L'hypokhâgneux : l'homme-livre ?

©R.A.C.

Répondez à cette difficile question en 300 ou 400 mots, tout au plus, d’une plume cultivée et en utilisant l’ « arc-en-ciel des humours » :

« L'humour noir (ainsi baptisé par Huysmans) est la forme la plus pure (...) de l'humour.»

Mais aussi :

« (...) L'humour jaune comme l'autodérision, vert comme la fausse naïveté, gris comme le monde vu par un dépressif, rouge comme la révolte changée en éclat de rire, violet comme le blasphème en robe de cardinal, bleu comme le délire déguisé en banalité quotidienne, caméléonesque comme la parodie, blanc, enfin, comme l'euphémisme cocasse, les phrases absurdes ou les pirouettes de dandy suicidaire. »

Domique Noguez, L’Arc-en –ciel des humours, Le Livre de Poche, coll. « Biblio », 2000.

A l'époque où le "bizutage" n'était pas confondu avec une séance de torture, des Khâgneux, d'une certaine khâgne, faisaient réciter ces vers parodiques et pastichiels aux apprentis Hypokhâgneux, d'une certaine hypokhâgne, en un certain pays, à une certaine époque... C'était donc pour rire, bien évidemment ! Nous rapportons fidèlement cette oeuvrette sans auteur, dont le goût pour l'hiatus déplairait à Boileau :

PAUCA HOMONCULIS

Ou quand un auguste Khâgneux s’adresse à un Hypokhâgneux novice

Homoncule béat, ô toi Lettro Supiens,

Descendant culturel du vieil Homo Sapiens,

Prends de la tradition cet auguste héritage,

Honore par le rite un divin bizutage.

Progéniture inculte, apprenti magicien,

Tu n’es pas d’Apollon mais bien d’un béotien.

Du fond de ta province, obscure Béotie,

Tu n’écris pas des vers mais la pire idiotie.

Et aujourd’hui encore tu prétends au savoir,

Quand même avec tes yeux tu ne saurais y voir ?

Ta langue n’est que cuirs et flagrants solécismes,

Au beau sexe tu dis de honteux barbarismes…

Révère maintenant la race des Titans,

Qui ont fait du savoir leur nectar pour longtemps !

Adore donc ces dieux de la classe de Khâgne,

Si tu veux t’échapper de ton immonde bagne.

Tandis que de l’autel tu t’approches craintif,

Et qu’à l’instar d’un bouc tu te montres rétif,

Acquiesce noblement à ce grand sacrifice

En rejetant d’un jeu le vicieux artifice.

Lors, que ces quelques vers unis en un quatrain,

D’un supplice si doux soit le joyeux refrain :

''Ô race des Khâgneux, sublimes et divins,

De nos esprits faiblards soyez enfin les maîtres ;

Car toujours vous serez, Ô majestueux êtres,

De nos funestes sorts les éternels devins !''