence africaine (Prix Ahmadou Kourouma 2015) ; <em>Silence du choeur</em> (2017), éditions Présence africaine ; <em>De purs hommes</em> (2018), éditions Philippe Rey ; et <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, éditions Philippe Rey / Jimsaan (Prix Goncourt 2021).</p>
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<p>Dans cette nouvelle conférence, <strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> nous parlera de son dernier livre, qui déploie avec subtilité dans les méandres de sa narration ce qu’André Siganos appelle «L’imaginaire du labyrinthe » (<em>Mythe et écriture.- La nostalgie de l’archaïque</em>, Presses Universitaires de France, coll. « écriture », 1999, p. 41.). L’incipit de ce roman passionnant ne se contente pas de donner le ton, il livre également une clé de lecture qui problématise sa composition :</p>
<p>« D’un écrivain et de son œuvre, on peut au moins savoir ceci : l’un et l’autre marchent ensemble dans le labyrinthe le plus parfait qu’on puisse imaginer, une longue route circulaire, où leur destination se confond avec leur origine : la solitude.</p>
<p>Je quitte Amsterdam. Malgré ce que j’y ai appris, j’ignore toujours si je connais mieux Elimane ou si son mystère s’est épaissi. Je pourrais convoquer ici le paradoxe de toute quête de connaissance : plus on découvre un fragment du monde, mieux nous apparaît l’immensité de l’inconnu et de notre ignorance ; mais cette équation ne traduirait encore qu’incomplètement mon sentiment devant cet homme. Son cas exige une formule plus radicale, c’est-à-dire plus pessimiste quant à la possibilité même de connaître une âme humaine. La sienne ressemble à un astre occlus ; elle magnétise et engloutit tout ce qui s’en rapproche. On se penche un temps sur sa vie et, s’en relevant, grave et résigné et vieux, peut-être même désespéré, on murmure : sur l’âme humaine, on ne peut rien savoir, il n’y a rien à savoir. »</p>
<p><em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, p. 15.</p>
<p>Métaphorisé par l’image du « cercle de solitude » (cette expression revient à la page 43), le labyrinthe ne sera donc pas seulement le mot-titre emblématique du livre mystérieux d’Elimane (<em>Le Labyrinthe de l'inhumain</em>), il symbolisera simultanément l’écriture du roman et sa lecture, sur le mode paradoxal de la docte ignorance, qui affirme ironiquement, dès les premières lignes, qu’ « on ne peut rien savoir » sur l’âme humaine, mais qu'il est besoin des quatre cent quarante pages suivantes pour le démontrer. Le lecteur – c’est sa seule certitude – pourra donc s’y perdre, en compagnie de l’écrivain, dont le sort, nous dit le narrateur, est strictement identique. Le pacte est conclu !</p>
<p>« Aventure d’une écriture » mais aussi « écriture d’une aventure » (en dépit de la brillante formule de Jean Ricardou, qui réduit le roman à la production du texte dans ses <em>Problèmes du nouveau roman</em>, Seuil, 1967, p. 111.), l'oeuvre de <strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> réconcilie le roman avec lui-même, loin d'un formalisme desséchant ou amnésique, prouvant avec brio que « le fond, c’est la forme » (Victor Hugo, <em>William Shakespeare</em>, Folio, p. 449 et sqq.) : «une technique romanesque renvoie toujours à la métaphysique du romancier», affirmait Sartre (cité p. 49), à propos de Faulkner (cf. <em>Situations I</em>, coll. Idées/Gallimard, p. 86.). Or il saute aux yeux que la métaphysique de notre auteur est une métaphysique du labyrinthe : ne s'agit-il pas de questionner <em>l'humain</em> en cherchant à résoudre l'énigme fascinante de son épiphanie, <em>l'inhumain</em>, avers et revers d'une même médaille au centre de cette quête littéraire : «le lieu du plus profond mal conserve toujours un fragment de la vérité» (p. 420)? Le sujet même du livre d'Elimane, <em>Le Labyrinthe de l'inhumain</em>, invite à un tel questionnement (cf. pp. 49-50). Dans sa confrontation critique de la littérature africaine avec ce que Milan Kundera appelle le grand «roman européen », dans <em>Les Testaments trahis</em> (Folio, p. 41 et sqq.), <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> s’apparente bien à un roman labyrinthique, qui arpente toute une géographie littéraire, dont les principaux points cardinaux sont Borges, Sabato, Kundera, Gombrowicz et Bolaño, bien que ce dernier ne soit cité qu’en épigraphe – sauf erreur.</p>
<p>C’est pourquoi, lors de cette prochaine RENCONTRE, notre réflexion se mouvra avec curiosité et bonheur « Dans le Labyrinthe du Roman », grâce aux fils d’Ariane que <strong>Mohamed</strong> voudra bien nous donner pour comprendre ce qui se présente aussi comme l’histoire d’une vocation. Elle a commencé avec un premier ouvrage, <em>Terre ceinte</em>, dont il était venu nous entretenir <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2016/12/05/La-4e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-29-novembre-2016-%3A-%C2%ABLa-Litt%C3%A9rature-et-le-Mal%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Mohamed-Mbougar-Sarr%2C-%C3%A9crivain%2C-laur%C3%A9at-du-prix-Ahmadou-Kourouma-2015-pour-son-roman-%C2%ABTerre-Ceinte%C2%BB.">en 2016</a>, pour notre plus grand plaisir !</p>
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<p><strong>9e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2021/12/09/La-9e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-23-novembre-2021-%3A-%C2%AB-%C2%ABLa-Fontaine-fabuliste-ou-les-noces-de-Morale-et-Po%C3%A9sie%C2%BB-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Patrick-Dandrey%2C-professeur-%C3%A9m%C3%A9rite-de-litt%C3%A9rature-fran%C3%A7aise-du-XVIIe-si%C3%A8cle-%C3%A0-la-So"><em>(Lire le billet du 11 décembre 2021)</em></a></p>
<p><strong>Conférence de Patrick Dandrey sur les <em>Fables</em> de La Fontaine, prévue MARDI 23 NOVEMBRE 2021, à 14 heures, salles Saint-Nicolas, 3 rue Jeanne d'Arc, à Compiègne</strong>.</p>
<p><strong>INFORMATION DU 15/11/2021 : pour des raisons sanitaires et sécuritaires (covid +vigipirate), la conférence aura exceptionnellement lieu au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em></strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>« LA FONTAINE FABULISTE OU LES NOCES DE MORALE ET POÉSIE»</strong></p>
<p><strong>Patrick Dandrey est professeur émérite de littérature française du XVIIe siècle à la faculté des Lettres de la Sorbonne («Sorbonne-Université»)</strong>. Membre de la Société Royale du Canada (Académie des Arts, Lettres et Sciences humaines), membre correspondant de l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse, il préside la Société des Amis de Jean de La Fontaine. Spécialiste de la littérature et de la culture du XVIIe siècle français, Molière et La Fontaine notamment, et de l’ancienne médecine de l’âme, en particulier l’imaginaire de la mélancolie, il leur a consacré une vingtaine d’ouvrages, autant d’éditions critiques et travaux éditoriaux, et un peu moins de deux cents études et articles .</p>
<p><strong>L’objectif de cette nouvelle conférence sera de s’interroger, avec Patrick Dandrey, sur le sens de l’apologue et de sa poétique dans ses rapports avec la morale classique</strong>. Nous lirons avec attention les deux recueils des <em>Fables</em> de La Fontaine, selon le parcours indiqué sur le programme de travail remis aux Hypokhâgneux. Du genre à la fois argumentatif et narratif décrit par Aristote dans sa <em>Rhétorique</em> (II, 20), où il cite déjà Ésope comme auteur de référence et du vaste corpus ésopique, constamment enrichi et adapté par des érudits et des pédagogues, jusqu’au XVIIe siècle, que reste-t-il dans l’œuvre de notre fabuliste ? Sorte d’«exemple» inventé (par opposition aux « faits passés »), la <em>fable</em> (<em>logos</em>) – comme la parabole socratique -fait partie, selon Aristote, des nombreux moyens de persuasion dont peut user un orateur dans le domaine des «preuves communes », et convient « aux discours qui s’adressent au peuple » (<em>Rhétorique</em>, « Gallimard, «Bibliothèque de la Pléiade », p. 805-806). Genre sérieux d’abord destiné aux adultes, sa propension à étayer un enseignement moral a tout naturellement intéressé les rhéteurs et les pédagogues, qui ont très tôt utilisé les collections anonymes de fables dites « ésopiques » (nous verrons en cours ce qu’il faut penser d’Ésope en tant qu’auteur des fables qui lui sont associées) comme supports d’exercices préparatoires pour la formation <em>scolaire</em> et plus précisément <em>rhétorique</em> des enfants et des adolescents : c’est ce que montrent dès le Ier siècle de notre ère l’<em>Institution oratoire</em> du pédagogue romain Quintilien et les <em>Progymnasmata</em> ( au sens d’ « exercices préparatoires ») du rhéteur alexandrin Aelius Théon. C’est que, dans l’apologue ésopique, le récit se double d’une moralité qui tire la leçon de l’histoire racontée. Le <strong>problème littéraire</strong> qui nous intéressera concerne l’articulation de la fiction et de son interprétation morale, en ce qu’elle noue subtilement <strong>l’esthétique et l’éthique</strong> à l’œuvre dans tout texte littéraire. Loin d’opposer l’une à l’autre, nous verrons au contraire comment La Fontaine tire parti de la nécessité de <em>plaire</em> pour <em>instruire</em> (cf. « Le Pâtre et le Lion », VI, 1, vers 3-6), l’enseignement perdant ainsi le caractère apparemment univoque qu’il pouvait avoir chez Ésope. C’est que, tout en reprenant à son illustre prédécesseur les parties constitutives de la fable (le <strong>récit</strong>, ou « le corps », et la <strong>moralité</strong>, ou « l’âme », selon La Fontaine, dans sa «Préface »), il « métamorphose » (mot de <strong>Patrick Dandrey</strong>) le genre en en complexifiant et la forme et la portée. La Fontaine exploite en effet la capacité de l’apologue ésopique <em>à dire sans dire tout en disant</em>, comme Aristote le montre déjà dans les exemples qu’il donne de l’usage de la fable… A partir de ces récits symboliques qui contiennent des hommes déguisés en animaux, notre auteur <em>fabrique</em> une œuvre dont il affirme, toujours dans sa « Préface », que ses parties « ne sont <strong>pas seulement morales</strong>, <strong>elles donnent encore d'autres connaissances</strong>. Les propriétés des animaux et leurs divers caractères y sont exprimés ; par conséquent les nôtres aussi, puisque <strong>nous sommes l'abrégé de ce qu'il y a de bon et de mauvais dans les créatures irraisonnables</strong>. » (p. 41 de l’édition du Livre de Poche, dont l’éditeur est Jean-Charles Darmon).</p>
<p>Ces propos très suggestifs nous aideront à <strong>problématiser</strong> notre lecture des <em>Fables</em> : 1) en réfléchissant à la fonction de la moralité : ce qu’elle dit ne se fige plus seulement dans la rigidité d’une formule gnomique. Très souvent, elle se déduit du récit ou est incluse dans une sorte de préambule qui semble ne pas tout dire, comme c’est le cas dans « Le Fou qui vend la sagesse » (IX, 8). La moralité est aussi enjouée ou légère, jamais frivole, elle peut formuler un pessimisme que l’on serait tenté de rapprocher de Port-Royal. Dans « L’Araignée et l’Hirondelle» (X, 6), la pseudo-moralité ne présente aucune injonction morale, aucune prescription éthique mais se fonde sur un constat : le monde est fait de puissants et de faibles, et le Ciel semble approuver cette inégalité. D’ailleurs, de quelle « morale » procède-t-elle, cette moralité retravaillée par La Fontaine ? Quelle part accorder à ce que Nietzsche appelle la « moraline » , dans <em>L’Antéchrist</em> notamment (§2, où il l'oppose à la <em>virtù</em>, vertu - «dans le style de la Renaissance» - qui est force et énergie) : à savoir le prêt-à-penser <em>moral</em> (expression de Jean-Charles Darmon) - la bien-pensance, dirait-on aujourd'hui -, qui est à l’éthique ce que la langue est à la parole : une réalité externe qui précède l’auteur, et avec laquelle ce dernier doit <em>composer</em> ? N’allons toutefois pas croire que tout ce qui se présente comme «moral» relève de la <em>moraline</em>. Comme le souligne Paul Bénichou dans ses <em>Morales du Grand Siècle</em>, la difficulté réside dans la nécessité de bien distinguer ce qui appartient à <strong>l’individuel</strong> et ce qui, en revanche, renvoie au <strong>social</strong>. Il reste que l’humanisme de La Fontaine, comme celui des Classiques, a renoncé aux abstractions de la scolastique pour privilégier « l’expérience directe de la vie et de la société », selon Bénichou, qui définit « l’angle moral », sous lequel il veut aborder les œuvres du XVIIe siècle, « en tant qu’(elles) prétendent répondre aux problèmes de la vie et de la conduite humaine. » La Fontaine sera ainsi approché comme un «moraliste », selon la définition qu’en donne Louis Van Delft dans ses travaux (notamment <em>Le Moraliste classique : essai de définition et de typologie</em>, Droz, 1982), c’est-à-dire <strong>un observateur critique plus qu’un moralisateur</strong> ; 2) en cernant précisément le <strong>problème littéraire qui découle du précédent</strong> : dans quelle mesure peut-on vraiment parler de <strong>critique sociale et politique</strong> chez La Fontaine ? Comment dépasse-t-il le plan strictement «moral » pour s’attacher à une réflexion concrète sur les réalités de son temps ? L’évolution du fabuliste est évidente, du premier au second recueil ( de 1668 à 1679), et sans doute plus frappante encore quand on regarde de près le livre XII, publié en 1694. Contrairement à La Bruyère, dont <em>Les Caractères</em> prennent acte de ce que Paul Hazard nomme «la crise de la conscience européenne », dans le livre du même titre (où l’affirmation du Bourgeois comme «nouveau modèle d’humanité » favorise progressivement une conscience de classe – Colbert succède à Fouquet…), La Fontaine appartient, lui, à la génération précédente, si bien que ses critiques de la société, déjà présentes dans le premier recueil, n’ont pas la même envergure ni la même portée que celles du second. C’est du moins l’hypothèse qui sera la nôtre, et que nous tenterons d’étayer <strong>à la lumière des travaux de Patrick Dandrey</strong>. Voilà qui nous permettra d’évaluer « l’engagement » (notion problématique à définir et à situer historiquement !) de La Fontaine, que Jean Giraudoux, dans ses <em>Cinq tentations de La Fontaine</em> (Grasset, 1938), associe aux Vauban, Fénelon et autres La Bruyère, qui auraient osé remettre en question « la description magnifique » que «toute la littérature du XVIIe siècle (aurait) donné du règne de Louis XIV» ; 3) en se demandant en quoi consistent <strong>les « autres connaissances »</strong> dispensées par l’apologue : Comment notre fabuliste s’approprie-t-il la transposition allégorique fondée sur la transposition du monde humain dans l’univers animal, à partir de la tradition ésopique ? Que nous apprend la fable des rapports que l’humain entretient avec l’animal ? D’un recueil à l’autre, cette question se complexifie : le « Discours à Madame de la Sablière » et celui adressé « A Monsieur le duc de La Rochefoucauld », tous deux auteurs de maximes et proches des milieux jansénistes, attestent que la fable n’est pas réductible à la satire mais s’impose comme une forme littéraire pensante voir philosophante… Quand La Fontaine discute la thèse cartésienne des animaux machines, ses preuves sont des fables où les bêtes ne sont plus des symboles mais des êtres à part entière, dont l’observation lui permet de redéfinir le rapport de l’homme à l’humanité. Sa philosophie de la vie provient de sa lecture des anciens épicuriens comme elle est aussi influencée par la pensée de Pierre Gassendi, grand adversaire de Descartes ; 4) en n'oubliant pas, enfin, comme l'affirme Georges Couton dans l'introduction de <em>La Politique de La Fontaine</em> (Les Belles Lettres, 1959) que «l'esprit général du XVIIe siècle est de trouver partout enseignement, symbole allégorie» et que, selon <strong>Patrick Dandrey</strong>, «il n' y a guère de grande poésie dont la signification ne soit lovée dans l'orbe de la forme» («Moralité», dans la revue <em>Littératures classiques</em>, supplément 1992). Comment comprendre la <em>poésie</em> des fables de La Fontaine ? Une fable qui devient <em>poème</em> reste-t-elle toujours un apologue ? La figure, l'art de l'emblème, auquel la fable lafontainienne est redevable, et le tour poétique ne sont pas de vains ornements ou des suppléments d'âme : ils sont la forme-sens de l'apologue.</p>
<p>Mais comme c'est le cas à chaque «Rencontre», nous interrogerons notre invité sur son parcours intellectuel, ses passions et, en l'occurrence, son travail de professeur entièrement consacré à la critique, que l'on a coutume de nommer «littérature secondaire». Son dernier ouvrage est consacré à <em>Trois adolescents d’autrefois</em>, Champion /Essais, 2021 (le beau titre de cet ouvrage est repris à un roman de François Mauriac). Il s’agit d’une étude qui s’intéresse au Rodrigue du <em>Cid</em>, à l’Agnès de <em>L’École des femmes</em> et à l’Hippolyte de <em>Phèdre</em>. Cette méditation sur l’adolescence de ces trois personnages célèbres, adolescence oubliée et délaissée par l’histoire littéraire, commence par une définition de la vieillesse qui prend l’allure d’un retour sur soi, à travers le prisme merveilleux de la fiction et de l’art des classiques. Elle nous autorisera, nous l'espérons, à demander à <strong>Patrick Dandrey</strong> quel «adolescent d'autrefois» il fut, comment l’amour de la littérature le saisit un jour au point de le décider à y consacrer sa vie. Il nous expliquera sans doute comment, du théâtre de Molière, dont il a minutieusement étudié les grandes pièces, il est passé à une réflexion plus générale sur la mélancolie à l’époque baroque, puis aux <em>Fables</em> de La Fontaine, dont il a savamment exploré la « poétique » dans un ouvrage aujourd'hui essentiel sur la question. Dans son <em>Itinéraire d’un chercheur</em> (texte disponible sur <a href="http://patrickdandrey.com/wp-content/uploads/2012/10/Itine%CC%81raire-dun-chercheur1.pdf">son site personnel</a>), on peut lire cette confidence enthousiasmante : <strong>«La littérature, pour moi, c’est du concept qui danse, de la beauté qui pense.»</strong> Voilà une belle formule qui semble bien symboliser <strong>le regard critique de</strong> <strong>Patrick Dandrey</strong>. Ses travaux, qui en sont la parfaite illustration, ont judicieusement confirmé le célèbre jugement d'André Gide sur La Fontaine : «C’est un miracle de culture. Sage comme Montaigne ; sensible comme Mozart. » André Gide, <em>Voyage au Congo</em>, chapitre premier, Gallimard, Folio, 1995 (1927), p. 14. Il nous fera l'honneur de sa présence le 23 novembre prochain, et nous sommes d'ores et déjà impatients de l'écouter sur le thème de cette <strong>9e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></strong> ! Nous le remercions par avance d'accepter de nous faire profiter généreusement de sa curiosité intellectuelle, aussi fine qu'élégante, et de son immense érudition.</p>
<p><em>La démarche du cours</em> :</p>
<p>Cette conférence est articulée au cours d’<strong>Histoire littéraire</strong> sur les <em>Fables</em> de La Fontaine, que les Hypokhâgneux auront lues dans l’édition citée ci-dessus (Ce cours du lundi fera écho au cours <strong>Genres / Notions</strong> du vendredi sur la Poésie). L’œuvre étant riche et complexe, un corpus précis et délimité dans les deux recueils leur a été proposé, afin de rendre plus simple et plus efficace la réflexion du cours, dont les linéaments viennent d’être exposés . Toujours dans son <em>Itinéraire d’un chercheur</em>, <strong>Patrick Dandrey</strong> précise que c’est «entre <strong>la spécificité poétique</strong> et <strong>l’anthropologie historique</strong> que se situe mon itinéraire, autrement dit <strong>au croisement de l’humain et du texte</strong>. » C’est très modestement que nous tâcherons d’imiter cette démarche, qui nous paraît depuis longtemps déjà être le meilleur rempart contre le séparatisme techniciste et l’émiettement des savoirs : le <em>technicisme</em> est la maladie scolaire du <em>formalisme</em>, la réduction du texte à ses procédés, ce qu'il faudrait pouvoir combattre, ne serait-ce que pour redonner goût à la littérature. L'étude des formes littéraires est tout à fait légitime - et même nécessaire, mais elle n'a bien évidemment rien à voir avec la <em>procédémania</em>...</p>
<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE DE PATRICK DANDREY</p>
<p>• <em>La Fabrique des Fables</em> : essai sur la poétique de La Fontaine, éd. Klincksieck, 1991. Revue, corrigée et augmentée, sous le titre : <em>La Fabrique des Fables</em>. Suivi de <em>Pour comprendre (enfin ?) La Cigale et la Fourmi</em>. Klincksieck, 2010, « Librairie Klincksieck ».</p>
<p>• <em>Molière ou l’esthétique du ridicule</em>. Klincksieck, 1992. « Librairie Klincksieck ». Revue, corrigée et augmentée. Klincksieck, 2002, « Librairie Klincksieck ».</p>
<p>• <em>Le «Cas» Argan. Molière et la maladie imaginaire</em>. Klincksieck, « Bibliothèque d’Histoire du Théâtre », 1993. Refondue et augmentée : Klincksieck, « Jalons critiques», 2006.</p>
<p>• <em>Dom Juan ou la critique de la raison comique</em>. Honoré Champion, 1993, « Bibliothèque de littérature moderne ». Corrigée et mise à jour, Honoré Champion, 2011, « Lumière classique ».</p>
<p>• <em>La Fontaine ou les métamorphoses d’Orphée</em>. Gallimard, 1995, « Découvertes ». Réédition, 2008.</p>
<p>• <em>L‘Éloge paradoxal de Gorgias à Molière</em>. Presses Universitaires de France, 1997, « Écriture ». Réédition Hermann, 2015, « Les Collections de la République des Lettres».</p>
<p>• <em>La Médecine et la maladie dans le théâtre de Molière</em>. 1- <em>Sganarelle et la médecine ou de la mélancolie érotique</em>. 2- <em>Molière et la maladie imaginaire ou de la mélancolie hypocondriaque</em>. Klincksieck, 1998, « Bibliothèque française et romane ».</p>
<p>(...) La suite de cette bibliographie, à peine esquissée ici, est consultable sur <a href="http://patrickdandrey.com/publications/livres-et-editions/">le site personnel de Patrick Dandrey</a>.</p>
<hr />
<p><strong>8e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/12/15/Les-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-ont-eu-lieu-jeudi-24-novembre-2022-%3A-%3A-%C2%AB-Le-Roman-in%C3%A9puisable-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Philippe-Le-Guillou%2C-romancier-et-essayiste%2C-prix-M%C3%A9dicis-1997-pour-%C2%ABLes-Sept-noms-du-peintre%C2%BB.-Rattrapage-de-la-8e-%C3%A9dition.">(Lire le billet du 16 décembre 2022)</a></em></p>
<p><strong>Conférence de Philippe Le Guillou sur la place du roman dans la littérature, prévue MARDI 18 MAI 2021, à 14 heures, salles Saint-Nicolas, 3 rue Jeanne d'Arc, à Compiègne</strong>, mais reportée <em>sine die</em>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>LE ROMAN INÉPUISABLE </strong></p>
<hr />
<p><strong>PHILIPPE LE GUILLOU ET LE ROMAN : DE LA TABLE RASE À LA TABLE RONDE</strong></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong> est romancier et essayiste. Presque toute son œuvre, qui compte maintenant de nombreux volumes, est publiée chez Gallimard, dans la collection «Folio ». Il a notamment obtenu le prix Médicis pour <em>Les Sept noms du peintre</em>, en 1997, et le prix Charles Oulmont de la Fondation de France en 2001, pour son roman <em>Le Roi dort</em>. Il a écrit de nombreux essais sur Chateaubriand, De Gaulle et Julien Gracq, avec lequel il a des affinités littéraires. Ainsi que l’écrit l’universitaire Luc Vigier, qui lui consacre un blogue (http://philippeleguillou.eklablog.com/accueil-c17337479), <strong>Philippe Le Guillou</strong> est l’ « héritier de toute une tradition française et des postures d'écrivains qui lui sont associées, (…) » et « se réclame volontiers de Chateaubriand, de Stendhal, de Proust, de Malraux, de Montherlant et de Gracq. » <strong>Philippe Le Guillou</strong> est aussi Inspecteur général de Lettres et docteur en littérature. Sa conférence sera à ce titre doublement intéressante : au point de vue universitaire s’ajoutera – et se substituera très vite - la critique littéraire d’une pratique personnelle du roman (auteur et lecteur), présenté dans une histoire subjective, <em>roman du roman</em> – « de Chrétien de Troyes aux romanciers les plus contemporains » - propre à susciter la réflexion.</p>
<p><strong>L’objectif de cette nouvelle conférence sera de s’interroger, avec Philippe Le Guillou sur le roman</strong>, sa longue et turbulente histoire, ses pouvoirs de séduction, qui font de ce dernier « un genre foisonnant, protéiforme et en perpétuel devenir ». De cette variété souvent contestée, <strong>Philippe Le Guillou</strong> tire la qualité suprême du roman, son caractère inépuisable et prometteur. On a pourtant souvent reproché à ce <em>genre</em> de n’en pas être un : si l’on n’en est plus à accuser le roman de « troubler les têtes», comme le rappelle Rousseau dans la fameuse « Préface de La Nouvelle Héloïse » (1761), on en a fait «un usurpateur par vocation », comme Cioran, qui affirme que le « romancier, dont l’art est fait d’auscultation et de commérage, transforme nos silences en potins. » Toujours dans <em>La Tentation d’exister</em>, il ajoute : «Il a fait le trottoir de la littérature. Nul souci de décence ne l’embarrasse, point d’intimité qu’il ne viole. Avec une égale désinvolture, il fouille les poubelles et les consciences. » <em>La Tentation d’exister</em>, Gallimard, 1956, coll. « Tel », pages 148-149. Plus récemment, Richard Millet, également grand romancier, avait impitoyablement réglé son compte à ce qui est devenu, selon lui, l’essence même de la « postlittérature », un roman dévalué, « instrument du mensonge général, une falsification, un dévoiement au service du Nouvel Ordre moral ou, si l’on préfère du moralisme postéthique américain. » <em>L’Enfer du roman</em>, Gallimard, 2010, p. 13. Ce jugement sévère ne niait certes pas l’existence d’authentiques œuvres romanesques : il voulait en montrer cependant la stupéfiante rareté. En 2011, l’écrivain et psychanalyste Catherine Millot expliquait à une journaliste de France-Culture le sens du mot roman qui figurait sur la première de couverture de son livre intitulé <em>O Solitude</em>. A la question « votre œuvre ne s’apparente-t-elle pas plus à une réflexion, à une méditation sur la solitude qu’à un roman ?», voici ce qu’elle répondait : « En tout cas ce n’est pas une fiction, ce n’est pas une autofiction. Mais on pourrait justifier l’appellation de roman, si l’on définit le roman comme le genre de ce qui n’appartient à aucun genre. Il me semble que je me rattache au roman de cette façon-là, parce que j’ai fait quelque chose qui n’appartient à aucun genre… » Catherine Millot, propos diffusés sur France-Culture le 19 septembre 2011 dans l’émission « La grande table ». Enfin, c’est dans le journal <em>Le Monde</em> daté du 12 septembre 2020 que Nathalie Azoulai, auteur, notamment, de <em>Titus n’aimait pas Bérénice</em> (P.O.L., 2015), a essayé de définir ce qui la fait douter d’un genre qu’elle a pourtant beaucoup pratiqué : « Un territoire qui, comme tous les territoires, fait fructifier le pire et le meilleur. Et du meilleur, il y en a. Du moins bon aussi, qui, de plus, en arrive à ce paradoxe de devoir s’adosser à la rubrique « roman », ce qui revient à nier le genre tout en s’en réclamant encore. Serait-ce que l’étiquette « roman » ne veuille plus du tout signifier ni fiction ni composition, mais seulement « livre » ? Ou qu’à la façon d’un leurre bienséant dont personne n’est dupe, elle estompe un instant l’impudeur, amortisse le choc frontal, la réticence d’un lecteur peu enclin à avouer qu’il est voyeur comme on l’est tous ? Serait-ce donc que le nom de « roman » serve encore de béquille à un genre sans statut parce qu’hybride et indécis ? Je l’ignore, mais ce que je sais, en revanche, c’est que, malgré l’autorité magistrale de Kundera, le doute creuse en moi son sillon : et si le roman, c’était fini ? ».</p>
<p>Le roman a été - ne l'oublions pas - le fer de lance de la modernité littéraire. Toutes les poétiques classiques l’ont ignoré, la narration relevant d'abord de l’épopée. C’est le romantisme – en particulier allemand, dès l’<em>Athenaeum</em> – qui l’a mis au cœur de la littérature, ainsi que le rappelle Maurice Blanchot, dans <em>L’Entretien infini</em> : « (…) l’art romantique qui concentre la vérité créatrice dans la liberté du sujet, forme aussi l’ambition d’un livre total, sorte de Bible en perpétuelle croissance qui ne représentera pas le réel, mais le remplacera, car le tout ne saurait s’affirmer que dans la sphère inobjective de l’œuvre. Le roman, disent tous les grands romantiques, sera ce Livre ; Schlegel : <em>‘Le roman est le livre romantique’</em> ; Novalis : ‘<em>Absolutiser le monde, seul le roman peut y parvenir, car il faut que l’idée du tout domine et modèle entièrement l’œuvre esthétique’,</em> et Solger : <em>‘Tout l’art d’aujourd’hui repose sur le roman, non sur le drame.’</em>» p. 525. Pour le romantisme d’Iena, à la fin des années 1790, le roman apparaît comme une véritable synthèse des genres, en particulier de l’épique et du dramatique : poétique ou en prose – mais ces deux formes doivent également <em>s’unir</em> -, il doit être à la fois fantastique, sentimental, philosophique et psychologique. La poésie « romantique » n’est donc pas strictement lyrique, elle est « romanesque », dans le sens élargi et synthétique que Schlegel et ses amis littéraires donnaient à ce terme. Héritier de l’épopée, frayant avec la tragédie, on sait comment le roman a pu incarner au XIXe et au XXe siècles cette « ambition d’un livre total », en cultivant notamment le monumental : les œuvres de Hugo, Balzac, Zola, Proust, Thomas Mann, Joyce et Musil, par exemple, traversent les grands problèmes biologiques, psychologiques et sociaux de leur époque, tout en restant travaillés par le légendaire et le mythique. Dans les années 1960, seul le « roman balzacien » sera critiqué par l’avant-garde du Nouveau Roman. Ce roman du « réel » et de la « connaissance », Robbe-Grillet voulait en dénoncer les fondements idéologiques par une étude de ses composantes « traditionnelles» les plus contestables, selon lui, comme le « personnage », «l’histoire» et la notion de « réalisme » ou plus précisément « l'illusion réaliste». Nombre d’écrivains de cette période ont su tirer parti des possibilités du genre romanesque, sans pour autant tomber dans la caricature du « roman balzacien » ni se déclarer « nouveaux romanciers ». C’est en partie ce que raconte <em>Le Roman inépuisable</em>, de Philippe Le Guillou, <em>roman du roman</em> mais aussi <em>essai</em> sur le roman, dont l’histoire <em>subjective</em> est ponctuée par des prises de position très claires en matière d’esthétique littéraire. Et loin de remettre en question le roman, il en fait l'admirable défense et illustration.</p>
<p>Le parcours proposé – et que <strong>Philippe Le Guillou</strong> commentera certainement pendant sa conférence – nous fait visiter les grandes œuvres, petits romans ou massifs romanesques, de Chrétien de Troyes aux romanciers les plus contemporains, notamment ceux qui sont parmi les « alliés substantiels » de l’auteur, Julien Gracq, Michel Tournier et Patrick Grainville (mais il y en d’autres). Très sommairement, on indique le tracé suivant, qui donne à réfléchir sur la formation de notre romancier : ce dernier manifeste un goût prononcé pour les œuvres qui sont à l’origine du roman français : la littérature du Graal, la <em>matière de Bretagne</em>, dont les romans de Chrétien ; Renart et Rabelais soulèvent son enthousiasme, ce qui n’est pas vraiment le cas du roman « psychologique » tel qu’il se modèle, de <em>La Princesse de Clèves</em>, de Madame de Lafayette, à <em>L’Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut</em>, de l’Abbé Prévost. Admiration pour Chateaubriand, Stendhal, Hugo, et Flaubert ; bien moins pour Balzac et Zola. Le vif intérêt que porte <strong>Philippe Le Guillou</strong> à la «littérature térébrante » ou l<em>a littérature du mystère</em> – selon ses propres termes -, en évoquant les œuvres de Huysmans, de Bloy et de Barbey d’Aurevilly, nous incite à en retrouver les échos dans ses propres romans. Au XXe siècle, ce sont Proust, Gide – et l’aventure de la prestigieuse NRF (la Nouvelle Revue Française), Bernanos, Mauriac, Gracq, les Hussards, Yourcenar, et bien d’autres, qui passionnent notre auteur. Nous serons donc attentifs à ce foisonnement de références pour y repérer ce qui le nourrit : le plaisir de la lecture naïve, qui se souvient de l’enfance et de ses découvertes littéraires fondatrices, le rejet du « caisson structuraliste » et des « critiques scientistes pressés de dépecer les œuvres littéraires », ainsi qu'une curiosité appuyée pour les « structures anthropologiques de l’imaginaire », dont le spécialiste est Gilbert Durand, disciple de Bachelard et théoricien de la mythanalyse qui, par l’étude des archétypes, explore la signification symbolique des œuvres. Nourrie, en particulier, par l’imagination matérielle – dirait Bachelard – des quatre éléments et par la <em>matière de Bretagne</em>, l’écriture de <strong>Philippe Le Guillou</strong> cherche dans le roman - souvent <em>initiatique</em> - une vérité <em>poétique</em>. C’est que la classe d’Hypokhâgne cherchera à cerner, à travers sa lecture du <em>Donjon de Lonveigh</em>.</p>
<p><em>La démarche du cours</em> :</p>
<p>Pour cette conférence, qui puise son thème dans le dernier essai de notre auteur, <em>Le Roman inépuisable – roman du roman</em>, Gallimard (2020), les Hypokhâgneux auront lu <em>Le Donjon de Lonveigh</em> (édition Gallimard /Folio) , et pour être plus sensibles aux paysages et au style de cette œuvre, ils auront aussi abordé, par quelques pages choisies, Barbey d’Aurevilly (<em>Une vieille maîtresse</em>, <em>L’Ensorcelée</em>) et Julien Gracq (<em>Au château d’Argol</em>, <em>Un beau ténébreux</em>), qui sont les deux références majeures à la lumière desquelles <strong>Philippe Le Guillou</strong> explique, dans l’avant-propos, la genèse de ce roman. Ils auront lu également <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> (Folio, 2007), qui fait le récit des rencontres avec Julien Gracq, pendant biographique et lumineux des entretiens fictifs du narrateur avec l’écrivain obscur et secret, Thomas Daigre, dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, dont nous avons esquissé un programme d’étude dans <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/06/22/Aux-futurs-Hypokh%C3%A2gneux-%3A-programme-d-%C3%A9tude-pour-l-ann%C3%A9e-2020-2021-et-programme-de-lecture-pour-les-colles.-Afin-de-pr%C3%A9parer-la-rentr%C3%A9e-%3A-un-%C3%A9t%C3%A9-avec-Julien-Gracq-et-Philippe-Le-Guillou...">le billet du 10 juillet dernier</a> :</p>
<p>Dans <em>Mon cœur mis à nu</em>, Baudelaire affirme qu’« il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie.» (Folio, p. 102). Les œuvres de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, qui peuvent se lire comme une théorie des exceptions, en sont, d'une certaine manière, l’illustration convaincante. Ainsi, la figure du grand écrivain, avec son aura et sa part de mystère, hante <em>Le Donjon de Lonveigh</em>. Le narrateur qui en raconte l’histoire, critique littéraire et éditeur aux éditions Gallimard, est un lecteur admiratif et passionné qui cherche à écrire le « roman de Thomas Daigre » à partir des entretiens que celui-ci lui a accordés dans son château irlandais. Dès lors, le narrateur veut percer le secret de celui qui, peut-être compromis avec la Collaboration, quitta la France et se mura ensuite dans le silence, solitaire dans son donjon. Tout le roman est construit sur cette rencontre bouleversante, qui confronte le narrateur à la signification sacrificielle de l’acte d'écrire (l'écrivain, double de saint Sébastien percé de flèches ?), les carnets de Thomas Daigre émaillant la narration à de nombreuses reprises pour laisser entrevoir les éclats miroitants d’une œuvre étrange et méconnue, mais constamment désirable, comme l’est aussi, sans doute, pour le narrateur, Florence, la fille de l’écrivain reclus, qui peint et aime avec la même violence que celle du paysage marin, des tourbières et des loughs, dont la description lancinante renvoie aux mêmes puissances envoûtantes qui tourmentent les personnages. <strong>« Il n’est de lecture possible que poétique »</strong>, écrit Thomas Daigre, dans l’un de ses carnets (Folio, p. 156). On le prendra au mot, en étant attentif à tout ce qui, dans ce roman, excède l’événement et veut atteindre au poème - et dans le <em>poème</em>, à la parole originelle, c'est-à-dire au <em>mythe</em> -, en pensant <em>mutatis mutandis</em> à Mallarmé, qui voyait dans le roman de son ami Rodenbach, <em>Bruges-la-Morte</em>, un « poème, infini par soi mais littérairement un de ceux en prose les plus fièrement prolongés. » (Lettre du 28 juin 1892), mais en n'oubliant pas non plus ce qu'a dit Remy de Gourmont du « roman éternel», conçu dès l'origine comme un <em>poème</em> (cf. <em>Promenades littéraires</em>, 7e série, 1927, où il cite, vers et prose, l<em>'Odyssée</em> et <em>Don Quichotte</em>, <em>Wilhelm Meister</em> et <em>Tribulat Bonhomet</em>, <em>Vita nuova</em> et <em>L'Education sentimentale</em> : ne peut-on pas voir là un prolongement de la conception <em>romantique</em> du roman également pris en charge par Philippe Le Guillou ?). Cette écriture recherche en effet par moments la « sorcellerie évocatoire » d’un lyrisme tout entier habité par « l’imaginaire du secret », pour reprendre le titre d’un livre suggestif de Pierre Brunel, le secret étant l’une des modalités de l’attente du sens et, paradoxalement, de son omniprésence, à travers les épiphanies du symbole qui travaillent le texte. On sera enfin curieux de reconnaître (<ins>hypothèses à vérifier</ins>), à travers les personnages écrivains, les figures littéraires qui ont pu en être les sources d’inspiration, sachant que le personnage n’est jamais pur mais résulte d’une combinaison complexe d'éléments hétérogènes qu’il faudra identifier (Pensons, entre autres, et pour commencer à cartographier la géographie littéraire de ce roman, à Paul Morand, André Pieyre de Mandiargues, Maurice Blanchot, Julien Gracq, Pierre Drieu la Rochelle, Henry de Montherlant... Dans son <em>avant-propos</em>, Philippe Le Guillou mentionne, outre Barbey d'Aurevilly et Julien Gracq, Michel Mohrt, Beckett et Kafka). <em>Le Donjon de Lonveigh</em> a été publié en 1991, peu après la disparition d'écrivains aussi importants que René Char, Francis Ponge, Samuel Beckett, Philippe Soupault et Michel Leiris. <strong>Philippe Le Guillou</strong> avait trente-deux ans. Il faudra situer précisément cette œuvre ténébreuse, et le <em>charme</em> de son style, dans la production romanesque de cette époque, dernière décennie du XXe siècle.</p>
<p><em>Envoi</em> :</p>
<p>Dans <em>Les Cahiers de la République des Lettres</em> du 15 avril 1926 (p. 69-70), Jean Giraudoux, précisait, dans un entretien, ses « ascendances », les romans qui l’ont intéressé et nourri. Parce que l’on peut y déceler des affinités avec les propos de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, voici ce qu’il en dit (nous soulignons):</p>
<p>« Ce qui, personnellement, m'intéresse, c'est le roman... N'entendez pas du tout par là le roman du XIXe siècle, <em>Adolphe</em>, <em>Dominique</em>, ni même, en remontant davantage, <em>La Princesse de Clèves</em>, qui sont, à proprement parler, des essais psychologiques. Entendez par <em>roman</em> l'élément romanesque. A côté du sujet, il y a <strong>la poésie — le style —</strong> la concentration d'une nature fabuleuse dans les personnages, c'est-à-dire <strong>la recherche de la vérité romanesque des êtres, non de la vérité réaliste</strong>. Je verrais mon ascendance dans la chanson de geste, les fabliaux. Les personnages des chansons de geste...</p>
<p>— Le traître... L'homme parfait..., etc., etc.</p>
<p>—Les animaux, qui tiennent tant de place dans les fabliaux. Et toujours, en arrière-fond, le pays. <strong>En ce temps-là, comme aujourd'hui, l'influence très grande de la géographie sur la formation du caractère français. De la géographie et de l'histoire</strong>. A toute époque troublée, comme celle des croisades, sans centralisation, sans commandes aux écrivains, ont dû correspondre des poètes-historiens — les romanciers — qui avaient une morale à tirer de leur œuvre — la chanson de geste. Je me suis pris en exemple parce que vous y teniez, mais ces ascendances littéraires expliquent une foule d'écrivains actuels.</p>
<p>— En résumé, lorsqu'il s'agit de justifier une école moderne, vous cherchez les précédents historiques, les analogies de toute sorte. Et c'est exactement contraire aux prétentions des jeunes gens que, si vous ne m'aviez interdit ce mot, j'aimerais taxer de fumisterie, qui veulent à toute force ignorer leurs aînés, brûler le Louvre et tout recommencer par le commencement. <strong>Au lieu d'en venir à la table rase, vous remontez</strong>...</p>
<p>— ... <strong>A la Table ronde</strong>. »</p>
<p>Sans en avoir encore la certitude (à cause de la crise sanitaire), nous espérons que cette « Rencontre » aura lieu, et nous remercions vivement <strong>Philippe Le Guillou</strong> d’avoir généreusement accepté de nous faire profiter de son talent créateur et de sa grande intelligence des textes !</p>
<hr />
<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE DES OEUVRES DE PHILIPPE LE GUILLOU :</p>
<p><strong>Romans, récits</strong> :</p>
<p><em>L'Inventaire du vitrail</em>, Mercure de France, 1983.</p>
<p><em>Les Portes de l'apocalypse</em>, Mercure de France, 1984.</p>
<p><em>Le Dieu noir</em>, Mercure de France, 1987.</p>
<p><em>La Rumeur du soleil</em>, Gallimard, 1989.</p>
<p><em>Le Donjon de Lonveigh</em>, Gallimard, 1991.</p>
<p><em>Le Passage de l'Aulne</em>, Gallimard, 1993.</p>
<p><em>Livres des guerriers d'or</em>, Gallimard, 1995.</p>
<p><em>Les Sept Noms du peintre</em>, Gallimard, 1997, prix Médicis 1997</p>
<p><em>L'Orée des flots. Rêverie tristanienne</em>, suivi de <em>Pour une poétique arthurienne</em>, Artus, 1997.</p>
<p><em>Douze années dans l'enfance du monde</em>, Gallimard, 1999.</p>
<p><em>Les Proximités éternelles</em>, récits, Mercure de France, 2000.</p>
<p><em>Le Roi dort</em> (Gallimard, 2001) Prix Charles Oulmont de la Fondation de France 2001.</p>
<p><em>Les Marées du Faou</em>, Gallimard, 2003.</p>
<p><em>Après l'équinoxe</em>, Gallimard, 2005.</p>
<p><em>La Consolation</em>, Gallimard, 2006.</p>
<p><em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> suivi de <em>« Monsieur Gracq »</em>, Gallimard, Folio, 2007.</p>
<p><em>Fleurs de tempête</em>, Gallimard, 2008.</p>
<p><em>Le Dernier Veilleur de Bretagne</em>, Mercure de France, 2009.</p>
<p><em>Le Bateau Brume</em>, Gallimard, 2010.</p>
<p><em>L'Intimité de la rivière</em>, Gallimard, 2011.</p>
<p><em>Le Pont des anges</em>, Gallimard, 2012.</p>
<p><em>Le Chemin des livres</em>, Mercure de France, 2013.</p>
<p><em>Les Années insulaires</em>, Gallimard, 2013.</p>
<p><em>Paris intérieur</em>, récit, Gallimard, 2015.</p>
<p><em>Géographies de la mémoire</em>, Gallimard, 2016.</p>
<p><em>Novembre</em>, Gallimard, 2017.</p>
<p><em>La Sainte au sablier</em>, <em>Carnet d'un pèlerin</em>, Éditions Salvator, 2017.</p>
<p><em>La Route de la mer</em>, Gallimard, 2018.</p>
<p><em>Le Roman inépuisable – Roman du roman</em>, Gallimard, 2020.</p>
<p><strong>Essais</strong> :</p>
<p><em>La Main à plume</em>, Artus, 1987.</p>
<p><em>Julien Gracq. Fragments d'un visage scriptural</em>, La Table Ronde, 1991.</p>
<p><em>Le Songe royal. Louis II de Bavière</em>, Gallimard, 1996.</p>
<p><em>L'Inventeur de royaumes</em>. <em>Pour célébrer Malraux</em>, Gallimard, 1996.</p>
<p><em>Figures et rituels initiatiques dans le roman et le récit français : (1970-1980)</em>, thèse de doctorat soutenue en 1997 à l’Université de Rennes II.</p>
<p><em>Chateaubriand à Combourg. Une initiation chevaleresque</em>, avec des photos de Jean Hervoche, Christian Pirot ed., 1997.</p>
<p><em>Stèles à de Gaulle</em>, Gallimard, 2000.</p>
<p><em>Chateaubriand et la Bretagne</em>, Blanc Silex, 2002.</p>
<p><em>Stèles à de Gaulle</em>, suivi de <em>Je regarde passer les chimères</em>, édition revue et augmentée, Folio, 2010.</p>
<p><em>À Argol il n'y a pas de château</em>, Pierre-Guillaume de Roux, 2014.</p>
<p><em>Le Pape des surprises</em>, Gallimard, 2015.</p>
<p><em>Le Passeur</em>, Mercure de France, 2019.</p>
<p><em>La Pierre et le vent</em>, Tallandier, 2019.</p>
<hr />
<p><strong>7e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/12/06/La-7e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-26-novembre-2019-sur-Proust-%3A-%C2%AB-%C3%80-la-recherche-du-temps-perdu%C2%BB%2C-un-roman-philosophique-Conf%C3%A9rence-de-Luc-Fraisse%2C-professeur-de-Litt%C3%A9rature-fran%C3%A7aise-%C3%A0-l-Universit%C3%A9-de-Strasbourg."><em>Lire le billet du 11 décembre 2019</em></a>)</p>
<p><strong>Conférence de Luc Fraisse sur <em>Du côté de chez Swann</em>, de Marcel Proust, MARDI 26 NOVEMBRE 2019, à 14 heures, salles Saint-Nicolas, 3 rue Jeanne d'Arc, à Compiègne</strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong><em>À LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU</em> : UN ROMAN PHILOSOPHIQUE ?</strong></p>
<p><strong>Luc Fraisse</strong> est <strong>professeur de Littérature française à l'Université de Strasbourg</strong> et <strong>membre senior de l'Institut universitaire de France</strong>. Éminent spécialiste de l'oeuvre de Proust, il a édité plusieurs volumes de son oeuvre <em>À la recherche du temps perdu</em>, d'abord aux éditions du Livre de Poche <em>classique</em> (<em>La Prisonnière</em> en 2008 et <em>Albertine disparue</em> en 2009), puis aux éditions Classiques Garnier, «Bibliothèque de littérature du XXe siècle», <em>La Prisonnière</em> (<em>À la recherche du temps perdu</em>, t. V), en 2014 et <em>La Fugitive</em> (<em>À la recherche du temps perdu</em>, t. VI), en 2017. Ses nombreux travaux portent sur Proust, Shakespeare, Potocki, Henri Bosco, les rapports entre littérature majeure et littérature mineure, les fondements de l'histoire littéraire et surtout sur le symbolisme de la création littéraire, qu'il a étudié chez de nombreux auteurs. Il dirige la « Bibliothèque proustienne » et la <em>Revue d'études proustiennes</em> aux éditions Classiques Garnier.</p>
<p><strong>En 2013, il a publié un livre magistral de 1340 pages sur les rapports de l'oeuvre de Proust avec la philosophie : <em>L’Éclectisme philosophique de Marcel Proust</em>, Paris, Presses universitaires de Paris-Sorbonne, coll. «Lettres françaises», 2013. Ouvrage couronné par le prix de la Critique de l'Académie française, en 2014</strong>.</p>
<p><strong>L'objectif de cette nouvelle conférence consistera à s'interroger sur les rapports de l'oeuvre proustienne avec la philosophie</strong>. Nous tâcherons de cerner les enjeux posés par la notion même de <em>roman philosophique</em> pour caractériser <em>À la recherche du temps perdu</em>, et plus précisément <em>Du côté de chez Swann</em>, qui sera cette année au programme de la classe de Lettres supérieures (2019-2020). Il s'agit là d'un vrai <em>problème littéraire</em>, qui fera peut-être sourciller les philosophes (de la philosophie dans le <em>roman</em> ?) et laissera perplexes les littéraires (la littérature peut-elle être <em>philosophique</em> ?). C'est pourquoi il conviendra de définir les contours de ces champs respectifs - <em>roman</em> et <em>philosophie</em> -, en situant historiquement leur rencontre. Du XVIIIe siècle, avec Rousseau et <em>La Nouvelle Héloïse</em>, Diderot et <em>Jacques le fataliste</em>, aux romans de Hugo, <em>Les Misérables</em>, <em>L'Homme qui rit</em>, <em>Les Travailleurs de la mer</em>, en passant par les «études philosophiques» de Balzac (pensons notamment à <em>La Peau de chagrin</em>, dont le sous-titre de l'édition originale est précisément «roman philosophique»), quels sont les critères qui définissent le caractère <em>philosophique</em> du roman : un personnage philosophe, une histoire qui fait référence à des oeuvres philosophiques ou encore une voix narrative qui disserte et raisonne <em>philosophiquement</em> ? Comment l'énonciation romanesque peut-elle accueillir l'énoncé réflexif ? Des Lumières au romantisme, les modalités de cette association sont-elles identiques ? Tout ce qui relève de la pensée n'appartient pas nécessairement à la philosophie, <em>stricto sensu</em>. Nous verrons ainsi qu'il faudra donner une extension plus large au <em>philosophique</em> qui, dans le roman, ne peut être réduit au <em>conceptuel</em>. Et que dire du roman à thèse ? L'histoire littéraire nous apprend qu'il s'apparente plutôt au <em>roman réaliste</em> (cf. Susan Suleiman, <em>Le Roman à thèse ou l'autorité fictive</em>, PUF, 1983). Aux antipodes, on croise le «roman <em>pensif</em>», selon l'expression de Victor Hugo dans une dédicace de <em>L'Homme qui rit</em>, qui en est comme le modèle. Nous savons en effet que dans <em>Le Roman expérimental</em>, Zola disqualifie pareillement la poésie et la philosophie, qui sont pour lui le propre des «romanciers idéalistes». Zola refuse de frayer avec l'inconnu, dans lequel beaucoup d'écrivains se complaisent, selon lui : «Je crois que les romanciers expérimentateurs doivent également ne pas se préoccuper de cet inconnu, s'ils ne veulent pas se perdre dans les folies des poètes et des philosophes.» (<em>Le Roman expérimental</em>, GF-Flammarion, p. 77.). Ce que le romantisme a tenté d'unir, <em>poésie</em> (1) et <em>philosophie</em>, l'auteur des <em>Rougon-Macquart</em> veut le défaire au nom même de la méthode scientifique de Claude Bernard, qu'il affirme vouloir appliquer à ses romans. S'il paraît évident que le roman de Proust s'élève contre le roman réaliste, est-ce à dire que son ambition philosophique est un héritage du romantisme ? Et quelle est cette ambition ?</p>
<p>Nous partirons de l'essai de Roland Barthes recueilli dans <em>Le Bruissement de la langue</em>, et dont le titre est l'introït de <em>Du côté de chez Swann</em>, «Longtemps, je me suis couché de bonne heure». Barthes y montre que de <em>Jean Santeuil</em> à la <em>Recherche</em> (abréviation communément admise pour <em>À la recherche du temps perdu</em>), en passant par le <em>Contre Sainte-Beuve</em>, Proust hésite entre l'Essai et le Roman. «Cherchant un roman qui ne soit pas fait selon les idées de Sainte-Beuve», il opterait pour une «forme» qui ne soit ni roman ni essai mais les deux à la fois : une «tierce forme», selon le mot de Barthes. De la méditation sur le sommeil, qui ouvre <em>Du côté de chez Swann</em>, à la leçon de philosophie esthétique (sur l'art, l'univers de l'artiste) qui parachève <em>Le Temps retrouvé</em>, Proust développe ce qu'il faut bien appeler des <em>essais théoriques</em> dans un cadre strictement romanesque. Ces essais constituent-ils une forme à part, ainsi que le pense Barthes, ou sont-ils plutôt «sécrétés» par le roman lui-même, selon <strong>Luc Fraisse</strong> ? Voilà qui incite le lecteur à mettre sa réflexion et sa culture à l'épreuve. Celui-ci sera donc conduit à se demander si, dans le contexte intellectuel de la <em>Recherche</em>, la référence à Bergson est nécessaire pour expliquer les excursus sur la mémoire involontaire, et - de manière plus générale - comment les connaissances philosophiques de Proust, de Leibniz à Schopenhauer, en passant notamment par Kant, Schelling et quelques autres encore, informent son écriture réflexive. N'oublions pas non plus que le célèbre critique littéraire Albert Thibaudet, en 1923, rattache l'oeuvre proustienne aux <em>Essais</em> de Montaigne, tandis qu'Aldous Huxley, dans <em>Along the Road</em>, affirme retrouver dans celle-ci les maximes de La Rochefoucauld sur l'amour... Le cours cernera également cette interférence avec la pensée des moralistes.</p>
<p>Mais comme c'est le cas à chaque «Rencontre», la <em>conférence</em> commencera par interroger notre invité sur son parcours intellectuel, ses passions et, en l'occurrence, son travail de professeur entièrement consacré à la critique, que l'on a coutume de nommer «littérature secondaire». Fasciné, comme Proust, par les cathédrales, <strong>Luc Fraisse</strong> étudie minutieusement l'édifice des oeuvres littéraires dans ses nombreux ouvrages et articles. Dans <em>L'Oeuvre cathédrale</em>, il propose un dictionnaire qui analyse le symbolisme de la création littéraire dans la <em>Recherche</em>, en s'appuyant sur la connaissance proustienne de l'architecture médiévale. Lisant dans le premier quatrain des «Correspondances» de Baudelaire une image qui éclaire la démarche de Proust («La nature est un temple où de vivants piliers...»), Luc Fraisse explore avec finesse et brio les «forêts de symboles» qui s'étendent de <em>Du côté de chez Swann</em> au <em>Temps retrouvé</em> (On observe également cet intérêt pour le processus de création dans des travaux sur d'autres auteurs. Citons, entre autres Shakespeare, Potocki, Henri Bosco et Claude Simon.). Mais <strong>Luc Fraisse</strong> est aussi passionné par l'histoire littéraire, à laquelle il a consacré de nombreux travaux, cherchant à faire dialoguer les approches critiques les plus diverses dans une synthèse qui en tire le meilleur. Il accorde, par exemple, une attention toute particulière à «l'étude des sources», qu'il se réapproprie en la remettant en perspective et en la croisant avec des méthodes aussi différentes que celles de Charles Mauron, dans son <em>Introduction à la psychocritique</em>, et Jean Rousset, dans <em>Forme et signification</em> - pour ne citer que ces auteurs. Enfin, <strong>Luc Fraisse</strong> nourrit tout autant sa réflexion critique en s'inspirant des écrivains eux-mêmes. Citant Julien Gracq au début de <em>La Petite musique du style</em>, il en extrait «un enseignement général sur la création littéraire» qui le guide dans son travail : <em>«Chaque écrivain porte en lui une bibliothèque de formes.»</em> (p. 9). Voilà une belle formule qui semble bien <em>symboliser</em> <strong>le regard critique de Luc Fraisse</strong>. Il nous fera l'honneur de sa présence le 26 novembre prochain, et nous sommes d'ores et déjà impatients de l'écouter sur le thème de cette <strong>7e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></strong> ! Nous le remercions par avance d'accepter de nous faire profiter généreusement de sa grande curiosité intellectuelle et de son immense érudition.</p>
<p><em>La démarche du cours</em> :</p>
<p>Cette conférence est articulée au cours d'<strong>Histoire littéraire</strong> sur l'oeuvre de Marcel Proust, écrivain du XXe siècle. Ce cours du lundi fera écho au cours <strong>Genres / Notions</strong> du vendredi sur le roman. L'approche du problème littéraire énoncé ci-dessus partira du triple questionnement suivant, adapté à la curiosité des futurs Hypokhâgneux : qu'est-ce qu'un <em>roman</em> ? Qu'est-ce qu'un <em>roman philosophique</em> ? Peut-on lire le <em>roman proustien</em> dans cette perspective ?</p>
<p>Contre le séparatisme <em>techniciste</em> (2) et l’émiettement des savoirs, on voudrait montrer aux étudiants - même très modestement - <strong>l’unité de la pensée créatrice - de Proust, en l'occurrence - et les convergences des disciplines (études littéraires, philosophie, histoire, sciences humaines)</strong>, malgré leurs évidentes différences épistémologiques. <strong>Le travail et la réflexion de Luc Fraisse sont d’une aide précieuse pour étudier le sens de l’oeuvre proustienne dans cette perspective</strong>.</p>
<p>(1) Au sens étymologique de <em>création littéraire</em>.</p>
<p>(2) Le <em>technicisme</em> est la maladie scolaire du <em>formalisme</em>, la réduction du texte à ses <em>procédés</em>, ce qu'il faudrait pouvoir combattre, ne serait-ce que pour redonner <em>goût</em> à la littérature. L'étude des <em>formes littéraires</em> est tout à fait légitime - et même nécessaire : la problématique de cette nouvelle conférence le démontre ! -, mais elle n'a bien évidemment rien à voir avec la <em>procédémania</em>...</p>
<hr />
<p><em><strong>Luc Fraisse</strong> a été invité mardi 29 janvier au <strong>Collège de France</strong> par Antoine Compagnon - dans le cadre du cours annuel de ce dernier consacré à <strong>PROUST ESSAYISTE</strong> - pour donner une conférence sur le sujet suivant :</em></p>
<p><strong><em>« Le roman de Proust se termine-t-il par un essai théorique?»</em></strong></p>
<p>Visionner <a href="https://www.college-de-france.fr/site/antoine-compagnon/seminar-2019-01-29-17h45.htm">la conférence de Luc Fraisse sur le site du Collège de France</a>.</p>
<hr />
<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE</p>
<p><em>Le Processus de la création chez Marcel Proust</em>, Paris, Corti, 1988. Publié avec le concours du C.N.R.S.</p>
<p><em>Proust en toutes lettres</em>, Paris, Bordas, 1989. En collaboration avec Michel Raimond.</p>
<p><em>L’Œuvre cathédrale – Proust et l’architecture médiévale</em>, Paris, Corti, 1990. Ouvrage couronné par l’Académie française – prix de l'essai 1991 – ; rééd. augmentée Paris, Classiques Garnier, «Bibliothèque proustienne», 2014.</p>
<p><em>Lire « Du côté de chez Swann »</em>, Paris, Dunod, 1993 ; rééd. Paris, Armand Colin, 2005.</p>
<p><em>« Roméo et Juliette » et la dramaturgie shakespearienne</em>, Strasbourg, Presses Universitaires, 1994.</p>
<p><em>Le Mystère de la cathédrale de Gap</em>, documents inédits publiés pour le centenaire (1895-1995), Gap, Éditions des Hautes-Alpes, 1994.</p>
<p><em>L’Esthétique de Marcel Proust</em>, Paris, SEDES, 1995.</p>
<p><em>Marcel Proust au miroir de sa correspondance</em>, Paris, SEDES, 1996.</p>
<p><em>Proust et le japonisme</em>, Strasbourg, Presses universitaires, 1997.</p>
<p><em>La Correspondance de Proust – son statut dans l’œuvre, l’histoire de son édition</em>, Besançon, Annales littéraires de Franche-Comté, 1998.</p>
<p><em>« Sodome et Gomorrhe » de Marcel Proust</em>, Paris, SEDES, 2000.</p>
<p><em>Les Fondements de l’histoire littéraire, de Saint-René Taillandier à Lanson</em>, Genève-Paris, Champion, « Romantisme et modernités », 2002. Prix Roland de Jouvenel de l’Académie française.</p>
<p><em>Potocki et l’imaginaire de la création</em>, Paris, Presses universitaires de Paris-Sorbonne, coll. « Lettres françaises », 2006.</p>
<p><em>L’Histoire littéraire, un art de lire</em>, Paris, Gallimard, « La Bibliothèque », 2006.</p>
<p><em>La Petite Musique du style. Proust et ses sources littéraires</em>, Paris, Classiques Garnier, « Bibliothèque proustienne », 2011.</p>
<p><em>L’Éclectisme philosophique de Marcel Proust</em>, Paris, Presses universitaires de Paris-Sorbonne, coll. «Lettres françaises», 2013. Ouvrage couronné par le prix de la Critique de l'Académie française 2014.</p>
<p><em>Marcel Proust et Reynaldo Hahn. Une création à quatre mains</em>, en collaboration avec Philippe Blay et Jean-Christophe Branger, Paris, Classiques Garnier, « Bibliothèque proustienne », 2018.</p>
<p><em>Proust et la stratégie militaire</em>, Paris, Hermann, « Savoir Lettres », 2018.</p>
<p><em>Proust et Versailles</em>, Paris, Hermann, 2018.</p>
<hr />
<p><strong>6e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2018/12/11/La-6e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-lundi-26-novembre-2018-%3A%C2%ABVerlaine-et-l-Art-po%C3%A9tique%3A-poeta-vates-ou-poeta-faber-%C2%BB-Conf%C3%A9rence-de-Bertrand-Degott%2C-enseignant-chercheur-%C3%A0-l%E2%80%99Universit%C3%A9-de-Besan%C3%A7on%2C-po%C3%A8te-et-traducteur.">Lire le billet du 11 décembre 2018</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Bertrand Degott sur le Verlaine de <em>Romances sans paroles</em> LUNDI 26 NOVEMBRE 2018, à 14 heures, salles Saint-Nicolas, 3 rue Jeanne d'Arc, à Compiègne</strong>.</p>
<p><em>Thème de cette nouvelle conférence</em> :</p>
<p><strong>VERLAINE ET L'ART POÉTIQUE : <em>POETA VATES</em> OU <em>POETA FABER</em> ?</strong></p>
<p>Bertrand Degott, enseignant-chercheur à l’Université de Besançon, poète et traducteur des <em>Sonnets</em> de Shakespeare, tentera de répondre à cette question, en prêtant plus particulièrement attention au recueil intitulé <em>Romances sans paroles</em> (1874), qui sera au programme de la classe de Lettres supérieures, à la prochaine rentrée. Sa réflexion sur l’œuvre de Verlaine nous donnera l’occasion de l’entendre aussi sur sa propre poésie, que l’on peut lire dans plusieurs livres publiés, notamment, chez Gallimard et aux éditions de La Table ronde. Il a publié sa thèse sous le titre <em>Ballade n’est pas morte. Étude sur la pratique de la ballade médiévale depuis 1850</em>, Annales littéraires de l’Université de Franche-Comté, 1996.</p>
<p>L'opposition, ancienne, entre le poète «inspiré» (<em>poeta vates</em>) et le poète «artisan» (<em>poeta faber</em>) questionne la nature de la poésie et permet de problématiser les enjeux de <em>l'art poétique</em> : d'Aristote à Boileau, en passant par Horace, et jusqu'à Claudel, et même plus récemment Guillevic ou Michel Deguy (il y en a d'autres), il n'est pas de poète - ou de théoricien de la poésie - qui n'ait réfléchi à la «nature» du poème et à ses conditions d'énonciation, qu'il insiste sur des règles, des techniques voire sur le «métier» ou qu'il privilégie le <em>furor poeticus</em>, inspiration du dieu ou de la Muse, ou encore la «sorcellerie évocatoire» (Baudelaire) et «l'alchimie du verbe» propre au Voyant (Rimbaud) : «Nascuntur poetae, fiunt oratores», selon le mot de Quintilien, qui affirme que l'on naît poète mais que l'on devient orateur... Diderot, dans la <em>Suite de l'Entretien</em>, dit cependant, à propos du poète latin Horace : «Ce poète, ou <em>faiseur</em>...», selon le sens de l'étymologie de <em>poète</em> et de <em>poésie</em>. Mais la <em>création</em> poétique est-elle exactement du même ordre que la <em>fabrication</em> d'un objet? Il faut se méfier des réponses hâtives.</p>
<p>Hypothèse : si une telle opposition a pu traverser le temps, c'est qu'elle ravive et reconduit parfois - selon des modalités diverses et <em>mutatis mutandis</em> (1) - certaines des grandes querelles dont nous ne sommes pas encore tout à fait sortis, celles qui rendent antagoniques le classicisme et le romantisme (et avant lui le baroque), l'apollinien et le dionysiaque (Nietzsche), le fond et la forme, la matière et l'esprit, le corps et l'âme, le visible et l'invisible... Voilà un beau noeud gordien, impossible à trancher, que nous essaierons toutefois de comprendre, à la lumière de cette proposition de Baudelaire, qui fait fusionner le poétique, le rhétorique et le métaphysique : « Car il est évident que les rhétoriques et les prosodies ne sont pas des tyrannies inventées arbitrairement, mais une collection de règles réclamées par l’organisation même de l’être spirituel» (<em> Salon de 1859</em>, « Le Gouvernement de l’imagination », dans <em>Curiosités esthétiques</em>, Classiques Garnier, éd. de Henri Lemaître, p. 328). La situation du Verlaine des <em>Romances sans paroles</em> est complexe : lorsqu'en 1874 notre poète affirme, dans son fameux «Art poétique», «De la musique avant toute chose !», de quoi parle-t-il, au juste ? La musique n'est-elle pas ce qui caractérise en propre Orphée, le « Threicius vates », présenté par Virgile, dans les <em>Géorgiques</em> comme un poète inspiré par les dieux ? Mais comment comprendre alors sa charge contre l'inspiration, dans son étude sur Charles Baudelaire, où il écrit, sous l'autorité de l'auteur des <em>Fleurs du Mal</em> : «...elle (l'inspiration) fait des dupes jusque chez les poètes... - l'Inspiration - ce tréteau ! - et les Inspirés - ces charlatans ! - ... » (<em>Oeuvres en prose complètes</em>, «Bibliothèque de la Pléiade», p. 605) ? A travers l'exemple de Verlaine, nous essaierons de voir si l'opposition entre le <em>vates</em> et le <em>faber</em>, opposition aussi symbolique que schématique en fin de compte, ne dissimule pas un autre <em>problème</em> poétique, que le romantisme a mis au premier plan de l'art et qui est apparu en définitive comme la fin ultime de la poésie, mettant « l’inspiré » et « l’artisan » sur la même voie, à défaut de les réconcilier : le problème de <em>la connaissance poétique</em>. Il nous sera très utile d'entendre à ce sujet un fin spécialiste des formes poétiques, poète lui-même et traducteur de poésie, qui écrit en vers, notamment des sonnets, s'intéresse et s'adresse parfois aux anciens, tel Jean-Baptiste Chassignet (1571-1635), auteur, entre autres, d'un recueil poétique intitulé <em>Le Mépris de la vie et consolation contre la mort</em> (1594). Ainsi dans <em>Battant</em>, éditions de La Table Ronde, coll. «L'Usage des jours» :</p>
<p><em>A J. B. Chassignet</em> <em>(A)</em></p>
<p>Il a fait froid ces derniers jours à Besançon</p>
<p>si froid qu’avec la bise le beau temps persiste</p>
<p>mais c’est l’hiver et je pense à toi (Jean-Baptiste)</p>
<p>aux psaumes, au mépris… sais-tu que des glaçons</p>
<p>se sont formés dans nos fontaines ? nos rues sont</p>
<p>froidement celles que tu as connues, moins tristes</p>
<p>pourtant, peut-être… et puis, comment te dire ? Christ</p>
<p>n’a-t-il pas étoilé la vitre où nous passons</p>
<p>nos doigts comme autrefois dans les dessins du givre ?</p>
<p>sur tes bouquins je m’écarquille encore les yeux</p>
<p>je mets ma phrase à la forme interrogative</p>
<p>mais comment te parler ? comment dire, grands dieux !</p>
<p>-par-delà quatre siècles – que sa violence</p>
<p>je l’éprouve aujourd’hui jusque dans ton silence…</p>
<p>Ainsi quand il traduit les sonnets de Shakespeare, « mis en vers français », et que dans son travail il convoque, pour « définir » la poésie shakespearienne ou expliquer ses partis pris, Pétrarque, Wordsworth, Hugo, Mallarmé et Yves Bonnefoy (1923-2016), immense poète récemment disparu et lui aussi traducteur de Shakespeare. Il faut faire ici une place particulière à Verlaine, « toujours amoureux de la rime », que Bertrand Degott cite pour justifier sa «traduction versifiée». Et le livre est dédié à Jean Grosjean (1912-2006), autre grand poète, également traducteur de nombreux textes bibliques mais aussi de Shakespeare ( il a contribué au prestige éditorial de la NRF auprès de Jean Paulhan, Marcel Arland et Dominique Aury, puis de Georges Lambrichs.). Il a joué, je crois, un rôle important dans la formation poétique de notre invité qui, je l’espère, nous parlera aussi de cette belle rencontre. Ce dialogue entre l’Ancien et le Nouveau est donc fondamental pour nourrir la réflexion sur la poésie aussi bien que sa «pratique».</p>
<hr />
<p><em>(A) C'est un sonnet, et malheureusement, la configuration de ce blogue ne me permet pas de restituer la structure strophique de ce poème</em>.</p>
<p>(1) Les termes de ces couples de «contraires» ne sont pas exactement équivalents.</p>
<hr />
<p><strong>Bibliographie non exhaustive de Bertrand Degott</strong> :</p>
<p><em>Scherwiller : images d'un village</em> (avec François Keck), 1981.</p>
<p><em>Éboulements et taillis</em>, Gallimard, 1996.</p>
<p><em>Ballade n'est pas morte</em>, Annales littéraires de l'université de Besançon, 1996.</p>
<p><em>Avant qu'ils tombent</em>, présentation de Laurent Book, Éd. associatives Clapàs, 1996.</p>
<p><em>Le vent dans la brèche</em>, Gallimard, 1998.</p>
<p><em>Plusieurs vols d'étourneaux</em>, Les Deux-Siciles, 2003.</p>
<p><em>Battant</em>, La Table ronde, 2006.</p>
<p><em>À chaque pas</em>, L'Arrière-pays, 2008.</p>
<p><em>More à Venise</em> / <em>Petit testament</em>, La Table ronde, 2013.</p>
<p><em>Plus que les ronces</em>, L'Arrière-pays, 2013.</p>
<p>« La Corde bouffonne. De Banville à Apollinaire», in <em>Études françaises</em>, vol. 51, 3, numéro préparé par Arnaud Bernadet et Bertrand Degott, Montréal, 2015</p>
<p><strong>Traduction</strong></p>
<p><em>Sonnets de William Shakespeare</em>, La Table ronde, 2007.</p>
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<p><strong>5e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2017/12/06/La-5e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-jeudi-30-novembre-2017-%3A-%C2%ABChateaubriand%2C-po%C3%A8te-du-souvenir%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-B%C3%A9atrice-Didier%2C-critique-litt%C3%A9raire%2C-%C3%A9ditrice%2C-professeur-%C3%A9m%C3%A9rite-%C3%A0-l-%C3%89cole-normale-sup%C3%A9rieure-de-Paris.">Lire le billet du 11 décembre 2017</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Béatrice Didier sur le Chateaubriand des <em>Mémoires d'outre-tombe</em> JEUDI 30 NOVEMBRE 2017</strong>, à 14 heures, à l'Université de Technologie de Compiègne, amphithéâtre Colcombet.</p>
<p><em>Thème de cette nouvelle conférence</em> :</p>
<p><strong>CHATEAUBRIAND, POÈTE DU SOUVENIR</strong></p>
<p>C’est en effet <strong>le poète du souvenir</strong> qui nous intéressera, celui des j<em>oies de l’automne</em>, de<em> la Sylphide</em> et de <em>la grive de Montboissier</em>, de la <em>conversation avec la lune</em> et de <em>la rêverie au Lido</em>. Son rapport au <em>romantisme</em> sera aussi un axe de réflexion privilégié.</p>
<p>Les points de réflexion suivants, proposés par Béatrice Didier elle-même : <strong><em>Chateaubriand au confluent de plusieurs traditions (autobiographie, mémoires historiques), la remontée de la mémoire : mémoire et oubli (ne pas tout dire), la recherche de l'identité : les </em>Mémoires<em>, moyen d'affirmer l'unité d'une personnalité tripartite (voyageur, écrivain, homme politique)</em></strong> seront articulés aux<strong><em> modalités de l'écriture de Chateaubriand, à ce qui apparaît comme « poétique » dans cette œuvre : harmonies des images et des sonorités, goût du mystère et du sublime, sentiment de l’infini</em></strong> (travail prévu en cours). Et comme les khâgneux aussi ont le romantisme au programme (avec Rousseau, Lamartine et Hugo), nous serons très heureux d’entendre notre invitée sur les <strong><em>rapports que Chateaubriand a entretenus avec le ou les romantismes des XVIIIe et XIXe siècles.</em></strong></p>
<p><strong>Béatrice Didier, professeur émérite à l’ENS de Paris, est critique littéraire et écrivain</strong>. Elle est spécialiste de la littérature des Lumières et du Romantisme et a beaucoup travaillé sur la musique des XVIIIe et XIXe siècles, dans ses rapports avec les œuvres littéraires. Elle dirige actuellement l’édition des œuvres complètes de Chateaubriand, comme elle l’a fait pour George Sand, chez Honoré Champion. Mais elle a aussi écrit sur Stendhal, et son doctorat d’Etat porte sur l’imaginaire chez Senancour. <em>Cette nouvelle « Rencontre » sera pour nous l'occasion de rendre hommage à Béatrice Didier et à son immense oeuvre critique</em>.</p>
<p><strong>Bibliographie</strong> :</p>
<p>(à compléter avec les informations que l'on peut consulter sur le site de Béatrice Didier :https://www.beatricedidier.fr/)</p>
<p><em>L’Imaginaire chez Senancour</em>, Corti, 1966, 2 vol. in-8, reprint Slatkine 2011.</p>
<p><em>Le XVIIIe siècle, III, 1778-1820, Histoire de la littérature</em>, Arthaud, 1976.</p>
<p><em>Sade</em>, essai, Denoël, 1976 (partiellement traduit en japonais).</p>
<p><em>Un dialogue à distance : Gide et Du Bos</em>, Desclée de Brouwer, 1976.</p>
<p><em>Le Journal intime,</em> PUF, 1976, rééd. 1991, traduit en japonais, 1987.</p>
<p><em>L’Écriture-femme</em>, PUF, 1981, rééd. 1991.</p>
<p><em>Stendhal autobiographe</em>, PUF, 1983 (Prix de la critique de l’Académie française).</p>
<p><em>La Musique des Lumières</em>, PUF, 1985.</p>
<p><em>Senancour romancier</em>, SEDES, 1986.</p>
<p><em>La Voix de Marianne</em>, essai sur Marivaux, Corti, 1987.</p>
<p><em>Le Siècle des Lumières</em>, éd. M. A. (diff. Gallimard), 1987.</p>
<p><em>La Littérature de la Révolution française</em>, PUF, « Que sais-je ? », 1988.</p>
<p><em>Écrire la Révolution, 1789-1799</em>, essai, PUF, 1989.</p>
<p><em>Littérature du XVIIIe siècle</em>, Nathan, 1992, 2e éd. PUR, 2004.</p>
<p><em>La Littérature française sous le Consulat et l’Empire</em>, PUF, « Que sais-je ? », 1992.</p>
<p><em>Beaumarchais ou la Passion du drame</em>, PUF, 1994.</p>
<p>R<em>aison et alphabet. Le paradoxe des dictionnaires au XVIIIe siècle</em>, PUF, 1995 (Prix Joseph-Saillet de l’Académie).</p>
<p>J<em>acques le Fataliste et son maître de Diderot</em>, Gallimard, « Foliothèque », 1998.</p>
<p><em>George Sand écrivain</em>. « Un grand fleuve d’Amérique », PUF, 1998.</p>
<p><em>Le Roman français au XVIIIe siècle</em>, Ellipses, 1998.</p>
<p><em>Les Liaisons dangereuses. Pastiches et ironie</em>, éd. du Temps, 1999.</p>
<p><em>Chateaubriand</em>, Ellipses, 1999.</p>
<p><em>Mme de Staël</em>, Ellipses, 1999.</p>
<p><em>Corinne ou l’Italie de Mme de Staël</em>, Gallimard, « Foliothèque », 2000.</p>
<p><em>Stendhal</em>, Ellipses, 2000.</p>
<p><em>Diderot</em>, Ellipses, 2001.</p>
<p><em>Diderot dramaturge du vivant</em>, PUF, 2001.</p>
<p><em>La Dictée du bonheur. Paroles, échos et écritures dans La Chartreuse de Parme</em>, Klincksieck, 2002.</p>
<p><em>Histoire de Gil Blas de Santillane de Lesage</em>, Gallimard, « Foliothèque », 2003.</p>
<p><em>Beaumarchais ou le Génie de la comédie</em>, à paraître.</p>
<p><em>À l’extrême de l’écriture de soi. Les derniers textes autobiographiques de J.-J. Rousseau</em>, à paraître.</p>
<p><em>L’Infâme et le sublime. Les Philosophes des Lumières devant le Sacré</em>, Hachette, en préparation.</p>
<p><em>Le livret d’opéra au XVIIIe siècle</em>, Oxford, Voltaire Foundation, SVEC, janv. 2013.</p>
<hr />
<p><strong>4e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2016/12/05/La-4e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-29-novembre-2016-%3A-%C2%ABLa-Litt%C3%A9rature-et-le-Mal%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Mohamed-Mbougar-Sarr%2C-%C3%A9crivain%2C-laur%C3%A9at-du-prix-Ahmadou-Kourouma-2015-pour-son-roman-%C2%ABTerre-Ceinte%C2%BB.">Lire le billet du 3 décembre 2016</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Mohamed Mbougar Sarr sur <em>Terre ceinte</em> MARDI 29 NOVEMBRE 2016</strong> :</p>
<p><strong>LA LITTÉRATURE, LA POLITIQUE ET LE MAL</strong></p>
<p>La conférence de Mohamed Mbougar Sarr s'inscrira dans le programme de littérature 2016-2017 de l'Hypokhâgne du lycée Pierre d'Ailly, qui comprendra notamment les <em>Maximes</em> de La Rochefoucauld et <em>Les Diaboliques</em> de Barbey d'Aurevilly, éclairées par <em>La Littérature et le Mal</em>, de Georges Bataille, dont les futurs Hypokhâgneux auront lu quelques chapitres importants.</p>
<p>Comme ce programme y invite, la conférence sera aussi placée sous les auspices de Bataille. Mais au-delà de son œuvre, dont on se demandera si les catégories sont pertinentes pour lire <em>Terre ceinte</em>, il sera question de réfléchir plus généralement, avec ce roman, sur la représentation du Mal dans la littérature.</p>
<p>Mohamed Mbougar Sarr est né en 1990 au Sénégal. Il a été formé au Prytanée militaire de Saint-Louis (Sénégal) et au lycée Pierre d'Ailly de Compiègne, où il a été élève en classes préparatoires aux grandes écoles littéraires (Hypokhâgne et Khâgne Lettres modernes) de 2009 à 2012. Il prépare actuellement une thèse de doctorat à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, à Paris. Il a reçu le <em>prix Stéphane Hessel de la jeune écriture francophone</em> en 2014 pour sa nouvelle intitulée « La Cale ».</p>
<p><strong>Distinctions pour <em>Terre ceinte</em></strong> (éditions Présence africaine) :</p>
<p><strong>Prix Ahmadou Kourouma 2015</strong></p>
<p>Grand Prix du Roman Métis 2015</p>
<p>Prix Métis des Lycéens 2015</p>
<p>Finaliste du Prix des Cinq continents de la Francophonie 2015</p>
<hr />
<p>Sur <em>Terre ceinte</em> (choix) :</p>
<p><strong>Presse écrite et en ligne</strong></p>
<p><strong>*Le Monde</strong> : Article en ligne 4 mai 2015 <em>Le roman d’un jeune Sénégalais, Terre ceinte, reçoit le prix Kourouma 2015</em>.</p>
<p>http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/05/04/le-roman-d-un-jeune-senegalais-terre-ceinte-recoit-le-prix-kourouma-2015_4626718_3212.html</p>
<hr />
<p><strong>*Le Figaro</strong> : Article en ligne : 1er décembre 2015 : <em>Mbougar Sarr, Grand prix du Roman Métis</em>.</p>
<p>http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2015/12/01/97001-20151201FILWWW00383-mbougar-sarr-grand-prix-du-roman-metis.php</p>
<hr />
<p><strong>Télévision et Radio</strong></p>
<p><strong>*France Ô</strong> : Emission « Page 19 »</p>
<p>http ://www.franceo.fr/emissions/page-19/videos/episode_17_22-02-2015_936465?onglet=tous&page=4</p>
<hr />
<p><strong>*France 5</strong> : « Les Grandes Questions » : Va-t-on vivre le meilleur des mondes?</p>
<p>http ://www.france5.fr/emission/50b896a5bb947831d1008027/560e242a706765d0c35b7e06</p>
<hr />
<p><strong>Entretiens</strong></p>
<p><strong>*Africultures</strong> : « Je suis engagé dans un point-virgule ».</p>
<p>http ://www.africultures.com/php/?nav=article&no=12951</p>
<hr />
<p><strong>*The Dissident</strong> : “L’intégrisme est le grand problème du 21e siècle”.</p>
<p>http://the-dissident.eu/7916/mohamed-mbougar-sarr-lintegrisme-est-le-grand-probleme-du-21eme-siecle/</p>
<hr />
<p><strong>Interventions ou communications universitaires</strong></p>
<p><strong>*Université Lyon II</strong> : Intervention sur <em>Le Politique en Littérature africaine</em></p>
<p>http://passagesxx-xxi.univ-lyon2.fr/le-politique-en-litterature-673656.kjsp</p>
<hr />
<p><strong>*Communication du Dr Abdoulaye Chimère NDIAYE</strong> : « Un palimpseste du chaos: <em>Terre ceinte</em> de Mohamed Mbougar Sarr et <em>Les Possédés</em> de F.M. Dostoïevski » (Colloque sur l’intertextualité au Goethe Institut de Dakar : 12-13 avril 2016)</p>
<hr />
<p><strong>3e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2015/11/27/3e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BBConf%C3%A9rence-de-Beno%C3%AEt-Chantre-sur-l-anthropologue-Ren%C3%A9-Girard.-%C2%AB-Du-d%C3%A9sir-mim%C3%A9tique-%C3%A0-l%E2%80%99apologie-du-christianisme.-%C2%BB">Lire le billet du 27 novembre 2015</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Benoît Chantre sur <em>René Girard</em> JEUDI 26 NOVEMBRE 2015</strong> :</p>
<p><strong>DU DÉSIR MIMÉTIQUE À L'APOLOGIE DU CHRISTIANISME</strong></p>
<p>Le thème de la conférence sera double. Il est d’abord question d’éclairer, pour nos étudiants, la fameuse théorie du désir mimétique que René Girard a commencé à développer dans son livre<em> Mensonge romantique et vérité romanesque</em> en 1961. A cette réflexion littéraire et plus largement <strong>anthropologique</strong> je souhaite que Benoît Chantre ajoute une réflexion sur le caractère <strong>apologétique</strong> de l’œuvre de Girard, ce qui permettrait de questionner et de rapprocher avec profit sa démarche de celle de Pascal, dont les <em>Pensées</em> sont au programme des Hypokhâgneux cette année.</p>
<p>Docteur ès lettres et éditeur de sciences humaines, Benoît Chantre est fellow de la fondation Imitatio (San Francisco), membre associé du Centre international d’étude de la philosophie française contemporaine (CIEPFC, Rue d’Ulm), et président de l’Association <em>Recherches Mimétiques</em>. Il a collaboré à diverses revues (<em>Artpress</em>, <em>Esprit</em>, <em>L’Infini</em>, <em>La Revue des deux mondes</em>…), écrit sur des artistes contemporains et organisé des colloques universitaires ou des rencontres d’écrivains, à Paris et à l’Académie de France à Rome (Villa Médicis). Ses recherches portent sur les œuvres de Bergson, Bernhard, René Girard, Levinas, Péguy ou Simone Weil. En tant que dramaturge, il a travaillé pour l’opéra et le théâtre : livret du <em>Chant de Lune</em> (Compiègne, 1991 ; Bourg-la-Reine, 2002) ; dramaturgie du <em>Naufragé</em> de Thomas Bernhard (Avignon, 2001 ; Paris, 2002) ; dramaturgies du <em>Messie</em> de Haendel (Théâtre du Châtelet, Paris, 2011) et du <em>Roi pasteur</em> de Mozart (Théâtre du Châtelet, Paris, 2014). Il partage aujourd’hui son activité entre l’édition, la recherche et l’écriture.</p>
<p><strong>Bibliographie</strong></p>
<p>• <em>La Migraine d’Orphée</em>, La Tuilerie tropicale, 1988.</p>
<p>•<em> La Divine Comédie</em>, avec Philippe Sollers, Desclée de Brouwer, 2000.</p>
<p>• <em>Le Choix de Pascal</em>, avec Jacques Julliard, Desclée de Brouwer, 2004. Réédition : « Champs », Flammarion.</p>
<p>• <em>Achever Clausewitz</em> avec René Girard, Carnets Nord, 2007 ; édition revue et augmentée, « Champs », Flammarion, 2012.</p>
<p>• <em>Péguy point final</em>, Le Félin, 2014.</p>
<pre></pre>
<p><strong>Films d’entretiens avec René Girard</strong></p>
<p>• <em>La Violence et le sacré</em>, Arte, 2006.</p>
<p>• <em>Le Sens de l’histoire</em>, Centre Pompidou, 2008.</p>
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<p><strong>2e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2015/06/10/2e-%C3%A9dition-des-%C2%AB-Rencontres-de-Pierre-d%E2%80%99Ailly-%C2%BB-%3A-Conf%C3%A9rence-de-Lucie-Albertini-Guillevic-le-29-mai-dernier.Un-grand-moment-d%C3%A9coute-et-des-%C3%A9changes-stimulants...">Lire le billet du 10 juin 2015</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de Lucie Albertini-Guillevic VENDREDI 29 MAI 2015 sur l’un des plus grands poètes du XXe siècle : <em>Guillevic</em> (1907-1997).</strong></p>
<p><strong>«L’EXIGENCE DE L'HIRONDELLE / EST AUSSI IMPÉRIEUSE QUE CELLE DE L'OCÉAN. » : RÉFLEXION ET DISCUSSION SUR LA POÉSIE DE GUILLEVIC : <em>TERRAQUÉ</em> (1942)</strong></p>
<p><strong>Lucie Albertini-Guillevic</strong> a été la compagne du poète de <em>Terraqué</em> et de <em>Du domaine</em> jusqu’à sa mort, en 1997. Elle est <strong>écrivain, traductrice et éditrice des œuvres posthumes de Guillevic chez Gallimard.</strong></p>
<p><strong>Dernières parutions</strong> :</p>
<p><em>Accorder. Poèmes 1933-1996</em>. Édition et postface de Lucie Albertini-Guillevic. Gallimard, collection Blanche, 2013.</p>
<p><em>Relier. Poèmes 1938-1996</em>. Édition et préface de Lucie Albertini-Guillevic. Gallimard, collection Blanche, 2007.</p>
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<p><strong>1re édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/11/25/Revue-des-Deux-Monde-%3A-Michel-Cr%C3%A9pu%2C-Du-truc.-Aux-%C3%A9l%C3%A8ves-du-lyc%C3%A9e-Pierre-d%E2%80%99Ailly-de-Compi%C3%A8gne%2C-en-souvenir-d%E2%80%99une-belle-rencontre.">Lire le billet du 25 novembre 2013</a>)</em></p>
<p><strong>Conférence de</strong> <strong>Michel Crépu, directeur de la <em>Revue des Deux Mondes</em> et écrivain (directeur de la NRF depuis janvier 2015)</strong> <strong>MARDI 19 NOVEMBRE 2013</strong> :</p>
<p><strong>LE NUMÉRIQUE, LA CULTURE, L'HUMANISME ET «L'OTIUM»</strong>.</p>
<p><strong>Quelques livres de Michel Crépu</strong> :</p>
<p>• <em>Charles Du Bos</em>, éditions du Félin, 1990.</p>
<p>• <em>Tombeau de Bossuet</em>, éditions Grasset, 1997.</p>
<p>• <em>Ce vice encore impuni</em>, précédé de <em>Le Silence des livres</em>, par George Steiner, éditions Arléa, 2006.</p>
<p>• <em>Le Souvenir du monde</em>.- <em>Essai sur Chateaubriand</em>, éditions Grasset, 2011.</p>
<p>• <em>Lecture : Journal littéraire (2002-2009),</em> éditions Gallimard, coll. « L’Infini », 2012.</p>
<p>• <em>En découdre avec le pré</em>. – Sur Philippe Jaccottet, éditions des crépuscules, 2012.</p>
<p>• <em>Un jour</em> (récit), éditions Gallimard, 2015.</p>
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Rentrée en Hypokhâgne lundi 4 septembre 2023... Premier cours de Lettres, lundi 4, de 10h10 à 13h05. Ordre du jour, recommandations, programme des réflexions et des travaux à venir.
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2023-08-28T10:52:00+02:00
2023-08-31T11:13:51+02:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Molie_re.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>UN CLIN D’ŒIL AUX ANCIENS HK ET UN SALUT DE BIENVENUE AUX NOUVEAUX</strong> :</p>
<p><strong>MOLIÈRE OU « LE GÉNIE A TOUT CE QU'IL LUI FAUT DANS SON CERVEAU. »</strong>... Victor Hugo, <em>William Shakespeare</em> (« Les Génies»)</p>
<p>Dessin humoristique de Catherine Meurisse, extrait de son excellent livre <em>Mes hommes de lettres</em>, éditions Sarbacanne, 2008. © Catherine Meurisse et les éditions Sarbacanne.</p>
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<p><strong>LUNDI 4 SEPTEMBRE : ORDRE DU JOUR</strong></p>
<p>Accueil en classe des élèves <strong>(plus tôt, accueil internat à préciser, <ins><a href="https://pierre-dailly-compiegne.ac-amiens.fr//">voir site du lycée</a></ins>)</strong>, présentation générale par le professeur principal, coordonnateur de l'HK. Durée moyenne : une heure. Ensuite, cours selon l'emploi du temps, qui vous sera communiqué dès la première heure.</p>
<p><strong>* Pour le COURS DE LETTRES : LUNDI 4 SEPTEMBRE : 10H10-13h05</strong></p>
<p>Il est nécessaire d'apporter ce jour-là la bibliographie que vous avez pu télécharger sur le site du lycée (ou qui vous a été remise), ainsi que les œuvres au programme, dans la mesure du possible. <strong>Il est en effet impératif que tous les élèves possèdent la même édition des œuvres qui seront étudiées cette année</strong> : je voudrais m'en assurer avec vous. Même si les raisons paraissent évidentes, j'expliquerai précisément pourquoi en cours. <strong>La bibliographie sera utile pour comprendre les informations que je donnerai au sujet des khôlles : textes à lire, calendrier, organisation.</strong></p>
<p><strong>Je présenterai ensuite <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2023/07/03/Aux-futurs-Hypokh%C3%A2gneux-%3A-programme-d-%C3%A9tude-pour-l-ann%C3%A9e-2023-2024-et-programme-de-lecture-pour-les-colles.-Afin-de-pr%C3%A9parer-la-rentr%C3%A9e-%3A-un-%C3%A9t%C3%A9-avec-Georges-Bataille-et-Ren%C3%A9-Girard-...">le programme de travail</a> que nous suivrons cette année, ainsi que les méthodes et les exercices auxquels vous serez formés</strong>. <strong><em>Des textes divers vous seront ensuite distribués</em></strong>, afin de préparer à l'exercice de l'explication de texte, et donc à la première série de khôlles - qui prendra place aux mois d'octobre et de novembre.</p>
<p><strong>FIN SEPTEMBRE / DÉBUT OCTOBRE</strong></p>
<p>Après une réflexion générale sur la littérature et quelques notions d’histoire littéraire mises en perspective (notamment à partir d'une <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/07/26/Lire-en-Hypokh%C3%A2gne-%3A-proposition-d-une-LISTE-qui-ne-devrait-pas-donner-le-vertige...">bibliographie chronologique détaillée</a>), nous étudierons <strong>l’œuvre de Louis-Ferdinand Céline, <em>Voyage au bout de la nuit</em></strong>, dans le <strong>cours d’HISTOIRE LITTERAIRE</strong> qui a lieu le lundi matin (10H10-13H05). <strong>Le cours GENRES/NOTIONS</strong> du vendredi (14h10-16h15) portera au début sur <strong>le roman</strong>. Il introduira notre travail sur le <strong><em>Voyage au bout de la nuit</em>, qui sera, avec d'autres oeuvres abordées en classe, au centre des prochaines<em> Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, jeudi 30 novembre, au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em>. L'invité en sera Emmanuel Pierrat, avocat au barreau de Paris et écrivain</strong>. La conférence sera consacrée cette année à la question de la liberté d'expression dans le domaine littéraire et aura pour intitulé : <strong>« Littérature, Droit et Morale : liberté et responsabilité de l'écrivain »</strong>.</p>
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<p><strong>Voici quelques textes suggestifs qui retiendront notre attention lors des premiers cours</strong>. Ils nous aideront à entamer une réflexion sur la littérature, appréhendée du point de vue de l'auteur mais aussi du lecteur. Pour chaque texte ou court extrait, il sera nécessaire de <em>situer</em> la pensée de l'auteur dans l'histoire littéraire, afin de mieux cerner les enjeux du problème que celle-ci énonce de manière plus ou moins explicite. Il sera donc question, dans un premier temps, de faire l’analyse comparée de la formule célèbre de La Bruyère avec les réponses que lui apportent Lautréamont et Philippe Jaccottet. Il faudra ensuite lire attentivement les textes suivants pour voir comment on peut les rattacher au problème que pose l'affirmation de La Bruyère.</p>
<p>1- <strong>La Bruyère (1645-1696)</strong>, dans « Des Ouvrages de l'Esprit » (<em>Les Caractères</em>, 1688, première édition) : « Tout est dit, et l'on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes et qui pensent. Sur ce qui concerne les mœurs, le plus beau et le meilleur est enlevé; l'on ne fait que glaner après les Anciens et les habiles d'entre les Modernes. »</p>
<p>2- <strong>Lautréamont (1846-1870)</strong> : « Rien n'est dit. L'on vient trop tôt depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes. Sur ce qui concerne les mœurs, comme sur le reste, le moins bon est relevé. Nous avons l'avantage de travailler après les Anciens, les habiles d'entre les Modernes. » <em>Poésies II</em></p>
<p>3- <strong>Philippe Jaccottet (1925-2021)</strong> : « Croire que ‘tout a été dit’ et que ‘l’on vient trop tard’ est le fait d’un esprit sans force, ou que le monde ne surprend plus assez. Peu de choses, au contraire, ont été dites comme il le fallait, car la secrète vérité du monde est fuyante, et l’on peut ne jamais cesser de la poursuivre, l’approcher quelquefois, souvent de nouveau s’en éloigner. » <em>Tout n’est pas dit</em>, éd. Le Temps qu’il fait, 1994.</p>
<p>TEXTE 1</p>
<p><strong>Roland Barthes, « Littérature et signification », dans <em>Essais critiques</em> (1964), éditions du Seuil, coll. « Points», pages 265-266.</strong></p>
<p>« La littérature possède-t-elle une forme, sinon éternelle, du moins transhistorique ? Pour répondre sérieusement à cette question, un instrument essentiel nous manque : une histoire de <em>l’idée</em> de littérature. On écrit sans cesse (du moins depuis le XIXe siècle, ce qui est déjà significatif) l’histoire des œuvres, des écoles, des mouvements, des auteurs, mais on n’a jamais encore écrit l’histoire de <em>l’être</em> littéraire. <em>Qu’est-ce que la littérature ?</em> : cette question célèbre reste paradoxalement une question de philosophe ou de critique, ce n’est pas encore une question d’historien. Je ne puis donc risquer qu’une réponse hypothétique – et surtout très générale.</p>
<p>Une technique déceptive du sens, qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que l’écrivain s’emploie à multiplier les significations sans les remplir ni les fermer et qu’il se sert du langage pour constituer un monde emphatiquement signifiant, mais finalement jamais signifié. Est-ce ainsi pour <em>toute</em> littérature ? Oui sans doute, car définir la littérature par sa technique du sens, c’est lui donner pour seule limite un langage contraire, qui ne peut être que le langage transitif ; ce langage transitif, c’est celui qui vise à transformer immédiatement le réel, non à le <em>doubler</em> : paroles « pratiques » liées à des actes, à des techniques, à des conduites, paroles invocatoires liées à des rites, puisque eux aussi sont censés ouvrir la nature ; mais dès lors qu’un langage cesse d’être incorporé à une praxis, dès lors qu’il se met à raconter, à <em>réciter</em> le réel, devenant ainsi un langage <em>pour soi</em>, il y a apparition de sens seconds, reversés et fuyants, et par conséquent institution de quelque chose que nous appelons précisément <em>littérature</em> même lorsque nous parlons d’œuvres issues d’un temps où le mot n’existait pas ; une telle définition ne peut donc reporter la « non-littérature » que dans une préhistoire que nous ne connaissons pas, là où le langage n’était que religieux ou pratique (il vaudrait mieux dire : praxique). Il y a donc sans doute une grande <em>forme</em> littéraire, qui couvre tout ce que nous connaissons de l’homme. Cette forme (anthropologique) a reçu, bien entendu, des contenus, des usages et des formes subsidiaires (« genres ») très différents selon les histoires et les sociétés. D’autre part, à l’intérieur d’une histoire restreinte comme celle de notre Occident (bien qu’à vrai dire, du point de vue de la technique du sens littéraire, il n’y ait aucune différence entre une Ode d’Horace et un poème de Prévert, un chapitre d’Hérodote et un article de <em>Paris-Match</em>), l’institution et la déception du sens ont pu s’accomplir à travers des techniques secondaires très variées ; les éléments de la signification peuvent être accentués différemment, de façon à produire des écritures très dissemblables et des sens plus ou moins remplis ; on peut par exemple codifier fortement les signifiants littéraires, comme dans l’écriture classique, ou au contraire les livrer au hasard, créateur de sens inouïs, comme dans certaines poétiques modernes, on peut les exténuer, les blanchir, les approcher, à l’extrême, de la dénotation, ou au contraire les exalter, les exaspérer (comme dans l’écriture d’un Léon Bloy, par exemple) : bref, le <em>jeu</em> des signifiants peut être infini, mais le signe littéraire reste immuable : depuis Homère et jusqu’aux récits polynésiens, personne n’a jamais transgressé la nature à la fois signifiante et déceptive de ce langage intransitif, qui « double » le réel (sans le rejoindre) et qu’on appelle « littérature » : peut-être précisément parce qu’il est un <em>luxe</em>, l’exercice du pouvoir inutile que les hommes ont de faire <em>plusieurs</em> sens avec une seule parole. »</p>
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<p>TEXTE 2</p>
<p><strong>Paul Valéry, « Je disais quelquefois à Stéphane Mallarmé », <em>Variété III</em> (1936), dans <em>Variété III, IV et V</em>, éditions Gallimard, coll. « folio /essais », pages 14-16</strong>.</p>
<p>« Les perfections, avec l'étrangeté soutenue de ses rares écrits, nous suggéraient une idée de leur auteur bien distincte de celles que l'on se fait ordinairement des poètes, même considérables.</p>
<p>Cependant que cette œuvre sans pareille surprenait, à peine entr'ouverte, séduisait aussitôt l'ouïe, s'imposait à la voix, et se soumettait tout l'appareil de la parole par une sorte de nécessité dans l'ajustement des syllabes créée à force d'art, – tout de suite elle embarrassait l'esprit, l'intriguait, le défiait parfois de <em>comprendre</em>. S'opposant à la résolution instantanée du discours en idées, elle exigeait du lecteur un travail souvent très sensible de l'intellect et une reprise attentive du texte : exigence dangereuse, presque toujours mortelle.</p>
<p>La facilité de lecture est de règle dans les Lettres depuis le règne de la hâte générale et des feuilles qui entraînent ou harcèlent ce mouvement. Tout le monde tend à ne lire que ce que tout le monde aurait pu écrire.</p>
<p>D'ailleurs, puisqu'il s'agit enfin en littérature d'amuser son homme ou de lui faire <em>passer le temps</em>, ne demandez l'effort, n'invoquez point la volonté : ici triomphe la croyance, peut-être naïve, que le plaisir et la peine s'excluent.</p>
<p>Quant à moi, je le confesse, je ne saisis à peu près rien d'un livre qui ne me résiste pas.</p>
<p>Demander au lecteur qu'il tendît son esprit et ne parvînt à la possession complète qu'au prix d'un acte assez pénible ; prétendre, de passif qu'il espère d'être, le rendre à demi créateur, – mais c'était blesser la coutume, la paresse, et toute intelligence insuffisante.</p>
<p>L'art de lire à loisir, à l'écart, savamment et distinctement, qui jadis répondait à la peine et au zèle de l'écrivain par une présence et une patience de même qualité, se perd : il est perdu. Un lecteur d'autrefois, instruit dès son enfance par Tacite ou par Thucydide pleins d'obstacles, à ne point dévorer ni deviner la ligne ; à ne fuir, le sens effleuré, la phrase et la page, promettait aux auteurs un partenaire qui valût que l'on pesât les termes et qu'on organisât la dépendance des membres d'une pensée. La politique et les romans ont exterminé ce lecteur. La poursuite de l'effet immédiat et de l'amusement pressant a éliminé du discours toute recherche de dessin ; et de la lecture, cette lenteur intense du regard. L'œil, désormais, goûte un crime, une « catastrophe », et s'envole. L'intellect se perd dans un nombre d'images qui le ravissent ; il se livre aux effets surprenants de l'absence de loi. Si le rêve est pris pour modèle, (ou bien le pur souvenir), la durée, la pensée le cèdent à l'instant.</p>
<p>Celui-là donc qui ne repoussait pas les textes complexes de Mallarmé se trouvait insensiblement engagé à réapprendre à lire. Vouloir leur donner un sens qui ne fût pas indigne de leur forme admirable et du mal que ces figures verbales si précieuses « avaient assurément coûté, conduisait infailliblement à associer le travail suivi de l'esprit et de ses forces combinatoires au délice poétique. Par conséquence, la Syntaxe, qui est calcul, reprenait rang de Muse.</p>
<p>Rien de moins « romantique ». Le Romantisme a décrété l'abolition de l'esclavage de soi. Il a pour essence la suppression de la <em>suite dans les idées</em>, qui est une des formes de cet esclavage ; il a favorisé par là un immense développement de littérature descriptive. La description dispense de tout enchaînement, admet tout ce qu'admettent les yeux, permet d'introduire de nouveaux termes à chaque instant. Il en résulta que l'effort de l'écrivain, réduit et concentré sur cet instant, s'est appliqué aux épithètes, aux contrastes de détail, aux « effets » facilement séparables. Ce fut le temps des joyaux.</p>
<p>Mallarmé a sans doute tenté de conserver ces beautés de la matière littéraire, tout en relevant son art vers la construction. Plus il avance dans ses réflexions, plus s'accusent, dans ce qu'il produit, la présence et le ferme dessein de la pensée abstraite. »</p>
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<p>TEXTE 3</p>
<p><strong>René Girard, <em>De la violence à la divinité</em>, éditions Grasset, 2007, pages (« Introduction»)</strong>.</p>
<p>MENSONGE ROMANTIQUE ET VÉRITÉ ROMANESQUE OU LE DÉSIR MIMÉTIQUE</p>
<p>Ce premier livre n’est pas le faux départ qu’il paraît être, dans une direction littéraire abandonnée par la suite en faveur du religieux et du social. Il est la première étape d’une recherche dont les instruments ont varié, je le répète, mais pas les objectifs. Toutes mes thèses sur la violence et le religieux se fondent sur la conception du désir élaborée dans ce livre.</p>
<p><em>Mensonge romantique</em>... est consacré à cinq grands romanciers européens qui vivaient dans des sociétés différentes à des époques différentes, dans des milieux différents. Ils n’avaient ni la même langue, ni le même style, ni les mêmes traditions littéraires. Mais ils ont tous la même conception mimétique du désir et elle produit des ressemblances plus intéressantes que toutes leurs différences.</p>
<p>Le désir mimétique est copié sur un autre désir. C'est un désir qui en imite un autre. Si Don Quichotte se jette sur les moulins à vent, c’est parce qu’à sa place, pense-t-il, le modèle des chevaliers errants, Amadis de Gaule, en ferait autant. Emma Bovary, elle aussi « programme » son désir sur les romans sentimentaux dont sa jeunesse s’est gavée.</p>
<p>Du fait que ce livre n’analyse que des romans il ne faut pas conclure que le genre romanesque a une espèce de monopole sur la révélation du désir mimétique. Quelques années plus tard, j’ai repris la théorie de ce désir sur des exemples empruntés à la tragédie grecque. Plus tard encore, j’ai écrit un livre sur le savoir exceptionnel de Shakespeare à son sujet.</p>
<p><em>Représenter</em> les rapports de désir au lieu de réfléchir abstraitement sur eux, avec les philosophes et les psychologues, favorise quelque peu la découverte du mimétisme. Celle-ci n’en reste pas moins très rare même dans le théâtre et dans les romans. Un des plus beaux exemples, dans sa simplicité, se trouve dans un poème. C'est le célèbre récit des amours de Paolo et de Francesca dans <em>La Divine Comédie</em>...</p>
<p>Francesca a épousé le frère de Paolo, elle est donc belle-sœur de ce dernier. Au début de son mariage, la présence auprès d’elle de son beau-frère ne la trouble aucunement, pas plus que sa présence à elle ne trouble Paolo. Un beau jour, cependant, les deux jeunes gens lisaient ensemble, innocemment, le fameux roman de Lancelot du Lac et au moment où la reine Guenièvre, l’épouse « du roi Arthur, échange avec le héros un premier baiser, Paolo et Francesca se tournèrent l’un vers l’autre et échangèrent, mimétiquement, leur premier baiser.</p>
<p>Le monde moderne applaudit ces amants qui continuent à s’aimer jusque dans cet enfer où le péché d’adultère et la vengeance du mari trompé les ont précipités. On applique à Paolo et Francesca tous les clichés romantiques sur la « spontanéité » et l’« authenticité » du désir, sur le souci exclusif des deux amants l’un pour l’autre, sur leur oubli total du monde extérieur, sans s’apercevoir qu’on fait dire à Dante le contraire de ce qu’il dit. C'est là ce que j’appelle le <em>mensonge romantique</em> qui projette imperturbablement sa définition solipsiste du désir sur la <em>vérité romanesque</em> de Dante c’est-à-dire la révélation du désir mimétique. (...).</p>
<p><em>Mensonge romantique</em>... entend montrer que le désir a une histoire et elle se définit par le rapprochement constant des modèles et de leurs imitateurs. Il ne s’agit pas là d’un phénomène exclusivement littéraire. On vérifie aisément qu’il se produit aussi dans l’histoire réelle. Plus le monde se démocratise, plus la liberté individuelle se répand, plus les rivalités se multiplient, les plus stériles comme les plus fécondes. Toute cette concurrence accélère le développement économique, scientifique et technique mais, simultanément, elle suscite le malaise des individus dans l’instabilité de toute communauté, familiale, locale, nationale... La théorie mimétique du désir rejoint sur beaucoup de points la pensée de Tocqueville dans la seconde partie de <em>La Démocratie en Amérique</em>, brièvement évoquée ici dans un chapitre sur Stendhal. »</p>
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<p><em>Si vous souhaitez me poser une question sur ce billet ou sur tout autre chose, vous pouvez laisser un commentaire sur ce blogue. Ma réponse intéressera sans doute tous les futurs Hypokhâgneux. Si votre question est personnelle, vous pouvez m'écrire à l'adresse suivante</em> :</p>
<p>Reynald-Andre.Chalard@ac-amiens.fr</p>
Aux futurs Hypokhâgneux : programme d'étude pour l'année 2023-2024 et programme de lecture pour les colles. Afin de préparer la rentrée : un été avec Emmanuel Pierrat, avocat au barreau de Paris et écrivain, sur les droits et les devoirs de l'auteur...
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2023-07-03T14:45:00+02:00
2024-02-06T12:49:29+01:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/diderot-vanloo.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Denis <strong>Diderot</strong> - écrivain, philosophe des Lumières, pourfendeur de la censure, symbole de l'esprit critique - peint par Louis-Michel Van Loo en 1767. © Photo RMN - Grand Palais (Musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle.</p>
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<p><strong>Félicitations pour votre admission en Lettres supérieures !</strong></p>
<p>Nous aborderons le programme de l'année à la lumière de la mise en regard des pensées de La Bruyère, Lautréamont et Philippe Jaccottet. Pendant l’été, je vous suggère, pour vous y préparer, de faire l’analyse comparée de cette formule célèbre de La Bruyère, avec la réponse que lui apporte le poète Philippe Jaccottet au XXe siècle - vous jugerez si celle-ci est plus intéressante que celle de Lautréamont dans ses <em>Poésies</em> (1870).</p>
<p>1- <strong>La Bruyère</strong> (1645-1696), dans « Des Ouvrages de l'Esprit » (<em>Les Caractères</em>, 1688, première édition) : « Tout est dit, et l'on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes et qui pensent. Sur ce qui concerne les mœurs, le plus beau et le meilleur est enlevé; l'on ne fait que glaner après les Anciens et les habiles d'entre les Modernes. »</p>
<p>2- <strong>Lautréamont</strong> (1846-1870) : « Rien n'est dit. L'on vient trop tôt depuis plus de sept mille ans qu'il y a des hommes. Sur ce qui concerne les mœurs, comme sur le reste, le moins bon est relevé. Nous avons l'avantage de travailler après les Anciens, les habiles d'entre les Modernes. » <em>Poésies II</em></p>
<p>3- <strong>Philippe Jaccottet</strong> (1925-2021) : « Croire que ‘tout a été dit’ et que ‘l’on vient trop tard’ est le fait d’un esprit sans force, ou que le monde ne surprend plus assez. Peu de choses, au contraire, ont été dites comme il le fallait, car la secrète vérité du monde est fuyante, et l’on peut ne jamais cesser de la poursuivre, l’approcher quelquefois, souvent de nouveau s’en éloigner. » <em>Tout n’est pas dit</em>, éd. Le Temps qu’il fait, 1994.</p>
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<p>Vous avez reçu ou recevrez, lors de votre inscription au lycée Pierre d'Ailly, une brochure dans laquelle vous trouverez, pour chaque discipline, une bibliographie et des consignes de lecture. Après un repos bien mérité, vous aurez à cœur de faire ces lectures nécessaires pour aborder sereinement la rentrée.</p>
<p>Je présente ci-dessous le programme d'étude en Lettres, <strong>auquel il faudra ajouter de nombreux extraits pour chaque genre littéraire, poésie, roman, théâtre, essai et un programme de lecture pour les colles</strong>, c'est-à-dire les interrogations orales (voir ci-dessous). D'autres précisions sont données dans ma bibliographie.</p>
<p><em>Je vous souhaite de belles vacances, reposantes et studieuses !</em></p>
<p><strong>PROGRAMME D’ÉTUDE</strong></p>
<p><strong>UN ÉTÉ AVEC EMMANUEL PIERRAT, AVOCAT AU BARREAU DE PARIS ET ÉCRIVAIN</strong></p>
<p><strong>A LIRE POUR LA RENTRÉE</strong> :</p>
<p><strong><em>Réflexion sur la littérature... et sur la notion d'écrivain</em></strong> :</p>
<p>A CONSULTER POUR LA RENTRÉE, AFIN DE PRÉPARER LES PROCHAINES «RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY» (30 NOVEMBRE 2023)</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.___pierrat_2_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Emmanuel <strong>PIERRAT</strong>, <em>L'auteur, ses droits et ses devoirs</em>, Gallimard, « Folio / essais ». ISBN : 978072819094.</p>
<p>Conçu comme un vade-mecum, cet ouvrage imposant traite des questions juridiques auxquelles l'écrivain ne peut plus échapper aujourd'hui. Il éclaire notamment, par <strong>la constante référence au Droit</strong>, le cadre légal de la liberté d'expression des auteurs, en regard des nouveaux interdits que la société se fixe, interdits qui peuvent changer d'une époque à l'autre, en fonction de l'évolution des moeurs. Les deuxième et quatrième parties du livre sont sur ce point très intéressantes, puisqu'elles passent <strong>la responsabilité de l'écrivain</strong> au crible des maux de notre temps : le racisme, le négationnisme, la pédophilie ou encore l'homophobie. Cet essai nous permettra ainsi de préparer <strong>la 11e édition des <em>RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</em></strong>, dont le thème roulera sur cet épineux mais passionnant sujet : <strong>« Littérature, Droit et Morale : Liberté et Responsabilité de l'écrivain»</strong>. <strong>Cette nouvelle conférence aura lieu jeudi 30 novembre 2023 au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em></strong>. Elle sera le prolongement du cours de Lettres, qui met cette année au programme de l'Hypokhâgne le roman de <strong>Louis-Ferdinand Céline</strong>, <em>Voyage au bout de la nuit</em>, récemment réédité dans la prestigieuse collection de la <em>Bibliothèque de la Pléiade</em>, aux éditions Gallimard. Son auteur, condamné pour le virulent antisémitisme de ses pamphlets, reste un écrivain reconnu mais controversé, sur lequel pèsent encore aujourd'hui de graves accusations, même si l'on peut <em>mettre à part</em> ce premier roman, qui obtint le prix Renaudot en 1932. On voit bien comment se tressent ici les notions convoquées par l'intitulé de la conférence que prononcera devant nous <strong>Maître Emmanuel Pierrat</strong>, fort de son expertise dans le domaine judiciaire : au-delà des polémiques inévitables sur un tel cas, la question qui nous préoccupera sera celle du <strong>statut de la fiction</strong> (pour le roman, et plus largement de l'oeuvre littéraire), du rapport qu'elle entretient avec son <strong>auteur</strong> (peut-on l'en séparer ?) et de ses conséquences constatées, supposées ou fantasmées sur le <strong>lecteur</strong>, le mimétisme n'étant jamais bien loin, si l'on en croit l'anthropologue <strong>René Girard</strong>. Car, nous apprend <strong>Georges Bataille</strong>, <strong>la littérature n'est pas innocente</strong>. C'est donc aussi réfléchir sur <strong>ses relations avec le mal</strong> (dont les formes ne se réduisent pas aux crimes et aux délits de droit commun) et tenter de comprendre, par la lecture, ce que <strong>Philippe Sollers</strong> appelle l' expérience des limites, dans son livre précisément intitulé <em>L'Écriture et l'expérience des limites</em>.</p>
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<p>A LIRE POUR LA RENTRÉE, CE CLASSIQUE DE LA CRITIQUE LITTÉRAIRE (<ins>au moins l'essai sur BAUDELAIRE</ins>, et Emily BRONTË, KAFKA, GENET pour les lecteurs vaillants), AFIN DE PRÉPARER LES PROCHAINES «RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY» :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Bataille_La_Litterature_et_le_Mal_s.jpg" alt="Bataille_La_Litterature_et_le_Mal.jpg" title="Bataille_La_Litterature_et_le_Mal.jpg, mai 2016" /></p>
<p>Georges <strong>BATAILLE</strong>, <em>La Littérature et le mal</em>, Gallimard, coll. « Folio ». ISBN : 978-2070326075.</p>
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<p>A LIRE POUR LA RENTRÉE, CE CLASSIQUE DE LA CRITIQUE LITTÉRAIRE (<ins>au moins les trois premiers chapitres</ins>), AFIN DE PRÉPARER LES PROCHAINS «LUNDIS DE PIERRE D'AILLY» : <em>Critique littéraire et anthropologie</em> ((27 MAI 2024)</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rene_Girard_Mensonge_romantique_et_verite_romanesque_s.jpg" alt="Rene_Girard_Mensonge_romantique_et_verite_romanesque.jpg" title="Rene_Girard_Mensonge_romantique_et_verite_romanesque.jpg, juin 2015" /></p>
<p>René <strong>GIRARD</strong>, <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>, éditions Fayard, coll. «Pluriel».</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Classiques1_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Nuccio <strong>ORDINE</strong>, <em>Une année avec les Classiques</em>, éditions Les Belles Lettres. ISBN : 978-2251445489.</p>
<p>Qu’est-ce qu’un « classique » ? On tâchera de répondre à cette question, avec l’aide de <strong>Nuccio Ordine</strong> mais aussi d’Italo Calvino, <em>Pourquoi lire les classiques</em>, (1984) et de Jorge Luis Borges qui, dans une « enquête », donne la définition suivante, non sans la passer au crible du relativisme historique : « Est classique le livre qu’une nation ou un groupe de nations ou les siècles ont décidé de lire comme si tout dans ses pages était délibéré, fatal, profond comme le cosmos et susceptible d’interprétations sans fin. (…) C’est un livre que les générations humaines, pressées par des raisons différentes, lisent avec une ferveur préalable et une mystérieuse loyauté. » « Sur les classiques », dans <em>Enquêtes</em>, Folio /essais, p. 251-252. Faut-il se hâter d'opposer les « Classiques » aux « Modernes » ? Dans un entretien entre Roger Caillois et Borges, ce dernier, qui a fait partie du mouvement ultraïste, à ses débuts, reconnaît avoir évolué « vers Boileau », autrement dit vers le classicisme. Caillois, d’abord surréaliste, se reconnaît également dans ce parcours. Voilà qui nous permettra de formuler le problème littéraire relatif aux tensions qui se jouent entre « l’Ancien et le Nouveau» - pour reprendre le titre de Marthe Robert -, et dont la littérature est le perpétuel théâtre. L’anthologie proposée a pour sous-titre : « Une petite bibliothèque idéale pour nous accompagner dans un voyage fascinant en littérature et en philosophie ». Il s’agit d’un recueil de citations extraites de quelques grandes œuvres de la littérature européenne, d’Homère à Gabriel Garcia Marquez, en passant, notamment, par Platon, Plaute, L’Arioste, Machiavel, Rabelais, Montaigne, Cervantès, Molière, Shakespeare, Montesquieu, Swift, Goethe, Balzac, Dickens, Zweig, Yourcenar, Borges, et d’autres encore. Chaque citation est suivie d’un petit commentaire, qui doit être considéré comme <strong>une invitation à la lecture intégrale des œuvres</strong> : <strong>une incitation à la réflexion personnelle aussi bien</strong>, qui peut prolonger voire discuter celle de Nuccio Ordine. Seront ainsi mises à l'épreuve l<em>'humanitas</em> et la <em>curiositas</em> (notion ambivalente dans l'Antiquité, prise ici <em>in bonam partem</em>, et définie par le <em>studium discendi</em>, la «passion d'apprendre» avec discernement), qui sont parmi les qualités essentielles du lettré, selon Cicéron (plus tard Sénèque également, cf. le <em>De Otio</em>) et surtout ses disciples humanistes de la Renaissance. Enfin, la variété des auteurs et des époques oblige à <strong>une lecture comparée</strong>, qui complètera utilement notre travail en littérature française.</p>
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<p>Ci-dessous, accompagnant chaque oeuvre au programme, un petit commentaire qui indique sommairement l'orientation de sa prochaine étude :</p>
<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XVIe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>la poésie</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Marot.jpeg" alt="" /></p>
<p>Clément <strong>MAROT</strong>, <em>L’Adolescence clémentine</em>, éd. Gallimard, coll. « Poésie / Gallimard » (édition de Frank Lestringant). ISBN : 978-2070345304.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XVIIe siècle / Cours sur le genre théâtral</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>le théâtre</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Corneille_s.jpg" alt="Corneille" title="Corneille, juil. 2013" /></p>
<p>Pierre <strong>CORNEILLE</strong>, <em>Rodogune</em> (éd. Gallimard, coll. Folio / Théâtre). Edition de Jean Serroy. ISBN : 978-2070419463.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XIXe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>la poésie</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Hugo_anthologie.jpeg" alt="" /></p>
<p>Victor <strong>HUGO</strong>, <em>Œuvres poétiques</em> (anthologie), éd. Le Livre de Poche, coll. « Les Classiques de Poche ». Édition de Claude Millet. ISBN : 978-2253160816.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XXe siècle / Cours sur le genre romanesque</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>le roman</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Ce_line_voyage.jpeg" alt="" /></p>
<p>Louis-Ferdinand <strong>CÉLINE</strong>, <em>Voyage au bout de la nuit</em>, éditions Gallimard, coll. « Folio ». ISBN : 978-2253030225.</p>
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<p><strong>POUR LA RENTRÉE EN SEPTEMBRE</strong></p>
<p><strong>Attention</strong> : pour la rentrée, vous devrez avoir lu avec précision les œuvres au programme. Celle qui nous occupera dès la rentrée, après une réflexion générale sur la littérature et quelques notions d’histoire littéraire (mises en perspective), est la suivante :</p>
<p>Louis-Ferdinand <strong>CÉLINE</strong>, <em>Voyage au bout de la nuit</em>, éditions Gallimard, coll. « Folio ».</p>
<p><strong>La prochaine édition des « Rencontres de Pierre d’Ailly » (jeudi 30 novembre 2023)</strong>, qui proposera une conférence de <strong>Maître Emmanuel PIERRAT, avocat au barreau de Paris et écrivain</strong>, sera consacrée cette année à la question de la liberté d'expression dans le domaine littéraire et aura pour intitulé : <strong>« Littérature, Droit et Morale : liberté et responsabilité de l'écrivain »</strong>.</p>
<p>En lisant, tenez compte de ce qu’affirme Michel Collot (professeur, poète et critique) au sujet de la poésie, mais qui vaut tout aussi bien, à des degrés divers, pour la littérature en général : « Toute expérience poétique engage au moins trois termes : un sujet, un monde, un langage (…). Toute poétique devrait donc essayer de comprendre la solidarité de ces trois termes, le jeu complexe des relations qui les unissent ». <em>La Poésie moderne et la structure d’horizon</em>, PUF, coll. « Ecriture », 1989, « Introduction », page 5.</p>
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<p><strong>Voici les œuvres sur lesquelles les colles porteront :</strong></p>
<p><em><strong>Attention bis</strong> : il faut <strong>lire</strong> ou <strong>relire</strong> dès cet été <strong>les oeuvres au programme des colles</strong>. Leur connaissance est nécessaire pour aborder la dissertation générale et l'explication de texte (qui portera, pour chaque genre, sur l'une de ces oeuvres)</em>.</p>
<p><strong>Romans/Récits/Nouvelles</strong> : Gabriel de Guilleragues, <em>Lettres portugaises</em> / Madame de La Fayette, <em>La Princesse de Clèves</em> / Montesquieu, <em>Lettres persanes</em> / Diderot, <em>Jacques le fataliste</em> / Choderlos de Laclos, <em>Les Liaisons dangereuses</em> / Chateaubriand, <em>Atala, René</em> / Stendhal, <em>Le Rouge et le noir</em> / Balzac, <em>La Peau de chagrin</em> / Gustave Flaubert, <em>Bouvard et Pécuchet</em> / Barbey d’Aurevilly, <em>Les Diaboliques</em> / Marcel Proust, <em>Du côté de chez Swann</em> (« Combray ») / Jean-Paul Sartre, <em>La Nausée</em> / Georges Bernanos, <em>Sous le soleil de Satan</em> / Louis Aragon, <em>Aurélien</em> / Samuel Beckett, <em>Malone meurt</em> / Régis Jauffret, <em>Microfictions</em>.* <strong>ŒUVRES (au moins 2 par siècle)</strong> <strong>À LIRE POUR LE 30 SEPTEMBRE 2023.</strong></p>
<p><strong>Poésie</strong> : Ronsard, <em>Sonnets pour Hélène</em> / Jean Rousset, <em>Anthologie de la poésie baroque française</em> / Lamartine, <em>Méditations poétiques</em> / Baudelaire, <em>Les Fleurs du mal</em> / Leconte de Lisle, <em>Poèmes barbares</em> / Paul Verlaine, <em>Poèmes saturniens</em> (sonnets) / Rimbaud, <em>Poésies</em> / Apollinaire, <em>Alcools</em> / Paul Valéry, <em>Poésies</em> (GF-Flammarion) / Robert Desnos, <em>Corps et Biens</em> / René Char, <em>Fureur et Mystère</em> / Francis Ponge, <em>Le Parti pris des choses</em> / Philippe Jaccottet, <em>À la lumière d’hiver</em>. / <em>Mon beau navire Ô ma mémoire – Un siècle de poésie française</em> (Anthologie Gallimard 1911-2011). <strong>*ŒUVRES À LIRE POUR LE 31 JANVIER 2024</strong>.</p>
<p><strong>Théâtre</strong> : Molière, <em>Les Femmes savantes, Tartuffe, Le Misanthrope</em> / Corneille, <em>L’Illusion comique, Cinna, Suréna</em> / Racine, <em>Britannicus, Andromaque, Bérénice, Athalie</em> / Marivaux, <em>La Double inconstance, Les Fausses confidences, L’Épreuve</em> / Beaumarchais, <em>Le Mariage de Figaro</em> / Voltaire, <em>Zaïre</em> / Vigny, <em>Chatterton</em> / Hugo, <em>Hernani, Lucrèce Borgia</em>, <em>Le Roi s’amuse</em> / Musset, <em>On ne badine pas avec l’amour, Lorenzaccio</em> / Edmond Rostand, <em>Cyrano de Bergerac</em> / Sartre, <em>Huis clos</em> / Eugène Ionesco, <em>La Cantatrice chauve, La Leçon, Rhinocéros</em> / Genet, <em>Les Bonnes</em> / Michel Vinaver, <em>Par-dessus bord</em>. <strong>*ŒUVRES À LIRE POUR le 31 MARS 2024</strong>.</p>
<p>Vous pouvez compléter ce programme en piochant dans la liste <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/07/26/Lire-en-Hypokh%C3%A2gne-%3A-proposition-d-une-LISTE-qui-ne-devrait-pas-donner-le-vertige...">LIRE EN HYPOKHÂGNE</a> (cf. QUE LIRE ? / COMMENT LIRE ?). La composition de cette liste sera étudiée en début d'année pour <strong>problématiser les notions de genre et de chronologie littéraires</strong>.</p>
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<p>Il est possible à tout visiteur de poster un commentaire sur un billet, ou sur une page, et d’obtenir des informations plus précises en contactant l’éditeur de ce blogue à l’adresse suivante :</p>
<p>Reynald-Andre.Chalard@ac-amiens.fr</p>
2e édition des « Lundis de Pierre d'Ailly ». « Du Nouveau chez Rimbaud : Problèmes éditoriaux et sémantiques des 'Illuminations' .» Conférence d'Eddie Breuil, docteur de l'Université Lumière-Lyon 2, spécialiste de l'édition critique, lundi 22 mai 2023.
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2023-06-03T17:54:00+02:00
2023-06-29T08:58:28+02:00
Reynald André Chalard
Les Lundis de Pierre d'Ailly
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Breuil1.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Eddie Breuil</strong>, dans la salle <em>Imago Mundi</em> du lycée Pierre d'Ailly, lundi 22 mai 2023.</p>
<p>Pour cette 2e édition des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/LES-LUNDIS-DE-PIERRE-D-AILLY">LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</a>, <strong>Eddie Breuil</strong> nous a fait partager sa passion de l'enquête philologique. Nous avons beaucoup appris. Qu'il en soit vivement remercié !</p>
<p>Et merci encore une fois à <strong>Axelle D</strong>., KH, pour ses très belles photos !</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Breuil2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Eddie Breuil</strong> et Reynald André Chalard</p>
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<p><strong>LES LUNDIS DE PIERRE D’AILLY</strong></p>
<p><strong>« Du Nouveau chez Rimbaud »</strong> :</p>
<p><strong>Problèmes éditoriaux et sémantiques des <em>Illuminations</em></strong> <em>(Littérature et critique philologique)</em></p>
<p>Conférence d’<strong>Eddie Breuil</strong> sur l’œuvre du poète Germain Nouveau et la question de sa contribution à l’écriture des <em>Illuminations</em> de Rimbaud.</p>
<p>Cette 2e édition des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/LES-LUNDIS-DE-PIERRE-D-AILLY">LUNDIS DE PIERRE D’AILLY</a> installe et consacre ce <strong>cycle de conférences aux études littéraires</strong>, sous le patronage d’Ernst Robert Curtius, philologue allemand, spécialiste des littératures romanes, qui affirme ceci, dans son maître ouvrage <em>La Littérature européenne et le Moyen Âge latin</em> : « La spécialisation sans l'universalisme est aveugle, l'universalisme sans la spécialisation n'est qu'une bulle de savon. » Ernst Robert Curtius, <em>La Littérature européenne et le Moyen Âge latin</em>, 1953. En complétant l’apport plus généraliste des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/Les-Rencontres-de-Pierre-d-Ailly">RENCONTRES DE PIERRE D’AILLY</a>, il s’agit de faire réfléchir les étudiants des classes de Lettres sur la spécificité des études littéraires, en les confrontant «techniquement» aux différentes approches critiques de cet objet particulier que l'on appelle littérature Face à un spécialiste universitaire d'un auteur, d'un genre, d'une période ou d'un mouvement, qui présente, dans le cadre d'une conférence, le ou les problèmes précis posés par une œuvre littéraire au programme, ils sont invités à questionner le sens de ce qui leur est donné à lire mais aussi le rapport de ce questionnement à la culture générale. À une époque où il est plus que jamais urgent de mettre le singulier à l'épreuve de l'universel, l'exigence de Curtius nous paraît fondamentale pour la construction critique des savoirs.</p>
<p>Le nom donné à ces conférences, <strong>LES LUNDIS DE PIERRE D’AILLY</strong>, est évidemment une référence aussi sérieuse qu’ironique aux fameuses <strong>CAUSERIES DU LUNDI</strong> du grand critique littéraire du XIXe siècle Sainte-Beuve, qui consistaient en des articles sur la littérature publiés chaque lundi, dans les journaux <em>Le Constitutionnel</em>, puis <em>Le Moniteur</em> et <em>Le Temps</em>, entre 1849 et 1869. Ces articles furent ensuite publiés en volume sous le titre de CAUSERIES DU LUNDI, puis de<strong> NOUVEAUX LUNDIS</strong>, le jour de la semaine ainsi retenu désignant par métonymie l’étude que Sainte-Beuve proposait à son public cultivé. La démarche de Sainte-Beuve était à la fois simple et ambitieuse : il était question de composer un tableau de la littérature française – et accessoirement de la critique -, en suivant l’actualité littéraire, dont il fallait rendre compte. Par exemple, le volume III des NOUVEAUX LUNDIS proposait, dans sa table des matières, une étude du théâtre de Corneille, et plus particulièrement du <em>CID</em>, à la lumière des travaux récents sur cet auteur, ainsi qu’un compte rendu de lecture sur le roman de Fromentin intitulé <em>Dominique</em>, qui avait paru deux ans auparavant. La «causerie » ne consistait pas en une vaine et démagogique familiarité de ton, mais plutôt dans le désir de rendre familière la littérature, et c'est cette seule ambition que poursuivent LES LUNDIS DE PIERRE D’AILLY, en mettant au cœur de leur réflexion l’étude de la littérature. Il n’est donc pas question de rivaliser avec Sainte-Beuve, mais de <strong><em>chercher à ritualiser, à travers le choix du premier jour de la semaine, notre intérêt commun pour les œuvres littéraires</em></strong>, ainsi que l’ont fait les MARDIS de Mallarmé, les DIMANCHES de Flaubert et les JEUDIS de Zola.</p>
<p>Et pour mettre en œuvre ce projet, il a paru utile de rapporter chaque conférence à <strong>un aspect de la recherche en littérature ou plus généralement de la critique littéraire savante</strong>. Ainsi, <strong><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2017/10/23/Conf%C3%A9rence-de-S%C3%A9bastien-Baudoin-lundi-13-novembre-2017-%3A-%C2%AB-La-Po%C3%A9tique-du-souvenir-%C2%BB-dans-les-%C2%AB-M%C3%A9moires-d%E2%80%99outre-tombe-%C2%BB-de-Chateaubriand.">la 1re édition des LUNDIS</a></strong> portait sur les <em>Mémoires d’outre-tombe</em>, de Chateaubriand (au programme de l’HK cette année-là), et mon invité, <strong>Sébastien Baudoin</strong>, spécialiste de cet auteur, avait exploré cette œuvre par l’étude des thèmes de l’exil et de l’envol, s’inscrivant ainsi dans le courant de la critique thématique inspirée des travaux de Gaston Bachelard et poursuivie par Georges Poulet, Jean Starobinski, Jean Rousset et Jean-Pierre Richard, pour ne citer que les plus connus.</p>
<p><strong>Cette 2e édition sera, elle, consacrée à l’approche philologique des textes littéraires</strong>, qui passe par l’étude des manuscrits, à partir desquels les œuvres sont en principe publiées, mais qui exige fondamentalement un effort d’attention à la lettre du texte, avant toute interprétation : « Toute lecture d’un texte du passé exige d’abord un effort de philologue : saisir le sens des mots d’autrui ». Frank Paul Bowman, « Au lecteur », Revue <em>Romantisme</em> n°5, 1973, éd. Flammarion, p. 2. Comme l’écrit Jean Starobinski, dans <em>Cahiers pour un temps</em> : « La philologie s’applique à vérifier les textes, à contrôler le sens des mots d’après le contexte, ou les usages de l’époque, à déceler des antécédents, à connaître l’histoire des genres, des lieux communs, des arts poétiques et des rhétoriques, à évaluer les écarts entre parole singulière et langue commune. Que ce soit par la compréhension grammaticale ou par le repérage de l’insertion historique, il y a là une tâche qui ne peut être éludée (…). » p. 11. Et, plus modestement, nos étudiants savent, car nous le leur enseignons, qu’<strong>une bonne explication de texte commence par l’Étude philologique du texte</strong> : compréhension du sens littéral, par l’élucidation des difficultés posées par le vocabulaire et la grammaire du texte. Et quoi de plus fragile qu’un manuscrit, quand il existe : car d’<strong>Homère à Shakespeare</strong>, il y a eu des écrivains pour lesquels l’identité ainsi que l'authenticité de leurs œuvres ont été remises en question. Que dire de <strong>Louise Labé</strong>, dont Mireille Huchon a voulu démontrer récemment qu’elle était un « emploi féminin » inventé de toutes pièces par un groupe de poètes réunis autour de <strong>Maurice Scève</strong> ; que dire, un siècle plus tard, de ces fameuses <strong><em>Lettres portugaises</em></strong>, attribuées à leur apparente auteure, <strong>Mariana Alcoforado</strong>, alors que Frédéric Deloffre a fini par faire admettre que <strong>Guilleragues</strong>, officier du roi Louis XIV, en était à l’origine (coup de théâtre assez récent : on penserait aujourd’hui à une solution mixte : Guilleragues aurait traduit et adapté des lettres authentiques !) ; que dire encore la polémique qui a opposé des chercheurs du CNRS, d’abord Dominique Labbé, voulant prouver que <strong>Corneille</strong> était l’auteur des œuvres de <strong>Molière</strong> (par le biais d’une étude de statistiques lexicales), puis deux autres, dont un chercheur de l’école nationale des Chartes, qui ont, semble-t-il, démontré le contraire, en avançant eux aussi les résultats de leur étude stylistique parue dans <em>Science Adavances</em> ? Et quand il n’y a pas de doute sur l’auteur, mais seulement sur les manuscrits ? On peut renvoyer aux différentes éditions des <em>Essais</em> de <strong>Montaigne</strong>, mais aussi à celles, plus problématiques encore des <em>Pensées</em> de <strong>Blaise Pascal</strong>, dont on n’a retrouvé que des liasses, et dont le professeur et critique littéraire Emmanuel Martineau a affirmé que les différents fragments devaient à l’origine former un discours bien articulé, ce que récusent d’autres chercheurs… <strong>La philologie, on le voit, est dans nombre de ces cas fondamentale pour tenter d’approcher la vérité</strong>, si jamais on a espoir de la trouver.</p>
<p>Pour incarner et illustrer cette activité critique, importante au plus haut point, nous recevons aujourd’hui <strong>Eddie Breuil, Chercheur, docteur de l'Université Lumière-Lyon 2 (qualifié aux fonctions de Maître de conférences), spécialiste de l'édition critique</strong>, à laquelle il a consacré sa thèse, passionnante, qu'il a publiée aux éditions Classiques Garnier en 2019, un fort volume de 900 pages, sous le titre <em>Méthodes et pratiques de l’édition critique</em>. Votre parcours est riche en expériences littéraires et en publications critiques : lauréat de la Fondation des Treilles, en 2019, vous avez notamment écrit dans <em>La Nouvelle Quinzaine littéraire</em>, vous avez été le secrétaire de la revue d’étude sur le surréalisme <em>Mélusine</em> dont, si je ne me trompe pas, vous rédigiez le bulletin numérique. Vous avez également consacré des études pour le public scolaire et universitaire à André Breton, Nicolas Gogol, et aux littératures fin de siècle, études publiées essentiellement chez Gallimard. Vous avez également à votre actif de très nombreux articles sur le mouvement Dada, le surréalisme, différents problèmes d’édition des œuvres littéraires, <strong>Rimbaud</strong> et <strong>Germain Nouveau</strong>, qui sont les deux poètes qui nous occupent aujourd’hui (mais je ne peux citer tous les articles tant ils sont nombreux). En prolongeant votre réflexion entamée dans votre livre <em>Du Nouveau chez Rimbaud</em> (Champion, 2014), vous avez co-organisé, en tant que conseiller scientifique, <a href="http://www.citedulivre-aix.com/spip.php?article338">la belle exposition organisée par la Bibliothèque Méjanes d'Aix-en-Provence en 2021 intitulée <strong>« Germain Nouveau, l’ami de Verlaine et de Rimbaud »</strong></a>. L’objectif de l’ouvrage susnommé et de l’exposition était de rendre justice à Germain Nouveau, en affirmant, preuves à l’appui, avec Aragon que Nouveau fut l’égal de Rimbaud, et qu’on lui devrait même une partie des <em>Illuminations</em>, œuvre attribuée bien évidemment à Rimbaud, ce que vous remettez en question, en étudiant de près le manuscrit de l’œuvre en question (1).</p>
<p>Nos HK ont lu <em>La Doctrine de l’Amour</em> et les <em>Valentines</em>, de Germain Nouveau – dont vous nous direz peut-être un mot sur le caractère aléatoire de leur édition -, mais ils ne mesurent pas encore l’importance de ce poète qui, contrairement à Rimbaud, n’a pas été « mythifié » de son vivant, ni d’ailleurs post-mortem : il a pourtant aussi sa part de mystère, jeune provençal du village de Pourrières, fils de négociant arrivé à Paris en 1872, après avoir été maître d’étude au lycée de Marseille. Il y rencontre très vite de jeunes écrivains comme jean Richepin et Charles Cros, participe à la vie littéraire parisienne en contribuant à l’écriture collective de l’<em>Album zutique</em>, où l’insolence et l’irrévérence anti-bourgeoises le disputaient au goût exhibé de mœurs libertaires. Et c’est en 1874 que Nouveau rencontre Rimbaud au café Tabourey, qui aurait provoqué – est-ce une légende ? – l’enlèvement de celui-là par celui-ci, partant tous deux à Londres, pour un séjour de courte durée (de mars à juin). C’est à ce moment-là que Rimbaud travaille aux <em>Illuminations</em> (c’est après le coup de feu tiré par Verlaine, à la suite d’une querelle, en juillet 1873, <em>Une saison en enfer</em> étant publiée en octobre). Nouveau rentre ensuite à Paris, où après Verlaine, il fait connaissance avec Mallarmé. Le métier de fonctionnaire à la division de la comptabilité du ministère de l’Instruction publique lui permet de poursuivre ses activités littéraires. Démission en 1883, départ pour le Liban en 1884, pour y travailler en tant que professeur de Français et de dessin dans le Collègue patriarcal des Grecs catholiques et retour à Paris en 1885, où il rencontre la Valentine de son recueil poétique.</p>
<p>Passons sur ses déboires de professeur de dessin dans un collège à Grenoble, puis au lycée Janson-de-Sailly, où il est pris d’une crise mystique devant ses élèves, ce qui provoque son internement à l’asile de Bicêtre, le reste de sa vie n’est plus qu’errance à Bruxelles, à Londres. Vivant mal de son art de peintre dessinateur, entré en religion et partant sur les traces de saint Benoît Labre, il est progressivement réduit à l’état de mendiant, de Rome à Alger, surtout à partir de 1898, date à laquelle sa situation s’aggrave. C’est en 1911 qu’il revient s’installer définitivement à Pourrières, son village natal, dans les Var. <strong>Cette fin de mendiant sublime – il est probablement mort de faim dans son logis provençal- n’a pas suffi à le transformer en poète mythique</strong>. Il aura pourtant passé la dernière partie de sa vie à refuser que l’on publie ses œuvres, réclamant même qu’on les détruise, ce qu’a peut-être fait aussi Rimbaud par son fameux <strong>silence, cette fin de non-recevoir définitive opposée à l’œuvre déjà écrite et renoncement à celle que tout le monde attendait</strong>. Nouveau, lui, a également renoncé, et de manière explicite, en s’inscrivant dans cette filiation d’écrivains qui, <strong>de Virgile à Kafka</strong>, ont voulu jeter leurs œuvres au feu, sans que cela soit remarqué par la postérité (Blanchot affirme dans son essai <em>La Part du feu</em> que « Kafka a peut-être voulu détruire son œuvre, parce qu’elle lui semblait condamnée à accroître le malentendu universel ». p. 9, voulant signifier les incompréhensions désastreuses que peut provoquer une mauvaise lecture…) Peut-être une partie de la réponse à notre inquiétude réside-t-elle dans l’élucidation de la part qu’a prise à l’élaboration des <em>Illuminations</em>. Dans l’introduction générale à votre ouvrage sur les <em>Méthodes et pratiques de l’édition critique</em>, vous écrivez ceci : « le travail philologique est le préalable nécessaire à toute exégèse. » p. 8. Il faudra donc en passer par là pour tenter de comprendre puis d’interpréter. Votre réflexion sur ce problème littéraire nous sera plus qu’utile : elle sera nourricière pour les jeunes étudiants – et les moins jeunes professeurs ! – qui vous écoutent, <strong>car la technicité de votre approche n’est pas technicisme, fuite en avant dans l’obsession de la taxinomie, mais pensée qui vivifie la mystérieuse articulation de la lettre et de l’esprit</strong>. Et de cela nous vous remercions très sincèrement !</p>
<p>RAC</p>
<p>(1) Yalla Seddiki conteste vigoureusement les thèses d'Eddie Breuil dans un ouvrage qui prend position mais permet la discussion par la confrontation des arguments : <em>Rimbaud is Rimbaud is Rimbaud</em>, éditions Non Lieu, 2018. On pourra s'y reporter avec profit.</p>
<p><br />******</p>
<p>Parmi les questions que j’ai posées à Eddie Breuil, j’en retiendrai deux, qui doivent attirer votre attention (commentaires en cours) :</p>
<p>1) En songeant à la pensée-manifeste de Lautréamont dans ses <em>Poésies</em> (I et II) : « La poésie doit être faite par tous. Non par un. » (1870), aurait-on pu concevoir les <em>Illuminations</em> comme une œuvre à quatre mains, celles de Rimbaud et de Nouveau ?</p>
<p>2) S’il n’y a pas de « mythe de Nouveau », n’est-ce pas parce que le « silence » de ce poète a pris la forme d’une conversion à la religion chrétienne (avec une conviction aussi radicale que passionnée), là où Rimbaud a incarné le rejet du christianisme, en trouvant même dans le paganisme une source d’inspiration (songeons au « Livre païen » que représente <em>Une saison en enfer</em>) ?</p>
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<p><strong>REMERCIEMENTS ET REMISE DU CADEAU</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Breuil3_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Hajar E.</strong> et <strong>Étienne G.</strong>, délégués de l'HK, offrent à <strong>Eddie Breui</strong>l un livre sur Proust pour le remercier de sa venue à Compiègne.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Breuil4_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Les professeurs des classes préparatoires littéraires présents</strong> : (de gauche à droite) <strong>Alexandre Jenn</strong>, professeur de Lettres ; Diane Gaillard, professeure d'Allemand ; <strong>Céline Vasseur</strong>, professeure de Philosophie.</p>
Hypokhâgneux et Khâgneux à Paris le 1er juin 2023. Au programme : le musée du Louvre et la Comédie-Française (Salle Richelieu) : «La Mort de Danton», drame de Georg Büchner, dans une mise en scène de Simon Delétang.
urn:md5:8530f538b0fc5a1e439650960710ad65
2023-05-23T07:40:00+02:00
2023-05-23T07:50:38+02:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Mort_de_Danton.jpg.webp" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><em>La Mort de Danton</em> de Georg Büchner, à la Comédie-Française, à Paris, en 2023. (c) CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE, COLL. COMÉDIE-FRANCAISE.</p>
<p>Au premier plan, <strong>Danton</strong> (Loïc Corbery).</p>
<hr />
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<p><strong>JEUDI 1er JUIN, NOUS SERONS À NOUVEAU SOUS LE CHARME DES <em>PUISSANCES DE PARIS</em></strong> (Jules Romains)</p>
<p><strong><em>Cette sortie de fin d'année est, comme les précédentes, une fête de la culture et de l'amitié</em></strong>.</p>
<p><strong>Visite du musée du Louvre pour les Hypokhâgneux et les Khâgneux :</strong></p>
<p><strong>PROGRAMME : Les chefs-d'oeuvre du Louvre et les grands formats du XIXe siècle. </strong></p>
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<p>Comme les années précédentes, nous prendrons <strong>le temps de nous promener dans Paris</strong> : quais de la Seine, Louvre, jardins du Palais-Royal, Quartier Latin... Car il importe de profiter de cette sortie pour découvrir et admirer la «poétique» de cette ville (2) - du moins de l'un ou deux de ses quartiers -, et devenir, l'espace de quelques heures, des «<strong>flâneurs des deux rives</strong>», à la manière d'Apollinaire ou de simples «<strong>piétons de Paris</strong>», comme Léon-Paul Fargue... Sur le Palais-Royal, ses jardins, ses arcades, et sur Diderot, qui fréquentait assidûment ces lieux, on peut lire <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2014/03/10/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-11-juin-2014.-Au-programme-%3A-Le-mus%C3%A9e-d-Orsay-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%21">le billet du 10 mars 2014</a>.</p>
<p>(1) Cf. Pierre Sansot, <em>Poétique de la ville</em>, Méridiens Klincksieck, 1988 (réédition récente en poche / Payot) : lire notamment «Qu'est-ce qu'aimer une ville ?», p. 239 et sqq.</p>
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<iframe width=" 459" height="344" src="https://www.youtube.com/embed/eCivD_pqSNA?feature=oembed" frameborder="0" allowfullscreen="allowfullscreen"></iframe>
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<p>Pour plus de détails sur la tradition de cette sortie, se reporter également aux billets suivants : <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/03/17/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-5-juin-2019.-Au-programme-%3A-le-mus%C3%A9e-d-Orsay-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%28Salle-Richelieu%29-%3A-%C2%ABElectre-/-Oreste%C2%BB%2C-d-Euripide%2C-dans-une-mise-en-sc%C3%A8ne-d-Ivo-van-Hove-.">billet du 17 mars 2019</a>, et <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/02/23/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-10-juin-2020.-Au-programme-%3A-mus%C3%A9e-d-Orsay%2C-mus%C3%A9e-Guimet-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%28Vieux-Colombier%29-%3A-%C2%ABBajazet%C2%BB%2C-de-Racine%2C-dans-une-mise-en-sc%C3%A8ne-d-%C3%89ric-Ruf.">billet du 14 mars 2020</a>.</p>
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<p><strong>Nous irons tous ensuite à la Comédie-Française (salle Richelieu) pour assister à la représentation de <em>La Mort de Danton</em>, drame de Georg Büchner, dans une mise en scène de Simon Delétang</strong>.</p>
<p><strong>Informations données par le site de <a href="https://www.comedie-francaise.fr/fr/evenements/la-mort-de-danton-22-23#">la Comédie-Française</a></strong> :</p>
<p>Après « Anéantis » de Sarah Kane au Studio-Théâtre, le directeur du Théâtre du Peuple de Bussang, Simon Delétang, choisit « La Mort de Danton » pour sa première mise en scène Salle Richelieu.</p>
<p>Une entrée au Répertoire signifiante que celle de cette pièce sur la Révolution française dans le Théâtre national qu’est devenue la Maison de Molière. Écrit en 1835 alors que Büchner vient d’échapper à l’arrestation après son pamphlet à destination des masses paysannes, <em>Le Messager hessois</em>, le drame se distingue par sa modernité et ses emprunts immédiats au réel que le dramaturge allemand revendique : « Pour ce qui est de la prétendue immoralité de mon livre, j’ai à répondre ceci : l’auteur dramatique n’est à mes yeux qu’un historien, mais il se situe au-dessus de ce dernier par le fait qu’il crée pour nous l’histoire une seconde fois et que, au lieu de donner une sèche narration, il nous transporte aussitôt dans la vie d’une époque, et nous donne au lieu de caractéristiques, des caractères, et au lieu de descriptions, des personnages. »</p>
<p>Fresque extrêmement documentée, <em>La Mort de Danton</em> peint une génération d’hommes et de femmes engagés dans un combat social qui causera leur perte. Simon Delétang situe sa mise en scène dans une esthétique XVIIIe siècle où les ors de la royauté resplendissent toujours. Un espace unique évolutif permet de suivre les dix-sept artistes au plateau dans les nombreux lieux où se joue le destin de Danton, ce jouisseur de la vie, fervent opposant à la Terreur de Robespierre. Convictions politiques et manipulation de l’opinion populaire, débats enflammés du Comité de salut public et lame meurtrière de la guillotine, le génie de Büchner tient à la façon dont il condense ce moment crucial de l’histoire de France, et à partir duquel il offre une réflexion poignante sur la condition humaine.</p>
<p>Avec le généreux soutien d'Aline Foriel-Destezet, grande ambassadrice de la création artistique
et le soutien de la Fondation pour la Comédie-Française</p>
<p>NOUVELLE PRODUCTION</p>
<p>ENTRÉE AU REPERTOIRE</p>
<p><strong>ÉQUIPE ARTISTIQUE</strong></p>
<p>Traduction : Jean-Louis Besson et Jean Jourdheuil</p>
<p>Mise en scène et scénographie : Simon Delétang</p>
<p>Costumes : Marie-Frédérique Fillion</p>
<p>Lumières : Mathilde Chamoux</p>
<p>Musiques originales et son : Nicolas Lespagnol-Rizzi</p>
<p>Assistanat à la scénographie : Aliénor Durand</p>
<p><strong>DISTRIBUTION</strong></p>
<p>Danton : Loïc Corbery</p>
<p>Femme de Danton : Julie Sicard</p>
<p>Saint-Just : Guillaume Gallienne</p>
<p>Robespierre : Clément Hervieu-Léger</p>
<p>Barrère : Christian Gonon</p>
<p>etc.</p>
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<p><strong>Les Hypokhâgneux se procureront la pièce de Büchner dans l'édition de poche suivante , à lire pour la rentrée des vacances de Pâques</strong> :</p>
<p>Büchner, <em>La Mort de Danton</em>, GF-Flammarion, traduction et présentation de Michel Cadot . ISBN-13 : 978-2080708885.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Danton_GF_s.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Ce sera pour eux l'occasion de faire le point sur <strong>le drame romantique</strong>, en confrontant l'oeuvre de Büchner à celles d'Alfred de Vigny (<em>Chatterton</em>), de Victor Hugo (<em>Ruy Blas</em>) et d'Alfred de Musset (<em>Lorenzaccio</em>), qui étaient au programme des khôlles sur le théâtre.</p>
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<p><em>Sortie organisée - chaque année depuis 2010 - par Mme Peiffert, professeur d'Histoire (musée : Orsay / Louvre), et M. Chalard, professeur de Lettres (théâtre : Comédie-Française / Odéon)</em>.</p>
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<p><strong>Récapitulatif des spectacles vus, depuis 2010</strong> :</p>
<p><strong>2010-2011</strong> : Théâtre de l’Odéon, Paris : <strong><em>Mille francs de récompense</em>, de Victor Hugo</strong>, mise en scène de Laurent Pelly.</p>
<p><strong>2011-2012</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Les Trois sœurs</em>, de Tchékhov</strong>, mise en scène d’Alain Françon.</p>
<p><strong>2012-2013</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Phèdre</em>, de Jean Racine</strong>, mise en scène de Michael Marmarinos.</p>
<p><strong>2013-2014</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Lucrèce Borgia</em>, de Victor Hugo</strong>, mise en scène de Denis Podalydès.</p>
<p><strong>2014-2015</strong> : Théâtre du Vieux-Colombier, Paris : <strong><em>Le Système Ribadier</em>, de Feydeau</strong>, mise en scène de Zabou Breitman.</p>
<p><strong>2015-2016</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Tartuffe</em>, de Molière</strong>, mise en scène Galin Stoev.</p>
<p><strong>2016-2017</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Cyrano de Bergerac</em>, d’Edmond Rostand</strong>, mise en scène de Denis Podalydès.</p>
<p><strong>2017-2018</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Britannicus</em>, de Racine</strong>, dans une mise en scène de Stéphane Braunschweig.</p>
<p><strong>2018-2019</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Électre / Oreste</em>, d'Euripide</strong>, dans une mise en scène d'Ivo van Hove.</p>
<p><strong>2019-2020</strong> : La Comédie-Française (salle du Vieux Colombier), Paris : <strong><em>Bajazet</em>, de Racine</strong>, dans une mise en scène d'Éric Ruf. Sortie annulée : COVID.</p>
<p><strong>2020-2021</strong> : Sortie annulée : COVID.</p>
<p><strong>2021-2022</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Le Bourgeois gentilhomme</em>, de Molière</strong>, dans une mise en scène de Valérie Lesort et de Christian Hecq.</p>
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LES LUNDIS DE PIERRE D'AILLY : Conférences sur les études littéraires. Présentation et programme.
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2023-05-15T15:30:00+02:00
2024-02-26T10:21:09+01:00
Reynald André Chalard
Les Lundis de Pierre d'Ailly
<p><strong><em>«La spécialisation sans l'universalisme est aveugle, l'universalisme sans la spécialisation n'est qu'une bulle de savon.»</em> Ernst Robert Curtius, <em>La Littérature européenne et le Moyen Âge latin</em>, 1953</strong>.</p> <p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Babel_Brueghel.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>« La Tour de Babel », Bruegel l’Ancien, 1563.</p>
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<p><strong>LES LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</strong> <em>ont pour vocation de faire réfléchir les étudiants des classes de Lettres sur la spécificité des études littéraires, en les confrontant «techniquement» aux différentes approches critiques de cet objet particulier que l'on appelle <ins>littérature</ins>. Face à un spécialiste universitaire d'un auteur, d'un genre, d'une période ou d'un mouvement, qui présente, dans le cadre d'une conférence, le ou les problèmes précis posés par une oeuvre littéraire au programme, ils sont invités à questionner le sens de ce qui leur est donné à lire mais aussi le rapport de ce questionnement à la culture générale. À une époque où il est plus que jamais urgent de mettre le singulier à l'épreuve de l'universel, l'exigence de Curtius nous paraît fondamentale pour la construction critique des savoirs. Comme pour </em><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/Les-Rencontres-de-Pierre-d-Ailly">Les Rencontres de Pierre d'Ailly</a><em>, que les «Lundis» complètent, chaque conférence est précisément articulée au cours de Lettres en Hypokhâgne, qu'elle prolonge par un dialogue vivant</em>.</p>
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<p><strong>2e édition des LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2023/06/03/2e-%C3%A9dition-des-%C2%AB-Lundis-de-Pierre-d-Ailly-%C2%BB.-%C2%AB-DU-NOUVEAU-CHEZ-RIMBAUD-%3A-Probl%C3%A8mes-%C3%A9ditoriaux-et-s%C3%A9mantiques-des-Illuminations-.%C2%BB-Conf%C3%A9rence-d-Eddie-Breuil%2C-docteur-de-l-Universit%C3%A9-Lumi%C3%A8re-Lyon-2%2C-sp%C3%A9cialiste-de-l-%C3%A9dition-critique%2C-lundi-22-mai"><em>(Lire le billet du 3 juin 2023)</em></a></p>
<p><strong>Conférence d'Eddie Breuil sur l'oeuvre du poète Germain Nouveau (1851-1920), <mark>lundi 22 MAI 2023</mark>, au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em>, à Compiègne</strong>.</p>
<p>Titre de la conférence :</p>
<p><strong>DU NOUVEAU CHEZ RIMBAUD : Problèmes éditoriaux et sémantiques des <em>Illuminations</em> </strong> <em>(Littérature et critique philologique)</em></p>
<p><strong>Eddie Breuil</strong>, docteur de l'Université Lumière-Lyon 2, est spécialiste de l'édition critique et a été l'un des conseillers scientifiques de <a href="http://www.citedulivre-aix.com/spip.php?article338">la belle exposition organisée par la Bibliothèque Méjanes d'Aix-en-Provence en 2021</a> sur le poète <strong>Germain Nouveau</strong>. Il est notamment l'auteur de deux ouvrages importants : a)<em>Du Nouveau chez Rimbaud</em>, éditions Honoré Champion, 2014 ; b)<em>Méthodes et pratiques de l'édition critique des textes et des documents modernes</em>, éditions Classiques Garnier, 2019. Il s'occupe en ce moment de l'édition complète des oeuvres de Germain Nouveau.</p>
<p>Compagnon méconnu de Rimbaud et de Verlaine, <strong>Germain Nouveau</strong> (1851-1920) est l'auteur d'une oeuvre poétique importante, mais aujourd'hui délaissée, malgré des travaux critiques en cours, qui tentent de réhabiliter ce poète dont Aragon lui-même a dit qu'il était l'égal de Rimbaud (<em>Les Lettres françaises</em>, 7 octobre 1948). Des contemporains de Nouveau, avant les Surréalistes, en avaient pris conscience. Notre étude de <em>La Doctrine de l’Amour</em> et des <em>Valentines</em> (éd. Gallimard, coll. «Poésie». Edition de Louis Forestier) cherchera à faire découvrir ce poète rare, dont l'oeuvre nous permettra de <strong>définir quelques problèmes littéraires d'envergure, que nous ne résoudrons évidemment pas, mais qui sont au coeur des études de Lettres</strong> : <strong>a) le problème de l'édition de son oeuvre</strong> : celle de Louis Forestier, dans la collection Poésie / Gallimard, comporte des erreurs et des inexactitudes imputables aux premiers éditeurs de Germain Nouveau, qui ne voulait pas que l'on publiât quoi que ce soit de sa plume ; <strong>b) le problème posé par les manuscrits de l'oeuvre de Rimbaud intitulée <em>Illuminations</em></strong> : on peut se demander s'ils ne cacheraient pas un autre auteur, qui serait Germain Nouveau lui-même. <strong>Eddie Breuil</strong> nous proposera une conférence sur ce thème, lundi 22 mai 2023. Il a en effet très aimablement accepté de venir nous expliquer ses conclusions sur l'analyse des manuscrits des <em>Illuminations</em>, pour savoir quelle part Germain Nouveau a pu prendre à l'élaboration de cette oeuvre. <em>Qu'il en soit d'ores et déjà vivement remercié!</em> <strong>c) Enfin, et dans le prolongement de ce qui précède, le problème de la place de Germain Nouveau dans l'histoire de la poésie</strong>, que nous tenterons de cerner en <em>lisant</em> son oeuvre à travers un ensemble de poèmes qui dessinent un parcours poétique et spirituel, et en prenant au sérieux ce qu'en dit le chef de file des Surréalistes André Breton, dans «Flagrant délit » (cf. <em>La Clé des champs</em>, Pauvert, 1979, p. 166.), à propos d'un faux Rimbaud publié en 1949 sous le titre <em>La Chasse spirituelle</em> : « Nouveau-Rimbaud : on n'aura rien dit, on n'aura rien franchi poétiquement tant qu'on n'aura pas élucidé ce rapport, tant qu'on n'aura pas dégagé le sens de la conjonction exceptionnelle de ces deux 'natures' et aussi de ces deux astres.»</p>
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<p><strong>1re édition des LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><em>(<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2017/10/23/Conf%C3%A9rence-de-S%C3%A9bastien-Baudoin-lundi-13-novembre-2017-%3A-%C2%AB-La-Po%C3%A9tique-du-souvenir-%C2%BB-dans-les-%C2%AB-M%C3%A9moires-d%E2%80%99outre-tombe-%C2%BB-de-Chateaubriand.">Lire le billet du 2 novembre 2017</a>)</em></p>
<p>Conférence de <strong>Sébastien Baudoin</strong> sur les <em>Mémoires d'outre-tombe</em>, de Chateaubriand, lundi 13 novembre 2017.</p>
<p>Titre de la conférence :</p>
<p><strong>L'EXIL ET L'ENVOL : L'ALCHIMIE DES SOUVENIRS DANS LES <em>MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE</em></strong> <em>(Littérature et critique thématique)</em></p>
<p><strong>Sébastien Baudoin</strong> est professeur de Lettres supérieures au lycée Victor Hugo à Paris. Agrégé de Lettres modernes et docteur ès Lettres, il est l’auteur de nombreux articles sur Chateaubriand et le paysage littéraire ainsi que sur Victor Hugo, Nerval, Flaubert, Emerson, Gracq, Thoreau, Tocqueville et Walt Whitman. Il est l’auteur de <em>Poétique du paysage dans l’œuvre de Chateaubriand</em> (Paris, Classiques Garnier, 2011), d’une édition scientifique de l’<em>Essai sur la littérature anglaise</em> de Chateaubriand (Paris, STFM/Classiques Garnier, 2013) et prépare actuellement l’édition scientifique du <em>Voyage en Amérique</em> (Paris, Gallimard, « Folio », 2019) ainsi que l’édition scientifique de la seconde partie du <em>Génie du Christianisme</em> de Chateaubriand (Paris, Honoré Champion, à paraître). Il co-dirige avec Béatrice Didier la section « Œuvres » du <em>Dictionnaire Chateaubriand</em> (Paris, Honoré Champion, à paraître). Notice de 2017. Aujourd'hui, <strong>Sébastien Baudoin</strong> est professeur de Première supérieure aux lycées Jules Ferry et Hélène Boucher de Paris, et sa bibliographie s'est considérablement enrichie !</p>
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Cours d'Histoire littéraire du lundi. Germain Nouveau, «Premiers poèmes» (1872-1879), «La Doctrine de l’Amour» (1879-1881) et les «Valentines» (1885-1887) : un itinéraire spirituel . A croiser avec le cours Genres/Notions du vendredi sur la Poésie...
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2023-04-02T18:33:00+02:00
2023-08-29T17:07:33+02:00
Reynald André Chalard
Cours
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Germain_Nouveau_poe_te_m.jpg" alt="" /><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Germain_nouveau_m.jpg" alt="" /></p>
<p><strong>Germain Nouveau (1851-1920)</strong>, photographie (d'Étienne Carjat, 1872 ou 1873) et poème adressés à Stéphane Mallarmé :</p>
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<p><em>Sans verte étoile au ciel, ni nébuleuse blanche</em>,</p>
<p><em>Sur je ne sais quel Styx morne, au centre de l'O</em></p>
<p><em>Magnifique qui vibre autour de lui sur l'eau</em>,</p>
<p><em>Mélancoliquement mon esprit fait la planche</em>.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XIXe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><strong>L'oeuvre au programme, dans l'édition demandée</strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Germain_Nouveau_poe_sies_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Germain Nouveau, <em>La Doctrine de l’Amour</em>, <em>Valentines</em>, éd. Gallimard, coll. « Poésie ». Édition de Louis Forestier. ISBN : 978-2070322053.</p>
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<p><strong>Les deux oeuvres de Rimbaud inscrites au programme des khôlles, indispensables pour comprendre <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/LES-LUNDIS-DE-PIERRE-D-AILLY">la problématique de la conférence</a> sur la fabrique des <em>Illuminations</em> </strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Rimbaud_Saison_et_Illuminations.webp" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Arthur Rimbaud, <em>Une saison en enfer</em>, <em>Illuminations</em> et autres textes, 1873-1875, éd. Le Livre de Poche, coll. «Classiques». Édition de Pierre Brunel. ISBN : 978-2253096368.</p>
<hr />
<p><strong>HISTOIRE LITTÉRAIRE</strong></p>
<p>Germain Nouveau (1851-1920)</p>
<p><em>Premiers poèmes</em> (1872-1879), <em>La Doctrine de l’Amour</em> (1879-1881) et les <em>Valentines</em> (1885-1887)</p>
<p><strong>TRAVAUX</strong> : les références renvoient impérativement à l’édition établie par Louis Forestier (1982). La bibliographie est purement indicative : elle sera commentée en classe pour vous montrer l’importance de la recherche et la nécessité de se référer à des sources fiables, en particulier aux travaux des spécialistes du sujet étudié.</p>
<p><em>Le programme de travail (modifiable) qui suit se contente d’indiquer les grandes lignes du cours et les principales préparations données aux élèves. Tous les textes proposés ci-dessous doivent être lus et médités dans la perspective de l’exercice indiqué</em>.</p>
<p>1- Notre étude cherchera à faire découvrir ce poète rare, dont l'œuvre nous permettra de <strong>définir quelques problèmes littéraires d'envergure</strong>, que nous ne résoudrons évidemment pas, mais qui sont au cœur des études de Lettres : <strong>a) le problème de l'édition de son œuvre</strong> : celle de Louis Forestier, dans la collection Poésie / Gallimard, comporte des erreurs et des inexactitudes imputables aux premiers éditeurs de Germain Nouveau, qui ne voulait pas que l'on publiât quoi que ce soit de sa plume ; <strong>b) le problème posé par les manuscrits de l'œuvre de Rimbaud intitulée <em>Illuminations</em></strong> : on peut se demander s'ils ne cacheraient pas un autre auteur, qui serait Germain Nouveau lui-même. L'universitaire <strong>Eddie Breuil</strong>, spécialiste de l'édition critique et conseiller scientifique de <a href="http://www.citedulivre-aix.com/spip.php?article338">la belle exposition organisée par la Bibliothèque Méjanes d'Aix-en-Provence en 2021 sur le poète Germain Nouveau</a>, nous proposera une conférence sur ce thème, au mois de mai 2023, dans le cadre des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/LES-LUNDIS-DE-PIERRE-D-AILLY">LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</a>. Il a en effet très aimablement accepté de venir nous expliquer ses conclusions sur l'analyse des manuscrits des <em>Illuminations</em>, pour savoir quelle part Germain Nouveau a pu prendre à l'élaboration de cette œuvre. <strong>c) Enfin, et dans le prolongement de ce qui précède, le problème de la place de Germain Nouveau dans l'histoire de la poésie</strong>, que nous tenterons de cerner en lisant son œuvre à travers un ensemble de poèmes qui dessinent un parcours poétique et spirituel, et en prenant au sérieux ce qu'en dit le chef de file des Surréalistes André Breton, dans «Flagrant délit» (cf. <em>La Clé des champs</em>, Pauvert, 1979, p. 166.), à propos d'un faux Rimbaud publié en 1949 sous le titre <em>La Chasse spirituelle</em> : « Nouveau-Rimbaud : on n'aura rien dit, on n'aura rien franchi poétiquement tant qu'on n'aura pas élucidé ce rapport, tant qu'on n'aura pas dégagé le sens de la conjonction exceptionnelle de ces deux 'natures' et aussi de ces deux astres.» Nous porterons notre attention sur les <em>Valentines</em>, mais nous commencerons notre étude par la fameuse <em>Doctrine de l’Amour</em> (il s’agit de décrire un itinéraire spirituel) : <strong>notre réflexion s’articulera autour de trois axes : <em>romantique</em> (sa formation, ses lectures, Hugo, Baudelaire, Musset…), <em>rimbaldien</em> (sa participation à l’<em>Album zutique</em>, sa veine « chatnoiresque », la période des <em>Illuminations</em>), <em>religieux</em> (en parallèle avec la conversion de Verlaine), ces trois perspectives - à définir - n’étant pas nécessairement indifférentes l’une à l’autre</strong>.</p>
<p>2- <strong>Lectures préalables pour orienter la réflexion</strong> (voir aussi infra les « références bibliographiques ») : lecture et maîtrise du <em>corpus minimum</em>, précisé en cours. Il convient tout d’abord de bien utiliser l’édition au programme : <strong>a) lire la préface de Louis Forestier, p.7-18</strong>, pour situer Germain Nouveau dans le second demi-siècle, et parmi ses contemporains : face au grand Victor Hugo, admiré, Alfred de Musset, passablement imité, le Baudelaire des <em>Fleurs du Mal</em>, lu, pastiché et dépassé par Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud et Charles Cros, entre autres (établir une notice pour chaque poète) ; <strong>b) consulter régulièrement le dossier, p. 273-303</strong>, pour cerner l’essentiel de la notice biographique et de la notice sur l’œuvre, mais aussi pour se reporter, à chaque fois que nécessaire, aux notes, qui permettent d’éclairer le sens des poèmes et leur orientation poétique ; <strong>c) lire les <em>Illuminations</em>, de Rimbaud</strong>.</p>
<p>3- <strong>Recherches (1)</strong> : Quelques recherches sur le « romantisme français » en particulier, et le romantisme européen en général s’imposent : comment caractériser le romantisme français, en précisant les influences qui l’ont constitué et le réseau d’œuvres littéraires et artistiques qui l’ont illustré ? Sans vous perdre dans l’abondance de la documentation, appuyez-vous en premier lieu sur des œuvres connues de vous pour répondre à cette délicate question, en choisissant au moins un roman, un recueil de poèmes, une œuvre dramatique et un essai, dont vous préciserez le contenu et définirez la portée. <strong>Car c’est de ce vaste mouvement que surgiront les différents groupes ou écoles de poètes du XIXe siècle</strong>. Cf. <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/05/04/Cours-d-Histoire-litt%C3%A9raire-%3A-Nerval%2C-Les-Chim%C3%A8res-%281854%29">ressources du blogue des Lettres, billet du 4 mai 2020</a>. <strong>Les travaux de contextualisation</strong> devront donc s’intéresser aux œuvres qui nourrissent l’œuvre de Germain Nouveau, en amont, mais aussi au regard rétrospectif que des poètes comme André Breton, Benjamin Péret et Aragon ont porté sur ce dernier, en en faisant l’égal de Rimbaud. On sera ainsi attentif à la manière dont cette œuvre est redécouverte dans deux anthologies célèbres, précisément celle de Breton, <em>Anthologie de l’humour noir</em> (1940) – citant « Le peigne », dans <em>Valentines</em>, notre édition p. 200 ; et celle de Péret, <em>Anthologie de l’Amour sublime</em> (1956) – citant « L’Amour de l’Amour », dans <em>La Doctrine de l’Amour</em>, notre édition p. 96 ; et dans <em>Valentines</em> « Supérieure » (p. 146), « Le baiser » (p. 236) et « L’agonisant » (p. 241) : <strong>l’humour noir</strong> - qui renverse l’ordre et les privilèges en transgressant les interdits sur un ton léger et féroce à la fois – <strong>et l’amour mystique -absolu</strong>, qui «apparaît comme un sentiment qui comble toute la vie du sujet » (Péret) – <strong>pourraient figurer parmi les principaux aiguillons de la poésie de Germain Nouveau</strong>.</p>
<p>4- <strong>Recherches (2)</strong> sur Germain Nouveau (1851-1920) : sa vie, ses contemporains, ses familiers par affinité : notamment Rimbaud et Verlaine, qui furent ses amis, et plus tard Mallarmé. On se demandera dans quelle mesure Germain Nouveau ne souffre pas un peu de ce que le critique René Étiemble appela en son temps « le mythe de Rimbaud » -ou encore du <em>rimbaldisme</em> - (« enfant précoce…, météore…, mystique, aventurier…, déserteur » : Étiemble, <em>Le Mythe de Rimbaud</em>. – <em>L’année du centenaire</em>, Gallimard, 1967, p. 214.).</p>
<p>5- <strong>Synthèse 1. Les titres.</strong> Leur fonction programmatique. A quelles significations les poèmes qu’ils coiffent renvoient-ils ?</p>
<p>6- <strong>Synthèse 2. Recherche des parentés, des influences poétiques</strong> (exemples) : <em>Premiers poèmes</em>, « Sonnet d’été » // Baudelaire, <em>Les Fleurs du Mal</em> (quel poème ?) ; <em>Premiers poèmes</em>, « Pourrières » // Musset, <em>Premières poésies</em> (quel poème ?) ; <em>La Doctrine de l’Amour</em>, « Immensité » et « Dieu » // Victor Hugo, par exemple, <em>Les Feuilles d’automne</em>, <em>Les Contemplations</em> (quels poèmes ?). Justifier ses réponses.</p>
<p><strong>Le programme des autres études littéraires et des explications de texte sera donné en classe</strong> . (...)</p>
<p>13- <strong>Quelques références bibliographiques</strong> : <strong>I. Lectures obligatoires</strong> : b) Max Milner, Claude Pichois, <em>Histoire de la Littérature française</em>. – <em>De Chateaubriand à Baudelaire</em>, GF-Flammarion : 1) « Problématique du romantisme », p. 7-17 ; c) Dans votre anthologie : <em>Littérature, 150 textes théoriques et critiques</em>, vous devez lire en priorité les chapitres suivants : « Le Langage poétique » et « Le Poète, le Moi et le Monde ». Le reste sera abordé dans le cours GENRES / NOTIONS du vendredi. <strong>II.Références (principales) du cours</strong> : Germain Nouveau, <em>Œuvres complètes</em>, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade, édition de Pierre-Olivier Walzer, 1970. a)Maïté Dabadie, <em>L’Écharde dans la chair. – ou La Vie du poète Germain Nouveau Humilis</em>, Tacussel éditeur, Marseille, 1986 ; b) José Lenzini, <em>Germain Nouveau. – Trimardeur de la poésie</em>, éd. Les Cahiers de l’Égaré, 2020 ; c) Martin Mirabel, <em>Germain Nouveau. – Un cœur illuminé</em>, éditions Michel de Maule, coll. « Le Quai », 2021 ; d) Ernest Delahaye, <em>Souvenirs familiers à propos de Rimbaud, Verlaine, Germain Nouveau</em>, Albert Messein éditeur, 1925 ; e) <em>Germain Nouveau</em> (sous la direction de M. A. Ruff), « Lettres modernes », Minard, 1967 ; f) <em>Le Point vélique. – Études sur Arthur Rimbaud et Germain Nouveau</em>, éditions La Baconnière, coll. « Langages », Neuchâtel, 1986 ; g) Jacques Lovochi, <em>Germain Nouveau ; - précurseur du surréalisme ?</em>, éditions Autres Temps, coll. « Autres SUD / documents », 2005 ; h) Eddie Breuil, <em>Du Nouveau chez Rimbaud</em>, éditions Honoré Champion, 2014 ; i) <em>Germain Nouveau l’insaisissable</em> (textes rassemblés par Michèle Monte), éditions de l’Université de Toulon, coll. « Var et Poésie » n° 10, Toulon, 2022 ; j) <em>Cahiers Germain Nouveau n° 5</em> (avec le DVD du film de Christian Philibert, <em>Le Poète illuminé Germain Nouveau</em> (Les Films d’Espigoule, 2020) ; k) Dominique Rabaté et alii, <em>Figures du sujet lyrique</em>, éd. Presses Universitaires de France, coll. « Perspectives littéraires», 1996. l) Michel Collot, <em>Sujet, monde et langage dans la poésie moderne</em>, éd. Classiques Garnier, 2018.</p>
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<p><strong>A visionner dès que possible (au plus tard pour vendredi 5 mai)</strong></p>
<p><em>Conférence-débat entre <strong>Pierre Brunel</strong> (Sorbonne-Université) et <strong>Eddie Breuil</strong> (Université de Lyon 2) en deux parties</em> (Animée par <strong>Jérôme Thélot</strong>, professeur de Littérature française à l'Université Lyon 3, 7 avril 2015, de 14h à 16h ) :</p>
<p><strong>Les <em>Illuminations</em> d'Arthur Rimbaud sont-elles de Germain Nouveau ? partie 1</strong></p>
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</div>
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<p><strong>Les <em>Illuminations</em> d'Arthur Rimbaud sont-elles de Germain Nouveau ? partie 2</strong></p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
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<p><strong>Sur Germain Nouveau</strong> (France Culture, 1974) :</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
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<p><strong>Sur Arthur Rimbaud</strong> (documentaire-fiction de Richard Dindo, <em>Arthur Rimbaud, une biographie</em>, 1991) :</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
<p>Liste des textes lus dans le documentaire-fiction de Richard Dindo, <em>Arthur Rimbaud, une biographie</em> (1991) :</p>
<p>a) <em>Une saison en enfer</em>, pp. 201-202 ; b) « Les Etrennes des orphelins », pp. 13-17 ; c) « Les Poètes de sept ans », pp. 112-114 ; d) « Sensation », p. 37 ; e) « Roman », pp. 41-42 ; f) <em>Lettre A Théodore de Banville</em> (24 mai 1870), p. 20-28 ; g) <em>Lettres A Georges Izambard</em> (25 août, 5 septembre et 2 novembre 1870) ; h) « Mémoire », pp. 157-159 ; i) »Ma bohème », p. 62 ; j) <em>Lettre A G. Izambard</em> (13 mai 1871), pp. 91-93 ; k) <em>Une saison en enfer</em> (« Mauvais sang »), pp. 203-209 ; l) <em>Une saison en enfer</em> (« Délires I »), pp. 215-219 ; m) <em>Une saison en enfer</em> (« L’Impossible »), pp. 229-231 ; n)<em> Illuminations</em> (« Vies »), pp. 262-263 ; o) <em>Illuminations</em> (« Enfance »), pp. 256-259 ; p) « Paris se repeuple », pp. 103-105 ; q) « Les Déserts de l’amour », pp. 182-184 ; r) « Le Bateau ivre », pp. 130-133 ; s) « Vers nouveaux », « Qu’est-ce pour nous… »), pp. 156-157 ; t) « Vers nouveaux », « Fêtes de la patience », pp. 166-171.</p>
<p>Les références ci-dessus renvoient à l’excellente édition de Jean-Luc Steinmetz : Arthur Rimbaud, <em>Oeuvres complètes</em>, GF-Flammarion, 2010. ISBN : 978-2081382725.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Rimbaud_complet.webp" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
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<p>Le mythe de Rimbaud dans la chanson populaire française des années 70 : Michel Delpech, <em>Rimbaud chanterait</em> (1974)</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
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<p>Catalogue de l'exposition <strong><em>Germain Nouveau: L'ami de Verlaine et de Rimbaud</em></strong>, éditions Silvana Editoriale, 2021.</p>
<p>Bibliothèque patrimoniale et archives municipales Michel-Vovelle, à Aix-en-Provence. 02 octobre-31 décembre 2021.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Germain_Nouveau_exposition.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
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Les «Rencontres de Pierre d'Ailly» ont eu lieu jeudi 24 novembre 2022 : « Le Roman inépuisable ». Conférence de Philippe Le Guillou, romancier et essayiste, prix Médicis 1997 pour «Les Sept noms du peintre». Rattrapage de la 8e édition.
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2022-12-16T16:12:00+01:00
2023-05-23T07:49:39+02:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/PLG1ter.JPG" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong>, dans la salle <em>Jeanne d'Arc</em> de l'ancien Hôtel-Dieu Saint-Nicolas, à Compiègne, jeudi 24 novembre 2022.</p>
<p><strong>La 8e édition des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/05/22/8e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB%2C-mardi-1er-d%C3%A9cembre-2020-sur-la-place-du-roman-dans-la-litt%C3%A9rature-%3A-%C2%AB-Le-Roman-in%C3%A9puisable%C2%BB%2C-Conf%C3%A9rence-de-Philippe-Le-Guillou%2C-romancier-et-essayiste."><em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></a> a été à nouveau un grand succès. </strong> <strong>Philippe Le Guillou</strong> nous a fait partager sa passion de la transmission et son goût pour le roman avec un enthousiasme <em>inépuisable</em>. Qu'il en soit vivement remercié !</p>
<p>Je remercie <strong>Madame Bourrelier</strong>, proviseur du lycée Pierre d'Ailly, qui a permis ces «Rencontres» et en a présenté cette 8e édition, en attente depuis 2020, à cause de la covid. Merci, enfin, à tous les participants, à <strong>M. Wieczorek</strong>, proviseur adjoint, aux collègues qui ont bien voulu encadrer les élèves et les étudiants présents ; à <strong>M. Miljevic</strong>, responsable des salles Saint-Nicolas, qui nous a accueillis avec sa bienveillance coutumière dans ce lieu mémorable.</p>
<p>Merci à <strong>Chloé S</strong>., HK, et à <strong>Axelle D</strong>., KH, pour leurs belles photos !</p>
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<p><strong>AVANT LA CONFÉRENCE, DEVANT LES SALLES SAINT-NICOLAS</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG8_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong> et <strong>Évelyne Bourrelier</strong></p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG9_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Les professeurs des classes préparatoires littéraires présents</strong> : (de gauche à droite) <strong>Aurélien Langlois</strong>, professeur d'Anglais ; <strong>Mélanie Jecker</strong>, professeure d'Espagnol ; <strong>Céline Vasseur</strong>, professeure de Philosophie ; <strong>Céline Barraud</strong>, professeure de Langues anciennes ; <strong>Sabine Peiffert</strong>, professeure d'Histoire ; <strong>Alexandre Jenn</strong>, professeur de Lettres.</p>
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<p><strong>EXORDE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG2ter_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG19_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Évelyne Bourrelier</strong>, proviseur, présentant la 8e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em> devant un auditoire de deux cents personnes dans la belle salle <strong>Jeanne d'Arc.</strong></p>
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<p><strong>CONFÉRENCE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG2bis_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong></p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG12_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Évelyne Bourrelier</strong>, <strong>Philippe Le Guillou</strong> et Reynald André Chalard</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG7_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Une partie de l'auditoire, avant les questions posées à l'invité : aux premiers rangs, <strong>les classes préparatoires littéraires du lycée Pierre d'Ailly (Hypokhâgne et Khâgne)</strong>, puis des <strong>élèves de première et de terminale</strong>, accompagnés de <strong>leurs professeurs</strong>.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong> et Reynald André Chalard, écoutant les questions posées par l'auditoire.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG27_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>M. Benjamin Wieczorek</strong>, proviseur adjoint du lycée Pierre d'Ailly, derrière deux Khâgneuses et un Hypokhâgneux attentifs (<strong>Maelwenn D.</strong>, <strong>Barbara LG.</strong> et <strong>Andy H.</strong>).</p>
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<p><strong>Pour introduire la conférence</strong> <em>(discours de présentation de Reynald André Chalard)</em> :</p>
<p>Nous voilà réunis aujourd’hui pour une nouvelle édition des « Rencontres de Pierre d’ Ailly», la 8e en réalité, qui aurait dû avoir lieu le 1er décembre 2020, et qui a été reportée à plusieurs reprises à cause de la Covid, mais qui peut enfin se tenir aujourd’hui. Merci à tous de votre présence.</p>
<p><em>Les enjeux de ces « conférences » - je le rappelle - tournent autour de la littérature, de l’expérience esthétique et éthique qu’elle nous propose, de ce qu’elle nous donne à penser de notre rapport au monde, des problématiques qu’elle permet de croiser, au carrefour de la philosophie, de l’histoire et plus largement des sciences humaines</em>. (Page à consulter sur ce blogue : <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/Les-Rencontres-de-Pierre-d-Ailly">LES RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</a>).</p>
<p>Le nouveau thème de réflexion choisi cette année porte sur deux œuvres au programme de L’Hypokhâgne : <em>Le Donjon de Lonveigh</em> (roman publié en 1991) et <em>Le Roman inépuisable, roman du roman</em> (publié en 2020), dont l’auteur est <strong>M. Philippe Le Guillou</strong>, que nous avons le plaisir et l’honneur de recevoir aujourd’hui, dans le sillage de deux précédentes éditions des « Rencontres de Pierre d’Ailly » qui étaient aussi consacrées au roman : l’une, en 2019, avec l’éminent spécialiste de Proust, <strong>Luc Fraisse</strong>, qui nous a aidés à poser et à comprendre le problème des rapports que le roman entretient avec la philosophie dans <em>À la recherche du temps perdu</em> ; l’autre, au mois de mai de cette année, avec notre ancien élève en classe préparatoire littéraire, <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>, devenu écrivain après sa deuxième Khâgne, et prix Goncourt 2021 pour <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>. La littérature est une fête, pensait Jean Paulhan, l’un des plus prestigieux directeurs de la <em>NRF</em>, et cette fête continue aujourd’hui avec l’œuvre imposante, riche et multiple de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, romancier et essayiste. Presque toute son œuvre, qui compte maintenant de nombreux volumes, est publiée chez Gallimard, dans la collection «Folio ». Vous avez obtenu cher <strong>M. Le Guillou</strong> de nombreux prix littéraires, dont le Médicis pour <em>Les Sept noms du peintre</em>, en 1997, et le prix Charles Oulmont de la Fondation de France en 2001, pour votre roman <em>Le Roi dort</em>. Vous avez écrit de nombreux essais sur Chateaubriand, De Gaulle et Julien Gracq, avec lesquels vous avez des affinités électives. Vous êtes également, et c’est votre métier, Inspecteur général de l’Éducation nationale, agrégé des Lettres et docteur en Littérature française. Il est important de souligner que vous avez été professeur en classes préparatoires aux grandes écoles et à l’Institut d’Études Politiques de Paris. On peut dire, je crois, que ce goût voire cette passion de la transmission ne vous a jamais quitté et qu’elle nourrit même votre travail d’écrivain, comme nous aurons l’occasion de l’observer tout au long de cette conférence.</p>
<p>Œuvre imposante, ai-je lancé, œuvre importante devrais-je également ajouter, qui a donné lieu à des journées d’études et, récemment, à un colloque qui s’est tenu à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, à Paris, et dont les actes ont paru au printemps dernier dans la collection des prestigieux <em>Cahiers de la NRF</em>, portant un titre très suggestif : <em>Géographies intérieures</em>. Luc Vigier identifie ainsi dans cette œuvre très variée plusieurs cycles, au sein desquels on peut trouver des genres différents, mais aussi des récits autobiographiques qui croisent « les grandes scansions légendaires » ou des romans qui glissent, dit-il, « vers la mythologie autobiographique », l’ensemble laissant entrevoir « des porosités multiples » et « générant un effet de totalité obsessionnel » - cette idée est cruciale, et j’y reviendrai (<em>Philippe Le Guillou. – Géographies intérieures</em>, Actes du colloque de la rue d’Ulm, éditions Gallimard, coll. « Les Cahiers de la NRF », 2022, pp. 9-10.).</p>
<p>Dès lors, parler de « cycle breton » ou « celtique et arthurien » (<em>L'Orée des flots. Rêverie tristanienne</em>, suivi de <em>Pour une poétique arthurienne</em>, Artus, 1997 ; <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, Gallimard, 1991) ; <em>Livres des guerriers d'or</em>, Gallimard, 1995…), de « cycle des papes » (auquel appartient <em>Le Dieu noir</em>, 1987, chronique d’un pape africain imaginaire), de « cycle autobiographique » (<em>Le Passage de l'Aulne</em>, Gallimard, 1993, <em>Les Marées du Faou</em>, Gallimard, 2003, où fiction et récit personnel conjuguent leurs efforts pour parler de soi), de cycle « pictural », avec par exemple <em>Les Sept Noms du peintre</em> (1997), de « cycle parisien », de « cycle politique » ou encore de « cycle de la foi » n’a-t-il pas qu’un intérêt taxinomique relatif : où ranger <em>Les Années insulaires</em>, Gallimard, 2013, qui met le peintre « insulaire » Kerros face au président Pompidou et à ses projets modernistes ? Où ranger <em>Le Bateau Brume</em>, Gallimard, 2010, qui raconte l’itinéraire de deux frères jumeaux, Gilles et Guillaume Vègh, l’un homme politique, l’autre peintre ? C’est peut-être le cycle de la foi qui est le plus homogène, par son objet religieux, par ses récits sur le Christ ou sur les saints, comme saint Guénolé ou sainte Thérèse de Lisieux.</p>
<p>Il y a pourtant des <em>invariants</em>, dans toutes ces œuvres, que l’on retrouve magistralement orchestrés, par exemple, dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em> (1991), votre cinquième livre mis au programme de l’Hypokhâgne cette année. <strong>L’itinéraire du personnage principal</strong>, et souvent celui de son double, apparaît comme <strong>un parcours initiatique</strong> que seul un art en harmonie avec soi et avec le cosmos peut ritualiser pour en manifester le sacré, c’est-à-dire une expérience totale de l’être, aussi bien physique que métaphysique : <strong>expérience du sacré</strong> qui, pour se régénérer, passe par la rédemption du sacrifice, lequel peut aller du don de soi jusqu’à son anéantissement. Dans <em>Mon cœur mis à nu</em>, Baudelaire affirme qu’« il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie.» (Folio, p. 102). Vos œuvres, qui peuvent se lire comme <em>une théorie des exceptions</em> (Sollers), en sont, d'une certaine manière, l’illustration convaincante. Ainsi, <strong>la figure du grand écrivain</strong>, avec son aura et sa part de mystère, hante <em>Le Donjon de Lonveigh</em>. Le narrateur qui en raconte l’histoire, critique littéraire et éditeur aux éditions Gallimard, est un lecteur admiratif et passionné qui cherche à écrire le « roman de Thomas Daigre » à partir des entretiens que celui-ci lui a accordés dans son château irlandais. Dès lors, le narrateur veut percer le secret de celui qui, compromis avec la Collaboration, quitta la France et se mura ensuite dans le silence, solitaire dans son donjon. Tout le roman est construit sur cette rencontre bouleversante, qui confronte le narrateur à la signification sacrificielle de l’acte d'écrire (l'écrivain, double de saint Sébastien percé de flèches ?), les carnets de Thomas Daigre émaillant la narration à de nombreuses reprises pour laisser entrevoir les éclats miroitants d’une œuvre étrange et méconnue, mais constamment désirable, comme l’est aussi, sans doute, pour le narrateur, Florence, la fille de l’écrivain reclus, qui peint et aime avec la même violence que celle du paysage marin, des tourbières et des loughs, dont la description lancinante renvoie aux mêmes puissances envoûtantes qui tourmentent les personnages.</p>
<p><strong>Autre <em>invariant</em> : « Il n’est de lecture possible que poétique »</strong>, écrit Thomas Daigre, dans l’un de ses carnets (Folio, p. 156). Il est donc nécessaire d’être attentif à tout ce qui, dans ce roman, excède l’événement et veut atteindre au poème - et dans le poème, à la parole originelle, c'est-à-dire au mythe -, en pensant <em>mutatis mutandis</em> à Mallarmé, qui voyait dans le roman de son ami Rodenbach, <em>Bruges-la-Morte</em>, un « poème, infini par soi mais littérairement un de ceux en prose les plus fièrement prolongés. » (Lettre du 28 juin 1892), mais en n'oubliant pas non plus ce que dit Remy de Gourmont du « roman éternel», conçu dès l'origine comme un poème (cf. <em>Promenades littéraires</em>, 7e série, 1927, où il cite, vers et prose, l<em>'Odyssée</em> et <em>Don Quichotte</em>, <em>Wilhelm Meister</em> et <em>Tribulat Bonhomet</em>, <em>Vita nuova</em> et <em>L'Éducation sentimentale</em> : ne peut-on pas voir là un prolongement de la conception romantique du roman également pris en charge par Philippe Le Guillou ?). Cette écriture recherche en effet par moments la «sorcellerie évocatoire » d’un lyrisme tout entier habité par « l’imaginaire du secret », pour reprendre le titre d’un livre suggestif de Pierre Brunel, le secret étant l’une des modalités de l’attente du sens et, paradoxalement, de son omniprésence, à travers les épiphanies du symbole qui travaillent le texte.</p>
<p><strong><em>Invariant</em> tout aussi important : l’épreuve du paysage</strong>. Thomas Daigre, l’homme des « pulsions » et des « fascinations sordides », l’homme de la transgression, que faisait «jouir » enfant le récit d’une exécution capitale fait par son grand-père, passe ses nuits à <em>attendre</em>. La nuit d’Irlande allégorise sa nuit intérieure, que lui révèlent les éléments naturels qu’il observe depuis son donjon. Mais l’harmonie s’est rompue, et contrairement à l’expérience énoncée par Baudelaire dans le poème en prose intitulé «Le Confiteor de l’artiste » (dans <em>Le Spleen de Paris</em>), il ne parvient plus à penser par la nature, comme la nature ne pense plus par lui. Il ne parvient plus, dans les «lieux vrais » - tel le narrateur découvrant la Chaussée des Géants – à se « raccorder » « à l’ossature du monde » (p. 141). Thomas Daigre est vaincu par le paysage irlandais qui l’attire irrémédiablement dans la profondeur de ses tourbières. Son donjon lui apparaît alors comme une sorte de bateau ivre qui ne démarre jamais et menace de prendre l’eau. Écrivain incapable de retrouver sa puissance de création d’autrefois, il reste prisonnier de lui-même et ne peut incarner les possibilités de cet être <em>autre</em> auquel il aspire. La seule ivresse qu’il connaisse lui vient de sa consommation excessive de whisky. Son histoire est finalement celle d’un grand écrivain raté qui n’a peut-être pas su être à la hauteur des mythes que ses œuvres ont magnifiés. Cher <strong>M. Le Guillou</strong>, il n’y a certes pas de donjon à Lonveigh, que vous avez inventé, comme il n’y a pas de château à Argol… Mais vous avez rêvé cette forteresse et son architecture, parce que, comme l’écrit très justement Victor Brombert, en pensant à la thèse de Maurice Lévy sur le roman noir, c’est là que se fixent «les manifestations d’une inquiétude» provoquée par « l’espace nocturne (et) le rêve d’une expérience verticale. » (Victor Brombert, <em>La Prison romantique</em>, José Corti, 1975, p. 57. Maurice Lévy, <em>Le Roman gothique anglais 1764-1824</em>, Albin Michel; coll. «Bibliothèque de l'Évolution de l'Humanité», 1995, en particulier le chapitre X intitulé «Structures profondes», p. 601-643.). A quoi on peut ajouter ces mots d’Annie Le Brun, que vous mentionnez dans l’avant-propos qui introduit au roman :</p>
<p>« Faut-il donc que les formes, les lieux, les êtres qui nous retiennent le plus, soient ceux qui livrent le moins leur secret et masquent le mieux le cours de notre vie ? Comme si chaque séduction se déployait en écran où reviendraient toujours se jouer, en se jouant de nous, nos rares raisons d’exister. Sans doute n’aimons-nous que des énigmes. » Annie Le Brun, <em>Les Châteaux de la subversion</em>, Gallimard, coll. « Folio », 1986 (1982), p. 9.</p>
<p>On le voit, votre conception du roman appartient à une esthétique et à une éthique qui tournent résolument le dos aux expérimentations de l’avant-garde qu’ont pu promouvoir jusque dans les années 70 des mouvements ou des « écoles » comme le « Nouveau Roman », <em>Tel Quel</em> ou encore l’OuLiPo. Vous faites partie d’une génération de romanciers telle Sylvie Germain, par exemple, – devancés, certes, par des « alliés substantiels » comme Michel Tournier et Le Clézio - et de poètes – tels Marie-Claire Bancquart et Jean-Pierre Lemaire - qui, à la fin des années 80, portent une plus grande attention à « l’expérience ontologique de l’existence », jugée plus importante que « l’auto-divination du langage » inspirée par une lecture formaliste de Rimbaud et de Mallarmé (cf. <em>La Poésie au tournant des années 80</em>, éditions José Corti, 1988, p. 7). C’est ainsi que dans ces années-là on revient à Baudelaire, poète dont la modernité ne court pas le risque de l’<em>hermétisme</em> et s’intéresse aussi bien au fugace qu’à l’éternel ; que le roman, avec des écrivains qui ont longtemps brillé par leurs théories comme Philippe Sollers et Alain Robbe-Grillet (que vous évoquez dans <em>Le Roman inépuisable</em>), retrouve le récit linéaire avec personnages. Vous-même, à partir de votre lecture des romans de Chrétiens de Troyes et du mythe de Tristan et Iseut (et plus largement de la matière de Bretagne), du roman mythologique de Michel Tournier, et de la poésie paysagère de Gracq et de Patrick Grainville – pour ne citer qu’eux -, vous imaginez, en 1997, -avec un enthousiasme saisissant -<strong>une poétique arthurienne</strong> qui continue les scripteurs médiévaux, dont « le travail, écrivez-vous, est emblématiquement inachevé » : «<strong>Le mythe</strong> doit être sans cesse dit et redit à l’orée des flots, comme une partition sacrée qui appelle en permanence de nouveaux accomplissements. Pour cela, il doit être raccordé à la souche irlandaise et primitive, il doit être retrempé dans le bain de ses mers d’origine. Toute poétique pleinement arthurienne doit être soucieuse de manifester ce feuilleté, cette stratification vivante qui montre l’ancrage fondateur. » <em>Pour une poétique arthurienne</em>, éditions Arthus, 997, p. 106.</p>
<p>On peut ainsi dire que cette poétique est le terreau de votre pratique d’<strong>écrivain</strong> mais aussi de <strong>lecteur</strong>. Les deux s’accordent pour faire l’éloge du roman, dans une méditation personnelle sur les œuvres qui vous ont particulièrement marqué et parfois même incité à prendre la plume, à votre tour. Ce « roman du roman », sous-titre repris à l’écrivain Jacques Laurent, dessine les cartes d’<strong>une véritable géographie littéraire</strong> (cf. Albert Thibaudet, « Pour la géographie littéraire », <em>NRF</em>, avril 1929.). Bien que le seul critère de vos choix repose sur vos propres goûts, vous y procédez – du moins au début – un peu comme Mme de Staël (citée p. 56 pour railler son roman bavard et touristique <em>Corinne</em>) qui, dans <em>De la littérature</em> (1800), faisait la distinction entre les littératures du Nord et celles du Midi. Vous fondant, comme elle – <em>mutatis mutandis</em> – sur les données imaginaires d’aires culturelles différentes, vous opposez de manière très suggestive une « matière guerrière (…), celle des dieux grecs et latins » à une « matière élémentaire et paysagère (…) traversée de songes et d’enchantements » (<em>Le Roman inépuisable</em>, p. 19). Votre préférence va bien évidemment à la matière de Bretagne, dont les images vous fascinent tout autant qu’elles vous permettent de résister à la routine et à la fadeur, selon vos propres mots. Vous confirmez ainsi que, contrairement à un jeune romancier des années 90 qui vous avez interpellé à ce sujet, <strong>l’imaginaire du roman</strong> du XXIe siècle ne sera pas celui de l’autoroute ! (<em>Pour une poétique arthurienne</em>, éditions Arthus, 1997, p. 107.) Aux antipodes de cet <em>adaptationnisme</em> littéraire : « Toute fiction est hantée, elle porte son <em>mundus imaginalis</em> comme le dit Durand, un monde d’images trempé de mystère et de nuit. Toute fiction est l’expression, la transfiguration de quelque chose qui vient d’un amont, d’une origine indécelable » (<em>Le Roman inépuisable</em>, p. 70). D’où votre intérêt constant pour la critique de Gaston Bachelard et ses travaux sur <strong>l’imagination matérielle</strong>, travaux poursuivis et approfondis par Gilbert Durand dans <em>Les Structures anthropologiques de l’imaginaire</em> – 1969- (la conscience n’est pas transparente, elle est faite de couches d’images qui s’y superposent…écrit Georges Poulet dans <em>La Conscience critique</em>). <strong>Archétypes et symboles</strong> vous guident ainsi dans l’exploration de cette « origine indécelable », véritable carrefour anthropologique où se mêlent désir de lire et d’écrire, nécessité de croire, d’espérer et de transmettre.</p>
<p>Car -<em>ars legendi, ars poetica</em> - avec <em>Le Roman inépuisable</em> vous nous proposez non seulement un <strong>art de lire</strong> mais aussi un <strong>art poétique</strong> qui ont tous deux pour vocation <strong>la transmission</strong>. Dans des pages qui rappellent l’heureux temps où les écrivains parlaient eux-mêmes des écrivains, avec autant d'autorité que de finesse, notamment dans la série des <em>Tableaux de la littérature française</em> lancée par Gide en 1939, vous convoquez vos « Pères » et vos « Pairs » en littérature, en parlant des romans qui ont compté pour vous : Chrétien de Troyes, Chateaubriand, Barbey d’Aurevilly, Proust, Malraux, Gracq, Montherlant, Tournier, Grainville… Ce roman est donc essentiellement français – vous n’êtes pas un émule de Kundera dans <em>L’Art du roman</em>, où il fait de l’œuvre de Cervantès, notamment, la matrice du roman européen. Vous lui opposez Proust sans hésiter. Ce roman, vous dites qu’il est <em>inépuisable</em> – contrairement à Richard Millet qui, dans <em>L’Enfer du roman</em>, y voit la marque de ce qu’il appelle la postlittérature – et qu’il a besoin de <strong>passeurs</strong>, mot qui revient souvent dans votre livre pour désigner aussi bien le romancier qui transmet par son œuvre que le professeur qui transmet les œuvres par son enseignement. <em>Le Passeur</em>, c’est aussi le titre d’un essai publié en 2019, où ne s’exprime pas seulement le romancier mais aussi le professeur de lettres que vous fûtes, et l’Inspecteur général que vous êtes toujours, rédigeant un plaidoyer pour l’explication de texte qui, avec intelligence dites-vous, doit être fondée sur <strong>une « rencontre » avec l’œuvre</strong>, « une sorte d’acquiescement à une présence, (contre les) grilles qui virent immanquablement au lit de Procuste. » p. 149. Car « l’explication d’un texte littéraire est avant tout un acte de lecture et le vrai lecteur, si l’on se met dans les pas du narrateur proustien à la fin du <em>Temps retrouvé</em> n’est jamais que le lecteur de lui-même, le livre – le texte – jouant le rôle de ces « verres grossissants » que l’opticien de Combray tendait à ses acheteurs. » p. 151. Travailler les textes, mais être aussi travaillé par eux « parachève, écrivez-vous très justement, le cheminement explicatif. » p. 153. Nous sommes donc loin d’un simple exercice scolaire, au sens étroit du terme.</p>
<p>Dans <em>Passions impunies</em>, le professeur et érudit George Steiner commente admirablement le tableau de Chardin intitulé <em>Un philosophe occupé de sa lecture</em> (1734). Il remarque en premier lieu son habit, un manteau et un bonnet de fourrure qui signale « une élégance appuyée, la mise impeccable du lecteur en cet instant choisi. » Il ajoute : « Lire, ici, n’est pas une initiative aléatoire, non préméditée. Il s’agit d’une rencontre civile, presque courtoise, entre une personne privée et l’un de ces « hôtes de marque dont Hölderlin évoque l’entrée dans les demeures mortelles dans son hymne ‘Comme par un jour de fête’. (…). Le lecteur rencontre le livre avec une élégance de cœur (tel est le sens de <em>cortesia</em>), avec une délicatesse, une hospitalité poussée jusqu’au scrupule et une disponibilité, dont la manche roussâtre, peut-être de velours ou de velvantine, ainsi que le manteau et la toque de fourrure sont les symboles extérieurs » (<em>Passions impunies</em>, Gallimard, 1996, p. 12).</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Chardin_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><em>Photo (C) RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / René-Gabriel Ojeda</em>.</p>
<p>C’est parés des mêmes intentions que nous allons maintenant vous écouter attentivement, ce qui est une autre manière de vous lire, en tout cas un moyen sûr de lire avec plus justesse et de profit cette œuvre <em>totale</em> qui est la vôtre, dont les différentes facettes toucheront aussi bien le cœur que l’esprit de tous nos élèves ici présents.</p>
<p>Pour tout cela , cher <strong>M. Le Guillou</strong>, je vous remercie sincèrement.</p>
<p>R. A. C.</p>
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<p><strong>LECTURES</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG6_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Étienne G</strong>., HK, lisant un extrait du <em>Roman inépuisable</em> : « Pour quelle raison se plonge-t-on dans la lecture d’un roman, au point de couper toute attache avec le monde, ce qui nous entoure, les obligations de la vie réelle ? Pourquoi en arrive-t-on à cette sorte d’autisme qui fait que la tour Eiffel ou les falaises d’Étretat pourraient s’effondrer, pour peu que le roman soit bon, bien ficelé, captivant, on ne s’en rendrait même pas compte ? Cette forme primordiale et presque juvénile de la lecture, qui se vit sur le mode d’un engagement radical, d’une immersion totale dans ce que Gracq appelle l’ « éther romanesque », cet abandon corps et biens à la souveraineté et à l’allégresse d’une fiction qui s’empare du lecteur au point de disposer de lui, suppose qu’on entre pieds et poings liés dans le <em>champ émotionnel</em> que déploie ce monde singulier et autonome, qu’on y adhère sans réserve, sans soupçon, et que jouent à plein tous les vieux ressorts tant décriés au moment de la Nouveauté romanesque des années 1960, à savoir l’identification aux personnages, le plaisir pris à déchiffrer leur psychologie, la soumission à la toute-puissance de l’intrigue.» (...). p. 16.</p>
<p><strong>« Racines du roman »</strong> : chapitre I (p. 16-18). Question posée à <strong>Philippe Le Guillou</strong> sur ce passage (P. 16-18) : Dans son livre intitulé <em>Roman du roman</em> (1977), Jacques Laurent, auquel vous rendez hommage dans votre essai <em>Le Roman inépuisable</em>, dit ceci : « Aurait-on le projet d’écrire si l’on n’avait pas lu ? Tout écrivain a d’abord été un lecteur, un admirateur donc un imitateur. » Vous faites, vous aussi, un éloge de la lecture (de romans en particulier) dès le début de votre essai, en la définissant comme un renoncement à soi au profit d’un abandon naïf, enfantin à la fiction et à son auteur. C’est l’origine de votre vocation. Pouvez-vous en expliquer les fondements (admiration et imitation, attitudes auxquelles on n’incline guère, me semble-t-il, aujourd’hui) ? (1)</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG5_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Baptiste F.</strong>, HK, lisant un extrait du <em>Roman inépuisable</em> : «Il y a une histoire — la longue chronologie des œuvres inscrites au patrimoine… et à l’obituaire des titres et des noms oubliés — et une géographie du roman, géographie conflictuelle, clivée entre deux espaces, deux mondes pourrait-on dire. D’un côté, l’univers du pouvoir, de la centralité, de la conquête arrogante, d’une mythologie aussi, celle des dieux grecs et latins ; de l’autre, celui des landes, des forêts, des tourbières et des brumes, des sortilèges et des enchantements, des talismans et des processions mystérieuses. (...) « Ensuite, c’est, d’une certaine manière, le creux de la vague, l’éclipse de la splendeur, la fadeur française — enfin selon moi ! Une fadeur élégante, ciselée, intense parfois, la fadeur d’une algèbre où le feu couve sous le givre. »</p>
<p><strong>« Racines du roman</strong> » : chapitres III et V (p. 19-20 et 33-34). Question posée à <strong>Philippe Le Guillou</strong> sur ces deux passages : Votre histoire subjective du roman déploie les pages essentielles d’une anthologie personnelle. Dans ce paysage littéraire, vous évoquez deux continents mythologiques, le gréco-latin et le celtique, en affirmant préférer le second, plus propice à ce que Bachelard nomme l’imagination matérielle, qui accorde une place fondamentale aux quatre éléments, tout en suscitant une rêverie nourrie par le goût du mystère et des enchantements. Cela explique-t-il votre rapport au classicisme de <em>La Princesse de Clèves</em> (et du classicisme louisquatorzien en général ?), dont vous louez, certes, « la langue admirable », mais qui est propre à illustrer ce que vous appelez « la fadeur française » ?</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG26_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Chloé S</strong><strong></strong>., HK, lisant un extrait du <em>Donjon de Lonveigh</em> (« L’aigle » : chapitre V, p. 64). <em>Dissimulé derrière « une touffe de buis », le narrateur observe Florence Daigre qui peint en dansant dans son atelier</em> : «J’entrai dans la danse et l’orgie. Florence était à ce point possédée qu’elle ne me vit pas. La peinture fusait toujours, au comble d’une énergétique qui était une parade gestuelle et un sacrifice.»</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG3_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Hajar E. A.</strong>, HK, lisant un extrait du <em>Donjon de Lonveigh</em> (« Les noms de la tribu » : chapitre XVII, p. 149-150). ''Thomas Daigre pose pour sa fille en saint Sébastien.': «L’atelier était quasiment vide, d’une neutralité ascétique. Florence avait dégagé les grandes toiles rouges, il n’y avait plus rien, le verre, le parquet ciré, le grand chevalet central. Au milieu de l’aire ainsi tracée se tenait Thomas Daigre, nu, dressé sur un flot de tissu pourpre, des flèches plantées dans le corps.»</p>
<p><strong>L'apollinien et le dionysiaque</strong>. Question posée à <strong>Philippe Le Guillou</strong> sur ces deux passages : Dans <em>Les Sept noms du peintre</em> (1997), vous écrivez ceci, au sujet du peintre Erich Sebastian Berg : « En amour, comme en peinture, Erich Sebastian Berg ne connaissait qu’un registre : l’excès. » (p. 217. Dans <em>Le Roman inépuisable</em> - p. 309 -, vous écrivez : « La littérature n’est qu’excès… »). Il est tentant de vous demander, en convoquant Nietzsche -que vous mentionnez dans ce roman -, si cet « excès», qui semble dominer dans vos œuvres, à travers vos personnages (Thomas et Florence Daigre en sont de bons exemples), ne recoupe pas la catégorie esthétique que l’auteur de <em>Naissance de la tragédie</em> nomme « le dionysiaque » et qui, avec « l’apollinien », préside à la création artistique. Pour le dire vite, on sait que le dionysiaque, caractérisé par l’ivresse et la perte de soi, favorise l’union avec la totalité naturelle : il est un principe de dissolution du sujet, là où l’apollinien s’affirme comme un principe d’individuation, de clarté et de mesure. L’apollinien et le dionysiaque, que Nietzsche appelle aussi des « pulsions », sont opposés mais pas séparables. Est-il exagéré de dire que dans vos œuvres, et dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em> en particulier, le « dionysiaque » (soutenu par l’image du chaos) l’emporte cependant, confinant parfois le personnage à la folie (on pense aux rêveries obsédantes de l’écrivain Thomas Daigre qui, souvent ivre de whisky, n’aspire qu’à se dissoudre dans les eaux tourbeuses du lac). Serait-ce là le drame de l’écrivain et de l’artiste, qui n’en réchapperait qu’une fois l’œuvre pleinement réalisée (or Thomas Daigre semble avoir renoncé à son œuvre) ? cf. aussi les scènes de peinture « sacrificielles » de Florence et de son père.</p>
<p><strong>Autres questions (1)</strong> :</p>
<p>1. « Le but de la poésie n'est pas, comme dit Baudelaire, de 'plonger au fond de l'Infini pour trouver du nouveau', mais au fond du défini pour y trouver de l'inépuisable.», affirme Paul Claudel, dans une « Introduction à un poème sur Dante» (1921). <em>Accompagnements</em> (<em>Œuvres en prose</em>, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 424.). L’inépuisable du roman tient-il au fait qu’il cherche à atteindre la poésie, renouvelant ainsi, par nécessité, ses formes reçues et dépassant, par conséquent, ses propres limites ? Dans votre essai, vous évoquez souvent, dans leurs romans ou leurs récits, la poésie de Stendhal, de Chateaubriand, la prose de Flaubert, « qui résiste…et…rechigne à devenir poème » (p. 104), et même Zola, que vous ne prisez guère. Est-ce là la force du roman : chercher à être une œuvre totale (le Poème), nourrie par « la nostalgie de l’unité » (titre d’un chapitre du <em>Bateau brume</em>) ? Dans <em>Le Donjon</em>, vous faites dire à Thomas Daigre qu’ « il n’est de lecture possible que poétique. » (p. 156).</p>
<p>2. Vous avez écrit sur des saints (Saint Guénolé, Saint Philippe Néri, Sainte Thérèse de Lisieux), sur le Christ aussi, notamment sur ses premières années dans <em>Douze années dans l’enfance du monde</em> (Gallimard, 1999) ; vous avez consacré des études en forme d’hommage à de grands hommes politiques comme Richelieu, De Gaulle et Malraux, ce dernier cumulant le prestige du grand écrivain. Comme certains de vos personnages, artistes ou écrivains, ils appartiennent à des ordres (au sens pascalien du terme) différents mais semblent avoir la tentation – sous votre plume – d’aspirer à l’ordre suprême, celui de la charité, du saint ou du sage. On se rappelle, pour ne citer que cet exemple, que Thomas Daigre (« L’Écrivain-prêtre »), dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, se dit mystique, qu’il pose pour sa fille en saint Sébastien et qu’il est fasciné, à Venise, par le tableau de Carpaccio qui représente Saint Augustin, au point de s’identifier à cette figure, tout comme l’enfant que vous fûtes – <em>mutatis mutandis</em> – était fasciné par le portrait de Richelieu, au point de vouloir se fondre à cette image dans une sorte de désir mimétique qui confine à la dévotion. Et le titre du livre qui raconte cette expérience cherche aussi à la décrire : <em>Le Mystère Richelieu</em>. Écrire, pour vous, est-ce vouloir éclaircir ce mystère, en figurant par la fiction les modalités de son épiphanie, quelle qu’en soit l’issue, qui peut être tragique (cette porosité apparente entre les ordres s’impose en réalité comme une dualité ambivalente, inscrite, par exemple, dans la gémellité de Gilles et Guillaume Vègh, du <em>Bateau brume</em>, l’un dans l’action politique, l’autre dans la création artistique) ?</p>
<p>3. Le motif de l’or – associé à d’autres motifs comme le secret ou le labyrinthe (mais aussi le feu, l’androgyne…) - parcourt toute votre œuvre, fictions et essais compris, et suggère des références alchimiques. Vous aimez L’œuvre au noir, de Yourcenar. Le mot « athanor », grand alambic des alchimistes, revient quelquefois dans vos romans (notamment <em>Le Bateau brume</em> mais surtout Livres des guerriers d’or) et dans vos proses, notamment dans <em>Déambulations</em>, méditations sur des œuvres, des paysages, des artistes. Dans <em>Le Donjon</em>, Daigre a écrit <em>La Transparence de l’or</em>, et il mentionne un alambic dans l’un de ses carnets (p. 156) ; vous-même recourez souvent à l’image du « laboratoire central » empruntée à un titre du poète Max Jacob. Cherchez-vous le secret du Grand Œuvre dans votre travail d’écriture ? N’est qu’une figure de votre <em>mundus imaginalis</em> (Gilbert Durand) ou bien êtes-vous de ces écrivains qui – comme certains surréalistes d’ailleurs, à commencer par André Breton – ont tenté d’explorer les voies de l’ésotérisme ?</p>
<p>4. Pour prolonger la question précédente : On connaît la formule lapidaire d’André Breton, « Je cherche l’or du temps ». Est-ce que vous ne faites pas de même avec l’espace, de sorte que l’on pourrait dire que vous cherchez l’or de la terre, en fouillant les strates mémorielles des vastes étendues de la Bretagne et de l’Irlande notamment ?</p>
<p>5. Dans <em>De l’usage de soi</em> (Hermann, 2017), le philosophe Jacques Schlanger affirme que « nous faisons usage de nous-mêmes pour agir, penser, pour comprendre, pour connaître, pour exprimer, pour expliquer, pour communiquer. » (p. 5). Nous puisons ainsi dans nos perceptions, nos sensations, nos sentiments, nos désirs, nos pensées, nos savoirs, nos croyances, notre expérience (je ne cite pas toute la liste). Et il ajoute : « Derrière toute affirmation, même la plus générale, derrière toute déclaration, même la plus passionnée, derrière toute proclamation, même la plus solennelle, on trouve toujours un <em>je</em>, même s’il ne se présente pas ouvertement comme tel : un <em>je</em> qui pense que …, un <em>je</em> qui croit que…, un <em>je</em> qui sait que…, etc. ». Vos romans emploient souvent la première personne du singulier, et même si Gérard Genette nous a bien appris à ne pas confondre le narrateur et l’auteur, qu’en est-il de ce <em>je</em> qui s’exprime ? Quel usage faites-vous de vous-même quand vous donnez la parole à ce <em>je</em> ? C’est un problème littéraire <ins>et</ins> <em>moral</em> que Genette ne pouvait résoudre, ni même aborder, compte tenu de sa perspective critique formaliste. On pense à l’une des épigraphes du <em>Donjon</em> : Il serait utile d’écrire les annales de ses désirs. STENDHAL, <em>Journal</em>, 8 novembre 1807.</p>
<p>6. Dans le prolongement de la question précédente, et pour lui donner une plus grande extension, comment fabriquez-vous vos personnages ? Ils semblent composites et souvent hantés par un double prestigieux qui les étoffe de manière énigmatique : si l’on hésite à retrouver dans le patronyme de Guillaume <strong>V</strong>è<strong>gh</strong> (<em>Le Bateau brume</em>), le souvenir sonore du nom de Van Gogh, on entend dans le nom en forme de triptyque d’ Erich Sebastian Berg, personnage principal des <em>Sept noms du peintre</em>, l’écho presque paronomastique de Johann Sebastian Bach, ce qui peut étonner, puisque Berg est un peintre, mais peut répondre à d’autres exigences comme la référence à l’ascendance de Berg (le rapport de ses parents à la musique) ou plus subtilement le désir d’établir des correspondances entre la peinture et la musique (dans <em>Le Donjon</em>, la musique de Mahler joue un rôle important). Dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, c’est votre avant-propos qui éclaire un peu la constitution du personnage de Thomas Daigre (Michel Mohrt pour l’esprit, et Beckett pour le corps noueux ?). Brieu paraît plus transparent : l’onomastique ici télescope deux grands noms d’écrivains collaborationnistes : <strong>Dr</strong>ieu la Rochelle et <strong>Br</strong>asillach… Qu’est-ce qui vous guide dans la fabrication de ce que la critique a appelé « le personnel du roman » ? (...).</p>
<p>(1) <em>Questions posées (choix) par Reynald André Chalard</em>. <em>Elles illustrent les principales articulations du cours de Lettres sur l'oeuvre de Philippe Le Guillou</em>.</p>
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<p><strong>ÉCHANGES AVEC LA SALLE</strong></p>
<p><strong>Nos élèves des classes préparatoires littéraires et du secondaire</strong> posent des questions à <strong>Philippe Le Guillou</strong>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG28_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Étienne G</strong>., HK.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG23_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Hajar E. A.</strong>, HK.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG24_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Elsa C.</strong>, HK.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG25_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Émeline P.</strong>, KH.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG20_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Adonis K.</strong>, 1G3.</p>
<hr />
<p><strong>REMERCIEMENTS ET REMISE DES CADEAUX</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/PLG10.JPG" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG29_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Hajar E. A.</strong> et <strong>Étienne G.</strong>, délégués de l'Hypokhâgne, offrant à <strong>Philippe Le Guillou</strong>, en présence de <strong>Mme Bourrelier</strong>, l<em>'Histoire Auguste</em>, dans la collection de la «Bibliothèque de la Pléiade» et le livre de Jean Nayrolles intitulé <em>Le Sacrifice imaginaire - Essai sur la religion de l'art chez les Modernes</em>, aux éditions Kimé.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG16_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong> prêt à dédicacer ses livres.</p>
<hr />
<p><strong>REGARDER ÉCOUTER LIRE</strong> :</p>
<p>J'ai demandé à <strong>Philippe Le Guillou</strong> quel tableau et quelle musique pourraient donner une <em>image</em> de ce qu'il écrit ou cherche en littérature, que cela soit ou non en rapport avec le roman. Voici les références qu'il a bien voulu m'indiquer (René Quéré, Matthieu Dorval et Liszt) :</p>
<p><strong>ARTS PLASTIQUES</strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG31Rene_-Que_re_-14-Brisants-dOuessant-33x41-PH_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>René Quéré</strong> (né en 1932), <em>Brisants d'Ouessant</em>. © Galerie Philippe Theallet</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.PLG33_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Matthieu Dorval</strong> (né en 1966), <em>Qui voit Ouessant</em>. © Matthieu Dorval. Extrait du livre de Philippe Le Guillou et Matthieu Dorval, <em>D'Armor en Argoat</em>, éditions Dialogues, 2016.</p>
<hr />
<p><strong>MUSIQUE</strong> :</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width="400" height="250" src="https://www.youtube.com/embed/BZ2AqIzHSQw?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen title="Liszt - Vallée d'Obermann (Claudio Arrau)"></iframe>
</div>
<p><strong>Franz Liszt</strong>, «Vallée d'Obermann», extrait des <em>Années de pèlerinage</em> (première année - Suisse -1836 / 1855).</p>
<hr />
«Les Rencontres de Pierre d'Ailly», jeudi 24 novembre 2022 : « Le Roman inépuisable ». Conférence de Philippe Le Guillou, romancier et essayiste, prix Médicis 1997 pour «Les Sept noms du peintre». Rattrapage de la 8e édition.
urn:md5:e2c59e28c6428785d1dbcbe4d5858e25
2022-10-01T13:19:00+02:00
2022-10-01T13:19:00+02:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Le_Guillou_2.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong>. Photo Catherine Hélie © Éditions Gallimard.</p>
<p><strong>8e édition des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p>(D'abord programmée le 1er décembre 2020, puis annulée deux fois à cause de la Covid)</p>
<p><strong>Conférence de Philippe Le Guillou sur la place du roman dans la littérature, JEUDI 24 NOVEMBRE 2022, à 14 heures, salles Saint-Nicolas, 3 rue Jeanne d'Arc, à Compiègne</strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>LE ROMAN INÉPUISABLE </strong></p>
<hr />
<p><strong>PHILIPPE LE GUILLOU ET LE ROMAN : DE LA TABLE RASE À LA TABLE RONDE</strong></p>
<p><strong>Philippe Le Guillou</strong> est romancier et essayiste. Presque toute son œuvre, qui compte maintenant de nombreux volumes, est publiée chez Gallimard, dans la collection «Folio ». Il a notamment obtenu le prix Médicis pour <em>Les Sept noms du peintre</em>, en 1997, et le prix Charles Oulmont de la Fondation de France en 2001, pour son roman <em>Le Roi dort</em>. Il a écrit de nombreux essais sur Chateaubriand, De Gaulle et Julien Gracq, avec lequel il a des affinités littéraires. Ainsi que l’écrit l’universitaire Luc Vigier, qui lui consacre un blogue (http://philippeleguillou.eklablog.com/accueil-c17337479), <strong>Philippe Le Guillou</strong> est l’ « héritier de toute une tradition française et des postures d'écrivains qui lui sont associées, (…) » et « se réclame volontiers de Chateaubriand, de Stendhal, de Proust, de Malraux, de Montherlant et de Gracq. » <strong>Philippe Le Guillou</strong> est aussi Inspecteur général de Lettres et docteur en littérature. Sa conférence sera à ce titre doublement intéressante : au point de vue universitaire s’ajoutera – et se substituera très vite - la critique littéraire d’une pratique personnelle du roman (auteur et lecteur), présenté dans une histoire subjective, <em>roman du roman</em> – « de Chrétien de Troyes aux romanciers les plus contemporains » - propre à susciter la réflexion.</p>
<p><strong>L’objectif de cette nouvelle conférence sera de s’interroger, avec Philippe Le Guillou, sur le roman</strong>, sa longue et turbulente histoire, ses pouvoirs de séduction, qui font de ce dernier « un genre foisonnant, protéiforme et en perpétuel devenir ». De cette variété souvent contestée, <strong>Philippe Le Guillou</strong> tire la qualité suprême du roman, son caractère inépuisable et prometteur. On a pourtant souvent reproché à ce <em>genre</em> de n’en pas être un : si l’on n’en est plus à accuser le roman de « troubler les têtes», comme le rappelle Rousseau dans la fameuse « Préface de La Nouvelle Héloïse » (1761), on en a fait «un usurpateur par vocation », comme Cioran, qui affirme que le « romancier, dont l’art est fait d’auscultation et de commérage, transforme nos silences en potins. » Toujours dans <em>La Tentation d’exister</em>, il ajoute : «Il a fait le trottoir de la littérature. Nul souci de décence ne l’embarrasse, point d’intimité qu’il ne viole. Avec une égale désinvolture, il fouille les poubelles et les consciences. » <em>La Tentation d’exister</em>, Gallimard, 1956, coll. « Tel », pages 148-149. Plus récemment, Richard Millet, également grand romancier, avait impitoyablement réglé son compte à ce qui est devenu, selon lui, l’essence même de la « postlittérature », un roman dévalué, « instrument du mensonge général, une falsification, un dévoiement au service du Nouvel Ordre moral ou, si l’on préfère du moralisme postéthique américain. » <em>L’Enfer du roman</em>, Gallimard, 2010, p. 13. Ce jugement sévère ne niait certes pas l’existence d’authentiques œuvres romanesques : il voulait en montrer cependant la stupéfiante rareté. En 2011, l’écrivain et psychanalyste Catherine Millot expliquait à une journaliste de France-Culture le sens du mot roman qui figurait sur la première de couverture de son livre intitulé <em>O Solitude</em>. A la question « votre œuvre ne s’apparente-t-elle pas plus à une réflexion, à une méditation sur la solitude qu’à un roman ?», voici ce qu’elle répondait : « En tout cas ce n’est pas une fiction, ce n’est pas une autofiction. Mais on pourrait justifier l’appellation de roman, si l’on définit le roman comme le genre de ce qui n’appartient à aucun genre. Il me semble que je me rattache au roman de cette façon-là, parce que j’ai fait quelque chose qui n’appartient à aucun genre… » Catherine Millot, propos diffusés sur France-Culture le 19 septembre 2011 dans l’émission « La grande table ». Enfin, c’est dans le journal <em>Le Monde</em> daté du 12 septembre 2020 que Nathalie Azoulai, auteur, notamment, de <em>Titus n’aimait pas Bérénice</em> (P.O.L., 2015), a essayé de définir ce qui la fait douter d’un genre qu’elle a pourtant beaucoup pratiqué : « Un territoire qui, comme tous les territoires, fait fructifier le pire et le meilleur. Et du meilleur, il y en a. Du moins bon aussi, qui, de plus, en arrive à ce paradoxe de devoir s’adosser à la rubrique « roman », ce qui revient à nier le genre tout en s’en réclamant encore. Serait-ce que l’étiquette « roman » ne veuille plus du tout signifier ni fiction ni composition, mais seulement « livre » ? Ou qu’à la façon d’un leurre bienséant dont personne n’est dupe, elle estompe un instant l’impudeur, amortisse le choc frontal, la réticence d’un lecteur peu enclin à avouer qu’il est voyeur comme on l’est tous ? Serait-ce donc que le nom de « roman » serve encore de béquille à un genre sans statut parce qu’hybride et indécis ? Je l’ignore, mais ce que je sais, en revanche, c’est que, malgré l’autorité magistrale de Kundera, le doute creuse en moi son sillon : et si le roman, c’était fini ? ».</p>
<p>Le roman a été - ne l'oublions pas - le fer de lance de la modernité littéraire. Toutes les poétiques classiques l’ont ignoré, la narration relevant d'abord de l’épopée. C’est le romantisme – en particulier allemand, dès l’<em>Athenaeum</em> – qui l’a mis au cœur de la littérature, ainsi que le rappelle Maurice Blanchot, dans <em>L’Entretien infini</em> : « (…) l’art romantique qui concentre la vérité créatrice dans la liberté du sujet, forme aussi l’ambition d’un livre total, sorte de Bible en perpétuelle croissance qui ne représentera pas le réel, mais le remplacera, car le tout ne saurait s’affirmer que dans la sphère inobjective de l’œuvre. Le roman, disent tous les grands romantiques, sera ce Livre ; Schlegel : <em>‘Le roman est le livre romantique’</em> ; Novalis : ‘<em>Absolutiser le monde, seul le roman peut y parvenir, car il faut que l’idée du tout domine et modèle entièrement l’œuvre esthétique’,</em> et Solger : <em>‘Tout l’art d’aujourd’hui repose sur le roman, non sur le drame.’</em>» p. 525. Pour le romantisme d’Iena, à la fin des années 1790, le roman apparaît comme une véritable synthèse des genres, en particulier de l’épique et du dramatique : poétique ou en prose – mais ces deux formes doivent également <em>s’unir</em> -, il doit être à la fois fantastique, sentimental, philosophique et psychologique. La poésie « romantique » n’est donc pas strictement lyrique, elle est « romanesque », dans le sens élargi et synthétique que Schlegel et ses amis littéraires donnaient à ce terme. Héritier de l’épopée, frayant avec la tragédie, on sait comment le roman a pu incarner au XIXe et au XXe siècles cette « ambition d’un livre total », en cultivant notamment le monumental : les œuvres de Hugo, Balzac, Zola, Proust, Thomas Mann, Joyce et Musil, par exemple, traversent les grands problèmes biologiques, psychologiques et sociaux de leur époque, tout en restant travaillés par le légendaire et le mythique. Dans les années 1960, seul le « roman balzacien » sera critiqué par l’avant-garde du Nouveau Roman. Ce roman du « réel » et de la « connaissance », Robbe-Grillet voulait en dénoncer les fondements idéologiques par une étude de ses composantes « traditionnelles» les plus contestables, selon lui, comme le « personnage », «l’histoire» et la notion de « réalisme » ou plus précisément « l'illusion réaliste». Nombre d’écrivains de cette période ont su tirer parti des possibilités du genre romanesque, sans pour autant tomber dans la caricature du « roman balzacien » ni se déclarer « nouveaux romanciers ». C’est en partie ce que raconte <em>Le Roman inépuisable</em>, de Philippe Le Guillou, <em>roman du roman</em> mais aussi <em>essai</em> sur le roman, dont l’histoire <em>subjective</em> est ponctuée par des prises de position très claires en matière d’esthétique littéraire. Et loin de remettre en question le roman, il en fait l'admirable défense et illustration.</p>
<p>Le parcours proposé – et que <strong>Philippe Le Guillou</strong> commentera certainement pendant sa conférence – nous fait visiter les grandes œuvres, petits romans ou massifs romanesques, de Chrétien de Troyes aux romanciers les plus contemporains, notamment ceux qui sont parmi les « alliés substantiels » de l’auteur, Julien Gracq, Michel Tournier et Patrick Grainville (mais il y en d’autres). Très sommairement, on indique le tracé suivant, qui donne à réfléchir sur la formation de notre romancier : ce dernier manifeste un goût prononcé pour les œuvres qui sont à l’origine du roman français : la littérature du Graal, la <em>matière de Bretagne</em>, dont les romans de Chrétien ; Renart et Rabelais soulèvent son enthousiasme, ce qui n’est pas vraiment le cas du roman « psychologique » tel qu’il se modèle, de <em>La Princesse de Clèves</em>, de Madame de Lafayette, à <em>L’Histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut</em>, de l’Abbé Prévost. Admiration pour Chateaubriand, Stendhal, Hugo, et Flaubert ; bien moins pour Balzac et Zola. Le vif intérêt que porte <strong>Philippe Le Guillou</strong> à la «littérature térébrante » ou l<em>a littérature du mystère</em> – selon ses propres termes -, en évoquant les œuvres de Huysmans, de Bloy et de Barbey d’Aurevilly, nous incite à en retrouver les échos dans ses propres romans. Au XXe siècle, ce sont Proust, Gide – et l’aventure de la prestigieuse NRF (la Nouvelle Revue Française), Bernanos, Mauriac, Gracq, les Hussards, Yourcenar, et bien d’autres, qui passionnent notre auteur. Nous serons donc attentifs à ce foisonnement de références pour y repérer ce qui le nourrit : le plaisir de la lecture naïve, qui se souvient de l’enfance et de ses découvertes littéraires fondatrices, le rejet du « caisson structuraliste » et des « critiques scientistes pressés de dépecer les œuvres littéraires », ainsi qu'une curiosité appuyée pour les « structures anthropologiques de l’imaginaire », dont le spécialiste est Gilbert Durand, disciple de Bachelard et théoricien de la mythanalyse qui, par l’étude des archétypes, explore la signification symbolique des œuvres. Nourrie, en particulier, par l’imagination matérielle – dirait Bachelard – des quatre éléments et par la <em>matière de Bretagne</em>, l’écriture de <strong>Philippe Le Guillou</strong> cherche dans le roman - souvent <em>initiatique</em> - une vérité <em>poétique</em>. C’est que la classe d’Hypokhâgne cherchera à cerner, à travers sa lecture du <em>Donjon de Lonveigh</em>.</p>
<p><em>La démarche du cours</em> :</p>
<p>Pour cette conférence, qui puise son thème dans le dernier essai de notre auteur, <em>Le Roman inépuisable – roman du roman</em>, Gallimard (2020), les Hypokhâgneux auront lu <em>Le Donjon de Lonveigh</em> (édition Gallimard /Folio) , et pour être plus sensibles aux paysages et au style de cette œuvre, ils auront aussi abordé, par quelques pages choisies, Barbey d’Aurevilly (<em>Une vieille maîtresse</em>, <em>L’Ensorcelée</em>) et Julien Gracq (<em>Au château d’Argol</em>, <em>Un beau ténébreux</em>), qui sont les deux références majeures à la lumière desquelles <strong>Philippe Le Guillou</strong> explique, dans l’avant-propos, la genèse de ce roman. Ils auront lu également <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> (Folio, 2007), qui fait le récit des rencontres avec Julien Gracq, pendant biographique et lumineux des entretiens fictifs du narrateur avec l’écrivain obscur et secret, Thomas Daigre, dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, dont nous avons esquissé un programme d’étude dans l<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/06/06/Aux-futurs-Hypokh%C3%A2gneux-%3A-programme-d-%C3%A9tude-pour-l-ann%C3%A9e-2022-2023et-programme-de-lecture-pour-les-colles.-Afin-de-pr%C3%A9parer-la-rentr%C3%A9e-%3A-un-nouvel-%C3%A9t%C3%A9-avec-Julien-Gracq-et-Philippe-Le-Guillou...">e billet du 4 juillet 2022</a> :</p>
<p>Dans <em>Mon cœur mis à nu</em>, Baudelaire affirme qu’« il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie.» (Folio, p. 102). Les œuvres de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, qui peuvent se lire comme une théorie des exceptions, en sont, d'une certaine manière, l’illustration convaincante. Ainsi, la figure du grand écrivain, avec son aura et sa part de mystère, hante <em>Le Donjon de Lonveigh</em>. Le narrateur qui en raconte l’histoire, critique littéraire et éditeur aux éditions Gallimard, est un lecteur admiratif et passionné qui cherche à écrire le « roman de Thomas Daigre » à partir des entretiens que celui-ci lui a accordés dans son château irlandais. Dès lors, le narrateur veut percer le secret de celui qui, peut-être compromis avec la Collaboration, quitta la France et se mura ensuite dans le silence, solitaire dans son donjon. Tout le roman est construit sur cette rencontre bouleversante, qui confronte le narrateur à la signification sacrificielle de l’acte d'écrire (l'écrivain, double de saint Sébastien percé de flèches ?), les carnets de Thomas Daigre émaillant la narration à de nombreuses reprises pour laisser entrevoir les éclats miroitants d’une œuvre étrange et méconnue, mais constamment désirable, comme l’est aussi, sans doute, pour le narrateur, Florence, la fille de l’écrivain reclus, qui peint et aime avec la même violence que celle du paysage marin, des tourbières et des loughs, dont la description lancinante renvoie aux mêmes puissances envoûtantes qui tourmentent les personnages. <strong>« Il n’est de lecture possible que poétique »</strong>, écrit Thomas Daigre, dans l’un de ses carnets (Folio, p. 156). On le prendra au mot, en étant attentif à tout ce qui, dans ce roman, excède l’événement et veut atteindre au poème - et dans le <em>poème</em>, à la parole originelle, c'est-à-dire au <em>mythe</em> -, en pensant <em>mutatis mutandis</em> à Mallarmé, qui voyait dans le roman de son ami Rodenbach, <em>Bruges-la-Morte</em>, un « poème, infini par soi mais littérairement un de ceux en prose les plus fièrement prolongés. » (Lettre du 28 juin 1892), mais en n'oubliant pas non plus ce qu'a dit Remy de Gourmont du « roman éternel», conçu dès l'origine comme un <em>poème</em> (cf. <em>Promenades littéraires</em>, 7e série, 1927, où il cite, vers et prose, l<em>'Odyssée</em> et <em>Don Quichotte</em>, <em>Wilhelm Meister</em> et <em>Tribulat Bonhomet</em>, <em>Vita nuova</em> et <em>L'Education sentimentale</em> : ne peut-on pas voir là un prolongement de la conception <em>romantique</em> du roman également pris en charge par Philippe Le Guillou ?). Cette écriture recherche en effet par moments la « sorcellerie évocatoire » d’un lyrisme tout entier habité par « l’imaginaire du secret », pour reprendre le titre d’un livre suggestif de Pierre Brunel, le secret étant l’une des modalités de l’attente du sens et, paradoxalement, de son omniprésence, à travers les épiphanies du symbole qui travaillent le texte. On sera enfin curieux de reconnaître (<ins>hypothèses à vérifier</ins>), à travers les personnages écrivains, les figures littéraires qui ont pu en être les sources d’inspiration, sachant que le personnage n’est jamais pur mais résulte d’une combinaison complexe d'éléments hétérogènes qu’il faudra identifier (Pensons, entre autres, et pour commencer à cartographier la géographie littéraire de ce roman, à Paul Morand, André Pieyre de Mandiargues, Maurice Blanchot, Julien Gracq, Pierre Drieu la Rochelle, Henry de Montherlant... Dans son <em>avant-propos</em>, Philippe Le Guillou mentionne, outre Barbey d'Aurevilly et Julien Gracq, Michel Mohrt, Beckett et Kafka). <em>Le Donjon de Lonveigh</em> a été publié en 1991, peu après la disparition d'écrivains aussi importants que René Char, Francis Ponge, Samuel Beckett, Philippe Soupault et Michel Leiris. <strong>Philippe Le Guillou</strong> avait trente-deux ans. Il faudra situer précisément cette œuvre ténébreuse, et le <em>charme</em> de son style, dans la production romanesque de cette époque, dernière décennie du XXe siècle.</p>
<p><em>Envoi</em> :</p>
<p>Dans <em>Les Cahiers de la République des Lettres</em> du 15 avril 1926 (p. 69-70), Jean Giraudoux, précisait, dans un entretien, ses « ascendances », les romans qui l’ont intéressé et nourri. Parce que l’on peut y déceler des affinités avec les propos de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, voici ce qu’il en dit (nous soulignons):</p>
<p>« Ce qui, personnellement, m'intéresse, c'est le roman... N'entendez pas du tout par là le roman du XIXe siècle, <em>Adolphe</em>, <em>Dominique</em>, ni même, en remontant davantage, <em>La Princesse de Clèves</em>, qui sont, à proprement parler, des essais psychologiques. Entendez par <em>roman</em> l'élément romanesque. A côté du sujet, il y a <strong>la poésie — le style —</strong> la concentration d'une nature fabuleuse dans les personnages, c'est-à-dire <strong>la recherche de la vérité romanesque des êtres, non de la vérité réaliste</strong>. Je verrais mon ascendance dans la chanson de geste, les fabliaux. Les personnages des chansons de geste...</p>
<p>— Le traître... L'homme parfait..., etc., etc.</p>
<p>—Les animaux, qui tiennent tant de place dans les fabliaux. Et toujours, en arrière-fond, le pays. <strong>En ce temps-là, comme aujourd'hui, l'influence très grande de la géographie sur la formation du caractère français. De la géographie et de l'histoire</strong>. A toute époque troublée, comme celle des croisades, sans centralisation, sans commandes aux écrivains, ont dû correspondre des poètes-historiens — les romanciers — qui avaient une morale à tirer de leur œuvre — la chanson de geste. Je me suis pris en exemple parce que vous y teniez, mais ces ascendances littéraires expliquent une foule d'écrivains actuels.</p>
<p>— En résumé, lorsqu'il s'agit de justifier une école moderne, vous cherchez les précédents historiques, les analogies de toute sorte. Et c'est exactement contraire aux prétentions des jeunes gens que, si vous ne m'aviez interdit ce mot, j'aimerais taxer de fumisterie, qui veulent à toute force ignorer leurs aînés, brûler le Louvre et tout recommencer par le commencement. <strong>Au lieu d'en venir à la table rase, vous remontez</strong>...</p>
<p>— ... <strong>A la Table ronde</strong>. »</p>
<p>Nous remercions vivement <strong>Philippe Le Guillou</strong> d’avoir généreusement accepté de nous faire profiter de son talent créateur et de sa grande intelligence des textes !</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Le_Guillou2022.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>ArMen REVUE N°229 - MARS/AVRIL 2019. © ArMen</p>
<p>BIBLIOGRAPHIE NON EXHAUSTIVE DES OEUVRES DE PHILIPPE LE GUILLOU :</p>
<p><strong>Romans, récits</strong> :</p>
<p><em>L'Inventaire du vitrail</em>, Mercure de France, 1983.</p>
<p><em>Les Portes de l'apocalypse</em>, Mercure de France, 1984.</p>
<p><em>Le Dieu noir</em>, Mercure de France, 1987.</p>
<p><em>La Rumeur du soleil</em>, Gallimard, 1989.</p>
<p><em>Le Donjon de Lonveigh</em>, Gallimard, 1991.</p>
<p><em>Le Passage de l'Aulne</em>, Gallimard, 1993.</p>
<p><em>Livres des guerriers d'or</em>, Gallimard, 1995.</p>
<p><em>Les Sept Noms du peintre</em>, Gallimard, 1997, prix Médicis 1997</p>
<p><em>L'Orée des flots. Rêverie tristanienne</em>, suivi de <em>Pour une poétique arthurienne</em>, Artus, 1997.</p>
<p><em>Douze années dans l'enfance du monde</em>, Gallimard, 1999.</p>
<p><em>Les Proximités éternelles</em>, récits, Mercure de France, 2000.</p>
<p><em>Le Roi dort</em> (Gallimard, 2001) Prix Charles Oulmont de la Fondation de France 2001.</p>
<p><em>Les Marées du Faou</em>, Gallimard, 2003.</p>
<p><em>Après l'équinoxe</em>, Gallimard, 2005.</p>
<p><em>La Consolation</em>, Gallimard, 2006.</p>
<p><em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> suivi de <em>« Monsieur Gracq »</em>, Gallimard, Folio, 2007.</p>
<p><em>Fleurs de tempête</em>, Gallimard, 2008.</p>
<p><em>Le Dernier Veilleur de Bretagne</em>, Mercure de France, 2009.</p>
<p><em>Le Bateau Brume</em>, Gallimard, 2010.</p>
<p><em>L'Intimité de la rivière</em>, Gallimard, 2011.</p>
<p><em>Le Pont des anges</em>, Gallimard, 2012.</p>
<p><em>Le Chemin des livres</em>, Mercure de France, 2013.</p>
<p><em>Les Années insulaires</em>, Gallimard, 2013.</p>
<p><em>Paris intérieur</em>, récit, Gallimard, 2015.</p>
<p><em>Géographies de la mémoire</em>, Gallimard, 2016.</p>
<p><em>Novembre</em>, Gallimard, 2017.</p>
<p><em>La Sainte au sablier</em>, <em>Carnet d'un pèlerin</em>, Éditions Salvator, 2017.</p>
<p><em>La Route de la mer</em>, Gallimard, 2018.</p>
<p><em>Le Roman inépuisable – Roman du roman</em>, Gallimard, 2020.</p>
<p><strong>Essais</strong> :</p>
<p><em>La Main à plume</em>, Artus, 1987.</p>
<p><em>Julien Gracq. Fragments d'un visage scriptural</em>, La Table Ronde, 1991.</p>
<p><em>Le Songe royal. Louis II de Bavière</em>, Gallimard, 1996.</p>
<p><em>L'Inventeur de royaumes</em>. <em>Pour célébrer Malraux</em>, Gallimard, 1996.</p>
<p><em>Figures et rituels initiatiques dans le roman et le récit français : (1970-1980)</em>, thèse de doctorat soutenue en 1997 à l’Université de Rennes II.</p>
<p><em>Chateaubriand à Combourg. Une initiation chevaleresque</em>, avec des photos de Jean Hervoche, Christian Pirot ed., 1997.</p>
<p><em>Stèles à de Gaulle</em>, Gallimard, 2000.</p>
<p><em>Chateaubriand et la Bretagne</em>, Blanc Silex, 2002.</p>
<p><em>Stèles à de Gaulle</em>, suivi de <em>Je regarde passer les chimères</em>, édition revue et augmentée, Folio, 2010.</p>
<p><em>À Argol il n'y a pas de château</em>, Pierre-Guillaume de Roux, 2014.</p>
<p><em>Le Pape des surprises</em>, Gallimard, 2015.</p>
<p><em>Le Passeur</em>, Mercure de France, 2019.</p>
<p><em>La Pierre et le vent</em>, Tallandier, 2019.</p>
<p><em>Le Mystère Richelieu</em>, Robert Laffont, 2021.</p>
<p><em>Le Testament breton</em>, Gallimard, 2022.</p>
<hr />
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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Cours d'Histoire littéraire du lundi : Philippe Le Guillou, « Le Donjon de Lonveigh» (1991). A croiser avec le cours Genres / Notions du vendredi sur le Roman...
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2022-09-09T16:25:00+02:00
2022-09-09T16:25:00+02:00
Reynald André Chalard
Cours
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Hugo_cha_teau.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Victor HUGO, « Burg en ruines », dessin à la plume, 1857. Photo (C) RMN-Grand Palais / Agence Bulloz. <strong>«Un rêve de pierre», comme le Donjon de Lonveigh</strong>...</p>
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<p><strong>Annie Le Brun, <em>Les Châteaux de la subversion</em>, Gallimard, coll. « Folio », 1986 (1982)</strong>:</p>
<p>« Faut-il donc que les formes, les lieux, les êtres qui nous retiennent le plus, soient ceux qui livrent le moins leur secret et masquent le mieux le cours de notre vie ? Comme si chaque séduction se déployait en écran où reviendraient toujours se jouer, en se jouant de nous, nos rares raisons d’exister. Sans doute n’aimons-nous que des énigmes. » p. 9.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XXe siècle / Cours sur le genre romanesque</em></strong></p>
<p><strong>Les œuvres au programme, dans l'édition demandée</strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Lonveigh_s.jpg" alt="" /> <img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.De_jeuner_Gracq_s.jpg" alt="" /></p>
<p>TRAVAUX : les références renvoient aux éditions suivantes : Philippe LE GUILLOU, <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, éd. Gallimard, coll. « Folio » ; <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em>, éd. Gallimard, coll. « Folio ».</p>
<p><em>Le programme de travail qui suit se contente d’indiquer les grandes lignes du cours et les principales préparations données aux élèves. Tous les textes proposés ci-dessous doivent être lus et médités dans la perspective de l’exercice indiqué</em>.</p>
<p>1. <strong>Lecture préalable pour orienter la réflexion</strong> (voir aussi infra les « références bibliographiques ») : <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> (2007). Le romancier et essayiste Philippe Le Guillou a rencontré à plusieurs reprises Julien Gracq, figure du grand écrivain aujourd'hui disparue, auteur, entre autres, d’<em>Au château d’Argol</em>, d’<em>Un beau ténébreux</em> et du <em>Rivage des Syrtes</em>, et dont les <em>Œuvres complètes</em> sont publiées dans la prestigieuse collection de « La Bibliothèque de la Pléiade », aux éditions Gallimard. <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> fait le récit émouvant des nombreuses rencontres avec cet « Allié substantiel », pour reprendre la belle formule de René Char. C'est donc une invitation à entrer en littérature par l’incarnation de la rencontre avec l’œuvre et avec l’écrivain. Il pourra inciter à une véritable réflexion littéraire, qui ne peut exister sans une authentique expérience de la lecture. <strong>Synthèse 1. Géographie littéraire</strong> : située à la fin des années 1980, l’histoire évoque directement ou indirectement, par allusions et déguisements, des écrivains, des mouvements ou des événements littéraires, à commencer par le surréalisme. A partir des rapports que le personnage de Brieu entretient, selon le narrateur (p. 50), avec les surréalistes (Th. Daigre, «dernier surréaliste breton», p. 203), et en prenant pour hypothèse que Brieu a pour modèle l’écrivain Pierre Drieu la Rochelle – dont vous établirez la notice biographique - : a) définissez les grandes lignes du surréalisme (œuvres à l’appui) ; b) nommez les écrivains que Brieu (alias Drieu) a pu fréquenter voire admirer ; c) montrez comment l’engagement politique a été un facteur déterminant dans la rupture avec ces relations ; d) en quoi l’œuvre et le personnage de Thomas Daigre ont-ils hérité de certains traits et de ces écrivains surréalistes et de Brieu (cf. aussi l'avant-propos de Ph. Le Guillou qui nomme précisément l'écrivain Michel Mohrt, 1914-2011 ) ? Faites également des recherches sur Paul Morand, André Pieyre de Mandiargues, Maurice Blanchot, Julien Gracq, Henry de Montherlant et la NRF.</p>
<p>2. <strong>Synthèse 1 bis</strong>. Histoire, politique et littérature : quelle est l’importance, pour les personnages du roman, de l’Action française, de la Deuxième Guerre mondiale, de la Collaboration et de la Résistance ? Pour répondre à cette question, tenez compte de cette contradiction que formule Thomas Daigre lui-même pour signifier au narrateur son mépris de tout projet biographique : «...à savoir ma fascination pour la réminiscence, qui est l'essence de l'art, et mon dégoût du passé biographique...», p. 124. Commentez cette phrase, p. 54 : « …ces idées vénéneuses qui avaient enchanté le jeune Daigre, dans cette acceptation résolue de l’étrangeté définitive de l’être et de la vie, de cet écart incompressible entre l’être et l’écriture, la séduction de la peste et la transparence de l’or. »</p>
<p>3. <strong>Synthèse 2</strong>. Commentaire de texte 1. Dans un développement de deux pages, montrez comment le titre <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, les épigraphes et l’incipit (p. 23-26, jusqu’à « …les mots ne dansent plus pour moi. ») orientent la lecture.</p>
<p>4. <strong>Explication de texte 1</strong> : p. 36, de « Le majordome… à la fin de la page 37.</p>
<p>5. <strong>Synthèse 3</strong>. Le personnage de Thomas Daigre : en quoi incarne-t-il le mythe du grand écrivain ? Répondez en citant et en commentant des passages précis. Dans <em>Mon cœur mis à nu</em>, Baudelaire affirme qu’« il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie.» (Folio, p. 102). En quoi ce personnage illustre-t-il cet aphorisme baudelairien ?</p>
<p>6. <strong>Explication de texte 2</strong> : p. 44, de « Conversation nocturne… » jusqu’à la fin de la page 46.</p>
<p>7. <strong>Explication de texte 3</strong> : p. 56, de « Je multipliai les promenades… » à «…du ciel et des eaux. », p. 57.</p>
<p>(...)</p>
<p>14. <strong>Exposés, études littéraires</strong> (pour chaque sujet, explications et consignes seront données en classe). a) Thomas Daigre, figure du grand écrivain « maudit » (« …j’ai compris que vous étiez de ceux que fascinent les maudits… », p. 139) ? ; b) Le donjon de Lonveigh, un « château de la subversion » (Annie Le Brun) ? c) « Le roman de Thomas Daigre » (p. 111) : un roman d’initiation ? d) La violence et le sacré dans <em>Le Donjon de Lonveigh</em> : rites et sacrifices ; e) Le paysage irlandais (// breton) : une géographie habitée par les mythes celtiques (Graal, dragon ; tout ce qui ressortit au <em>Génie du Nord</em>, selon le titre du livre de Jacques Darras) ; f) <em>Le Donjon de Lonveigh</em> : écriture romanesque et style poétique (Daigre « écrivain baroque », p. 136) ; g) autres sujets : littérature, mystère et secret ; le motif de l’or (du temps, de l’espace, de l'art - « trésor » du donjon) ; art, religion et folie (obsessions de Daigre, « Écrivain-prêtre », p. 79 et 84…, délires mystiques de Florence, angoisses du narrateur…) ; présence de l’Histoire et du légendaire (« L’Histoire m’avait rompu. », p. 135) ; le double (Daigre / narrateur ; Daigre / Florence) et l’androgyne ; commentaire de la définition de l’art suivante : « …n’oubliez pas que l’art, ce n’est pas seulement la complicité amicale d’un soir de fête, c’est une blessure, un silence, une incompatibilité. » (dit par Th. Daigre, p. 162). D’autres propositions – outre les vôtres – seront faites en cours.</p>
<p>15. <strong>Quelques références bibliographiques du cours</strong> : <strong>Philippe Le Guillou</strong>, <strong>Romans, Récits</strong> : <em>Le Passage de l’Aulne</em>, 1993 ; <em>Livres des Guerriers d’or</em>, 1995 ; <em>Les Sept noms du peintre</em>, 1997 ; <em>Géographies de la mémoire</em>, 2016 (tous chez Gallimard). <strong>Essais</strong> : <em>L’Inventeur des royaumes</em> (sur Malraux), Gallimard, 1996 ; <em>Pour une poétique arthurienne</em>, Artus, 1997 ; <em>A Argol, il n’y a pas de château</em>, Pierre-Guillaume de Roux, 2014 ; <em>La Pierre et le vent</em>, Tallandier, 2019 ; <em>Le Passeur</em>, Mercure de France, 2019 ; <em>Le Roman inépuisable</em>, Gallimard, 2020. <strong>Sur l’œuvre entière de Philippe Le Guillou</strong> : <em>Philippe Le Guillou. – Géographies intérieures, actes du colloque de la rue d’Ulm (novembre 2019)</em>, Gallimard, coll. « Les Cahiers de la nrf », 2022 (Présentation par Luc Vigier). <strong>Pour <em>Le Donjon de Lonveigh</em></strong> : a) Pierre Drieu la Rochelle, <em>Les Mémoires de Dirk Raspe</em>, éditions RN (posthume) ; <em>Sur les écrivains</em>, Gallimard, 1982 ; <em>Journal 1939-1945</em>, Gallimard, coll. « Témoins », 1992 ; b) Pascal Ory, <em>Les Collaborateurs</em>, Seuil, «Points / Histoire », 1980 ; c) Philippe Sollers, <em>Théorie des Exceptions</em>, Gallimard, « Folio /Essais », 1985 ; Dominique Noguez, <em>Le Grantécrivain & autres textes</em>, Gallimard, coll. «L’Infini », 2000 ; Julien Gracq, <em>André Breton</em>, 1948 ; d) Annie Le Brun, <em>Les Châteaux de la subversion</em>, Gallimard, coll. « Folio », 1986 (1982) ; Pierre Brunel, <em>L’Imaginaire du secret</em>, ELLUG, 1998 ; Gaston Bachelard, <em>La Poétique de la rêverie</em>, Presses Universitaires de France, coll. « Quadrige », 1986 (1962), ses livres sur l’imagination de la matière, dont <em>L’Eau et les rêves</em>, José Corti, 1942 ; Roger Caillois, <em>L’Homme et le sacré</em>, Gallimard, coll. « Folio/essais », 1950 ; Mircea Eliade, <em>Images et symboles</em>, Gallimard, coll. « Tel », 1980 (1952), <em>La Nostalgie des origines</em>, Gallimard, « Folio/essais», 1991 (1971) (cf. en particulier le chapitre VII : « L’initiation et le monde moderne ») ; Gilbert Durand, <em>L’Imagination symbolique</em>, Presses Universitaires de France, coll. «Quadrige », 1984 (1964) ; Jean Nayrolles, <em>Du sacrificiel dans l’art</em>, Kimé, 2019 ; e)<strong>Sur le roman</strong> : Jacques Laurent, <em>Roman du roman</em>, Gallimard, coll. « Idées », 1980 (1977) ; Erich Auerbach, <em>Mimesis</em>, Gallimard, 1968 ; Roland Barthes et alii, <em>Poétique du récit</em>, Seuil, 1977 ; Jean-Yves Tadié, <em>Le Récit poétique</em>, Gallimard, coll. «Tel », 1994 ; Gérard Genette, <em>Figures III</em>, Éditions du Seuil, 1972 ; Jean Rousset, <em>Narcisse romancier, essai sur la première personne dans le roman</em>, Corti, 1972 ; Michel Butor, <em>Essais sur le roman</em>, Gallimard, coll. « Tel », 1992 ; Julien Gracq, <em>Lettrines</em>, 1967, <em>En lisant en écrivant</em>, Corti, 1981 ; Milan Kundera, <em>L'Art du roman</em>, Gallimard, coll. « Folio », 1995, <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/11/15/Cours-d-Histoire-litt%C3%A9raire-du-lundi-%3A-Philippe-Le-Guillou%2C-%C2%AB-Le-Donjon-de-Lonveigh%C2%BB-%281991%29.-A-croiser-avec-le-cours-Genres-/1986" title="1986">1986</a> ; <em>Le Rideau</em>, Gallimard, coll. « Folio », 2006 <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/11/15/Cours-d-Histoire-litt%C3%A9raire-du-lundi-%3A-Philippe-Le-Guillou%2C-%C2%AB-Le-Donjon-de-Lonveigh%C2%BB-%281991%29.-A-croiser-avec-le-cours-Genres-/2005" title="2005">2005</a>.</p>
<p><strong>Prolongement du cours : <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/05/22/8e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB%2C-mardi-1er-d%C3%A9cembre-2020-sur-la-place-du-roman-dans-la-litt%C3%A9rature-%3A-%C2%AB-Le-Roman-in%C3%A9puisable%C2%BB%2C-Conf%C3%A9rence-de-Philippe-Le-Guillou%2C-romancier-et-essayiste.">Philippe Le Guillou, invité de la 8e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></a>. <mark>Conférence prévue jeudi 24 novembre 2022</mark></strong>.</p>
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<p><strong>Philippe Le Guillou parle de son roman <em>Les Années insulaires</em></strong> (2014) :</p>
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Rentrée en Hypokhâgne jeudi 1er septembre 2022... Premier cours de Lettres, vendredi 2, de 14h10 à 16h15. Ordre du jour, recommandations, programme des réflexions et des travaux à venir.
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2022-08-25T16:26:00+02:00
2022-08-29T11:46:05+02:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Hugo_Levy.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>UN CLIN D’ŒIL AUX ANCIENS HK ET UN SALUT DE BIENVENUE AUX NOUVEAUX</strong> :</p>
<p><strong>ET SI C'ÉTAIT VRAI ?</strong>...</p>
<p>Dessin humoristique de Catherine Meurisse, extrait de son excellent livre <em>Mes hommes de lettres</em>, éditions Sarbacanne, 2008. © Catherine Meurisse et les éditions Sarbacanne.</p>
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<p><strong>JEUDI 1er SEPTEMBRE : ORDRE DU JOUR</strong> <em>(informations provisoires)</em></p>
<p>Accueil en classe des élèves <strong>(plus tôt, accueil internat à préciser, <ins><a href="https://pierre-dailly-compiegne.ac-amiens.fr//">voir site du lycée</a></ins>)</strong>, présentation générale par le professeur principal, coordonnateur de l'HK. Durée moyenne : une heure. Ensuite, cours selon l'emploi du temps, qui vous sera communiqué dès la première heure.</p>
<p><strong>* Pour le COURS DE LETTRES : VENDREDI 2 SEPTEMBRE : 14H10-16h15</strong></p>
<p>Il est nécessaire d'apporter ce jour-là la bibliographie que vous avez pu télécharger sur le site du lycée (ou qui vous a été remise), ainsi que les œuvres au programme, dans la mesure du possible. <strong>Il est en effet impératif que tous les élèves possèdent la même édition des œuvres qui seront étudiées cette année</strong> : je voudrais m'en assurer avec vous. Même si les raisons paraissent évidentes, j'expliquerai précisément pourquoi en cours. <strong>La bibliographie sera utile pour comprendre les informations que je donnerai au sujet des khôlles : textes à lire, calendrier, organisation.</strong></p>
<p><strong>Je présenterai ensuite <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/06/06/Aux-futurs-Hypokh%C3%A2gneux-%3A-programme-d-%C3%A9tude-pour-l-ann%C3%A9e-2022-2023et-programme-de-lecture-pour-les-colles.-Afin-de-pr%C3%A9parer-la-rentr%C3%A9e-%3A-un-nouvel-%C3%A9t%C3%A9-avec-Julien-Gracq-et-Philippe-Le-Guillou...">le programme de travail que nous suivrons cette année</a>, ainsi que les méthodes et les exercices auxquels vous serez formés</strong>. <strong><em>Des textes divers vous seront ensuite distribués</em></strong>, afin de préparer à l'exercice de l'explication de texte, et donc à la première série de khôlles - qui prendra place aux mois d'octobre et de novembre.</p>
<p><strong>FIN SEPTEMBRE / DÉBUT OCTOBRE</strong></p>
<p>Après une réflexion générale sur la littérature et quelques notions d’histoire littéraire mises en perspective (notamment à partir d'une <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/07/26/Lire-en-Hypokh%C3%A2gne-%3A-proposition-d-une-LISTE-qui-ne-devrait-pas-donner-le-vertige...">bibliographie chronologique détaillée</a>), nous étudierons <strong>l’œuvre de Philippe Le Guillou, <em>Le Donjon de Lonveigh</em></strong>, dans le <strong>cours d’HISTOIRE LITTERAIRE</strong> qui a lieu le lundi matin (10H10-13H05). <strong>Le cours GENRES/NOTIONS</strong> du vendredi (14h10-16h15) portera au début sur <strong>le roman</strong>. Il introduira notre travail sur <strong><em>Le Donjon de Lonveigh</em>, qui sera, avec l'oeuvre de Philippe Le Guillou, au centre des prochaines<em> Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, jeudi 24 novembre, à la salle Saint-Nicolas de Compiègne. L'invité en sera Philippe Le Guillou lui-même, romancier et essayiste, prix Médicis 1997 pour <em>Les Sept noms du peintre</em></strong>.</p>
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<p><strong>Voici deux textes suggestifs qui retiendront notre attention lors du premier cours, vendredi 2 septembre</strong>. Ils sont à lire en regard de l'ironique dessin de Catherine Meurisse qui orne malicieusement ce billet. Appartenant chacun à un contexte historique différent, qu'il nous faudra cerner au mieux, ils nous permettront de faire un peu de <strong>sociologie littéraire</strong> pour mieux aborder ensuite <strong>le sens de la création artistique et la valeur que nous lui conférons</strong>. Vous préciserez, dans ces deux extraits, quelle est la thèse défendue par les auteurs, quelles sont les oppositions en présence (nature et fonction), et comment, dans ce que Pierre Bourdieu* nomme <strong>le champ littéraire</strong> (et ici plus largement artistique), l'art, de même que la culture, se laisse définir.</p>
<ul>
<li>cf. Pierre Bourdieu, <em>Les Règles de l'art</em> - <em>Genèse et structure du champ littéraire</em>, éditions du Seuil, coll. «Points », 1998 (1992).</li>
</ul>
<p>TEXTE 1</p>
<p><strong>Sainte-Beuve, « De la littérature industrielle » (1839), dans <em>Pour la critique</em>, éd. Gallimard, coll. « Folio », 1992, pages 197, 199-203, 205-206, 222</strong>.</p>
<p>« DE loin la littérature d'une époque se dessine aux yeux en masse comme une chose simple ; de près elle se déroule successivement en toutes sortes de diversités et de différences. Elle est en marche ; rien n'est encore accompli. Elle a ses progrès, ses écarts, ses moments d'hésitation ou d'entraînement. Il y a lieu de les noter à l'instant, de signaler les fausses routes, les pentes ruineuses ; ce n'est pas toujours en vain. On fait partie d'ailleurs du gros de la caravane, on s'y intéresse forcément, on en cause autour de soi en toute liberté : il est bon quelquefois d'écrire comme on cause et comme on pense. (…).</p>
<p>Pour ne pas s'effrayer du mot, pour mieux combattre la chose, il s'agit d'abord de ne se rien exagérer. De tout temps, la littérature industrielle a existé. Depuis qu'on imprime surtout, on a écrit pour vivre, et la majeure partie des livres imprimés est due sans doute à ce mobile si respectable. Combinée avec les passions et les croyances d'un chacun, avec le talent naturel, la pauvreté a engendré sa part, même des plus nobles œuvres, et de celles qui ont l'air le plus désintéressé. <em>Paupertas impulit audax</em>, nous dit Horace, et Le Sage écrivait <em>Gil Blas</em> pour le libraire. En général pourtant, surtout en France, dans le cours du XVIIe et du XVIIIe siècle, des idées de libéralité et de désintéressement s'étaient à bon droit attachées aux belles œuvres. (…) Boileau, faisait cadeau de ses vers à Barbin et ne les vendait pas. Dans tous ces monuments majestueux et diversement continus, des Bossuet, des Fénelon, des La Bruyère, dans ceux de Montesquieu ou de Buffon, on n'aperçoit pas de porte qui mène à l'arrière-boutique du libraire. Voltaire s'enrichissait plutôt encore à l'aide de spéculations étrangères que par ses livres qu'il ne négligeait pourtant pas. Diderot, nécessiteux, donnait son travail plus volontiers qu'il ne le vendait. Bernardin de Saint-Pierre offrit l'un des premiers le triste spectacle d'un talent élevé, idéal et poétique, en chicane avec les libraires. (…).</p>
<p>Ce qui la caractérise en ce moment cette littérature, et la rend un phénomène tout-à-fait propre à ce temps-ci, c'est la naïveté et souvent l'audace de sa requête, d'être nécessiteuse et de passer en demande toutes les bornes du nécessaire, de se mêler avec une passion effrénée de la gloire ou plutôt de la célébrité ; de s'amalgamer intimement avec l'orgueil littéraire, de se donner à lui pour mesure et de le prendre pour mesure lui-même dans l'émulation de leurs exigences accumulées ; c'est de se rencontrer là où on la supposerait et où on l'excuse le moins, dans les branches les plus fleuries de l'imagination, dans celles qui sembleraient tenir aux parties les plus délicates et les plus fines du talent.</p>
<p>Chaque époque a sa folie et son ridicule ; en littérature nous avons déjà assisté (et trop aidé peut-être) à bien des manies ; le démon de l'élégie, du désespoir, a eu son temps ; l'art pur a eu son culte, sa mysticité ; mais voici que le masque change ; l'industrie pénètre dans le rêve et le fait à son image, tout en se faisant fantastique comme lui ; <em>le démon de la propriété littéraire</em> monte les têtes et paraît constituer chez quelques-uns une vraie maladie pindarique, une danse de saint Guy curieuse à décrire. Chacun s'exagérant son importance, se met à évaluer son propre génie en sommes rondes ; le jet de chaque orgueil retombe en pluie d'or. Cela va aisément à des millions, l'on ne rougit pas de les étaler et de les mendier. Avec plus d'un illustre, le discours ne sort plus de là : c'est un cri de misère en style de haute banque et avec accompagnement d'espèces sonnantes. (…) La littérature industrielle est arrivée à supprimer la critique et à occuper la place à peu près sans contradiction et comme si elle existait seule. (…). De là, une littérature à physionomie jusqu'à présent inouïe dans son ensemble, active, effervescente, ambitieuse, osant tout, menant les passions les plus raffinées de la civilisation avec le sans-façon effréné de l'état de nature ; perdant un premier enjeu de générosité et de talent dans des gouffres d'égoïsme et de cupidité qui s'élargissent en s'enorgueillissant ; et, au milieu de ses prétentions, de ses animosités intestines, n'ayant pu trouver jusqu'ici d'apparence d'unité que dans des ligues momentanées d'intérêts et d'amours-propres, dans de pures coalitions qui violent le premier mot de toute morale harmonie.</p>
<p>Je n'exagère pas. En province, à Paris même, si l'on n'y est pas plus ou moins mêlé, on ignore ce que c'est au fond que la presse, ce bruyant rendez-vous, ce poudreux boulevard de la littérature du jour, mais qui a, dans chaque allée, ses passages secrets. En parlant de la presse, je sais quelles exceptions il convient de faire ; politiquement j'en pourrais surtout noter ; mais littérairement, il y en a très peu à reconnaître. La moindre importance qu'on attache probablement à une branche réputée accessoire a fait que sur ce point on a laissé aller les choses. Il en est résulté dans la plupart des journaux, chez quelques-uns même de ceux qui passeraient volontiers pour puritains, un ensemble d'abus et une organisation purement mercantile qui fomente la plaie littéraire d'alentour et qui en dépend. (…). Il faut bien se résigner aux habitudes nouvelles, à l'invasion de la démocratie littéraire comme à l'avènement de toutes les autres démocraties. Peu importe que cela semble plus criant en littérature. Ce sera de moins en moins un trait distinctif que d'écrire et de faire imprimer. (…).</p>
<p>Non ; quel que soit à chaque crise son redoublement d'espérance et d'audace, la littérature industrielle ne triomphera pas ; elle n'organisera rien de grand ni de fécond pour les lettres, parce que l'inspiration n'est pas là. Déjà en deux ou trois circonstances notables, depuis plusieurs années, elle a échoué fastueusement. Elle avait rallié des noms, des plumes célèbres, sans lien vrai ; elle les a compromises, décréditées plutôt en détail, sans en rien tirer de collectif ni de puissant. Déjà on l'a vue à l'œuvre dans cette entreprise gigantesque qui s'intitulait <em>l'Europe littéraire</em>, une autre fois dans <em>la Chronique de Paris</em> renouvelée, une autre fois et plus récemment dans la presse à quarante francs.</p>
<p>(…) Il est donc urgent que tous les hommes honnêtes se tiennent, chacun d'abord dans sa propre dignité (on le peut toujours), et entre eux, autant qu'il se pourra et quel que soit le point de départ, par des convenances fidèles et une intelligence sympathique. C'est le cas surtout de retrouver le courage d'esprit et de savoir braver. Que cette littérature industrielle existe, mais qu'elle rentre dans son lit et ne le creuse qu'avec lenteur : il ne tend que trop naturellement à s'agrandir. Pour conclure : deux littératures coexistent dans une proportion bien inégale et coexisteront de plus en plus, mêlées entre elles comme le bien et le mal en ce monde, confondues jusqu'au jour du jugement : tâchons d'avancer et de mûrir ce jugement en dégageant la bonne et en limitant l'autre avec fermeté. »</p>
<hr />
<p>TEXTE 2</p>
<p><strong>Max Horkheimer, Theodor W. Adorno, « La production industrielle de biens culturels », dans <em>La Dialectique de la raison</em>, éd. Gallimard, coll. « Tel », 2007 (1944), p. 144-146</strong>.</p>
<p>«L'amusement et tous les éléments de l'industrie culturelle ont existé bien avant celle-ci. Maintenant on s'en saisit d'en haut et on les remet au goût du jour. L'industrie culturelle peut se vanter d'avoir accompli énergiquement — et érigé en principe — le transfert souvent bien maladroit de l'art dans la sphère de la consommation, d'avoir libéré l'amusement de ses naïvetés importunes et amélioré la confection de la marchandise. En s'imposant de plus en plus, en poussant tout <em>outsider</em> de plus en plus impitoyablement vers la faillite ou en le contraignant à adhérer à un syndicat, elle s'est affinée et élevée progressivement, pour aboutir finalement à la synthèse de Beethoven et du Casino de Paris. Sa victoire est double : la vérité qu'elle étouffe à l'extérieur, elle peut la reproduire à l'intérieur en tant que mensonge. « L'art facile » en tant que tel, le divertissement, n'est pas une forme de décadence. Celui qui l'accuse de trahison envers l'idéal de l'expression pure se fait des illusions sur la société. La pureté de l'art bourgeois, qui s'est hypostasié comme royaume de la liberté en opposition à la pratique matérielle, fut obtenue dès le début au prix de l'exclusion des classes inférieures à la cause desquelles — véritable universalité — l'art reste fidèle précisément en sauvegardant sa liberté par rapport aux fins de la fausse universalité. L'art sérieux s'est refusé à ceux pour lesquels les difficultés et la pression de l'existence ont fait du sérieux une farce, et qui doivent être contents lorsqu'ils peuvent utiliser à se laisser aller le temps qu'ils ne consacrent pas au mécanisme de la production. L'art facile a accompagné l'art autonome comme une ombre. Il est la mauvaise conscience sociale de l'art sérieux. Ce que le premier — en vertu de ses prémisses sociales — dut perdre en vérité confère à l'autre l'apparence de la légitimité. Cette division est elle-même la vérité : elle exprime au moins la négativité de la culture qui est constituée par l'addition des deux sphères. L'absorption de l'art facile par l'art sérieux ou inversement est le moyen le moins sûr d'annuler l'opposition entre eux. Mais c'est ce que tente de faire l'industrie culturelle. L'excentricité du cirque, du musée de figures de cire et de la maison close par rapport à la société est aussi pénible à cette dernière que celle de Schönberg et de Karl Kraus. C'est pourquoi le jazzman Benny Goodman doit se produire en même temps que le quatuor de Budapest et être plus pédant sur le plan du rythme que n'importe quel clarinettiste dans un orchestre philharmonique, tandis que le jeu des membres du quatuor sera aussi lisse, aussi uniforme que le jeu doucereux de Guy Lombardo. Ce qui est significatif, ce n'est pas l'inculture crasse, la bêtise et la grossièreté. Grâce à sa propre perfection, l'industrie culturelle a éliminé les rebuts d'hier, en interdisant et en domestiquant le dilettantisme bien qu'elle commette sans cesse d'énormes bourdes sans lesquelles on ne pourrait absolument pas concevoir un niveau de style élevé. Mais ce qui est nouveau, c'est que les éléments inconciliables de la culture, l'art et le divertissement, sont subordonnés à une seule fin et réduits ainsi à une formule unique qui est fausse : la totalité de l'industrie culturelle. Celle-ci consiste en répétitions. Le fait que ses innovations caractéristiques ne sont jamais rien de plus que des améliorations de la production de masse n'est pas visible de l'extérieur du système. C'est avec raison que l'intérêt de nombreux consommateurs s'attache à la technique et non aux contenus creux répétés opiniâtrement et déjà à moitié discrédités. Le pouvoir social qu'idolâtrent les spectateurs s'affirme davantage dans l'omniprésence du stéréotype imposé par la technologie que dans les idéologies vieillies et rebattues que doivent cautionner les contenus éphémères.</p>
<p>L'industrie culturelle reste néanmoins l'industrie du divertissement. Elle exerce son pouvoir sur les consommateurs par l'intermédiaire de l'amusement qui est finalement détruit, non par un simple <em>diktat</em>, mais par l'hostilité — qui lui est inhérente — envers ce qui serait plus que lui. Du fait que le transfert de toutes les tendances de l'industrie culturelle dans la chair et le sang du public est favorisé par l'ensemble du processus social, la survie du marché dans ce secteur agit favorablement sur ces tendances. La demande n'est pas encore remplacée par la simple obéissance. Il est bien connu que la grande réorganisation du cinéma avant la Première Guerre mondiale — condition matérielle de son expansion — consista justement à l'adapter délibérément aux besoins du public enregistrés sur la base des recettes : on ne pensait guère devoir prendre ce fait en considération à l'époque des pionniers de l'écran. Aujourd'hui, les magnats du cinéma sont toujours de cet avis et leurs critères sont toujours les succès plus ou moins phénoménaux, mais ils ont la sagesse de ne jamais avoir recours aux exemples opposés, ceux de la vérité. Leur idéologie, ce sont les affaires. La vérité dans tout cela c'est que le pouvoir de l'industrie culturelle vient de ce qu'elle s'identifie au besoin produit et ne s'oppose pas simplement à lui, même si cette opposition signifiait qu'elle est toute-puissante ou impuissante. Dans le capitalisme avancé, l'amusement est le prolongement du travail. Il est recherché par celui qui veut échapper au processus du travail automatisé pour être de nouveau en mesure de l'affronter. Mais l'automatisation a pris en même temps un tel pouvoir sur l'homme durant son temps libre et sur son bonheur, elle détermine si profondément la fabrication des produits servant au divertisse- ment, que cet homme ne peut plus appréhender autre chose que la copie, la reproduction du processus du travail lui-même. Le prétendu contenu n'est plus qu'une façade défraîchie ; ce qui s'imprime dans l'esprit de l'homme, c'est la succession automatique d'opérations standardisées. Le seul moyen de se soustraire à ce qui se passe à l'usine et au bureau est de s'y adapter durant les heures de loisirs. Tout amusement finit par être affecté de cette maladie incurable. Le plaisir se fige dans l'ennui du fait que, pour rester un plaisir, il ne doit plus demander d'effort et se meut donc strictement dans les ornières usées des associations habituelles.»</p>
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<p>Dans cet extrait de <em>Bajazet</em>, de Vivaldi, vous serez notamment sensibles aux <strong>ornements baroques de la voix</strong>, ce que les traités de musique de l'époque nomment des <em>notes d'agrément</em>, invisibles sur la partition, mais qui font la beauté de la mélodie. Nous en tirerons en classe une <em>leçon</em> pour notre approche de la littérature...</p>
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<p><em>Si vous souhaitez me poser une question sur ce billet ou sur tout autre chose, vous pouvez laisser un commentaire sur ce blogue. Ma réponse intéressera sans doute tous les futurs Hypokhâgneux. Si votre question est personnelle, vous pouvez m'écrire à l'adresse suivante</em> :</p>
<p>Reynald-Andre.Chalard@ac-amiens.fr</p>
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Aux futurs Hypokhâgneux : programme d'étude pour l'année 2022-2023 et programme de lecture pour les colles. Afin de préparer la rentrée : un nouvel été avec Philippe Le Guillou et Julien Gracq ...
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2022-07-04T16:46:00+02:00
2022-12-08T11:35:31+01:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Gudin-tempete.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Théodore Gudin (1802-1880), <em>Tempête sur les côtes de Belle-Île</em>, 1851 - Huile sur toile, 1.32 x 2.02 m - Dépôt du FNAC, Paris au Musée des beaux-arts de Quimper.
© Musée des beaux-arts de Quimper</p>
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<p><strong>Félicitations pour votre admission en Lettres supérieures !</strong></p>
<p>Nous aborderons le programme de l'année à la lumière de cette pensée de <strong>Paul Claudel</strong>, que <em>Le Roman inépuisable</em> de <strong>Philippe Le Guillou</strong> nous paraît rejoindre. <strong>Philippe Le Guillou</strong> sera l'invité des prochaines <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, jeudi 24 novembre 2022 :</p>
<p><em>« Le but de la poésie n'est pas, comme dit Baudelaire, de 'plonger au fond de l'Infini pour trouver du nouveau', mais au fond du défini pour y trouver de l'inépuisable.»</em></p>
<p><strong>Paul Claudel</strong>, « Introduction à un poème sur Dante» (1921), dans <em>Accompagnements</em> (<em>Oeuvres en prose</em>, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », p. 424.).</p>
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<p>Vous avez reçu, lors de votre inscription au lycée Pierre d'Ailly, une brochure dans laquelle vous trouverez, pour chaque discipline, une bibliographie et des consignes de lecture. Après un repos bien mérité, vous aurez à cœur de faire ces lectures nécessaires pour aborder sereinement la rentrée.</p>
<p>Je présente ci-dessous le programme d'étude en Lettres, <strong>auquel il faudra ajouter de nombreux extraits pour chaque genre littéraire, poésie, roman, théâtre, essai et un programme de lecture pour les colles</strong>, c'est-à-dire les interrogations orales (voir ci-dessous). D'autres précisions sont données dans ma bibliographie.</p>
<p><em>Je vous souhaite de belles vacances, reposantes et studieuses !</em></p>
<p><strong>PROGRAMME D’ÉTUDE</strong></p>
<p><strong>UN ÉTÉ AVEC PHILIPPE LE GUILLOU ET JULIEN GRACQ</strong></p>
<p><strong>A LIRE POUR LA RENTRÉE</strong> :</p>
<p><strong><em>Réflexion sur la littérature</em></strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.De_jeuner_Gracq_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Philippe LE GUILLOU, <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em>, éd. Gallimard, coll. « Folio ». ISBN : 978-2070343553.</p>
<p>Le romancier et essayiste <strong>Philippe Le Guillou</strong> a rencontré à plusieurs reprises <strong>Julien Gracq</strong>, figure du grand écrivain aujourd'hui disparue, auteur, entre autres, d’<em>Au château d’Argol</em>, d’<em>Un beau ténébreux</em> et du <em>Rivage des Syrtes</em>, et dont les <em>Œuvres complètes</em> sont publiées dans la prestigieuse collection de « La Bibliothèque de la Pléiade », aux éditions Gallimard. <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> fait le récit émouvant des nombreuses rencontres avec cet « Allié substantiel », pour reprendre la belle formule de René Char. Si l’on apprend beaucoup sur Gracq et le génie des lieux qu’il habite, on a aussi le plaisir de suivre de belles conversations littéraires sur des sujets qui ne peuvent qu’intéresser de jeunes étudiants en Lettres : la situation de la poésie au XXe siècle, ce qui donne lieu à des aperçus d’histoire littéraire qui amènent l’auteur d<em>'En lisant en écrivant</em> à faire des comparaisons entre les genres, entre les siècles, et mêmes entre les écrivains (Lamartine, Hugo, Malraux) ; le surréalisme et l’admiration de Gracq pour André Breton ; le nouveau roman, avec Michel Butor, notamment ; les fondateurs de la grande revue d’avant-garde TEL QUEL et, au-dessus de cette dernière, l'incomparable NRF ; Roland Barthes, certaines de ses œuvres comme <em>Fragments d’un discours amoureux</em> et <em>La Chambre claire</em> ; mais aussi les œuvres de Gracq, au premier chef : les rapports de ce dernier avec la fiction, ce qui le fait écrire, l’espace ; son goût pour l’essai, ses idées sur les livres, la vocation de l’écrivain à partir de l’expérience de la lecture ; ses rapports avec les éditeurs, en particulier José Corti, auquel il est toujours resté fidèle ; le tableau qui a inspiré «Le Roi Cophetua», l'un des trois récits de <em>La Presqu'île</em>. On l’aura deviné : ce que nous dit Philippe Le Guillou de Julien Gracq est aussi l’occasion, pour l’auteur du <em>Donjon de Lonveigh</em>, d’évoquer discrètement son propre parcours, ce qui de l’étudiant lecteur admiratif des œuvres de Gracq l’a progressivement métamorphosé en écrivain s’adressant à un autre écrivain. C’est d’ailleurs Julien Gracq lui-même qui, par ses allusions, ses questions ou ses commentaires sur certains livres de Philippe Le Guillou, favorise ces mises au point. Sont ainsi présentées et plus ou moins commentées les œuvres suivantes, qui doivent retenir l’attention : <em>Le Donjon de Lonveigh</em> (au programme cette année), <em>Le Dieu noir</em>, <em>Douze années dans l’enfance du monde</em>, « apocryphe imaginaire » sur la vie du Christ, publié chez Gallimard (2000), qui sera prolongé par un <em>Jésus</em>, en 2002, aux éditions Pygmalion. Ce sont aussi certaines de ses lectures qui nous sont dévoilées, en particulier celle, décisive, du livre de Michel Tournier, <em>Le Roi des Aulnes</em>, dont il avoue qu’il fut « le grand embrasement de mon été avant la rentrée en hypokhâgne, à Rennes» (Folio, p. 49). <em>Le Déjeuner des bords de Loire</em> est donc une invitation à entrer en littérature par l’incarnation de la rencontre avec l’œuvre et avec l’écrivain. Il pourra inciter à une véritable réflexion littéraire, qui ne peut exister sans une authentique expérience de la lecture. Avant de prendre la littérature pour objet d’étude - et elle le sera -, le lecteur devrait pouvoir s’y <em>abandonner</em>, ainsi que l’explique très finement Thomas Pavel dans sa leçon inaugurale au Collège de France, <em>Comment écouter la littérature ?</em> (Fayard, 2006, p. 16). C'est la même conception de la lecture que défend Philippe Le Guillou dans son très bel essai sur le roman , <em>Le Roman inépuisable</em> (Gallimard, 2020, dès la page 16). Nous reviendrons sur ce point capital en cours.</p>
<p>Cette réflexion sur la littérature, <strong>qui sera poursuivie par l'anthologie des Classiques de Nuccio Ordine et la leçon d'Antoine Compagnon</strong> (cf. ci-dessous), doit mettre en place ce qui est essentiel à la méthodologie des Lettres : <strong>l'initiation à la problématisation littéraire</strong>. Pour « transformer l'information en <strong>savoir</strong>» (Michel Serres), il faut apprendre à <em>problématiser</em> : dynamiser sa pensée par la <em>recherche</em>, la <em>formulation</em> puis la <em>résolution</em> de <strong>« problèmes littéraires»</strong>. Ces derniers sont nombreux et sont le plus souvent tirés de l'étude spécifique des textes. Mais il en est de généraux, qui portent, par exemple, sur les genres, les mouvements littéraires et les contextes socioculturels. A chaque fois, il faudra exercer <em>honnêtement</em> sa réflexion pour ne pas s'en tenir aux idées toutes faites sur les auteurs et leurs oeuvres. On adoptera ainsi l'esprit provocateur d'un Paul Valéry pour déjouer ce que peuvent avoir d'abusif voire d'inexact les généralités sur les mouvements littéraires (c'est un exemple parmi tant d'autres) : <em>« Il est impossible de penser — sérieusement — avec des mots comme Classicisme, Romantisme, Humanisme, Réalisme — On ne s’enivre ni ne se désaltère avec des étiquettes de bouteilles»</em>. <em>Mauvaises pensées et autres</em> (<em>Œuvres Complètes</em>, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade», tome 2 p. 801). Cette exigence de <strong>la pensée littéraire</strong> présidera aux trois exercices canoniques des études de Lettres : L'explication de texte (linéaire), le commentaire composé et bien évidemment la dissertation.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Classiques1_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Nuccio ORDINE, <em>Une année avec les Classiques</em>, éditions Les Belles Lettres. ISBN : 978-2251445489.</p>
<p>Qu’est-ce qu’un « classique » ? On tâchera de répondre à cette question, avec l’aide de <strong>Nuccio Ordine</strong> mais aussi d’Italo Calvino, <em>Pourquoi lire les classiques</em>, (1984) et de Jorge Luis Borges qui, dans une « enquête », donne la définition suivante, non sans la passer au crible du relativisme historique : « Est classique le livre qu’une nation ou un groupe de nations ou les siècles ont décidé de lire comme si tout dans ses pages était délibéré, fatal, profond comme le cosmos et susceptible d’interprétations sans fin. (…) C’est un livre que les générations humaines, pressées par des raisons différentes, lisent avec une ferveur préalable et une mystérieuse loyauté. » « Sur les classiques », dans <em>Enquêtes</em>, Folio /essais, p. 251-252. Faut-il se hâter d'opposer les « Classiques » aux « Modernes » ? Dans un entretien entre Roger Caillois et Borges, ce dernier, qui a fait partie du mouvement ultraïste, à ses débuts, reconnaît avoir évolué « vers Boileau », autrement dit vers le classicisme. Caillois, d’abord surréaliste, se reconnaît également dans ce parcours. Voilà qui nous permettra de formuler le problème littéraire relatif aux tensions qui se jouent entre « l’Ancien et le Nouveau» - pour reprendre le titre de Marthe Robert -, et dont la littérature est le perpétuel théâtre. L’anthologie proposée a pour sous-titre : « Une petite bibliothèque idéale pour nous accompagner dans un voyage fascinant en littérature et en philosophie ». Il s’agit d’un recueil de citations extraites de quelques grandes œuvres de la littérature européenne, d’Homère à Gabriel Garcia Marquez, en passant, notamment, par Platon, Plaute, L’Arioste, Machiavel, Rabelais, Montaigne, Cervantès, Molière, Shakespeare, Montesquieu, Swift, Goethe, Balzac, Dickens, Zweig, Yourcenar, Borges, et d’autres encore. Chaque citation est suivie d’un petit commentaire, qui doit être considéré comme <strong>une invitation à la lecture intégrale des œuvres</strong> : <strong>une incitation à la réflexion personnelle aussi bien</strong>, qui peut prolonger voire discuter celle de Nuccio Ordine. Seront ainsi mises à l'épreuve l<em>'humanitas</em> et la <em>curiositas</em> (notion ambivalente dans l'Antiquité, prise ici <em>in bonam partem</em>, et définie par le <em>studium discendi</em>, la «passion d'apprendre» avec discernement), qui sont parmi les qualités essentielles du lettré, selon Cicéron (plus tard Sénèque également, cf. le <em>De Otio</em>) et surtout ses disciples humanistes de la Renaissance. Enfin, la variété des auteurs et des époques oblige à <strong>une lecture comparée</strong>, qui complètera utilement notre travail en littérature française.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Compagnon_Litte_rature_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Antoine COMPAGNON, <em>La Littérature, pour quoi faire ?</em>, éditions Fayard, coll. «Pluriel». ISBN : 978-2818505564.</p>
<p>Pour préciser et approfondir la perspective d'étude de cet ouvrage, vous pouvez consulter <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/04/29/Deux-le%C3%A7ons-sur-la-litt%C3%A9rature-et-le-sens-des-%C3%A9tudes-litt%C3%A9raires-%3A-Roland-Barthes-%281977%29-et-Antoine-Compagnon-%282006%29...">le billet du 02 juin 2020</a>.</p>
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<p>Ci-dessous, accompagnant chaque oeuvre au programme, un petit commentaire qui indique sommairement l'orientation de sa prochaine étude :</p>
<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XVIIe siècle / Cours sur le genre théâtral</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>le théâtre</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Moliere_Le_Misanthrope_s.jpg" alt="Moliere_Le_Misanthrope.jpg" title="Moliere_Le_Misanthrope.jpg, juin 2015" /></p>
<p>Molière, <em>Le Misanthrope</em>, éd. Gallimard, coll. « Folio classique » (édition de Jacques Chupeau). ISBN:978-2070449934.</p>
<p>En partant des deux vers célèbres de Philinte (I, 1, vv. 105-106), qui font rimer la <strong>maladie</strong> d'Alceste avec la <strong>comédie</strong> que ce dernier joue malgré lui, selon son ami, nous mènerons notre étude selon l'axe de réflexion ainsi libellé : <em>Représentation théâtrale de la mélancolie et critique de la </em>raison<em> misanthropique</em>. De quoi Alceste souffre-t-il au juste ? D'un excès de bile noire ou d'un amour impossible ? A-t-il des raisons de ne pas suivre...la raison ? Comment faut-il donc entendre ces deux vers de rupture, en forme de pirouette, qui sonnent le glas de tout compromis : « Il est vrai : ma raison me le dit chaque jour ; / Mais la raison n'est pas ce qui règle l'amour.» (I, 1, vv. 247-248) ? Chemin faisant, nous aborderons les points suivants, que nous passerons au crible du langage théâtral : <strong>l’amour</strong> (cf. Barthes, <em>Fragments d’un discours amoureux</em>), <strong>la comédie</strong> (les personnages sont acteurs et spectateurs), <strong>l’ennui</strong> (lecture des <em>Pensées</em> de Pascal, « misanthrope sublime », selon Voltaire, à mettre en résonance avec le catalogue des vanités dressé par Alceste, cet autre « solitaire », en se gardant toutefois des équivalences faciles. On pourra ainsi discuter ce qu’un critique, Antony Mc Kenna, a affirmé au sujet d’Alceste : «Alceste est janséniste, tout comme Tartuffe était jésuite…») ; enfin <strong>l’espace</strong> représenté ou évoqué dans la pièce : le salon, la cour, le « désert »… Dans le cadre de notre approche des oeuvres dites <em>classiques</em>, nous essaierons de comprendre ces propos suggestifs que tenait Louis Jouvet à ses élèves, quand il voulait leur faire jouer Molière : « Si ce sont des œuvres classiques, si elles ont perduré jusqu’à maintenant, c’est à cause de cette vertu inépuisable, c’est que ce sont des pièces qu’on peut comparer à ces pièces d’or dont parle Bergson, dont on ne finit pas de rendre la monnaie. » Louis Jouvet, <em>Molière et la comédie classique</em>, éditions Gallimard, coll. « Pratique du Théâtre », 1965, p. 15.</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XIXe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>la poésie</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Germain_Nouveau_poe_sies_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Germain Nouveau, <em>La Doctrine de l’Amour</em>, <em>Valentines</em>, éd. Gallimard, coll. « Poésie ». Edition de Louis Forestier. ISBN : 978-2070322053.</p>
<p>Compagnon méconnu de Rimbaud et de Verlaine, <strong>Germain Nouveau</strong> (1851-1920) est l'auteur d'une oeuvre poétique importante, mais aujourd'hui délaissée, malgré des travaux critiques en cours, qui tentent de réhabiliter ce poète dont Aragon lui-même a dit qu'il était l'égal de Rimbaud (<em>Les Lettres françaises</em>, 7 octobre 1948). Des contemporains de Nouveau, avant les Surréalistes, en avaient pris conscience. Aussi partira-t-on des confidences que fit le vieux poète parnassien Léon Dierx à Apollinaire, qui les recueillit au début du XXe siècle, et les publia en 1928 dans <em>Le Flâneur des deux rives</em> (texte intitulé « La Cave de M. Vollard», coll. « L’Imaginaire », p. 110-112.):</p>
<p>« Notre époque de prose et de science a connu les poètes les plus lyriques. Leur vie, leurs aventures constituent la partie la plus étrange de l'histoire de notre temps. Gérard de Nerval se tue pour échapper aux misères de l'existence, et le mystère qui entoure sa mort n'est pas encore expliqué. Baudelaire est mort fou, ce Baudelaire dont on connaît si mal la vie, en dépit des biographes et des éditeurs épistolaires. N’a-t-on pas parlé de ses vices et de ses maîtresses ? On assure maintenant que, dans ses Mémoires, Nadar se fait fort de démontrer que Baudelaire est mort vierge.</p>
<p><strong>En ce moment même, un poète du premier ordre, un poète fou erre à travers le monde... Germain Nouveau</strong> <em>(je souligne)</em> quitta un jour le lycée où il professait le dessin et se fit mendiant, pour suivre l'exemple de saint Benoît Labre. Il alla ensuite en Italie, où il peignait et vivait en vendant ses tableaux. Maintenant il suit les pèlerinages et j’ai su qu'il avait passé à Bruxelles, à Lourdes, en Afrique. Fou, c’est trop dire, Germain Nouveau a conscience de son état. Ce mystique ne veut pas qu’on l’appelle un Fou et <em>Poverello</em> lyrique, il veut qu’on n’emploie à son endroit que le mot Dément.</p>
<p>Des amis ont publié quelques-uns de ses poèmes, et comme il a renoncé à son nom, on n’a mis sur ce livre que cette indication mystique comme un nom de religion : P. N. Humilis. Mais son humilité serait choquée de cette publication, s’il la connaissait. »</p>
<p>Notre étude cherchera à faire découvrir ce poète rare, dont l'oeuvre nous permettra de <strong>définir quelques problèmes littéraires d'envergure, que nous ne résoudrons évidemment pas, mais qui sont au coeur des études de Lettres</strong> : <strong>a) le problème de l'édition de son oeuvre</strong> : celle de Louis Forestier, dans la collection Poésie / Gallimard, comporte des erreurs et des inexactitudes imputables aux premiers éditeurs de Germain Nouveau, qui ne voulait pas que l'on publiât quoi que ce soit de sa plume ; <strong>b) le problème posé par les manuscrits de l'oeuvre de Rimbaud intitulée <em>Illuminations</em></strong> : on peut se demander s'ils ne cacheraient pas un autre auteur, qui serait Germain Nouveau lui-même. L'universitaire <strong>Eddie Breuil</strong>, spécialiste de l'édition critique et conseiller scientifique de <a href="http://www.citedulivre-aix.com/spip.php?article338">la belle exposition organisée par la Bibliothèque Méjanes d'Aix-en-Provence en 2021</a> sur le poète Germain Nouveau, nous proposera une conférence sur ce thème, au mois de mai 2023, dans le cadre des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/LES-LUNDIS-DE-PIERRE-D-AILLY">LUNDIS DE PIERRE D'AILLY</a>. Il a en effet très aimablement accepté de venir nous expliquer ses conclusions sur l'analyse des manuscrits des <em>Illuminations</em>, pour savoir quelle part Germain Nouveau a pu prendre à l'élaboration de cette oeuvre. <em>Qu'il en soit d'ores et déjà vivement remercié !</em> <strong>c) Enfin, et dans le prolongement de ce qui précède, le problème de la place de Germain Nouveau dans l'histoire de la poésie</strong>, que nous tenterons de cerner en <em>lisant</em> son oeuvre à travers un ensemble de poèmes qui dessinent un parcours poétique et spirituel, et en prenant au sérieux ce qu'en dit le chef de file des Surréalistes André Breton, dans «Flagrant délit » (cf. <em>La Clé des champs</em>, Pauvert, 1979, p. 166.), à propos d'un faux Rimbaud publié en 1949 sous le titre <em>La Chasse spirituelle</em> : « Nouveau-Rimbaud : on n'aura rien dit, on n'aura rien franchi poétiquement tant qu'on n'aura pas élucidé ce rapport, tant qu'on n'aura pas dégagé le sens de la conjonction exceptionnelle de ces deux 'natures' et aussi de ces deux astres.»</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XXe siècle / Cours sur le genre poétique</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>la poésie</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Yourcenar_Feux_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Marguerite Yourcenar, <em>Feux</em>, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire ». ISBN : 978-2070733125.</p>
<p>Dans la préface, Marguerite Yourcenar présente ainsi son oeuvre, inspirée d'une situation biographique : «Produit d'une crise passionnelle, <em>Feux</em> se présente comme un recueil de poèmes d'amour, ou, si l'on préfère, comme une série de proses lyriques reliées entre elles par une certaine notion de l'amour.» Si l'on peut qualifier ces textes de <em>récits</em>, terme d'ailleurs employé par l'auteur, il faut y ajouter l'adjectif <em>mythiques</em>, qui permet de cerner chaque histoire, dont le personnage principal - victime de la passion : Phèdre, Achille, Patrocle, Antigone... - appartient à « la Grèce antique, sauf Marie-Madeleine, située dans ce monde judéo-syrien où le christianisme a pris forme, et que les peintres de la Renaissance et de l'ère baroque (...) ont toujours aimé peupler de belles architectures classiques, de belles draperies et de beaux nus.» Le livre faisant alterner <em>récits</em> et <em>pensées détachées</em>, il nous reviendra d'interroger ce qui, dans ce dispositif, ressortit à la <em>poésie</em> ou comment la recherche de l'absolu à travers le mythe actualisé fonde et nourrit le <em>je lyrique</em> qui tente de s'exprimer.</p>
<p>Marguerite Yourcenar parle de <em>Feux</em>, dans un entretien avec Bernard Pivot, en 1979 :</p>
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<p><strong><em>Cours d'histoire littéraire : littérature du XXe siècle / Cours sur le genre romanesque</em></strong></p>
<p><em>À associer - pour le cours et pour la préparation à la dissertation - au programme de lecture des colles sur <strong>le roman</strong></em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Lonveigh_s.jpg" alt="" /></p>
<p>Philippe LE GUILLOU, <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, éditions Gallimard, coll. « Folio ». ISBN : 978-2070462377.</p>
<p>Dans <em>Mon cœur mis à nu</em>, Baudelaire affirme qu’« il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie.» (Folio, p. 102). Les œuvres de <strong>Philippe Le Guillou</strong>, qui peuvent se lire comme une théorie des exceptions, en sont, d'une certaine manière, l’illustration convaincante. Ainsi, la figure du grand écrivain, avec son aura et sa part de mystère, hante <em>Le Donjon de Lonveigh</em>. Le narrateur qui en raconte l’histoire, critique littéraire et éditeur aux éditions Gallimard, est un lecteur admiratif et passionné qui cherche à écrire le « roman de Thomas Daigre » à partir des entretiens que celui-ci lui a accordés dans son château irlandais. Dès lors, le narrateur veut percer le secret de celui qui, peut-être compromis avec la Collaboration, quitta la France et se mura ensuite dans le silence, solitaire dans son donjon. Tout le roman est construit sur cette rencontre bouleversante, qui confronte le narrateur à la signification sacrificielle de l’acte d'écrire (l'écrivain, double de saint Sébastien percé de flèches ?), les carnets de Thomas Daigre émaillant la narration à de nombreuses reprises pour laisser entrevoir les éclats miroitants d’une œuvre étrange et méconnue, mais constamment désirable, comme l’est aussi, sans doute, pour le narrateur, Florence, la fille de l’écrivain reclus, qui peint et aime avec la même violence que celle du paysage marin, des tourbières et des loughs, dont la description lancinante renvoie aux mêmes puissances envoûtantes qui tourmentent les personnages. <strong>« Il n’est de lecture possible que poétique »</strong>, écrit Thomas Daigre, dans l’un de ses carnets (Folio, p. 156). On le prendra au mot, en étant attentif à tout ce qui, dans ce roman, excède l’événement et veut atteindre au poème - et dans le <em>poème</em>, à la parole originelle, c'est-à-dire au <em>mythe</em> -, en pensant <em>mutatis mutandis</em> à Mallarmé, qui voyait dans le roman de son ami Rodenbach, <em>Bruges-la-Morte</em>, un « poème, infini par soi mais littérairement un de ceux en prose les plus fièrement prolongés. » (Lettre du 28 juin 1892), mais en n'oubliant pas non plus ce qu'a dit Remy de Gourmont du « roman éternel», conçu dès l'origine comme un <em>poème</em> (cf. <em>Promenades littéraires</em>, 7e série, 1927, où il cite, vers et prose, l<em>'Odyssée</em> et <em>Don Quichotte</em>, <em>Wilhelm Meister</em> et <em>Tribulat Bonhomet</em>, <em>Vita nuova</em> et <em>L'Education sentimentale</em> : ne peut-on pas voir là un prolongement de la conception <em>romantique</em> du roman également pris en charge par Philippe Le Guillou ?). Cette écriture recherche en effet par moments la « sorcellerie évocatoire » d’un lyrisme tout entier habité par « l’imaginaire du secret », pour reprendre le titre d’un livre suggestif de Pierre Brunel, le secret étant l’une des modalités de l’attente du sens et, paradoxalement, de son omniprésence, à travers les épiphanies du symbole qui travaillent le texte. On sera enfin curieux de reconnaître (<ins>hypothèses à vérifier</ins>), à travers les personnages écrivains, les figures littéraires qui ont pu en être les sources d’inspiration, sachant que le personnage n’est jamais pur mais résulte d’une combinaison complexe d'éléments hétérogènes qu’il faudra identifier (Pensons, entre autres, et pour commencer à cartographier la géographie littéraire de ce roman, à Paul Morand, André Pieyre de Mandiargues, Maurice Blanchot, Julien Gracq, Pierre Drieu la Rochelle, Henry de Montherlant... Dans son <em>avant-propos</em>, Philippe Le Guillou mentionne, outre Barbey d'Aurevilly et Julien Gracq, Michel Mohrt, Beckett et Kafka). <em>Le Donjon de Lonveigh</em> a été publié en 1991, peu après la disparition d'écrivains aussi importants que René Char, Francis Ponge, Samuel Beckett, Philippe Soupault et Michel Leiris. <strong>Philippe Le Guillou</strong> avait trente-deux ans. Il faudra situer précisément cette œuvre ténébreuse, et le <em>charme</em> de son style, dans la production romanesque de cette époque, dernière décennie du XXe siècle. L’auteur, qui a confiance dans « Le Roman inépuisable », ne manquera pas de nous éclairer sur les circonstances de son écriture, le 24 novembre prochain, puisqu’il sera <strong>l'invité très attendu des « Rencontres de Pierre d’Ailly »</strong> !</p>
<p><em>Le Donjon de Lonveigh</em>, p. 43-45 :</p>
<p>« Le journal commençant de Thomas Daigre habiterait mon insomnie. J'étais fatigué, toujours traversé de cette même nervosité qui m'empoignait dès que je visitais Lonveigh. Tout en lisant, j'écoutais <em>Ruhevoll</em> de Mahler, seule musique qui parvînt, dans mes moments d'angoisse, à me rattacher à une origine, un ancrage un peu stable. (...) Je poursuivis mon exploration, écoutant Mahler jusqu'à l'obsession.»</p>
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<p><strong>POUR LA RENTRÉE EN SEPTEMBRE</strong></p>
<p><strong>Attention</strong> : pour la rentrée, vous devrez avoir lu avec précision les œuvres au programme. Celle qui nous occupera dès la rentrée, après une réflexion générale sur la littérature et quelques notions d’histoire littéraire (mises en perspective), est la suivante :</p>
<p><strong>Philippe LE GUILLOU, <em>Le Donjon de Lonveigh</em>, éditions Gallimard, coll. « Folio »</strong>.</p>
<p><strong>La prochaine édition des « Rencontres de Pierre d’Ailly » (jeudi 24 novembre 2022)</strong>, qui proposera une conférence de <strong>Philippe LE GUILLOU, romancier et essayiste</strong>, sera consacrée cette année encore au roman et aura pour intitulé : <strong>« Le Roman inépuisable »</strong>.</p>
<p>En lisant, tenez compte de ce qu’affirme Michel Collot (professeur, poète et critique) au sujet de la poésie, mais qui vaut tout aussi bien, à des degrés divers, pour la littérature en général : « Toute expérience poétique engage au moins trois termes : un sujet, un monde, un langage (…). Toute poétique devrait donc essayer de comprendre la solidarité de ces trois termes, le jeu complexe des relations qui les unissent ». <em>La Poésie moderne et la structure d’horizon</em>, PUF, coll. « Ecriture », 1989, « Introduction », page 5.</p>
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<p><strong>Voici les œuvres sur lesquelles les colles porteront :</strong></p>
<p><em><strong>Attention bis</strong> : il faut <strong>lire</strong> ou <strong>relire</strong> dès cet été <strong>les oeuvres au programme des colles</strong>. Leur connaissance est nécessaire pour aborder la dissertation générale et l'explication de texte (qui portera, pour chaque genre, sur l'une de ces oeuvres)</em>.</p>
<p><strong>Romans/Récits/Nouvelles</strong> : Madame de La Fayette, <em>La Princesse de Clèves</em> / Voltaire, <em>Candide et autres contes</em> (Folio/Classique) / Diderot, <em>Jacques le fataliste</em>/ Rousseau, <em>La Nouvelle Héloïse</em> (la 1re partie) / Chateaubriand, <em>René</em> / Stendhal, <em>Le Rouge et le noir</em> / Balzac, <em>Eugénie Grandet</em> / Théophile Gautier, <em>Le Roman de la momie</em> / Gustave Flaubert, <em>Madame Bovary</em> / Barbey d’Aurevilly, <em>L’Ensorcelée</em> / Alain-Fournier, <em>Le Grand Meaulnes</em> / Julien Gracq, <em>Au château d’Argol</em> / François Mauriac, <em>Un adolescent d’autrefois</em> / Michel Tournier, <em>Vendredi ou les limbes du pacifique</em> / Marguerite Yourcenar, <em>L’œuvre au noir</em> / Richard Millet, <em>L’Écrivain Sirieix</em>.* <strong>ŒUVRES (au moins 1 par siècle)</strong> <strong>À LIRE POUR LE 30 SEPTEMBRE 2022.</strong></p>
<p><strong>Théâtre</strong> : Molière, <em>Le Malade imaginaire, Tartuffe, Le Misanthrope</em> / Corneille, <em>Le Cid, Polyeucte, Suréna</em> / Racine, <em>Britannicus, Andromaque, Phèdre</em> / Marivaux, <em>Le Jeu de l’amour et du hasard, La Double inconstance, Les Fausses confidences</em> / Beaumarchais, <em>Le Mariage de Figaro</em> / Voltaire, <em>Zaïre</em> / Vigny, <em>Chatterton</em> / Hugo, <em>Ruy Blas, Le Roi s’amuse</em> / Musset, <em>On ne badine pas avec l’amour, Lorenzaccio</em> / Sartre, <em>Huis clos</em> / Giraudoux, <em>Intermezzo</em> / Beckett, <em>En attendant Godot</em> / Genet, <em>Les Bonnes</em> / Valère Novarina, <em>L’Acte inconnu</em>. <strong>*ŒUVRES À LIRE POUR LE 31 JANVIER 2023</strong>.</p>
<p><strong>Poésie</strong> : Du Bellay, <em>Les Regrets</em> (20 premiers sonnets) / La Fontaine, <em>Fables</em> (Livres VII et VIII) / Victor Hugo, <em>Les Contemplations</em> (livre premier « Aurore ») / Baudelaire, <em>Les Fleurs du mal</em> (« Spleen et Idéal ») / Théophile Gautier, <em>Émaux et camées</em> / Rimbaud, Poésies, <em>Une saison en Enfer, Illuminations</em> / Apollinaire, <em>Alcools</em> (« Zone », « Le Pont Mirabeau », « La Chanson du Mal-Aimé ») / Francis Ponge, <em>Le Parti pris des choses</em> (« Le Cageot », « Le Pain », « Végétation ») / Guillevic, <em>Art poétique</em> / Georges Perros, <em>Une vie ordinaire</em>. <strong>*ŒUVRES À LIRE POUR le 31 MARS 2023</strong>.</p>
<p>Vous pouvez compléter ce programme en piochant dans la liste <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/07/26/Lire-en-Hypokh%C3%A2gne-%3A-proposition-d-une-LISTE-qui-ne-devrait-pas-donner-le-vertige...">LIRE EN HYPOKHÂGNE</a> (cf. QUE LIRE ? / COMMENT LIRE ?). La composition de cette liste sera étudiée en début d'année pour <strong>problématiser les notions de genre et de chronologie littéraires</strong>.</p>
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<p>Il est possible à tout visiteur de poster un commentaire sur un billet, ou sur une page, et d’obtenir des informations plus précises en contactant l’éditeur de ce blogue à l’adresse suivante :</p>
<p>Reynald-Andre.Chalard@ac-amiens.fr</p>
La 10e édition des «Rencontres de Pierre d'Ailly» a eu lieu jeudi 12 mai 2022 : «Dans le Labyrinthe du Roman». Conférence de Mohamed Mbougar Sarr, Prix Goncourt 2021, ancien Khâgneux de notre lycée.
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2022-05-30T23:31:00+02:00
2024-02-28T19:16:47+01:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Rencontres_Mohamed1.JPG" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>, dans la salle <em>Imago Mundi</em> du lycée Pierre d'Ailly, jeudi 12 mai 2022.</p>
<p><strong>La 10e édition des <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2022/04/15/10e-%C3%A9dition-exceptionnelle-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB%2C-jeudi-12-mai-2022-%3A%C2%ABDans-le-Labyrinthe-du-Roman%C2%BB-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Mohamed-Mbougar-SARR%2C-%C3%A9crivain%2C-laur%C3%A9at-du-Prix-Goncourt-2021."><em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></a> a été à nouveau un grand succès. </strong> <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> a su nous parler de son beau roman, avec passion et brio. Qu'il en soit vivement remercié !</p>
<p>Je remercie <strong>Madame Bourrelier</strong>, proviseur du lycée Pierre d'Ailly, qui a permis ces «Rencontres» et en a présenté la 10e édition. Merci également à tous les participants, aux nombreuse personnalités, qui nous ont fait l'honneur et le plaisir de leur présence : <strong>M. Pierre Vatin</strong> (député de la 5ᵉ circonscription de l'Oise), <strong>M. Raphaël Muller</strong> (recteur de l'académie d'Amiens), <strong>Mme Emmanuelle Compagnon</strong> (directrice académique des services départementaux de l'Éducation nationale de l'Oise), <strong>M. Paul Raucy</strong> (inspecteur général de l'Éducation nationale, retraité), <strong>Mme Sophie Schwarz</strong> (première adjointe au maire de Compiègne), <strong>M. Antoine Torrens</strong> (directeur des bibliothèques de Compiègne) ; merci à mes collègues et aux élèves et étudiants présents.</p>
<p>Merci enfin à <strong>Axelle D.</strong>, HK, pour ses belles photos !</p>
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<p><strong>EXORDE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed4_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mme Évelyne Bourrelier</strong>, proviseur, présentant la 10e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed6_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>M. Raphaël Muller</strong>, recteur de l'Académie d'Amiens, réagit aux propos de Mme Bourrelier et se réjouit à son tour de cette nouvelle édition des <em>Rencontres</em> consacrée à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed25_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mme le Proviseur</strong>, <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>, Reynald André Chalard et <strong>M. le Recteur</strong>.</p>
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<p><strong>PARMI LES PARTICIPANTS</strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed7_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mme Emmanuelle Compagnon</strong>, directrice académique des services départementaux de l'Éducation nationale de l'Oise.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed8_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>M. Pierre Vatin</strong>, député de la 5ᵉ circonscription de l'Oise.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed9_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>M. Antoine Torrens</strong>, directeur des bibliothèques de Compiègne.</p>
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<p><strong>CONFÉRENCE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed5_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong></p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed26_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed3_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> et Reynald André Chalard</p>
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<p><strong>Pour introduire la conférence</strong> <em>(discours de présentation de Reynald André Chalard)</em> :</p>
<p>Monsieur le Député, Monsieur le Recteur, Madame la Directrice Académique des Services Départementaux de l’Éducation nationale, Monsieur l’Inspecteur général, Madame la Première adjointe au maire de Compiègne, Monsieur le Directeur des bibliothèques de Compiègne, Madame le Proviseur, chers collègues et amis, très chers Étudiants des Classes Préparatoires littéraires du lycée Pierre d’Ailly,</p>
<p>Nous voilà à nouveau réunis pour <strong>la 10e édition des « Rencontres de Pierre d’Ailly »</strong>. Elle nous vaut la présence tant attendue de <strong>Mohamed Mbougar Sarr, écrivain, lauréat du Prix Goncourt 2021</strong>, qui nous a fait l’honneur et l’amitié d'accepter notre invitation.</p>
<p>Je tiens à rappeler que ces « Rencontres » <em>ont pour vocation d’engager un débat fécond entre les étudiants de nos classes préparatoires littéraires et un écrivain ou un critique, un poète, un philosophe, un éditeur, un homme ou une femme de culture. Les enjeux de ces « conférences » tournent autour de la littérature, de <strong>l’expérience esthétique et éthique</strong> qu’elle nous propose, de ce qu’elle nous donne à penser de notre rapport au monde - de nos «différents modes d'existence» (E. Souriau) - , des problématiques qu’elle permet de croiser, au carrefour de la philosophie, de l’histoire et plus largement des sciences humaines. Chaque conférence est précisément articulée au cours de Lettres en Hypokhâgne, qu'elle prolonge par un dialogue vivant</em>. (Page à consulter sur ce blogue : <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?pages/Les-Rencontres-de-Pierre-d-Ailly">LES RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</a>).</p>
<p>Ce qui est en effet en jeu ici – et nous allons le voir tout au long de la conférence -, c’est le présupposé – voulu, choisi - qui guide l’étude de la littérature menée avec nos étudiants et qui relève bien de <strong><em>l’expérience esthétique</em> et <em>éthique</em></strong> de l’<em>objet littéraire</em>, <strong>le texte et l’œuvre</strong>, auxquels tout sujet lecteur, conscient de sa démarche intellectuelle, est sommé de <em>répondre</em>, aussi bien par un commentaire, - d’abord <em>naïf</em>, puis <em>réfléchi</em> voire <em>savant</em> - que par une attitude, <em>un positionnement éthique</em> qui questionne des problèmes existentiels de toutes natures, qu’ils soient individuels ou collectifs.</p>
<p>Ce double parti pris, qui nous confronte aux <em>mots</em> et aux <em>choses</em>, nous a conduits à écouter, en 2013, et pour la toute première édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, <strong>Michel Crépu</strong>, alors directeur de la <em>Revue des Deux Mondes</em> – et aujourd’hui directeur de la <em>Nouvelle Revue Française</em>. Nous demandions ainsi à l’écrivain Michel Crépu de nous expliquer comment et pourquoi <em>La Condition numérique</em>, titre d’un ouvrage qu’il venait d’éreinter dans l’un de ses éditoriaux, était pour lui une « condition inhumaine ». Il avait alors courageusement confronté son expérience d’écrivain – et surtout de lecteur – aux grandes notions qui, de l’Antiquité à nos jours, ont fondé notre culture : l’ « otium », bien sûr, - le loisir studieux, mot latin dont le pendant grec « scholè » résonne mieux à nos oreilles -, mais aussi l’humanisme des « humaniores litterae », les « lettres qui rendent plus humains », selon l’expression consacrée, notions et concepts qu’il fallait passer au crible des conséquences de la révolution numérique pour savoir ce qu’il pourrait advenir du livre, de nos pratiques de lecture habituelles héritées d’une longue tradition de méditation spirituelle. S’ensuivit un débat passionnant, dont on retrouve quelques traces sur <em>Le Blogue des Lettres en Hypokhâgne</em> (à partir du <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/05/11/Revue-des-Deux-Mondes-%3A-Un-exercice-de-lecture-de-Michel-Cr%C3%A9pu-propos%C3%A9-aux-HK-%21">11 mai 2013</a> et aussi du <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/10/12/Rencontre-exceptionnelle-avec-Michel-Cr%C3%A9pu%2C-directeur-de-la-grande-Revue-des-Deux-Mondes-et-%C3%A9crivain%2C-mardi-19-novembre-2013-au-lyc%C3%A9e-Pierre-d-Ailly-%21-Quelques-textes-pour-nourrir-la-r%C3%A9flexion-et-le-d%C3%A9bat-sur-le-num%C3%A9rique...">20 octobre de la même année</a> ; cf. enfin le billet relatif à la <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2013/11/25/Revue-des-Deux-Monde-%3A-Michel-Cr%C3%A9pu%2C-Du-truc.-Aux-%C3%A9l%C3%A8ves-du-lyc%C3%A9e-Pierre-d%E2%80%99Ailly-de-Compi%C3%A8gne%2C-en-souvenir-d%E2%80%99une-belle-rencontre.">1re édition des <em>Rencontres</em>, avec Michel Crépu</a>), débat auquel d’ailleurs notre invité avait participé – on peut toujours lire ses brillantes interventions aux jours indiqués.</p>
<p>En réalité, le fond de ce débat n’a cessé de nous accompagner depuis, que ce soit avec la conférence de <strong>Benoît Chantre</strong>, en 2015, <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2015/11/27/3e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BBConf%C3%A9rence-de-Beno%C3%AEt-Chantre-sur-l-anthropologue-Ren%C3%A9-Girard.-%C2%AB-Du-d%C3%A9sir-mim%C3%A9tique-%C3%A0-l%E2%80%99apologie-du-christianisme.-%C2%BB">sur l’anthropologue René Girard et sa lecture des <em>Pensées</em> de Pascal</a>, celle de <strong>Béatrice Didier</strong> <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2017/12/06/La-5e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-jeudi-30-novembre-2017-%3A-%C2%ABChateaubriand%2C-po%C3%A8te-du-souvenir%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-B%C3%A9atrice-Didier%2C-critique-litt%C3%A9raire%2C-%C3%A9ditrice%2C-professeur-%C3%A9m%C3%A9rite-%C3%A0-l-%C3%89cole-normale-sup%C3%A9rieure-de-Paris.">sur Chateaubriand</a>, en 2017, celle de <strong>Luc Fraisse</strong> <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/12/06/La-7e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-26-novembre-2019-sur-Proust-%3A-%C2%AB-%C3%80-la-recherche-du-temps-perdu%C2%BB%2C-un-roman-philosophique-Conf%C3%A9rence-de-Luc-Fraisse%2C-professeur-de-Litt%C3%A9rature-fran%C3%A7aise-%C3%A0-l-Universit%C3%A9-de-Strasbourg.">sur Proust</a>, en 2019 ou plus récemment celle de <strong>Patrick Dandrey</strong> <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2021/12/09/La-9e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-23-novembre-2021-%3A-%C2%AB-%C2%ABLa-Fontaine-fabuliste-ou-les-noces-de-Morale-et-Po%C3%A9sie%C2%BB-%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Patrick-Dandrey%2C-professeur-%C3%A9m%C3%A9rite-de-litt%C3%A9rature-fran%C3%A7aise-du-XVIIe-si%C3%A8cle-%C3%A0-la-So">sur les Fables de La Fontaine</a>, dont la puissance littéraire, <em>esthétique</em> et <em>éthique</em>, ne peut manquer de nous faire réfléchir sur ce que le philosophe Michel Foucault appelait la « stylistique de l’existence ».</p>
<p>Ce débat, nous l’avons également mené avec <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> en <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2016/12/05/La-4e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-29-novembre-2016-%3A-%C2%ABLa-Litt%C3%A9rature-et-le-Mal%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Mohamed-Mbougar-Sarr%2C-%C3%A9crivain%2C-laur%C3%A9at-du-prix-Ahmadou-Kourouma-2015-pour-son-roman-%C2%ABTerre-Ceinte%C2%BB.">novembre 2016</a>, puisque nous l’avions reçu alors pour son premier roman, <em>Terre ceinte</em>, roman prometteur et déjà récompensé par l’obtention du prestigieux prix Amadhou Kourouma. Il s’agissait - pour nous, en Hypokhâgne -, en contrepoint de l’étude des <em>Maximes</em> de La Rochefoucauld et des <em>Diaboliques</em> de Barbey d’Aurevilly, de réfléchir à la problématique de la littérature et du mal, inspirée par Georges bataille. Déjà en 2016, nous n’accueillions pas seulement un jeune écrivain mais aussi, et surtout – à cause de la joie et de l’amitié qui nous unissent à Mohamed – un ancien brillant élève de classe préparatoire littéraire, qui avait fait chez nous son Hypokhâgne, puis deux années de Khâgne, la première avec la spécialité Histoire-Géographie, la seconde en Lettres modernes. <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> est né au Sénégal, il a fait ses études secondaires au Prytanée militaire de Saint-Louis, puis c’est en France que ses études secondaires ont commencé, en classes préparatoires littéraires au lycée Pierre d’Ailly, ensuite à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, à Paris, où il a entamé une thèse que, si j’ai bien compris, il ne mènera pas à son terme (<em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>: la thèse est « un exil de l’éden de l’écrivain », p. 24-25). Depuis 2016, trois autres livres ont paru : <em>Silence du chœur</em> (2017), éditions Présence africaine ; <em>De purs hommes</em> (2018), éditions Philippe Rey ; et <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, éditions Philippe Rey / Jimsaan, qui vient de recevoir le Prix Goncourt. Mais avant d’en venir à ce passionnant roman, de montrer ce qui peut le différencier des précédents, et avant donc d’introduire la conférence qui nous entraînera <strong>« Dans le Labyrinthe du Roman »</strong>, je souhaiterais faire, « à sauts et à gambades », le portrait intellectuel et moral de l’étudiant en Lettres que fut <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>.</p>
<p>Je passerai vite sur la discrétion, la courtoisie et la délicatesse de ses manières, dont nous nous souvenons encore, pour aller à l’essentiel : <strong>la volonté de savoir</strong>, l<strong>a curiosité principielle</strong> pour tout ce qui relève de la culture et <strong>la passion de la lecture</strong>. Ces trois moteurs de l’esprit s’articulent en réalité entre eux, ils sont indissociables : «l’allégresse est savoir », écrit le grand Rilke dans l'un des <em>Sonnets à Orphée</em>, mais cette proposition est réversible : <strong><em>le savoir est allégresse</em></strong>, car même s’il peut être amer et difficile parfois, il est la condition <em>sine qua non</em> de la compréhension de soi et du monde, que seule rend possible <strong>la « curiositas » humaniste</strong>, dans ses exigences pluridisciplinaires. <strong>Mohamed</strong> pensait et travaillait ainsi dans toutes les disciplines, et chez lui, toutes les disciplines se rejoignaient avec bonheur dans <strong>l’inquiétude salutaire de la passion de la lecture</strong>. Car pour <em>savoir</em>, il faut non seulement <em>écouter</em> et <em>s’approprier la parole des professeurs</em> -oserai-je dire des Maîtres ? -, mais il faut aussi <em>lire</em>, mettre à l’épreuve cette parole par l’usage critique de sa propre pensée et risquer la solitude de la « rencontre » avec un auteur, cette autre « autorité » qu’il faut humblement accueillir pour pouvoir tirer les bénéfices intellectuels du dialogue qu’il nous propose. <strong>Mohamed</strong> était ce Khâgneux-là qui, sans se dérober aux contraintes de la préparation au concours, s’intéressait moins aux notes qu’aux disciplines qui stimulaient sa réflexion. <strong>C’est cela que permet la classe préparatoire littéraire, c’est cela qu’elle a d’unique et d’irremplaçable</strong>. Certes, la prépa ne fabrique ni le talent ni le génie – cela se saurait -, mais elle peut les accompagner, les stimuler et donner à ceux qui ont toutes sortes d’aptitudes, des plus modestes aux plus prometteuses, une <strong>« formation »</strong> (ce mot importe) qui <em>augmente</em> leurs capacités. Nous ne le disons peut-être pas assez : nous pouvons être fiers de ce travail accompli dans toutes les disciplines avec nos étudiants qui, s’ils n’intègrent pas les Écoles Normales Supérieures (beaucoup d’appelés, peu d’élus, refrain connu), réussissent souvent des concours plus accessibles (de journalisme, de sciences politiques), et souvent jusqu’au CAPES et à l’Agrégation. Cela nous rend fiers d’eux, comme nous sommes fiers de toi, mon cher Mohamed, fiers de ton parcours et heureux de voir et de lire combien cette période de ta vie estudiantine a compté pour toi. Cela s’entend dans les entretiens que tu donnes ici et là, et cela se lit dans tes livres, et en particulier dans le dernier, <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, qui est <strong>une vraie fête de la littérature</strong>. Et ce que je voudrais montrer, c’est que d’une certaine manière, il y a continuité entre ta pratique de lecteur et ta pratique d’écrivain, contre l’air du temps qui réduit l’écriture à une technique que l’on pourrait apprendre dans un atelier conçu à cet effet. Si tous les lecteurs ne deviennent pas écrivains, il ne saurait y avoir d’écrivains – de <em>bons</em> écrivains – qui ne soient d’abord de vrais lecteurs. Mais que lire, et comment lire ? Voilà des questions fondamentales auxquelles l’HK et la KH répondent sans faillir !</p>
<p>Venons-en maintenant à ton livre et au thème que je t’ai proposé pour cette conférence. A la parution de <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, la critique avait unanimement salué une œuvre qui célébrait la littérature et la langue littéraire. Cet enthousiasme, mâtiné d’étonnement, laissait entendre que cela faisait longtemps qu’un tel roman n’avait pas été publié. L’autofiction et le récit de soi et de ses névroses semblent en effet avoir occupé durablement le champ littéraire (il n'est évidemment pas question d'ignorer les oeuvres importantes de ce genre - de Serge Doubrovsky à Annie Ernaux - mais de déplorer son malheureux destin épigonal, qui en fait un des horizons majeurs de la littérature contemporaine). Et quand la production littéraire narrative ne renonce pas à la fiction, elle a tendance à pasticher le roman balzacien ou anglo-américain, avec le désir à peine dissimulé de se transformer le plus rapidement possible en un scénario, dont on fera un film certainement plus intéressant que le livre qui l’a inspiré (les exemples sont nombreux...) : dans ce cas, à quoi bon avoir un <em>style</em>, puisque ce qui est écrit n’a de valeur que s’il est transposable en images. Le propre d’un style n’est pas seulement de distinguer celui qui écrit, mais aussi ce pour ou contre quoi il écrit. Le style, ce n’est donc pas seulement l’homme, mais <em>l’autre de l’homme</em>, qui est aussi <em>l’autre de la littérature</em>. C’est pourquoi une œuvre, une œuvre puissante et vraie, porte en elle d’autres œuvres, avec lesquelles elle peut avoir des rapports de nature très variée : comme l’a montré Gérard Genette, l’œuvre littéraire qui nous requiert est un véritable <em>palimpseste</em>, qui cite, fait des allusions à..., réécrit – par le pastiche ou la parodie – d’autres œuvres dont elle-même se nourrit. D’où ce regard parfois réflexif ou <em>métatextuel</em> de la parole littéraire, qui en vient à se prendre pour objet de narration. Or qu’est-ce que <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> ? C’est une œuvre qui raconte l’histoire, mythique, puis familiale -mais finalement les deux se rejoignent (dans l’Antiquité déjà, les grands mythes sont des histoires de famille déguisées...) – d’une œuvre, <em>Le Labyrinthe de l’inhumain</em>, de T.C. Elimane, dont le caractère énigmatique éblouit et inquiète le narrateur-héros du roman, le jeune écrivain sénégalais Diégane Latyr Faye. Celui-ci veut connaître l’origine du livre, le mystère du silence et de la disparition de son auteur, et probablement les raisons de sa fascination – à lui Diégane -pour ce véritable <em>mystère dans les Lettres</em>. Voilà qui installe d’emblée, <strong>comme un thème et comme une structure, le dispositif du labyrinthe</strong>, car d’un livre dont on ne connaît guère que l’incipit – ou quelques résumés plus ou moins justes proposés par des personnages plus ou moins avisés – on découvrira chemin faisant les multiples voies qui permettent d’en cerner le sens, à travers des discours et des lieux dans lesquels l’auteur veut que le lecteur se perde un peu… Métaphorisé par l’image du « cercle de solitude » (cette expression revient à la page 43), le labyrinthe ne sera donc pas seulement le mot-titre emblématique du livre mystérieux d’Elimane (<em>Le Labyrinthe de l'inhumain</em>), il symbolisera simultanément l’écriture du roman et sa lecture, sur le mode paradoxal de la docte ignorance, qui affirme ironiquement, dès les premières lignes, qu’ « on ne peut rien savoir » sur l’âme humaine, mais qu'il est besoin des quatre cent quarante pages suivantes pour le démontrer. Le lecteur – c’est sa seule certitude – pourra donc s’y perdre, en compagnie de l’écrivain, dont le sort, nous dit le narrateur, est strictement identique. Le pacte est conclu ! Et le lecteur semble convié, dans un tel élan, à penser avec Sartre, qui le disait à propos de Faulkner, qu’«une technique romanesque renvoie toujours à la métaphysique du romancier», (cité p. 49), (cf. <em>Situations I</em>, coll. Idées/Gallimard, p. 86.). Car même si le mystère littéraire se désépaissit ici, fait, là, l’objet d’une forme d’ironie narrative, il dépasse toujours la somme de ses explications possibles.</p>
<p><strong>Et cela me paraît impliquer une conception du roman que la littérature contemporaine a volontairement délaissée</strong>, au profit d’un <em>réalisme narcissique</em> que j’aurais tendance – pour ma part – à juger plutôt plat et ennuyeux (le cours nuance, bien entendu, des positions qui sont ici volontairement tranchées). Je n'en retiens ici que <strong>deux aspects, solidaires l’un de l’autre d’ailleurs</strong>, et qui pourront être discutés tout à l’heure. Mais ils me paraissent traduire une lacune française, que l’on ne retrouvera pas en revanche – ou dans une moindre mesure – dans la littérature étrangère ou dans une littérature française qui puise dans la littérature étrangère. 1) <strong>Tout d’abord, précisément <em>un certain rapport à l’expérience de la transcendance</em> – authentique ou chimérique –</strong> que font certains de tes personnages, mon cher Mohamed, à travers le mystère d’Elimane. Cela t’amène à évoquer les religions, la spiritualité voire la mystique – quand bien même l’ironie en accompagne la méditation. Cela te fait employer des <em>« mots en trop »</em>, si l’on en croit un dictionnaire récent intitulé, précisément, <em>Dictionnaire des mots en trop</em> (éditions Thierry Marchaisse, 2017), comme « absolu » et « âme », que ledit dictionnaire estime devoir bannir au nom de l’esprit cartésien, et au motif qu’ils véhiculeraient des idées creuses voire des illusions. C’est pourtant sacrifier l’intelligence d’<strong>une expérience fondamentale qui</strong>, de Saint-Augustin à François Cheng – beau poète français d’origine chinoise, qui a publié en 2016 une manière de traité intitulé <em>De l’âme</em> (éditions Albin Michel, 2016) -, en passant par Marcile Ficin, Montaigne, Pascal, Rousseau, Hugo et les Romantiques, Jung, Péguy, Jouve et Philippe Jaccottet..., <strong>est au cœur de la poésie</strong> ! On sait tout le profit que tu en tires, et combien tu donnes raison – pour le meilleur et pour le pire de l’humanité – à Paul Valéry lui-même qui, dans sa « Petite lettre sur les mythes » affirme : « Que serions-nous sans le secours de ce qui n’existe pas… » (<em>Oeuvres</em>, coll. « Bibliothèque de la Pléiade», p. 961 et sqq). Je pense à la belle et terrifiante scène – donc sacrée ! – (p. 39) qui décrit l’introspection d’une <em>âme</em>– celle de Diégane - invitée à entrer dans une autre <em>âme</em>, celle de Siga D., après que l’union des corps a été rendue impossible. Il est évident qu’ici, nous sommes au plus haut de ce que doit être la tâche littéraire, selon Borgès, laquelle est « mystérieuse, car si elle ne l’était pas, ce serait un simple jeu sur les mots. » (entretien, Pléiade, p. 1255), car les mots ne disent pas tout... 2) <strong>Le deuxième point, très lié au précédent, me semble correspondre à la critique que tu fais d’<em>un certain réalisme</em></strong> : p. 57, les jeunes écrivains du « Ghetto » pourfendent leurs aînés ainsi : « nous incriminions leur réalisme exsangue qui se contentait de reproduire le monde sans l’interpréter ou le recréer, et nous vomissions leur égoïsme dissimulé sous le droit à la liberté de l’artiste, et nous fauchions à larges andains les têtes de nos prédécesseurs qui avaient écrit beaucoup de romans injuriant la littérature par leur banalité, et nous prononcions des sentences de mort contre ceux qui avaient renoncé à se demander ensemble ce que signifiait être dans leur situation littéraire, impuissants à créer les conditions pour des esthétiques novatrices dans nos textes, trop paresseux pour penser et se penser par la littérature, trop asservis aux prix littéraires, aux flatteries, aux dîners mondains, aux festivals, aux chèques, aux circuits pour chercher à grimer ou gripper la littérature convenable …». Il y a là, me semble-t-il, <em>une esquisse d’art poétique</em>, par satire interposée, qui cherche à s’appuyer sur <em>une approche plus négative de la littérature</em> – presque mystique – et que l’on pourrait relier à ce que ton personnage Stanislas, traducteur de son état, dit du rapport que celle-ci entretient avec <em>le rien</em> – dont le sens est évidemment complexe -, mais qui par ses allusions flaubertiennes peut s’entendre - au moins dans un premier temps - comme un renoncement aux facilités du message dont certains auteurs voudraient que l’œuvre littéraire soit <em>porteuse</em> : différence avec les trois autres romans, qui <em>portaient</em> successivement sur le terrorisme, les migrants et l’homosexualité ? Volonté, pourrait-on dire, comme chez Flaubert, de trouver un <em>style</em> – une <em>écriture</em> ? – qui fasse <strong>se rejoindre sans opposition le fond et la forme</strong> (transposition littéraire de l'opposition métaphysique de l'esprit et de la matière, de l'âme et du corps ?). Un aphorisme de Cioran, publié dans un récent inédit, me paraît éclairer la conception de certains de tes personnages : « L’imbécile fonde son existence sur ce qui est. Il n’a pas découvert le possible, cette fenêtre sur le Rien… » <em>Fenêtre sur le Rien</em>, Gallimard, coll. « Arcades », 2019, p. 13. C'est une vaste question, passionnante et centrale, que nous n'aurons pas vraiment le temps de bien cerner aujourd'hui. Mais peu importe, posons-la quand même !</p>
<p>Il reste que ton auteur mythique, T.C. Elimane est inspiré d’un véritable auteur, Yambo Ouologem, écrivain malien, qui obtint en 1968 le prix Renaudot pour <em>Le Devoir de violence</em>, roman qui lui valut également une accusation de plagiat, tout comme Elimane, dont on verra à quel point son livre synthétise une douleur inexorable, une douleur provoquée par un déchirement culturel, sentimental, affectif, frappé au coin de la double appartenance – et il y a dans son histoire une dualité qui est au cœur d’une gémellité impossible -inscrite pourtant dans sa filiation – qui l’oblige au silence, le contraint à la fuite (le roman remonte le temps et permet de comprendre la fabrication du mythe, au travers de révélations terrifiantes - celles de Siga D. et de son père notamment -, dans un contexte colonial qui exacerbe les tensions).
Je vais donc maintenant te demander, mon cher Mohamed, de <strong>nous instruire sur ce labyrinthe</strong>, dont la polymorphie est redoutable : labyrinthe du roman, labyrinthe de l’inhumain, « labyrinthe de ma vie », « métaphore facile mais juste », fais-tu dire à Siga D. (p. 318) : la lettre et l’esprit semblent se rejoindre dans cette forme énigmatique. Comment est-elle devenue une nécessité pour questionner l'humain, en cherchant à résoudre l'énigme fascinante de son épiphanie, l'inhumain, avers et revers d'une même médaille au centre de cette quête littéraire : «le lieu du plus profond mal conserve toujours un fragment de la vérité» (p. 420)?</p>
<p>C’est avec un immense plaisir que nous allons maintenant t’écouter. Mais avant de te donner la parole, je voulais te redire la joie profonde qui est la nôtre de t’accueillir à nouveau dans ton ancien lycée : au nom de nous tous, <strong>cher Mohamed</strong>, je te remercie très amicalement !</p>
<p>R.A.C.</p>
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<p><strong>LECTURES</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed10_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Fanny G.</strong>, HK, lisant un extrait de <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> : «La littérature m’apparut sous les traits d’une femme à la beauté terrifiante. Je lui dis dans un bégaiement que je la cherchais. Elle rit avec cruauté et dit qu’elle n’appartenait à personne. (...) Je t’attraperai, je t’assiérai sur mes genoux, je t’obligerai à me regarder dans les yeux, je serai écrivain ! », p. 54.</p>
<p><strong><em>« Métamorphose ontologique »</em></strong> (p. 86). Question posée à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> sur ce passage (p. 53-55) : la double référence à Pascal et à Rimbaud unit, avec dérision et profondeur, <em>métaphysique et vocation poétique</em>, en les associant au mythe de Rimbaud. Quelle est pour toi l’importance de ce mythe, pourquoi y tiens-tu autant ? Conception sacrale de la littérature : ouverture, horizon ou impasse ? Le grand poète Yves Bonnefoy a publié en 2009 un livre intitulé <em>Notre besoin de Rimbaud</em>, où il dit ceci : « Lire un grand poète, ce n’est pas décider qu’il est grand (…), c’est lui demander de nous aider. C’est attendre de sa radicalité qu’elle nous guide, tant soit peu, vers le sérieux dont on est peut-être capable. » p. 11. Qu’en penses-tu ?</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed11_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Barbara LG</strong>., HK, lisant un extrait de <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> : « Tu commences à comprendre où je veux en venir, Siga. Je te le redis : tu étais dans le ventre de ta mère, j’ai posé ma main sur ce ventre, il y a eu un grand éclair dans ma tête. Au milieu de cette lumière j’ai vu ton visage entre les leurs : celui d’Elimane et celui d’Assane. Ceux qui sont partis. J’ai su avant ta naissance que tu les suivrais. Que ton destin passerait loin de notre culture. (...)», p. 181-182.</p>
<p><strong><em>Le labyrinthe des terribles révélations du père de Siga D.</em></strong> Question posée à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> sur ce passage (p. 181-182) : Les révélations d’Ousseynou Koumakh sont terrifiantes : la gémellité de son père et de son oncle symbolise sa double culture. Mais les liens du sang revendiqués par Ousseynou semblent décrits comme une malédiction : quel rôle joue-t-elle dans la vocation de l’écrivain ? cf. la révélation de Mossane, dans un monologue intérieur saisissant (presque du Claude Simon / Faulkner : question importante de la phrase française - dans sa constitution grammaticale et ses effets stylistiques - dans ton roman !). Mais le drame d’Elimane n’est pas que familial, il est social, historique (cf. p. 235-236).</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed12_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Émeline P.</strong>, HK, lisant un extrait de <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> : «Mais pourquoi continuer, tenter d’écrire après des millénaires de livres comme Le Labyrinthe de l’inhumain, qui donnaient l’impression que plus rien n’était à ajouter ? Nous n’écrivions ni pour le romantisme de la vie d’écrivain – il s’est caricaturé –, ni pour l’argent – ce serait suicidaire –, ni pour la gloire – valeur démodée, à laquelle l’époque préfère la célébrité –, ni pour le futur – il n’avait rien demandé –, ni pour transformer le monde – ce n’est pas le monde qu’il faut transformer –, ni pour changer la vie – elle ne change jamais –, pas pour l’engagement – laissons ça aux écrivains héroïques –, non plus que nous ne célébrions l’art gratuit – qui est une illusion puisque l’art se paie toujours. Alors pour quelle raison ? On ne savait pas ; et là était peut-être notre réponse : nous écrivions parce que nous ne savions rien (...).», p. 56.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed16_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Océane A</strong>., HK, lisant un extrait de <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> : «Ce qu’on cherche, mon vieux Journal, n’est peut-être jamais la vérité comme révélation, mais la vérité comme possibilité, lueur au fond de la mine où nous creusons depuis toujours sans lampe frontale. Ce que je poursuis, c’est l’intensité d’un rêve, le feu d’une illusion, la passion du possible. Qu’y a-t-il au bout de la mine ? Encore de la mine : la gigantesque muraille de houille, et notre hache, et nos cognées, et notre han. Voilà l’or.», p. 116.</p>
<p><strong><em>Littérature et non-savoir / « La passion du possible »</em></strong>. Question posée à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> sur les deux derniers passages : ces extraits questionnent le sens de la poursuite de l’œuvre. Art poétique négatif : l’écrivain semble menacé par l’opposition baudelairienne action / rêve et par l’épuisement de ce dernier. Son seul moteur, « la passion du possible » : comment définirais-tu ce parti pris plutôt hugolien ?</p>
<p><strong>Autres questions</strong> :</p>
<p>1) <strong><em>La Toile de l’Araignée-mère</em></strong>. Le personnage de Siga D. Elle incarne le conflit entre la littérature et la vie : elle semble être du côté du corps (<em>sexualité</em> et <em>savoir du monde</em>, même dénominateur commun, <em>la soif</em> // sexualité d’Elimane qui fréquente un temps des cercles libertins, p. 230). Ce qui l’intéresse chez Elimane, ce n’est pas l’écrivain, c’est l’homme (p. 215), son silence, pas son silence littéraire mais son silence familial, « envers sa mère" notamment, à qui il n’a plus jamais donné de nouvelles après son départ pour la France. Son œuvre maîtresse, <em>Élégie pour nuit noire</em>, semble être une véritable catharsis. La métaphore de l’araignée-mère invite d’ailleurs à une interprétation psychanalytique façon Karl Abraham (symbole de la mère méchante, virile et dure)… Qu'en penses-tu ?</p>
<p>2) Dans un de ses <em>Carnets</em>, <strong>Albert Camus affirme qu’il <em>préfère les hommes engagés aux livres engagés</em></strong>. Est-ce que cette pensée te paraît éclairer le parcours odysséen d’Elimane jusqu’en Argentine, pour y retrouver le nazi Engelmann ?</p>
<p>3) Au-delà de Flaubert et du XIXe siècle, dans sa confrontation critique de la littérature africaine avec ce que Milan Kundera appelle le grand «roman européen », dans <em>Les Testaments trahis</em> (Folio, p. 41 et sqq.), <strong><em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> arpente toute</strong> <strong>une géographie littéraire</strong>, dont les principaux points cardinaux sont Borges, Sabato, Kundera, Gombrowicz et Bolaño. Quelle dette as-tu envers ces auteurs ? Pourquoi leur éclairage sur Elimane t’a-t-il paru important ?</p>
<p>4) <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> : « Tout est clair pour toi : la composition formelle du <em>Labyrinthe de l’inhumain</em>, les plagiats, les emprunts, tout ça ne devait pas obscurcir la vérité du cœur. Et la vérité du cœur de Madag, te dis-tu, la vérité de son livre, est l’histoire de l’ultime sacrifice d’un homme : pour atteindre à l’absolu, il tue sa mémoire. Mais il ne suffit pas de tuer pour détruire ; et cet homme, qu’il s’agisse du Roi sanguinaire du roman ou de Madag, avait oublié ceci : les âmes qui prétendent le fuir courent en réalité derrière le passé et finissent, un jour ou l’autre, par le rattraper dans leur futur. Le passé a du temps ; il attend toujours avec patience au carrefour de l’avenir ; et c’est là qu’il ouvre à l’homme qui pensait s’en être évadé sa vraie prison à cinq cellules : l’immortalité des disparus, la permanence de l’oublié, le destin d’être coupable, la compagnie de la solitude, la malédiction salutaire de l’amour. Madag l’a compris après toutes ces années de fuite. Il a compris que <em>Le Labyrinthe de l’inhumain</em> non seulement ne mettait pas fin au passé, mais qu’il l’y ramenait encore. Il est donc revenu ici.
C’est du moins l’interprétation que tu as faite. » p. 451.</p>
<p><strong><em>Ce que </em>Le Labyrinthe<em> peut vouloir dire</em></strong>… Question posée à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>sur ce passage (p. 450-451) : <strong>Besoin du sens, besoin d'interpréter</strong>. Ce texte semble tenir compte du double écueil relevé par Pascal dans les <em>Pensées</em>, au sujet de la lecture des textes sacrés : 1. Prendre tout littéralement ; 2. Prendre tout spirituellement (édition de Philippe Sellier, fr 284) : le mythe (cf. Mircea Eliade) aurait paradoxalement un sens littéral ? Ses « figures » ne seraient pas si éloignées de nous ? Dans l’<em>Épilogue</em>, le mythe même épuisé – détruit ? - demeure par les questions qu’il pose et auxquelles il n’ y a d’autres réponses que celles toujours plus énigmatiques du labyrinthe. Ton « écrire, ne pas écrire » (p. 457), c’est un peu ton <em>« to be or not to be »</em> ?</p>
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<p><strong>ÉCHANGES AVEC LA SALLE</strong></p>
<p><strong>Nos élèves des classes préparatoires littéraires</strong> posent des questions à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed19_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Alexis F.</strong>, HK.</p>
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<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed18_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Tom M.</strong>, KH.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed17_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Louise M.</strong>, HK.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed15_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Fanny G.</strong>, HK.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed14_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Armand B</strong>., KH.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed13_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Louis L.</strong>, KH.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed20_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Marie-France U.</strong>, KH.</p>
<hr />
<p><strong>REMERCIEMENTS ET REMISE DES CADEAUX</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed22_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed21_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Barbara LG.</strong> et <strong>Émeline P.</strong>, HK, offrant à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> <em>La Divine Comédie</em>, de Dante, dans la «Bibliothèque de la Pléiade», ainsi qu'un bouquet de roses pour le remercier de sa venue à Compiègne.</p>
<hr />
<p><strong>APRÈS LA CONFÉRENCE</strong></p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed23_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Cinq Hypokhâgneuses heureuses : <strong>Barbara LG., Louise M., Océane A., Maelwenn D.</strong>, et <strong>Charlotte V.</strong></p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Rencontres_Mohamed24_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Louise M.</strong>, avec <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong>.</p>
<hr />
<p><strong>REGARDER ÉCOUTER LIRE</strong> :</p>
<p>J'ai demandé à <strong>Mohamed Mbougar Sarr</strong> quel tableau et quelle musique pourraient donner une <em>image</em> de ce qu'il cherche (ou aime) en littérature, que cela soit ou non en rapport avec le roman. Voici les références qu'il a bien voulu m'indiquer (Van Gogh, Super Diamono et Coltrane) :</p>
<p><strong>ARTS PLASTIQUES</strong> :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/la_nuit_etoilee.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>En peinture</strong>, je choisis la célèbre <em>Nuit étoilée</em> de Van Gogh. Il me semble que ce tableau réussit à métaphoriser le mystère même de la création, qui a toujours à voir avec la nuit et avec la lumière. Les deux sont présents dans cette peinture. Les tourbillons du ciel ressemblent à des labyrinthes ; les étoiles portent autant de paroles du passé et cette dimension cosmique, loin d'être opposée à la simplicité terrestre du village, semble au contraire suggérer une réalité intégrale, plus profonde.</p>
<p><em>Commentaire de Mohamed Mbougar Sarr</em>.</p>
<p><strong>MUSIQUE</strong> :</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width="400" height="300" src="https://www.youtube.com/embed/ktE6e3-lLVs?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen title="Super Diamono MOUDJE"></iframe>
</div>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width="400" height="300" src="https://www.youtube.com/embed/ll3CMgiUPuU?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen title="John Coltrane - A Love Supreme [Full Album] (1965)"></iframe>
</div>
<p><strong>En musique</strong>, le morceau <em>Moudje</em> du groupe sénégalais Super Diamono, que j'ai beaucoup écouté pendant l'écriture, et qui est d'ailleurs cité dans le roman, me touche par sa lenteur, ses variations (qui sont aussi des réflexions) rythmiques. Mais derrière <em>Moudje</em> et le Super Diamono, il me semble qu'il y a le jazz, et qu'il y a John Coltrane, et qu'il y a <em>A love supreme</em>, album que j'ai toujours écouté comme une grande prière lancée à l'inconnu -ce qui pourrait être une définition spirituelle du roman.</p>
<p><em>Commentaire de Mohamed Mbougar Sarr</em>.</p>
<hr />
<p>Cette <strong>10e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em></strong> s'est tenue dans <a href="https://pierre-dailly-compiegne.ac-amiens.fr/add/prepa_litteraire/accueil.html">notre beau lycée</a>, véritable <em>locus amoenus</em>, lieu agréable et charmant, paysage idéal propice à la transmission des savoirs et à l'écoute d'une parole, littéraire, capable de s'émanciper du bruit et du bavardage contemporains.</p>
<p>Pour notre plus grand plaisir, ce jour-là, les oiseaux ont mêlé au vent leurs chants de flûte...</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width="400" height="300" src="https://www.youtube.com/embed/X7Qnk8QYPeo?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen></iframe>
</div>
<hr />
Mohamed Mbougar Sarr, Prix Goncourt 2021, fait la promotion des classes préparatoires littéraires du lycée Pierre d'Ailly, à Compiègne.
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2022-05-23T18:45:00+02:00
2022-05-23T18:45:00+02:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Mohamed_Pierre_d_Ailly_3.jpeg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Invité de la 10e édition des <em>Rencontres de Pierre d'Ailly</em>, jeudi 12 mai, <strong>Mohamed Mbougar Sarr, prix Goncourt 2021 et ancien élève en classes préparatoires littéraires de notre lycée </strong>(2009-2012, Khâgne spé. Lettres modernes)<strong></strong>, a bien voulu redire tout ce qu'il doit à cette formation, dans une vidéo réalisée par le service communication du rectorat d'Amiens, tout de suite après la conférence.</p>
<p>Belle occasion d'encourager tout lycéen motivé à faire ce choix !</p>
<p>Pour écouter, cliquer <a href="https://pierre-dailly-compiegne.ac-amiens.fr/add/prepa_litteraire/accueil.html">ici</a>.</p>
Hypokhâgneux et Khâgneux à Paris le 7 juin 2022. Au programme : le musée d'Orsay et la Comédie-Française (Salle Richelieu) : «Le Bourgeois gentilhomme», comédie-ballet de Molière, dans une mise en scène de Valérie Lesort et de Christian Hecq.
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2022-05-19T18:38:00+02:00
2023-03-22T07:58:00+01:00
Reynald André Chalard
Informations diverses
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Bourgeois_gentilhomme1.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><em>Le Bourgeois gentilhomme</em> de Molière, à la Comédie-Française, à Paris, en juin 2021. (c) CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE, COLL. COMEDIE-FRANCAISE.</p>
<hr />
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Bourgeois_gentilhomme2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>Nicolas Lormeau, Christian Hecq, Gaël Kamilindi dans <em>Le Bourgeois gentilhomme</em>. (c) CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE.</p>
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<p><strong>MARDI 7 JUIN, NOUS SERONS À NOUVEAU SOUS LE CHARME DES <em>PUISSANCES DE PARIS</em></strong> (Jules Romains)</p>
<p><strong><em>Cette sortie de fin d'année est, comme les précédentes, une fête de la culture et de l'amitié</em></strong>.</p>
<p><strong>Visite du musée d'Orsay pour les Hypokhâgneux et les Khâgneux :</strong></p>
<p><strong>PROGRAMME : Après l'impressionnisme, de Van Gogh à Bonnard. </strong></p>
<p>Pour une présentation du musée d'Orsay, <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2017/03/17/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-7-juin-2017.-Au-programme-%3A-le-Mus%C3%A9e-d-Orsay-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%28Salle-Richelieu%29-%3A-Cyrano-de-Bergerac%2C-d-Edmond-Rostand%2C-dans-une-mise-en-sc%C3%A8ne-de-Denis-Podalyd%C3%A8s.2">lire le billet du 1er juin 2017</a>.</p>
<hr />
<p>Comme en 2019 - avant la covid, «Un mal qui répand la terreur» (1)...- , nous prendrons <strong>le temps de nous promener dans Paris</strong> : quais de la Seine, Louvre, jardins du Palais-Royal, Quartier Latin... Car il importe de profiter de cette sortie pour découvrir et admirer la «poétique» de cette ville (2) - du moins de l'un ou deux de ses quartiers -, et devenir, l'espace de quelques heures, des «<strong>flâneurs des deux rives</strong>», à la manière d'Apollinaire ou de simples «<strong>piétons de Paris</strong>», comme Léon-Paul Fargue... Sur le Palais-Royal, ses jardins, ses arcades, et sur Diderot, qui fréquentait assidûment ces lieux, on peut lire <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2014/03/10/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-11-juin-2014.-Au-programme-%3A-Le-mus%C3%A9e-d-Orsay-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%21">le billet du 10 mars 2014</a>.</p>
<p>(1) La Fontaine, «Les Animaux malades de la peste», dans le deuxième recueil des <em>Fables</em>.</p>
<p>(2) Cf. Pierre Sansot, <em>Poétique de la ville</em>, Méridiens Klincksieck, 1988 (réédition récente en poche / Payot) : lire notamment «Qu'est-ce qu'aimer une ville ?», p. 239 et sqq.</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<iframe width=" 459" height="344" src="https://www.youtube.com/embed/eCivD_pqSNA?feature=oembed" frameborder="0" allowfullscreen="allowfullscreen"></iframe>
</div>
<p>Pour plus de détails sur la tradition de cette sortie, se reporter également aux billets suivants : <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2019/03/17/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-5-juin-2019.-Au-programme-%3A-le-mus%C3%A9e-d-Orsay-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%28Salle-Richelieu%29-%3A-%C2%ABElectre-/-Oreste%C2%BB%2C-d-Euripide%2C-dans-une-mise-en-sc%C3%A8ne-d-Ivo-van-Hove-.">billet du 17 mars 2019</a>, et <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2020/02/23/Hypokh%C3%A2gneux-et-Kh%C3%A2gneux-%C3%A0-Paris-le-10-juin-2020.-Au-programme-%3A-mus%C3%A9e-d-Orsay%2C-mus%C3%A9e-Guimet-et-la-Com%C3%A9die-Fran%C3%A7aise-%28Vieux-Colombier%29-%3A-%C2%ABBajazet%C2%BB%2C-de-Racine%2C-dans-une-mise-en-sc%C3%A8ne-d-%C3%89ric-Ruf.">billet du 14 mars 2020</a>.</p>
<hr />
<p><strong>Nous irons tous ensuite à la Comédie-Française (salle Richelieu) pour assister à la représentation du «Bourgeois gentilhomme», comédie-ballet de Molière, dans une mise en scène de Valérie Lesort et de Christian Hecq</strong>.</p>
<p>En juin dernier, le tandem Valérie Lesort et Christian Hecq crée un Bourgeois gentilhomme remarqué, au rythme enlevé de la musique des Balkans.</p>
<p>Les « turqueries » sont à la mode en 1670 quand Molière écrit cette comédie pour une des opulentes fêtes royales. Il excelle autant dans la représentation de cet exotisme, alors au goût du jour, que dans la caricature du bourgeois rompu à l’apprentissage des bonnes manières propres aux « gens de qualité ».</p>
<p>Le plateau entier est rendu à l’esprit fantasque de cet homme qui s’exerce avec piètre adresse à la danse et à l’escrime, s’initie à la philosophie avec la curiosité d’un enfant. Premières à le brocarder, son épouse et sa servante s’opposent à son surcroît d’autorité, surtout quand il refuse de donner la main de sa fille à Cléonte parce qu’il n’est pas gentilhomme. La raillerie est à son comble grâce à la ruse du valet qui introduit chez lui l’amoureux déguisé « en grand Turc », offrant un final d’anthologie avec la scène du Mamamouchi. Valérie Lesort et Christian Hecq s’emparent allègrement de tout ce qui nourrit l’excentricité de ce Monsieur Jourdain frénétiquement attiré par les ors royaux : « il est d’une naïveté sans bornes et cette naïveté nous touche particulièrement. Comme beaucoup d’artistes, nous travaillons avec l’enfance et Molière fait de son Bourgeois un enfant qui “veut jouer à”.»</p>
<p><strong>Comédie-ballet</strong></p>
<p>Spectacle créé le 18 juin 2021 Salle Richelieu</p>
<p>Date de création de l’œuvre : 14 octobre 1670 au Château de Chambord</p>
<p>Date de création à la Comédie-Française : 4 octobre 1680 au Théâtre de l’Hôtel Guénégaud</p>
<p>1791 représentations de l’œuvre par la Comédie-Française depuis la création dont 23 dans cette mise en scène.</p>
<p><strong>DISTRIBUTION</strong></p>
<p>Véronique Vella</p>
<p>Sylvia Bergé</p>
<p>Françoise Gillard</p>
<p>Laurent Stocker</p>
<p>Christian Hecq</p>
<p>Guillaume Gallienne</p>
<p>Didier Sandre, etc.</p>
<p><strong>ÉQUIPE ARTISTIQUE</strong></p>
<p>Mise en scène : Valérie Lesort et Christian Hecq</p>
<p>Scénographie : Éric Ruf</p>
<p>Costumes : Vanessa Sannino</p>
<p>Lumières : Pascal Laajili</p>
<p>Musiques originales et arrangements : Mich Ochowiak et Ivica Bogdanić</p>
<p>Travail chorégraphique : Rémi Boissy</p>
<p>Marionnettes : Carole Allemand et Valérie Lesort</p>
<p>Assistanat à la mise en scène : Florimond Plantier</p>
<p>Assistanat à la scénographie : Julie Camus</p>
<p>Assistanat aux costumes : Claire Fayel de l’académie de la Comédie-Française</p>
<p>Source : <a href="https://www.comedie-francaise.fr/fr/evenements/le-bourgeois-gentilhomme-eht7xy">Site de la Comédie-Française</a>.</p>
<hr />
<p><strong>Les Hypokhâgneux se procureront la pièce de Molière dans l'édition de poche suivante , à lire pour la rentrée des vacances de Pâques</strong> :</p>
<p>Molière, <em>Le Bourgeois gentilhomme</em>, Gallimard, coll. « folio / classique », édition de Georges Couton. ISBN-13 : 978-2070450008.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Bourgeois3.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<hr />
<p><em>Sortie organisée - chaque année depuis 2010 - par Mme Peiffert, professeur d'Histoire (musée : Orsay / Louvre), et M. Chalard, professeur de Lettres (théâtre : Comédie-Française / Odéon)</em>.</p>
<hr />
<p><strong>Récapitulatif des spectacles vus, depuis 2010</strong> :</p>
<p><strong>2010-2011</strong> : Théâtre de l’Odéon, Paris : <strong><em>Mille francs de récompense</em>, de Victor Hugo</strong>, mise en scène de Laurent Pelly.</p>
<p><strong>2011-2012</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Les Trois sœurs</em>, de Tchékhov</strong>, mise en scène d’Alain Françon.</p>
<p><strong>2012-2013</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Phèdre</em>, de Jean Racine</strong>, mise en scène de Michael Marmarinos.</p>
<p><strong>2013-2014</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Lucrèce Borgia</em>, de Victor Hugo</strong>, mise en scène de Denis Podalydès.</p>
<p><strong>2014-2015</strong> : Théâtre du Vieux-Colombier, Paris : <strong><em>Le Système Ribadier</em>, de Feydeau</strong>, mise en scène de Zabou Breitman.</p>
<p><strong>2015-2016</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Tartuffe</em>, de Molière</strong>, mise en scène Galin Stoev.</p>
<p><strong>2016-2017</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Cyrano de Bergerac</em>, d’Edmond Rostand</strong>, mise en scène de Denis Podalydès.</p>
<p><strong>2017-2018</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Britannicus</em>, de Racine</strong>, dans une mise en scène de Stéphane Braunschweig.</p>
<p><strong>2018-2019</strong> : La Comédie-Française (salle Richelieu), Paris : <strong><em>Électre / Oreste</em>, d'Euripide</strong>, dans une mise en scène d'Ivo van Hove.</p>
<p><strong>2019-2020</strong> : La Comédie-Française (salle du Vieux Colombier), Paris : <strong><em>Bajazet</em>, de Racine</strong>, dans une mise en scène d'Éric Ruf. Sortie annulée : COVID.</p>
<p><strong>2020-2021</strong> : Sortie annulée : COVID.</p>
<hr />
<p><strong>Pour inspirer des promenades dans Paris</strong> :</p>
<p>un extrait de <em>Petit cadastre parisien</em>, par Philippe Le Guillou, illustrations de Philippe Kerarvran, éditions Dialogues, 2021, p. 10-11.</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Paris1_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /> <img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Paris2_m.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>(c) éditions Dialogues</p>
<hr />
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
<hr />
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
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</div>
10e édition exceptionnelle des «Rencontres de Pierre d'Ailly», jeudi 12 mai 2022 :«Dans le Labyrinthe du Roman» ». Conférence de Mohamed Mbougar SARR, écrivain, lauréat du Prix Goncourt 2021.
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2022-04-06T16:48:00+02:00
2022-04-06T18:32:40+02:00
Reynald André Chalard
Les Rencontres de Pierre d'Ailly: Conférences
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Mohamed_Goncourt_2.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> en 2018. © Melania Avanzato/Opale/Leemage.</p>
<p><strong>10e édition <em>exceptionnelle</em> des RENCONTRES DE PIERRE D'AILLY</strong></p>
<p><strong>Conférence de Mohamed Mbougar SARR sur <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, éditions Philippe Rey / Jimsaan (Prix Goncourt 2021), prévue <mark>JEUDI 12 MAI 2022</mark>, à 14 heures, au lycée Pierre d'Ailly, en salle <em>Imago Mundi</em>, à Compiègne</strong>.</p>
<p>Thème de cette nouvelle conférence :</p>
<p><strong>« DANS LE LABYRINTHE DU ROMAN»</strong></p>
<p><strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> est né en 1990 au Sénégal. Il a été formé au Prytanée militaire de Saint-Louis (Sénégal) et au lycée Pierre d'Ailly de Compiègne, où il a été élève en classes préparatoires aux grandes écoles littéraires (Hypokhâgne et Khâgne Lettres modernes) de 2009 à 2012. Il prépare actuellement une thèse de doctorat à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, à Paris. Il a reçu le <em>prix Stéphane Hessel de la jeune écriture francophone</em> en 2014 pour sa nouvelle intitulée « La Cale».</p>
<p>Il est l'auteur de quatre romans : <em>Terre ceinte</em>, éditions Présence africaine (Prix Ahmadou Kourouma 2015) ; <em>Silence du choeur</em> (2017), éditions Présence africaine ; <em>De purs hommes</em> (2018), éditions Philippe Rey ; et <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, éditions Philippe Rey / Jimsaan (<a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2021/11/10/Prix-Goncourt-2021">Prix Goncourt 2021</a>).</p>
<hr />
<p>Dans cette nouvelle conférence, <strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> nous parlera de son dernier livre, qui déploie avec subtilité dans les méandres de sa narration ce qu’André Siganos appelle «L’imaginaire du labyrinthe » (<em>Mythe et écriture.- La nostalgie de l’archaïque</em>, Presses Universitaires de France, coll. « écriture », 1999, p. 41.). L’incipit de ce roman passionnant ne se contente pas de donner le ton, il livre également une clé de lecture qui problématise sa composition :</p>
<p>« D’un écrivain et de son œuvre, on peut au moins savoir ceci : l’un et l’autre marchent ensemble dans le labyrinthe le plus parfait qu’on puisse imaginer, une longue route circulaire, où leur destination se confond avec leur origine : la solitude.</p>
<p>Je quitte Amsterdam. Malgré ce que j’y ai appris, j’ignore toujours si je connais mieux Elimane ou si son mystère s’est épaissi. Je pourrais convoquer ici le paradoxe de toute quête de connaissance : plus on découvre un fragment du monde, mieux nous apparaît l’immensité de l’inconnu et de notre ignorance ; mais cette équation ne traduirait encore qu’incomplètement mon sentiment devant cet homme. Son cas exige une formule plus radicale, c’est-à-dire plus pessimiste quant à la possibilité même de connaître une âme humaine. La sienne ressemble à un astre occlus ; elle magnétise et engloutit tout ce qui s’en rapproche. On se penche un temps sur sa vie et, s’en relevant, grave et résigné et vieux, peut-être même désespéré, on murmure : sur l’âme humaine, on ne peut rien savoir, il n’y a rien à savoir. »</p>
<p><em>La Plus secrète mémoire des hommes</em>, p. 15.</p>
<p>Métaphorisé par l’image du « cercle de solitude » (cette expression revient à la page 43), le labyrinthe ne sera donc pas seulement le mot-titre emblématique du livre mystérieux d’Elimane (<em>Le Labyrinthe de l'inhumain</em>), il symbolisera simultanément l’écriture du roman et sa lecture, sur le mode paradoxal de la docte ignorance, qui affirme ironiquement, dès les premières lignes, qu’ « on ne peut rien savoir » sur l’âme humaine, mais qu'il est besoin des quatre cent quarante pages suivantes pour le démontrer. Le lecteur – c’est sa seule certitude – pourra donc s’y perdre, en compagnie de l’écrivain, dont le sort, nous dit le narrateur, est strictement identique. Le pacte est conclu !</p>
<p>« Aventure d’une écriture » mais aussi « écriture d’une aventure » (en dépit de la brillante formule de Jean Ricardou, qui réduit le roman à la production du texte dans ses <em>Problèmes du nouveau roman</em>, Seuil, 1967, p. 111.), l'oeuvre de <strong>Mohamed Mbougar SARR</strong> réconcilie le roman avec lui-même, loin d'un formalisme desséchant ou amnésique, prouvant avec brio que « le fond, c’est la forme » (Victor Hugo, <em>William Shakespeare</em>, Folio, p. 449 et sqq.) : «une technique romanesque renvoie toujours à la métaphysique du romancier», affirmait Sartre (cité p. 49), à propos de Faulkner (cf. <em>Situations I</em>, coll. Idées/Gallimard, p. 86.). Or il saute aux yeux que la métaphysique de notre auteur est une métaphysique du labyrinthe : ne s'agit-il pas de questionner <em>l'humain</em> en cherchant à résoudre l'énigme fascinante de son épiphanie, <em>l'inhumain</em>, avers et revers d'une même médaille au centre de cette quête littéraire : «le lieu du plus profond mal conserve toujours un fragment de la vérité» (p. 420)? Le sujet même du livre d'Elimane, <em>Le Labyrinthe de l'inhumain</em>, invite à un tel questionnement (cf. pp. 49-50). Dans sa confrontation critique de la littérature africaine avec ce que Milan Kundera appelle le grand «roman européen », dans <em>Les Testaments trahis</em> (Folio, p. 41 et sqq.), <em>La Plus secrète mémoire des hommes</em> s’apparente bien à un roman labyrinthique, qui arpente toute une géographie littéraire, dont les principaux points cardinaux sont Borges, Sabato, Kundera, Gombrowicz et Bolaño, bien que ce dernier ne soit cité qu’en épigraphe – sauf erreur.</p>
<p>C’est pourquoi, lors de cette prochaine RENCONTRE, notre réflexion se mouvra avec curiosité et bonheur « Dans le Labyrinthe du Roman », grâce aux fils d’Ariane que <strong>Mohamed</strong> voudra bien nous donner pour comprendre ce qui se présente aussi comme l’histoire d’une vocation. Elle a commencé avec un premier ouvrage, <em>Terre ceinte</em>, dont il était venu nous entretenir <a href="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/index.php?post/2016/12/05/La-4e-%C3%A9dition-des-%C2%ABRencontres-de-Pierre-d-Ailly%C2%BB-a-eu-lieu-mardi-29-novembre-2016-%3A-%C2%ABLa-Litt%C3%A9rature-et-le-Mal%C2%BB.-Conf%C3%A9rence-de-Mohamed-Mbougar-Sarr%2C-%C3%A9crivain%2C-laur%C3%A9at-du-prix-Ahmadou-Kourouma-2015-pour-son-roman-%C2%ABTerre-Ceinte%C2%BB.">en 2016</a>, pour notre plus grand plaisir !</p>
<hr />
<p>Gian Carlo Menotti, <em>Errand into the Maze</em> (ballet, chorégraphie de Martha Graham), New York, Ziegfeld, 28 février 1947.</p>
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« In memoriam » Michel Deguy (1930-2022), poète, traducteur, critique et fondateur de la revue PO&SIE.
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2022-03-03T18:38:00+01:00
2022-03-10T09:29:32+01:00
Reynald André Chalard
Varia
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/Deguy_Michel_en_1988.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p><strong>Michel Deguy, en février 1988</strong>. © LOUIS MONIER / GAMMA RAPHO.</p>
<p>Source : <em>Le Monde</em> (17 février 2022).</p>
<hr />
<p><em>Un grand poète est mort le 16 février dernier</em> : <strong>Michel Deguy (1930-2022)</strong>. Le plus bel hommage que nous puissions lui rendre est de le <em>lire</em>, comme nous continuons de lire les oeuvres des poètes, longtemps après qu'ils ont disparu... André du Bouchet, Jacques Dupin, Yves Bonnefoy, Michel Butor, Lorand Gaspar, Jude Stéfan, Philippe Jaccottet...</p>
<p>Avec <em>Michel Deguy</em>, le poème <em>moderne</em> - à partir du dialogue avec Baudelaire, notamment dans <em>Spleen de Paris</em>, éditions Galilée, 2001 - repose inlassablement cette lancinante question : Qu'est-ce que la <em>poésie</em> ? Elle est, à l’origine a-t-on pu dire, un chant sacré qui est inspiré par la divinité et s’adresse souvent à elle. Les poètes ne l’ont pas oublié et jusqu’au romantisme au moins (après la définition de la poésie se fait plus critique), même si la référence à Dieu ou aux dieux change d’un auteur à l’autre, le poème avoue être l’expression d’un désir de transcendance, d’une recherche de l’inconnu, de l’infini ou encore de l’Idéal qui suppose une élévation vers le sublime, loin du bruit et de la fureur de l’ « ici-bas » qui est, pour Mallarmé, « ignoble » et « a une odeur de cuisine » ((Lettre à Henri Cazalis du 3 juin 1863). Si <strong>Michel Deguy</strong> <em>reprend</em> l'héritage romantique, c'est pour le questionner, en espérant sortir de l'impasse théologique ou simplement religieuse : poète de l'indivision, de l'esperluette - <em>PO&SIE</em> (1) -, il n'oppose plus l'idéal au réel, l'éternel au quotidien. Toute sa poésie cherche à penser ce qui se joue <em>poétiquement</em> à travers l'expérience du langage, ce qui ne l'empêche pas de s'intéresser à des problèmes qui semblent la dépasser, comme le <em>sublime</em>, auquel il a consacré une étude, «Le Grand-Dire», dans un livre collectif intitulé...<em>Du sublime</em>, éditions Belin, 1988 (réflexion sur les rapports entre <em>phusis</em> - nature - et <em>technè</em> - art -, entre le sublime et l'artifice...) . La poésie, comme l'existence, est figurative, elle est «comme-une», scrute la ressemblance, la « comparution-comparaison » des êtres et des choses. Ainsi que l'écrit Alain Bonfand dans sa préface à <em>Ouï Dire</em> (éd. La Différence, coll. « Orphée », n° 136, p. 16) : « Ce ne sont pas les choses qui se figureraient dans les mots, mais au contraire, c’est le langage qui leur donne figure, qui littéralement les figure, qui donne tournure au chaos, qui le corsète en monde. » D'où la nécessaire méditation de Baudelaire, de Mallarmé, et au XXe siècle de Ponge, tous poètes d'une rhétorique <em>profonde</em>, si par ce dernier adjectif on vise le caractère métaphysique attaché à toute technique, selon Barthes ( <em>Chateaubriand : « Vie de Rancé »</em>, dans <em>Nouveaux essais critiques</em>, Points / Essais, p. 112), qui reprend une idée de Sartre, à propos de la technique romanesque chez Faulkner (cf. <em>Situations</em> I). C'est dans ce noeud problématique que se rejoignent chez Michel Deguy <em>poésie</em> et <em>philosophie</em>, <em>jumelage</em> infini (comme pour le vers et la prose), sous les auspices de Kant - en développant de livre en livre une <em>critique</em> de <em>La Raison poétique</em> (éditions Galilée, 2000)-, Heidegger, Ricoeur et Derrida, pour n'en citer que quelques-uns. Cette pensée poétique originale, qui veut s'occuper du monde tel que nous le vivons, a aussi développé tout naturellement une réflexion sur l'écologie : «L'écologie, une "logie" (pensée, parole, dires) de l'"oïkos" (maison, habitation, terre des hommes), n'est pas facultative.» (<em>Écologiques</em>, Hermann, coll. « Le Bel Aujourd'hui», 2012).</p>
<p>Nous aurons l'occasion d'évoquer en cours cette poésie exigeante et ambitieuse, en essayant de la <em>situer</em> dans le paysage littéraire contemporain, et en lisant et en commentant les extraits proposés dans ce billet. En attendant, on peut feuilleter les deux volumes dont la première de couverture est présentée ci-dessous : ce sont des anthologies de l'oeuvre de Michel Deguy. Les deux sont publiés chez Gallimard, dans la précieuse collection « <em>Poésie</em> / Gallimard » :</p>
<p><img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Deguy_1_s.jpg" alt="" /> <img src="http://blogs.ac-amiens.fr/lettreshypokhagne/public/.Deguy_2_s.jpg" alt="" /></p>
<p>(1) Lire le texte, drôle et profond, «Po&Sie», dans <em>Jumelages</em>, éditions du Seuil, coll. « Fiction & Cie », 1978, p. 55-65 :</p>
<p><em>Po</em> et <em>Sie</em> depuis si longtemps indivis décident, après avoir célébré leurs noces de cendres de diamant, une séparation aux fins de ménager le divorce. (...).</p>
<hr />
<p><em>Tombeau de Du Bellay</em>, Gallimard, coll. « Le Chemin » , 1973, p. 187 et 205.</p>
<p><em>Parages</em></p>
<p><em>Mouvement de monde...</em></p>
<p>Et comment va la vie qui n'est pas éternelle ?</p>
<p>Il y eut la clarté Il y eut l'énigme</p>
<p>Puis ce fut</p>
<p>Il y eut l'énigme Il y eut la clarté</p>
<p>Être parut cela</p>
<p>Il y eut l'énigme il y eut la clarté</p>
<p>Puis fut la terre au centre de la table</p>
<p>Qui sinon ce sera la force des faibles ?</p>
<ul>
<li></li>
</ul>
<p><em>Leçons de ténèbres</em></p>
<p><em>Paroi la mort</em></p>
<p>Paroi la mort adamantine</p>
<p>Est de l'autre côté des murs</p>
<p>Ce mur impénétrable mais</p>
<p>Reculant sous les mains sans dureté</p>
<p>Qui longe tout ce que nous longeons</p>
<p>Elle esquive emmurante enrubannée</p>
<p>Verso qui sonorise nos défilés nos pierres</p>
<p>L'écho vient rebondir à son clos doucereux</p>
<p>L'au-delà est ici les pierres parlent</p>
<p>Doublure en murailles où nous télégraphions</p>
<p>Prisonniers qui s'entendent par ce qui les isole</p>
<hr />
<p><em>Gisants</em>, « L'Effacement », Gallimard, 1985, p. 61-63.</p>
<p><em>Dédicace</em></p>
<p>Je ne peux écrire ton nom. Les lois l'interdisent. Ayant écrit ton nom, je dirais que je ne le dirai jamais et ainsi le cèlerai-je. Tu es ma chresmologue. Il est écrit que s'accomplisse ton voeu que j'écrive un <em>gisant</em>.</p>
<ul>
<li></li>
</ul>
<p><em>Gisants</em></p>
<p>Affrontés. Palingenèse qui relie les os d'en bas et ceux d'en haut. Le haut s'alite, devient l'avant. La liaison reforme ce faisceau ; ce mobile arc-boutant. Comment franchir la deuxième enceinte, passée l'ivresse du premier ciel et de la description du réel où les seins glabres se mirent ? Tu sais que j'ai de plus en plus de mal à parler... Comment parler autrement, si l'unité innommable est ce qui tient, en s'en retirant, la demeure où nous met la répulsion universelle, l'hendiadyn divin du pluriel ?</p>
<ul>
<li></li>
</ul>
<p><em>Contenance</em></p>
<p>Le projet disposerait côte à côte aux quinconces des pages ces figures enlacées qui chiffrent les lettres restantes, et l'art de la poésie qui décontenance les poèmes.</p>
<p>(...)</p>
<p><em>L'esprit de poésie</em></p>
<p>toute figure est une figure de pensée...</p>
<p>Une figure est celle du dieu de poésie</p>
<p>Qui se glisse dans la forme de cette figure</p>
<p>En ressemblant à s'y méprendre à cet hôte qui l'accueille</p>
<p>Pour y féconder Alcmène la poésie</p>
<p>p. 125.</p>
<hr />
<p><em>La Poésie n'est pas seule . Court traité de poétique</em>, éditions du Seuil, coll. « Fiction & Cie », 1987, p. 19-20 et 42-43.</p>
<p>La poésie est l’expérience d’un questionnement. Il n’y a pas d’une part une vie plus ou moins triviale et «simple aux travaux ennuyeux et faciles », quotidienneté humaine à embûches ou apories en «parcours jusqu’à ce que mort s’en suive, et de l’autre, une disposition inquiète qui transforme ces assurances en paraboles, les perceptions en figures énigmatiques, et relance les questions pour jouer vainement. La poésie ouvre l’existence à son être-en-question(s) — sans réponses. Qu’est-ce qu’être ici, comment y être, «vraiment ». La passion et la puissance figurative de la poésie portent à l’éclairement de questions l’aimer, le douloir, l’œuvrer, le désirer, le donner, le perdre... Elle met en relation les choses entre elles, et les arts entre eux. Sa vigilance sur les manières d’être s’appartient en une langue et en ses langages — en une poétique.</p>
<ul>
<li></li>
</ul>
<p><em>Y a-t-il du fait poétique ?</em></p>
<p>La lecture d’un texte poétique serait impossible si nous ne connaissions ni ne pouvions correspondre en quelque manière aux questions auxquelles ce poème répond — dans la perspective où, selon Michel Meyer en sa remarquable « problématologie » : « Ce qui est est réponse à une question qui disparaît dans l’apparition de cela qui était en question et qui est devenu réponse, réponse “déproblématologisée” qui ne laisse présent que son objet.» (1)</p>
<p>Quelle est la question jacente à un poème, que nul lecteur n’attendait et pour cause ? De quoi est-il question avec les choses de la poésie sinon de la question à quoi ça ressemble ; et je ne dis pas que cette question intéresse la seule poésie — art de disjoindre et de conjoindre des syntagmes pour ajointer des choses en choses-de-choses ou images — mais la Dichtung en général, ou art. La question se fibrille ainsi :
— C’est comment — un « paysan-ensoleillé » ; une « fontaine-romaine » ; l’enfer... ? C’est comme ça...
A quoi ça ressemble, la poésie ? Ça peut ressembler à ça : un poème enveloppe l’inquiétude de son rapport avec la poésie, cet étrange « tout » qui est partie à ce poème-ci. Un poème a du contenu pour autant qu’il a de la contenance, et sa contenance, autrement dit sa forme, est d’une « capacité » déterminée par la poésie qui la décontenance, par le passage de la poésie qui n’est pas « contenue» dans ce poème (telle est, par exemple, la plainte que fait entendre chaque Regret de Du Bellay en même temps que son « thème » local).</p>
<p>(1) Michel Meyer, <em>De la problématologie</em>, Bruxelles, Pierre Mardaga éditeur, 1986.</p>
<hr />
<p><em>Le Monde</em>, 27 octobre 2016</p>
<p><strong>Michel Deguy : « Un poème est aussi, d’une certaine manière, une histoire de la poésie »</strong> (extrait)</p>
<p><em>Créateur de la revue « Po & sie », éditeur, Michel Deguy est philosophe et poète</em>.</p>
<p><strong>Michel Deguy, de qui ou de quoi vous sentez-vous l’héritier ?</strong></p>
<p>L’héritier d’une tradition, d’une transmission qui fait voisiner depuis 2500 ans ce qu’on appelle philosophie et poésie. Dans ma vie, j’ai toujours été lecteur et enseignant de philosophie, écrivain et lecteur de poésie. Je me situe dans cette médiation entre les deux que j’appelle la poétique.</p>
<p><strong>Ecrire, c’est transmettre, sans doute. Mais quoi et à qui ?</strong></p>
<p>C’est espérer transmettre un attachement à ce monde que l’on va appeler le terrestre. Mais c’est aussi un attachement à la langue, à la beauté de la langue. Un « faire-voir » par le dire. C’est un attachement double, jumeau, croisé, duel. Le titre de Francis Ponge est magnifique : ce <em>« parti pris des choses »</em> qui dépend du <em>«compte tenu des mots »</em>. Il ne s’agit pas d’une duplicité, mais d’une dualité fondamentale. Un attachement au terrestre, à ce que les philosophes appellent l’ouverture au monde, c’est-à-dire aux choses du monde. Je dis volontiers : autant de choses, au pluriel, autant de monde, au singulier.</p>
<p><strong>Cette mise en présence du monde ne se produit-elle pas aujourd’hui sans obstacle ?</strong></p>
<p>La chose est en effet menacée par son devenir image, ce qui est une affaire sans précédent. J’observe qu’on ne dit presque plus, dans le propos courant ou médiatique, « l’islam » mais « l’image de l’islam », ni « l’autorité » mais « l’image de l’autorité ». C’est ce que j’appelle le devenir image des choses, ou leur « screenisation », c’est-à-dire ce qui se passe à l’écran, sous l’injonction du vivre en direct.</p>
<p><strong>L’image ne nous rapporterait désormais du monde que des choses dégradées ou lacunaires ?</strong></p>
<p>Je pense surtout que l’image, il faut la faire parler. Autrement dit, on lui fait dire n’importe quoi. Elle représente un danger dans la mesure où on ne parle plus aujourd’hui directement des choses. Cette altération de la chose dans l’image est le champ d’une inquiétude que je place volontiers dans la descendance de Baudelaire et de sa méfiance à l’égard de la photographie, par exemple.</p>
<p><strong>Dans vos livres de poésie et de philosophie, les mots de « relique », « perte », « rebut » reviennent souvent. Face à une ruine, quelque chose du passé ne revient à nous que d’une manière incomplète. Hériter, est-ce recevoir quelque chose qu’il faut compléter ?</strong></p>
<p>Pas compléter, mais transformer, oui. Que reste-t-il aujourd’hui ? C’est une question cruciale. Il y avait autrefois cette boutade devenue obsolète : la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié. Aujourd’hui, l’injonction serait plutôt : gardons tout ; non plus « Du passé faisons table rase », mais « Du passé, conservons tout ». Le problème se pose en termes de recyclage du passé. Que faire en effet des reliques ? Où sont les reliques ? Elles ne sont plus des objets, des petites choses pour la superstition ou l’idolâtrie ; les reliques sont dans la langue que nous parlons et les œuvres qui nous sont transmises. Il ne faut pas les conserver, mais les transformer. (...).</p>
<hr />
<p><em>Michel Deguy, parmi des poètes importants du XXe siècle : propositions de lecture !</em></p>
<p>Georges Perros, <em>Une vie ordinaire</em>, Gallimard, coll. « Poésie », 1988 (1967), p. 115-116.</p>
<p>Moi je suis tout prêt à vous dire</p>
<p>que Jacques Dupin Jaccottet</p>
<p>Henri Thomas et Du Bouchet</p>
<p>Guillevic Follain Boissonnas</p>
<p>Pierre Jean Jouve Jean Grosjean</p>
<p>Bonnefoy Oster Francis Ponge</p>
<p>Giroux Limbour et Des Forêts</p>
<p>Michel Deguy et Mandiargues</p>
<p>Sûr que je dois en oublier</p>
<p>et le très cher Armand Robin (...)</p>
<p>c'est beaucoup mieux que mes chansons</p>
<p>Lisez-les On trouve leurs livres</p>
<p>dans les grand-maisons d'édition</p>
<p>s'il en reste car aujourd'hui</p>
<p>ce n'est pas parce qu'on vous aime</p>
<p>qu'on vous publie Et là-dessus</p>
<p>j'aurais mon mot un peu plus tard</p>
<p>Si j'y allais là tout de suite</p>
<p>où trouverais-je un éditeur ?</p>
<hr />
<p>Michel DEGUY – <em>L'Atelier d'écriture</em> (DOCUMENTAIRE, 1996)</p>
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<hr />
<p>Beethoven, sonate <em>Hammerklavier</em>, opus 106, III. Adagio sostenuto :</p>
<p><em>Brevets</em>, éditions Champ Vallon, 1993, p. 48 :</p>
<p>Dans la mesure où le <em>sublime</em> de cette musique, comme aurait dit le XVIIIe siècle, consiste dans la tension et la lutte de forces d’ascension et de descente, d’un principe d’élévation et d’un mouvement de retenue et de retombée, de l’équilibre d’un monter et d’un dégravir (…), la grande image, le grand <em>mythe</em> selon lequel la musique peut se mettre en scène pour l’œil qui l’écoute, est celui d’Orphée et d’Eurydice, plus précisément saisi au moment de la descente aux Enfers, de la remontée, et de la perte d’Eurydice.</p>
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