Alceste à bicyclette, film de Philippe Le Guay (2013)

Un célèbre acteur de série télévisée (Gauthier Valence) veut mettre en scène Le Misanthrope de Molière et proposer le rôle de Philinte à un ami comédien (Serge Tanneur) qui a brutalement mis fin à sa carrière par dégoût d’un milieu qu’il juge hypocrite et superficiel. Dans sa solitude, retiré dans son « désert », l’île de Ré, il semble incarner sans le vouloir le personnage d’Alceste. Mais Serge refuse de remonter sur les planches, et Gauthier va tout tenter pour le faire changer d’avis, acceptant même de jouer le rôle de Philinte en alternance. Serge lui demande alors de passer quelques jours avec lui pour répéter la scène 1 de l’acte I du Misanthrope, après quoi il lui fera savoir sa décision. Les deux hommes sont tour à tour amis et rivaux, Alceste et Philinte au théâtre, mais dans la vie, leur jeu se heurte aux contradictions de l’existence, que l’amour révèle… N’est pas Alceste qui veut ! Gauthier, faux misanthrope, parviendra—t-il à jouer son rôle ? Il est progressivement pris au piège des mots de Molière (la scène du lapsus « révélateur » aura un grand retentissement final), tandis que Serge, qui connaît par cœur les répliques de l’atrabilaire amoureux, a le plus grand mal à reconnaître l’amour. Avec une certaine subtilité, qui prend le temps de s’installer, le film de Le Guay montre à quelles impasses la confrontation des deux comédiens aboutit : on ne badine pas avec le théâtre, ni avec la vie d’ailleurs. Serait-ce la leçon de Molière ?