Jean-Paul Dubois - Une Vie Française, éloge du gaucher

Il faut reconnaître une chose à Jean-Paul Dubois : le talent de finir ses livres. Je viens d’en lire deux coup sur coup, prêtés – à ma demande – par mon amie Carole. Une Vie Française, un roman ( ?) auquel l’usage du « je » donne un fumet autobiographique peut-être usurpé, puis Éloge du gaucher, un essai.
Une Vie Française
obéit strictement à un principe : la vie du narrateur – irrémédiablement toulousaine – marche du même pas que les élections présidentielles de la seconde moitié, puis des débuts des XXe et XXIe siècles. Depuis l’événement fondateur de la mort de son frère le jour de l’élection de de Gaulle en décembre 58 jusqu’au deuxième mandat de Chirac, ça a un petit côté Forrest Gump à la française. Ou Tours et détours de la vilaine fille, ce roman de Vargas Llosa entrepris sur un air allègre de mambo, et qui entraîne le lecteur sur les traces des diverses révolutions de gauche à travers le monde à la suite de cette « vilaine fille » allégorique et increvable dont on finit par rêver qu’elle y reste, une bonne fois, tant le système devient lassant et les personnages antipathiques. Chez J. P. D., dans les deux que je viens de lire, même sentiment de déception : à chaque fois, un début séduisant, puis le sentiment  de sombrer dans un bavardage mondain. Indéniablement bien écrit, mais creux. À cause, sans doute, d’une certaine fatuité légère, lasse, agacée, d’une tendance au persiflage, aussi. Et quand l’agacement est enfin partagé par le lecteur – enfin, la lectrice, moi précisément, car ces ouvrages ont été salués par le public, et Une Vie Française a reçu le Prix Fémina, (à quoi pensaient-elles, les femmes, de couronner de leur prix un ouvrage si intensément masculin ?) – quand l’agacement donc m’a saisie, je me suis laissée regagner à la fin : le père déserté par sa famille et par la vie même d’Une Vie française contemplant le dernier paysage de son grand-père paternel berger, sur une crête des Pyrénées, un fil du rasoir du monde, avec sa fille enfermée dans le silence, ou l’histoire du gaucher (El Zurdo) meurtrier et silencieux, contée par un minuscule Espagnol fin de race sur un balcon nocturne face aux lumières gauches et droites, anglaises et espagnoles, de Gibraltar. Des fins au bord du monde, toutes les deux, quand on y pense.

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

La discussion continue ailleurs

URL de rétrolien : http://blogs.ac-amiens.fr/let_convolvulus/index.php?trackback/237

Fil des commentaires de ce billet