Autre madeleine...

Non qu’il soit dans mes habitudes de commenter la littérature dite « jeunesse ». Mais j’ai repris hier soir avant de m’endormir sur l’étagère de ma nièce un des bouquins que j’ai lus et relus dans mon enfance : Daddy-long-legs, de Jean Webster. A l’époque, c’était dans un volume relié de toile avec la silhouette dégingandée du héros éponyme sur la couverture, et le titre en était « Papa Faucheux », car en anglais « daddy-long-legs » est le nom de cette araignée aux immenses pattes fines. Aujourd’hui, on le traduit par « Papa-longues-jambes » et j’aime moins, car on y perd l’araignée. C’est essentiellement un roman épistolaire, à tel point que j’avais oublié que le premier chapitre en était narratif. C’est pourtant dans ce premier chapitre que l’on rencontre Jerusha Abbott, l’aînée des enfants de l’orphelinat John Grier, vêtue de sa robe de guinguan à carreaux. Le guingan est devenu du vichy dans la nouvelle traduction Folio junior, je suis très déçue, même si ça ressemble, au fond. Le guinguan à carreaux fait partie de ma mythologie de lectrice.

Bref, ce roman est constitué de la correspondance à sens unique de Jérusha devenue par choix Judy, adressée à son bienfaiteur Mr John Smith, qui lui a offert d’entrer à l’Université, afin qu’elle puisse y cultiver son talent pour l’écriture. Seule condition, écrire une lettre par mois à son bienfaiteur pour lui rendre compte de ses études. Judy a beaucoup de verve et d’impertinence, et elle baptise incontinent son bienfaiteur plus qu’anonyme ‘papa Faucheux’ à cause de l’immense silhouette dégingandée qu’elle a aperçue au moment de son départ de l’orphelinat. C’est une chronique pleine d’allant de la vie d’un collège de filles aux Etats-Unis à la fin du XIXe siècle ou au tout début du XXe, et une très jolie histoire sentimentale. Une histoire d’émancipation par l’écriture.

Quant à Jean Webster, l’autrice, issue de trois générations de femmes militantes (pour les droits des femmes, ou des Noirs) et petite-nièce de Mark Twain dont son père fut l’éditeur avant que leurs relations ne se rompent et qu’il finisse par se suicider, elle a mené à son tour une vie engagée dans des luttes pour les femmes, les orphelins, les prisonniers, avant d’épouser en 1915 un homme divorcé, et de mourir, un an après son mariage, à la naissance de sa fille, de fièvre puerpérale. Une très belle femme, sur la photo Wikipedia. Et un roman à découvrir. Il y a une suite, d’ailleurs, Dear Ennemy, disponible ici sur le project Gutenberg.

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