Non que la lecture de Et La Mer profonde et bleue soit reposante. Mais quel passionnant thriller ! du genre qu’on est obligé(e) de lâcher de temps à autre pour reprendre – entre meurtres, incendie, espionnage, grains, noyades et autres naufrages – un peu de souffle. Harry Goddard, un yachtman naufragé au grand large des Philippines est recueilli sur un cargo, grâce à l’effet conjugué d’une panne et du regard perçant de l’une des deux passagères – sortie de sa cabine exaspérée par les rugissements d’amour de l’autre passagère. Le reste des occupants du bateau, équipage et passagers, est masculin. Il y a un capitaine falot et bigot, et un second, solaire et sarcastique. Et bien vite, on le comprend, des séquelles très toxiques du nazisme. Les termes de navigation y sont très abondants, témoignant des compétences de l’auteur en ce domaine – lexique suit.
Quant à l’histoire, elle est presque tout entière contée à travers le regard de Goddard (les deux ou trois décrochages de sa perspective sont des maladresses, à mon sens), et de façon tellement cinématographique que c’est à se demander si Williams n’espérait pas voir le roman se transformer en scénario. Goddard, d’ailleurs, est producteur de cinéma. Je n’avais lu de Charles Williams que Fantasia chez les ploucs (The Diamond Bikini, avec le liseron bleu tatoué sur le sein de Miss Harrington), dont j’ai dit ici même, il y a bien longtemps – six ans, ou quasi ! – tout le plaisir que j’avais pris à sa lecture, et Aux Urnes, les ploucs, dont j’ai tout oublié. Je ne connaissais pas sa veine sérieuse. Ce roman maritime, l’avant-dernier avant son suicide sur la mer (ah, eh bien, non, d’après wikipedia, vois-je, c’est une légende. Wikipedia où l’on apprend que l’auteur était, quant à lui, scénariste !), est en tout cas une excellente lecture, de TGV ou d’ailleurs.