La Bataille de l’Empereur
21 au 31 mars 1918
(par Thomas Vicart)
Le plan
Le plan conçu par Lundendorff est simple. Il s'agit d'un coup de massue porté en un seul point, convenablement choisi. Saint-Quentin, là où est la soudure des forces anglaises et françaises. Le Grand Etat-major allemand sait que la principale faiblesse de l'Entente est l'absence d'un commandement unique.
Si les Allemands réussissent à pénétrer en coin entre les Anglais et les Français, les deux grands alliés ne seront vraisemblablement pas capables de coordonner leurs efforts.
Ainsi, même s'ils avaient l'intention, ce qui est peu probable, de mettre leurs réserves en commun, Français et Anglais, préoccupés chacun du sort de leur secteur, conserveront jalousement leurs disponibilités et laisseront l'offensive allemande progresser librement.
L'attaque
Le 21 Mars le front s'enflammait de la mer à la Suisse; et, en maints endroits, se déclanchaient des préparations d'artillerie avec un Luxe de munitions. Cependant, cette préparation fut particulièrement violente dans la région comprise entre la Scarpe et Vendeuil.
Grâce aux canons de calibres inconnus, à des obus toxiques, les Allemands réalisèrent encore une fois la zone de mort intègrale sur ce front de 80 kilomètres.
C'était surtout sur l'effet moral produit par les obus toxiques que Ludendorff comptait pour forcer la victoire.
Il y avait depuis la Scarpe jusqu'à la route de Péronne à Cambrai, deux Armées britanniques: la 3e, du général Byng, le vainqueur du Cambrésis, avec 9 divisions en première ligne et 5 en deuxième ; et au sud, s'étendant jusque dans la forêt de Saint-Gobain, où elle se soudait aux Armées françaises, la 5e Armée du général Gough, avec en première ligne 10 divisions d'infanterie et en deuxième ligne 3 divisions infanterie et 3 divisions de cavalerie.
Le quartier général de Byng était à Albert, celui de Gough à Nesle.Byng a 6 divisions entre Croisilles et La Vacquerie; Gough en a 10 de la Vacquerie à La Fère.Contre ces 16 divisions se ruent, à partir de 9h30 du matin, 37 divisions allemandes appartenant à la 3e Armée du général von der Marwitz, à la XVIIe Armée d'Otto Von Below, flanquant l'attaque au nord; à la XVIIIe Armée de von Hutier, l'appuyant au sud.
Au contraire, l'Armée de Gough qui se croyait en sûreté parce que la plus grande partie de son front était couverte par les marais de l'Oise, fut surprise.
Les marais de l'Oise étaient à sec ; ils n'arrêtèrent pas ces colonnes d'assaut allemandes et celles-ci submergèrent les tranchées britanniques. Dans la soirée, la 5e Armée était rejetée derrière le canal de Crozat, entre Saint-Simon et Tergnier, et cette dernière localité était même enlevée par l'ennemi.
En somme, cette journée, au cours de laquelle ces Allemands, profitant de tous les avantages d'une longue préparation et de tous les effets de la surprise, avaient engagé contre 16 divisions britanniques, outre leurs 37 divisions de première ligne, 27 divisions de renfort, soit un total de 64 divisions, avaient creusé dans le front de nos Alliés deux poches inégales : l'une, assez faible, dans la région de Croisilles, en direction de Bapaume; l'autre plus importante, de La Vacquerie à La Fère, en direction de Ham. Mais, dès que les guetteurs britanniques ont signalé les masses allemandes quittant leurs tranchées, le maréchal Haig, prévenu, a immédiatement téléphoné au général Pétain qui, sans perdre une minute, a alerté ses réserves.
La nuit du 21 au 22 mars