De case en cass'

Échanges, travaux autour des codes de lectures de la Bande dessinée.

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janv. 5

La BD en 2013


Comme chaque année l’ACBD : l’association des critiques et des journalistes de bande dessinée a publié son rapport sur la santé de nos « petites bulles » préférées en 2013. Je vous en propose un petit résumé :

Pour la première fois, depuis au moins 17 ans, la production d’albums de bande dessinée, a diminué : enfin tout de même 5159 livres de bande dessinée ont été publiés (cela représente en fait une baisse de 7.3% par rapport à 2012). :


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Parmi cette publication il faut distinguer les strictes nouveautés, qui sont au nombre de 3 892 albums s’adressant toujours, principalement, à 4 lectorats distincts

— celui des BD traditionnelles dites franco-belges qui reste de loin le secteur le plus prisé par les lecteurs de bandes dessinées

— celui des séries « asiatiques » nouveaux mangas, manhwas, manhuas et assimilés dont la production diminue quelque peu :

— celui des comics américains (ou réalisés par des Européens) qui est le seul à augmenter en 2013

— et celui des romans graphiques et livres expérimentaux, également en régression

Boosté par le nouvel Astérix, l’économie de la bande dessinée, dans son ensemble, fait partie des secteurs du livre qui résistent le mieux à la crise. Les 5 plus gros tirages furent :

2 480 000 d’ex. pour le 35e Astérix par Jean-Yves Ferri et Didier Conrad.

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— 445 000 ex. pour le 22e Blake et Mortimer par Jean Dufaux, Antoine Aubin et Étienne Schréder.

— 350 000 ex. pour le 18e Le Chat par Philippe Geluck.

— 250 000 ex. pour le 22e XIII par Yves Sente et Iouri Jigounov.

— 220 000 ex. pour le 5ème Blacksad par Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido.


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Du côté comics, Walking Dead (avec 2 tomes tirés à 120 000 et 100 000 ex.) est le tirage le plus important de l’année.

En ce qui concerne les mangas, le podium est toujours squatté par l’habituel trio de tête composé par Naruto (4 nouveaux tomes tirés à 200 000 ex. par Kana), One Piece (4 tomes entre 150 000 et 170 000 ex. par Glénat, auxquels il faut rajouter un guidebook à 50 000 ex.) et Fairy Tail (7 entre 90 000 et 115 000 ex. par Pika).


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1492 auteurs réussiraient à vivre de la création de bandes dessinées sur le territoire francophone européen ; par ailleurs, 1678 personnes ont publié au moins un album en 2013.

Même si elle ne nourrit pas vraiment son homme, la création est toujours bien présente sur Internet, notamment avec les blogs BD, où des auteurs de bandes dessinées, professionnels ou amateurs, proposent en ligne leurs créations sous forme de billets publiés ante-chronologiquement.

Toutefois, on peut connaître ceux qui ont le plus de succès en termes de liens pointant vers eux. En effet, d’après le classement Ebuzzing, les 3 premiers blogs BD en novembre 2013 étaient Papacube (Papa au cube), le blog communautaire 30 jours de BD et Hotmilk le blog de Luchie. Celui de Martin Vidberg n’arrive qu’en 17e position et celui de Pénélope Bagieu, en 21e position.


10 bandes dessinées francophones ont donné lieu à des longs métrages diffusés au cinéma. (des Profs, Boule et Bill ou Les Schtroumpfs, à La Vie d’Adèle ou à Snowpiercer – d’après Le Bleu est une couleur chaude et Le Transperceneige —, en passant par Quai d’Orsay et Joséphine, ou encore par le dessin animé Aya de Yopougon)


Il y a de plus en plus d’événements organisés autour de la BD sur le territoire francophone européen : 514 en 2013 (contre 489 l’an passé). Pour la première fois, le Comic Con et Japan Expo de Villepinte (232 000 contre 208 000) dépasse nettement le Festival international de la bande dessinée à Angoulême (qui déclare une fréquentation supérieure à 200 000).

Gilles Ratier, secrétaire général de l’ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée)

mar. 2

L’histoire de la bande dessinée.

Posté par JF

Depuis deux siècles, de Monsieur vieux-bois à Corto Maltese, du Japon à la Belgique, la bande dessinée est l'une des « pratiques culturelles » les plus répandues et les mieux partagées dans le monde.

Il est néanmoins presque impossible de définir où et quand est née la bande dessinée tant les définitions qu'on lui donne sont variées. En même temps, il ne viendrait à l'esprit de personne de chercher à déterminer la terre d'origine de la littérature, de la musique ou de la peinture, ces disciplines étant considérées par essence comme des arts universels.

La bande dessinée ne fait pas exception. Plusieurs essais se sont interrogés sur la filiation de la bande dessinée avec des œuvres aussi anciennes que les dessins organisés en séquences tracés par les nomades du paléolithique,

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le codex maya, la colonne trajane,

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la tapisserie de Bayeux

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ou les enluminures de l’art  médiéval.


Toutefois, la plupart de ces récits structurés en séquence d'images, bien qu'annonçant peut-être la bande dessinée, ne sont pas moins dépourvus pour la plupart de textes.

Or comme nous avons vu dans un billet précédent, c'est le caractère hybride de la bande dessinée qui nous semble déterminant pour la définir.

De plus il y a un événement qui domine l'histoire de la BD, tout comme l'histoire de l'écriture : l'invention de l'imprimerie. Avec cette invention, ce qui était réservé aux riches et aux puissants devenait accessibles à tous.

C'est donc beaucoup plus tard qu'il faut essayer d'envisager la naissance du neuvième art dans son acception moderne. Apparue parallèlement au cinéma et à la photo, tout au long du XIXe siècle de nombreux dessinateurs ont préparé l'émergence de la bande dessinée moderne.

Nous allons ici tenter d’aborder un rapide résumé des étapes de cette histoire par bonds successifs, résultats de choix forcément critiquables, mais réalisés dans le but de donner un aperçu suffisamment clair:

Les précurseurs :

On se sent obligé de citer l’Anglais William Hogarth qui au milieu du XVIIIe siècle conçoit la littérature dite d’estampes (« La vie d’un libertin » 1735) qui va inspirer quelques années par la suite son compatriote Thomas Rowlandson qui sera le premier à encercler des dialogues dans des ballons raccordés à la bouche des personnages (« Dr Syntax » 1812)

En 1814, au Japon, le peintre Hokusai innove en présentant certaines pages de ses croquis, dont quelques caricatures, dans des cases accompagnées de texte. L'œuvre prend le nom de Manga, qui en japonais veut dire « image maladroite », ou « caricature ». Le terme désignera plus tard la bande dessinée japonaise.
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Hokusai, Lutteurs s'échauffant, publié dans Hokusai Manga, 1814.

Dès la fin du XVIIIe siècle, l'Imagerie d'Epinal commence à diffuser de petites vignettes narrant des sujets populaires, non seulement des images pieuses, mais aussi des comptines, des devinettes, des épisodes de l'histoire de France, etc. De 1870 à 1914, ce sont plus de 500 millions de planches qui sont vendues !

Mais on s’accorde en générale à reconnaître avec le Suisse Rodolphe Töpfer, qui eut l'idée en 1827 de dessiner des aventures en inscrivant une légende sous ses dessins comme l’inventeur de la BD. Ses manuscrits enthousiasmèrent même Goethe mais surtout ils furent publiés. (« Les amours de monsieur Vieux-Bois » 1833).

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Très vite publiées en France, ses histoires vont inspirer de grands artistes comme Nadar lui-même avant qu’il ne se tourne vers la photographie, Gustave Doré ou bien encore un dessinateur nommé Caran d'Ache. En Allemagne est créée la série "Max und Moritz", dessinée par W. Busch, et qui a influencé de très nombreux auteurs.

L’apparition d’un genre nouveau :

Certaines revues comprennent très vite l'intérêt d'ouvrir leurs pages à ces publications d'un genre nouveau. Aux Etats-Unis, les dessinateurs employés par les hebdomadaires sont débauchés par les grands quotidiens. Dans la guerre que se livrent par exemple le New York World et l'Evening Journal les "strips" (fractions de page sous forme de bandes de quelques images) sont un argument de poids. Le premier quotidien publie en 1896 la série de Richard Felton Outcault : " At the circus in hogan's Alley", vite rebaptisée "Yellow Kid" à cause du personnage récurrent. C'est la première véritable B.D., par le découpage des images et l'apparition des bulles de dialogue.

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A noter que cette primauté est revendiquée également par l’œuvre de l’anglais Henry Ross et Marie Duval (française de son vrai nom Emilie Tissier) (« Iky Mo and Ally Sloper ») qui cumule plusieurs «1ers » : 1er héros récurrent, 1ére publication régulière dans un magazine, 1er héros à avoir par la suite son propre périodique et 1ére histoire (et pendant longtemps la seule) illustrée par une femme.

Arrive ensuite d'autres garnements l’année suivante : "The Katzenjammers Kids", en français "Pim, Pam, Poum" (de R. Dirks).

En France, la presse illustrée, surtout enfantine, se développe rapidement au début du siècle, orientée vers un public populaire mais également vers un lectorat plus bourgeois. Précurseur, "le petit français illustré" publie "la famille Fenouillard" de Georges Colomb en 1890.

Toutefois aussi bien "l'illustré", que "l'épatant" ou "la semaine de Suzette" et "l'écho de Noël" restent réfractaires à cette nouvelle forme de narration qui utilise les bulles, préférant encore les récits illustrés (légendés, sans bulles).En 1905, la semaine de Suzette proposera par exemple les aventures de Bécassine. "l'Epatant" publiera néanmoins en 1908 les tribulations d'un trio de petits malins, les "Pieds Nickelés".

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Lente gestation de la BD (1920-1929)

Les Américains découvrent les bénéfices financiers que peuvent apporter les B.D., en termes de vente des journaux mais aussi de produits dérivés et de dessins animés. Les revues spécialisées ou faisant appel aux B.D. se développent alors aux U.S.A., en Grande-Bretagne, en Italie... Pendant cette période, les séries américaines ont un caractère humoristique, d'où le nom de "comics" qu'elles conserveront, elles sont souvent toutefois destinées aux adultes.

Citons, entre autres "Little orphan Annie" de H. Gray.

En Europe, on s'adresse plus souvent à des enfants et on salue l’introduction des premières bulles avec quelques héros modernes, comme Zig et Puce (1925) de Alain Saint-Ogan ou Tintin qui font une timide apparition dans les suppléments jeunesse de grands journaux.

Quelques précisions sur la naissance d’une des figures emblématiques du 9e art. L'abbé Wallez, directeur du journal « le XXème siècle », crée un supplément hebdomadaire destiné à la jeunesse. Il en confie la rédaction à un de ses employés, Georges Rémi (pseudo Hergé ), celui-ci décide en 1929 de reprendre un personnage qu'il avait dessiné auparavant en boy-scout : un simple rond pour la tête, un petit nez, deux points pour les yeux, d'en faire un grand reporter et de lui adjoindre un fox-terrier, Milou. Jusqu'au dernier tome "Tintin et les Picaros", en 1975 et à la mort d'Hergé en 1983, Tintin est devenu une légende, ayant parcouru le globe entier, combattant des trafiquants et des dictateurs.

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1930 – 1950 : l’âge d’or des comics :

L’Amérique bouge plus vite que l’Europe avec la création de grands personnages comme Dick Tracy (1931), Flash Gordon ou Mandrake (1934). En juillet 1934, sort « Famous Funnies » considéré généralement comme le premier comic book. A la veille de la Seconde Guerre mondiale, la bande dessinée continue de séduire un jeune et large public à travers de nouveaux périodiques (Cœurs vaillants, journal de Spirou). De l’autre côté de l’Atlantique les premiers super-héros prennent leur envol : Superman (1938) , Batman (1939).

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Pendant le conflit mondial, les super-héros américains se font les « porte-drapeaux » du monde libre. Quelques périodiques européens tentent péniblement de se tenir à flot. Dés la Libération, la bande dessinée franco-belge renoue avec le succès. En Belgique et en France, parmi les parutions d'après-guerre, 3 revues vont bouleverser le paysage du 9ème art et lancer un nombre impressionnant d'auteurs devenus aujourd'hui incontournables :

- Le Journal de SPIROU (Gaston (1957) , Lucky Luke (1946) et tant d'autres ...)

- Tintin, le journal des aventuriers (Alix (1948) , Blake et Mortimer (1946), Michel Vaillant (1957))

- le journal Pilote : Astérix(1959) , Blueberry (1963), Tangy et Laverdure (1959) , Valérian (1967)….

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Au début des années 50, la bande dessinée reste essentiellement un phénomène de presse. Au-delà du tandem Spirou-Tintin et autres périodiques juvéniles spécialisés, on peut en lire dans les grands quotidiens, les hebdomadaires féminins et les premiers « petits formats » populaires. C’est dans les années 1950 que de nouvelles séries sous forme d’albums vont commencer à s’implanter.

Après la guerre, les Américains sont moins portés sur les super-héros, préférant des séries au ton satirique (Snoopy-1950), voire décalé.

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Il y aura bien, dans les années 60, des tentatives d'exploiter à nouveau les héros mythiques, Spiderman (1962), créé à cette époque, sera presque le seul à renouer avec un succès mérité. D'ailleurs ses superpouvoirs, loin de le rendre invincible, le fragilisent souvent.

Tout comme lui, les 4 fantastiques (1961) sont des héros au destin tragique, qui subissent parfois leurs pouvoirs.

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 1960-milieu des années 1970 : La bande dessinée s’émancipe :

Avant la guerre on dessinait en Europe surtout pour les enfants, après la Libération pour les adolescents, dans les années 1970, c’est désormais aux adultes que l’on s’adresse et d’abord aux hommes.

En 1967 paraît l'album Ballade de la mer salée, qui raconte les expéditions mélancoliques d'un marin maltais, Corto Maltese. Son auteur, Hugo Pratt, est considéré comme un précurseur de ce que l'on nommera le graphic novel, où la bande dessinée prend une dimension littéraire.

Petit à petit, une partie des auteurs de bande dessinée (Enki Bilal, Moebius, Tardi, Van Hamme, Shuiten...) se démarque de l'univers de l'enfance, pour affirmer la maturité de leurs héros.

La BD se mue lentement mais sûrement en 9e art.

La contestation et la libération sexuelle se traduisent à travers tous les medias: fluide glacial, Circus, L'écho des savanes, Charlie Hebdo, A suivre... qui proposent une création plus libre et décomplexée.

1976 : le terme « graphic novel » apparaît simultanément pour désigner trois albums parus aux Etats-Unis cette année-là, notamment A Contract With God And Other Tenement Stories de Will Eisner.

Entre roman et BD, le graphic novel (ou roman graphique) marque l'orientation d'une part de la bande dessinée vers le champ littéraire. (exp.: La série Sin city de Frank Miller)

 Les années 1980 : l’ouverture :

Les artistes européens (Bilal, Manara, Shuiten...) accèdent à une diffusion internationale. Aux Etats-Unis, des créateurs imposent leur originalité : Alan Moore, Dave Gibbons et l'incontournable Maüs d'Art Spiegelman...

Mais le phénomène marquant est incontestablement l'explosion des mangas, suite à la découverte de la série Akira(1983), et des héros de dessins animés (car Goldorak, Albator, Dragon Ball et autres Chevaliers du zodiaque sont avant tout des B.D.).

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Ils séduisent largement le public franco-belge, à qui l'on propose rarement ce type d'écriture, et marqueront définitivement la culture et le style d'auteurs américains et européens

Deux grands centres spécialisés sont créés, à Angoulême et à Bruxelles.

Dans la seconde partie des années 1980 la presse spécialisée BD en perte de vitesse cède progressivement la place à un secteur d’albums en pleine expansion qui par ses succès en librairie atteint un très large public : pour n'en citer que quelques uns : XIII (1984), les 7 vies de l'épervier(1982) , la quête de l'oiseau du temps(1975), Thorgal (1977)..

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1990-1999 : la diversification :

La dernière décennie du XXe siècle marque la disparition progressive des principaux supports de presse, au profit du secteur des albums. De nouveaux « Blockbusters » comme Largo Winch(1990), Titeuf (1992) ou Lanfeust (1994) accaparent le devant de la scène. La nouvelle bande dessinée indépendante s’exprime dans des maisons d’éditions comme l’Association. On assiste parallèlement à une confirmation de la déferlante manga.

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 La première décennie du XXIe siècle :

La production éditoriale est en constante évolution. Jamais, les libraires n’avaient vu autant de nouveautés envahir les bacs des magasins. La bande dessinée connait une hausse exponentielle de sa production privilégiant entre autres, le manga avec des succès considérables comme la série Naruto (1999),

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le roman graphique ou les adaptations littéraires. La BD devient également une importante source d’inspiration pour le cinéma.

Et demain ?

La bande dessinée a toujours évolué parallèlement aux technologies qui l’ont accompagné : l’édition BD a ainsi vu le jour dès lors que l’évolution de la technique a permis de reproduire des dessins originaux tracés sur du papier.

Les éditeurs BD cherchent désormais de nouveaux talents sur le web, où les blogs de bandes dessinées se multiplient Depuis à peine une dizaine d’années se développe également la BD numérique un temps cantonnée à l’ordinateur via Internet et qui maintenant connait un véritable second souffle avec les nouveaux supports comme les smartphones ou les tablettes numériques.

Le passage de la BD papier au numérique pourrait constituer de ce fait une suite logique de l’évolution des supports de publication.


Pour le moment, deux voies semblent se dégager : pour commencer, les éditeurs restent attachés au support papier, et n’hésitent pas à dédoubler leur offre, proposant des versions physiques et digitales, comme le réalisaient eux-mêmes les éditeurs Foolstrip, ou Manolosanctis, actuellement en difficulté ; ou sur les plate-formes de diffusion Iznéo, bdBuzz ou AveComics.

Dans le même temps, on peut noter que des outils dédiés se développent, comme Art of Sequence ou Comic Composer,, alors que des outils de diffusion voient le jour petit à petit… par exemple WEBellipses, et NagMag, ainsi que Les Autres Gens. Sur les écrans, tout se mélange, ce qui démultiplie les possibilités créatives et d’interprétation. Comment se raconteront les bandes dessinées de demain ?

Aujourd’hui la bande dessinée est un véritable phénomène de société. Elle fait même l’objet de salons (Salon international de la bande dessinée d’Angoulême), au même titre que les romans. La bande dessinée a donc réussi à se forger une légitimité au fil du temps car c’est un genre qui a su s’enrichir et continuer à évoluer au rythme de la société.

Le neuvième art a donc un bel avenir devant lui !


Pour aller plus loin:

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"La bande dessinée : qui? Quand? Quoi?" Didier Quella-Guyot. Ed. Hachette livre
"BD guide: Encyclopédie de la bande dessinée internationale: son histoire, ses auteurs, ses héros, ses journaux" Dir / Claude Moliterni. Ed; Omnibus.
"Qu'est ce que la bande dessinée aujourd'hui?" Ed. Beaux Arts.

mar. 1

Les angles de vue :

Posté par JF

En variant les angles de vue on dynamise la narration. Certains angles induisent ainsi chez le lecteur de véritables sensations :

L’angle de vue normal : La scène se déroule sous nos yeux, les personnages se situent au même niveau que nous. C’est l’angle le plus utilisé. Il peut aussi bien évoquer une situation normale que toute autre atmosphère ou état extraordinaire.

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La plongée : quand on voit la scène d’au-dessus, donne une sensation d’écrasement ou de solitude.

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La contre-plongée : quand on regarde l’action d’en bas, peut donner l’apparence d’un personnage menaçant ; mais cela peut aussi suggérer la difficulté ou l’inaccessibilité d’un obstacle à surmonter.

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La vue subjective : où le lecteur voit la même chose que le personnage. Cette prise de vue peut être purement descriptive du geste que pose le personnage (l’écriture d’une lettre par exemple) ou encore être utilisée pour nous faire ressentir plus fortement l’état d’esprit du personnage (son désarroi, sa peur)

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Le cadrage penché : La plupart du temps quand nous observons une scène nos yeux sont parallèles au plan de l’horizon. C’est la façon naturelle de voir. Le cadrage penché consiste à faire basculer la ligne d’horizon de façon à déséquilibrer plus ou moins fortement l’image et contribuant à suggérer un désordre psychologique, une douleur ou un danger faisant basculer les êtres et les objets dans quelque chose de négatif, de malsain.

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Les différents plans

Posté par JF.

En bande dessinée, une même scène peut être représentée de différentes manières.
Lors du découpage, le scénariste va imaginer quel plan ou cadrage correspondra le mieux pour recréer l’atmosphère adéquate à chaque scène.

Il existe différents types de plan qui ont une fonction et un pouvoir d’évocation bien spécifiques contribuant à donner de la force et du rythme au récit.

Plans à forte valeur descriptive

Le plan d’ensemble (ou panoramique) : C’est un plan très large qui permet de montrer les grands décors, les paysages, les foules… Il situe le contexte global et établit clairement deux choses : l’endroit et le moment de l’action. C’est souvent le plan choisi pour la première case de la première planche : cf. : les aventures d’Astérix.

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Le plan général : C’est un plan intermédiaire entre le plan d’ensemble et le plan moyen. Il montre les personnages et une partie de leur environnement. Dans ce plan, le décor occupe encore une place assez importante.

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Plans à forte valeur narrative :

Le plan moyen : Ce plan montre un ou plusieurs personnages en pied (c'est-à-dire vus en entier) dans leur décor immédiat. Ici, le décor n’occupe plus qu’une place restreinte par rapport aux personnages sur qui la caméra est centrée. C’est le plan le plus utilisé. Il attire l’attention sur le ou les personnages principaux et place nettement l’intérêt sur l’action qui se déroule. Le décor devient ici plus ou moins accessoire. On va plutôt à l’essentiel.

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Le plan américain : Il s’agit d’un plan où le personnage est cadré à mi-cuisse. Permet de se rapprocher davantage d’un ou de plusieurs personnages afin de mettre en évidence leurs attitudes, leurs gestes ou leurs mouvements. On se retrouve au cœur de l’action.

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Plan à forte valeur psychologique :

Le plan rapproché : Dans ce cas, le personnage est cadré à la hauteur de la taille ou de la poitrine: Proche des lecteurs, ce plan joue la carte de l’intimité. Le lecteur perçoit clairement les émotions, les réactions des personnages.

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Plans à forte valeur dramatique :

Le gros plan : Ce plan montre uniquement le visage d’un ou de plusieurs personnages ou un objet en particulier. Il permet de bien faire ressentir les émotions du personnage à travers les expressions du visage.
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Le plan de détail : Il montre le détail d’un visage, d’un geste, d’un objet ou d’une action pour attirer l’attention sur un détail particulier de la scène.

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Plus la planche va alterner différents plans plus la lecture gagnera en dynamisme.

fév. 27

Le vocabulaire de la bande dessinée.

Posté par JF

La Bande dessinée utilise de nombreux « outils » qui la caractérisent :

- les bulles : (ou ballons ou phylactères) sont les cadres qui servent à contenir les textes et les dialogues prononcés par les personnages ; de diverses formes les bulles servent à indiquer quel type d’intonation a le dialogue. Elles peuvent également exprimer la pensée d’un personnage. Il existe également les légendes dans lesquelles on trouve la voix d’un narrateur, ou bien d’un personnage en dehors de la scène.

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- Les signes graphiques : (ou idéogrammes) ce sont tous les symboles qui sont utilisés pour décrire une émotion, un état d’esprit ou un événement particulier ; ils sont parfois plus efficaces et plus directs que les mots.

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- Les lignes cinétiques : sont des lignes dessinées dans une vignette pour illustrer le mouvement. Les lignes cinétiques peuvent être des lignes droites ou bien courbes (elles sont particulièrement présentes dans les mangas).

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- Les onomatopées : Longtemps décriées par les détracteurs du 9e art pour ce qu’ils considéraient au mieux comme des fautes, au pire l’expression d’une forme de bêtise, les onomatopées sont en fait la réponse intelligente des auteurs à une contrainte de la BD : la représentation du son en image. Lues et vues, les onomatopées sont également « entendues » : par leur richesse c’est devenu un des emblèmes du 9e art. Si beaucoup cherchent à ressembler au bruit que fait le son que l’on est censé entendre (PAF, PAN, COCORICO…) bien que francisées les mots évoquent souvent le verbe d’origine : CRAC : (to crack : craquer) SNIFF (to sniff : renifler) SLURP (to slurp : boire bruyamment)

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Ces différents codes sont utilisés le plus souvent sur une page comportant également un vocabulaire très spécifique :

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Pour aller plus loin je vous conseille deux ouvrages très intéressants :

« L’art invisible » Scott MC Cloud (Delcourt) « La BD de case en classe : Explorer la bande dessinée » Didier Quella-Guyot (Scéren CRDP , Poitou-Charentes)

Qu'est ce que la bande dessinée?

Posté par JF

Difficile de répondre rapidement à cette question. Mais à Cassibulles, nous n’avons peur de rien ….. si ce n’est que le ciel nous tombe sur la tête… bien entendu.

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La Bande dessinée constitue un langage qui ne cesse de s’inventer depuis bientôt deux cents ans avec ses codes spécifiques. Ce langage utilise une séquence de dessins afin de raconter les moments clés d’une histoire, d’une scène, d’une action.

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La bande dessinée est multiple tant elle peut être à la fois distrayante et didactique, subversive et consensuelle; elle s'adresse également à tous les publics: populaire et élitiste et propose des œuvres de toutes natures: classique et moderne, réaliste et onirique.
La bande dessinée est un art hybride mélant le dessin et l'écriture.

Depuis 1967 on a pris l’habitude de parler de « narration figurative » ce qui valorise le récit par opposition à « figuration narrative » qui favorise l’image.

Cet art du récit qui a plus de cent ans, marqué par de nombreux chefs d’œuvre, reste pour autant sous-estimé probablement parce que en même temps qu’art du dialogue, de la mise en scène cet art du dessin renvoie à l’enfance ce que l’histoire des illustrés en Europe a également enraciné dans les esprits. Il est cependant considéré comme le Neuvième Art depuis les années 1960.La BD est même enseignée dans les écoles et bénéficie de la reconnaissance officielle, ayant conquis tous les milieux et faisant l'objet de thèses, de séminaires, de colloques, de salons et de festivals.

Le générique « BD » est plus souvent utilisé pour la bande dessinée française et belge, qui portent le plus souvent une grande attention aux détails, à l’environnement.

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Planche réalisée par un groupe de 4éme en 2002.

Au Etats-Unis on emploie davantage le terme de « comics ». Nées au départ comme des vignettes humoristiques dans les quotidiens, elles se sont développées par la suite dans beaucoup de genres et de formats.

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« Manga » peut être traduit par image dérisoire ou image drôle : c’est le nom des bandes dessinées au Japon

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En Italie les bandes dessinées s’appellent « fumetti ». Nées au début du XIXe siècle avec des dessins sans bulle mais avec des légendes sous forme de rime. Dans les pays hispaniques, elles sont appelées « historietas ».

Une petite citation pour finir. :

« La BD est un peu l’esperanto du siècle. Une image peut être servie à tout le monde et comprise par tout le monde, c’est un moyen de communication pour les hommes du monde entier » - Osamu Tezuka ( un des fondateurs du manga moderne) – 1982.

fév. 21

Les chiffres de 2011

Posté par JF

Malgré la crise, la production d'albums de bande dessinée a encore progressé en 2011 avec 5 327 albums.

(sources: (ACBD)).

Ce qui donne une augmentation par rapport à 2010 de + 3 % soit 162 titres de plus.

5 groupes assurent la moitié de la production et 80 % des ventes alors qu’existent 310 éditeurs.

Le groupe Médias-Participations (qui regroupent entre autres Dargaud, le Lombard, Dupuis) est le plus important sur le plan économique. Il a réalisé 30 % des ventes en 2011 avec 775 albums. Suit Delcourt qui détient désormais une part majoritaire des éditions Soleil (16,5 % des ventes avec 840 albums), Glénat (15,1 % des ventes avec 469 albums), Flammarion (7,9 % des ventes avec 226 albums) et Hachette Livre (6,6% des ventes avec 185 albums).

La production des séries « asiatiques » se stabilise 1 520 nouveaux mangas et assimilés soit 39,57% des nouveautés,

Les bandes dessinées américaines :303 comics sont parus en 2011, ce qui représente7,89% soit une petite augmentation de 6 titres.

Les romans graphiques et autres livres expérimentaux, dont le nombre diminue légèrement 386 albums atypiques sont parus en 2011, soit 10,05%,

Les BD franco--‐belges : 1 632 titres sont parus en 2011, soit 42,49%, (contre 41,96% en 2010) .

Une centaine de titres tirés à plus de 50 000 exemplaires ont réalisé l'essentiel du chiffre d'affaires du secteur.



Le top 10 des meilleurs tirages s'établit comme suit :

1. XIII 20 : Le Jour du Mayflower (500 000 ex)

2. Kid Paddle 12 : Panik Room (360 000 ex)

3. Boule et Bill 33 : A l'Abordage (253 000 ex)

4. Thorgal 33 : Le Bateau Sabre (220 000 ex)

5. Kid Lucky 1 : L'Apprenti Cow-Boy (220 000 ex)

6. XIII Mystery 4 : Le Colonel Amos (200 000 ex)

7. Tintin : L'album du film (180 000 ex)

8. Les Légendaires 14 : L'Héritage du Mal (170 000 ex)

9. Cédric 25 : Qu'est-ce qu'il a ? (170 000 ex)

10. Les Nombrils 5 : Un Couple d'Enfer (160 000 ex)

Pourquoi parle-t-on de 9e art pour la BD ?

Posté par JF

La bande dessinée est souvent désignée comme le « neuvième art »

Les avis divergent selon les sources pour connaître l’origine de cette appellation.

L’expression « 9ème art » aurait été inventée en 1964 par le critique de cinéma Claude Beylie.

Elle a ensuite été popularisée par Pierre Vanker, un cadre des chemins de fer belges passionné de BD, et le dessinateur de Lucky Luke Morris qui réalisèrent dans Journal de Spirou entre 1964 et 1967 une rubrique intitulée « 9ème Art », sous-titrée « musée de la bande dessinée ».

Cette classification a été reprise et popularisée par Francis Lacassin dans son livre Pour un neuvième art, la bande dessinée, paru en 1971.%%

Francis Lacassin (1931-2008) est un journaliste, éditeur, écrivain, scénariste et essayiste français. Spécialiste des cultures populaires.

Il a été un des fondateurs du Club des Bandes dessinées en France

qui a offert à la bande dessinée sa reconnaissance. (Cofondateurs: Alain Resnais mais aussi Evelyne Sullerot, sociologue, défenderesse des Droits de la Femme et promotrice du Planning Familial). De toute façon, il fallait du courage à l’époque pour défendre ce fameux 9ème art Il a occupé à partir de 1971 la première chaire d'histoire de la BD à l'université Paris-I.

Je dirais même plus pour ceux qui voudraient se rappeler les 8 autres : 1er art : l’architecture ; 2e art : la sculpture ; 3e art : la peinture ; 4e art : la musique ; 5e art : la poésie ; 6e art : la danse, le mime, le théâtre et le cirque, aujourd’hui les « arts de la scène » ; 7e art : le cinéma ; 8e art : la radiodiffusion, la télévision et la photographie, regroupées en « arts médiatiques ».

fév. 1

"Dîtes Msieur, ça gagne bien sa vie un auteur de BD?"

Posté par JF

Très souvent quand je fais intervenir un auteur de BD en classe et qu'arrive le moment des questions posées par les élèves voilà une des questions les plus régulièrement posées.

Le problème est que avant d'arriver à bien en vivre il faut passer par la case jeune auteur à la recherche d'une maison édition qui accepte d'investir sur son talent. Et là se pose le problème d'identification: en 2010 la publication de BD a été de 3592 titres, ce qui fait 300 nouveautés en moyenne par mois et donc 75 nouveautés par semaine dont (faute de place) une cinquantaine ne seront pas mis en avant par les libraires. Un auteur complet touche 8% de la vente de son album (ou alors 40 % pour le scénariste et 60 % pour le dessinateur.) 15% vont pour l'éditeur, 15% pour l'imprimeur, 20% pour le diffuseur, 30 à 40 % pour le libraire + 5.5% (pour le moment) de T.V.A. . Pour un format classique 48 pages le prix moyen est de 12.50€.

Je dirais même plus: pour ceux qui ont quelques difficultés en maths cela fait 1€ pour un auteur complet par album vendu.... un jeune auteur peut s'estimer déjà heureux si son premier album dépasse les 3000 ventes (donc 3000€ pour environ 2 années de travail !!!!)

Mais quand on s'appelle Uderzo et que le dernier Astérix a vu sa première édition vendue à 3 176 000 exemplaires vendus en 3 semaines: c'est tout de suite plus facile.

janv. 30

Qui est le Grand Prix d'Angoulême 2012?

Posté par JF

Cette année le festival d'Angoulême 2012 a décerné le grand prix (sorte de césar d'honneur de la BD) à

Jean C Denis. jean-c.denis.jpg

Qui est -il?

C'est un dessinateur scénariste français né à Paris le 1er janvier 1951. Il commença par des séries animalières comme "André le Corbeau" mais c'est surtout la série "Luc Leroi" publiée chez Casterman (8 albums parus) qui fit prendre à sa carrière une accélération notable. Par la suite il va publier toute une série de one shot dont en 2002 "quelques mois en Amélie" dans la collection Aire libre chez Dupuis pour lequel il fut déjà primé à Angoulême.

A noter que cet artiste "touche à tout" est également un excellent guitariste qui forma avec d'autres auteurs de BD (comme Margerin par exemple) le groupe "Dennis Twist" qui a connu un succès notable dans les années 1980.

Je dirais même plus ayant remporté le grand prix il sera donc le président du festival d'Angoulême 2013 qui sera le 40éme.

Appel à contribution.

Toute personne désirant communiquer sur le langage attaché à la Bande dessinée peut trouver ici un espace ouvert aux échanges.